Souvenirs de guerre de Pierre Capucin

par Paul Chanoine

·       1. Royan

·       2. Angleterre (1940)

·       3. Dakar (1940)

·       4. Érythrée (1941)

·       5. Syrie (1941)

·       6. Lybie (1941-1943)

·       7. Tunisie (1943)

·       8. Italie (1943-1944)

9. France (1944-1945)

 

A

près on a rembarqué, à Naples je crois [1]. Là, c’était pour la petite promenade vers la France. Cela a d’abord été le débarquement à Cavalaire. Pour moi c’était le 2° ou le 3° jour du débarquement [2]. On était sur des navires de débarquement américains et on s’est retrouvé dans un champ de mines flottantes. Le ricain ne savait pas très bien où on était. Cela aurait été marrant qu’on saute en dernière minute ! Enfin on s’en est sorti. On sort d’ailleurs toujours d’un champ de mines… ou on y reste !

Les Allemands étaient plus loin, à Hyères où il y eu une petite bagarre et des Allemands tués. On voyait des cadavres allemands allongés. Cela faisait drôle quand même.

Sur la route au nord de Valence (août 1944)

 

En Bourgogne (septembre 1944)

 

Après on a continué jusqu’à Lyon qui a été la première ville vraiment importante qu’on a libérée [3]. La 1° D.F.L. est connue sur Lyon, mais à Paris, ils ne savent pas ce que c’est. Pendant ce temps, Leclerc faisait sa promenade avec la 2° D.B. et débarquait en Normandie. Puis il libérait Paris. En Libye on s’était retrouvé pour la première fois avec les gars qu’on avait quittés au Cameroun. C’est là qu’il y avait eu une première jonction. Ensuite on s’est retrouvé beaucoup plus tard [4].

Après la Libération, les Allemands résistaient encore à Royan et on a failli y être envoyé. Cela aurait été marrant que je retourne à Royan ! Mais entre-temps les Allemands avaient lancé leur fameuse contre-attaque dans les Ardennes et l’Alsace se retrouvait menacée. Alors qu’on partait pour Royan, on a fait un quart de tour et on est allé échouer en Alsace, à Meisengott si vous voyez ce que je veux dire [5]. Là, on avait désormais de l’équipement militaire.

En route vers l’Alsace (novembre 1944)

 

Meisengott (novembre 1944):

 

 

En Alsace, je n’ai pas été directement dans la bataille de Strasbourg [6]. La 1° D.F.L. n’y a été engagée que dans un second temps. C’était la 2° D.B. qui avait libéré Strasbourg. Et quand les Allemands ont contre-attaqué avec le Maréchal Von Rüstett, comme la 2° D.B. était déjà en Allemagne, c’est la 1° D.F.L. qui est intervenue pour sauver Strasbourg une seconde fois. Après cela, Leclerc a téléphoné à Brosset [7] pour lui dire : “Bravo mon vieux ; tu as fait la même chose que nous !”.

Avec Maria (Meisengott, 25 février 1945)

 

 

Après l’Alsace, on n’a pas voulu qu’on aille en Allemagne, pour des raisons politiques, alors que la 2° D.B. y a été. Le résultat, c’est qu’on est reparti ; il y a eu l’Authion [8] ; mais cela, c’était une promenade terminale - le journal de la 1° D.F.L. s’appelle Bir Hakeim - L’Authion -. Il y avait encore quelques points de résistance mais c’était pratiquement terminé. Ensuite on est revenu sur l’intérieur de la France. On a été à Marolles-les-meaux (à côté de Meaux) et là on a été démobilisé gentiment ; c’était en 1945 après la victoire [9].

Nice (mars-mai 1945)

L’Authion (mars-avril 1945)

 

 

 

Excursion au Saut du Loup (mai 1945)

 

 

L’Olivette (Nice, mai 1945)

 

 

J’étais toujours 1° classe. J’avais eu la croix de guerre (il y avait eu une promotion en Libye, pendant la 2° campagne), la médaille coloniale (c’était alors la mode : avec l’Érythrée, la Libye…) ; mais tout cela, c’était symbolique. On mettra ça sur mon cercueil, si on y pense….

Après, cela a été le retour à Paris. Pour ma part je suis d’abord reparti dans le Nord, chez ma mère. Mais là-bas je n’ai pas trouvé de boulot ; alors je suis revenu définitivement à Paris où ma mère avait conservé une espèce de chambre (où il n’y avait ni lumière, ni rien).

Voilà, c’est comme cela qu’on a fait notre petite promenade.

 

Paul en famille à St-Michel (Nord, 1945)

 

 

St Michel (Nord – 1945)

 

 

*

·       10. Et ensuite…



[1] Le 7 août 1944

[2] Le débarquement commence le 15 Août. L’armée française B (qui deviendra en septembre la 1° armée française), commandée par de Lattre de Tassigny, débarque à partir du 16 Août. Elle était composée (plus de 300 000 hommes) d’à peu près autant de soldats non français (originaires d’Afrique du Nord, d’A.O.F. et d’A.E.F.) que de Français (originaires d’Afrique du Nord - le plus grand nombre - et de Corse, ou évadés de métropole - on estime à quelque 20 000 les Français qui s’évadèrent de Métropole de 1940 à 1944).

[3] Le 3 septembre 1944

[4] La jonction se réalisera en Bourgogne le 12 septembre 1944.

[5] Village de Maria, sa future femme…

[6] Décembre 1944 - Janvier 1945

[7] Général, commandant alors la 1° D.F.L.

[8] Massif montagneux au nord de Nice où la 1° D.F.L. a été envoyée, fin mars - début avril 1945, combattre les dernières forces allemandes retranchées.

[9] La dissolution de la 1° D.F.L. a lieu officiellement le 15 août 1945.