Musique, mathématiques et philosophie : Que vient faire ici la philosophie ?

Séminaire Entretemps (Ircam, samedi 7 octobre 2000)

François Nicolas

L'intitulé de ce séminaire comporte trois termes (musique, mathématiques et philosophie) au lieu des deux plus usuels (musique et mathématiques) qui, par exemple, ont intitulé le récent forum Diderot tenu en ces lieux mêmes en décembre 1999. Pourquoi associer ces trois termes, pourquoi en quelque sorte mêler la philosophie au dialogue plus habituel entre mathématiques et musique ? Plus généralement, pourquoi conjoindre en un triangle trois dialogues de statuts fort différents : celui de la musique et des mathématiques, celui des mathématiques et de la philosophie, celui de la philosophie et de la musique ?

Et d'abord ce triangle a-t-il jamais existé comme tel ? S'agit-il donc de l'inventer ou, en quelque sorte, de le réactiver ?

 

  1. Quelques propositions

    Un point me semble clair : ce triangle a déjà existé et a déjà opéré comme tel : lors de ce que j'appellerai le Moment Grec qui couvre trois siècles environ entre Pythagore et Parménide qui l'ont ouvert et Aristoxène de Tarente qui l'a défait. J'examinerai ce moment en tant que tel que dans une seconde partie de mon exposé. Mais je voudrais d'abord problématiser plus avant les questions précédentes pour nourrir ainsi le travail à venir de notre séminaire.

    S'il est vrai que le triangle de pensée musique - mathématiques - philosophie a déjà existé, son existence cependant s'avère séquentielle, momentanée et non pas permanente ou structurale. Ce triangle n'est pas, en effet, une constante de toute situation historique de pensée. D'où la question : Y a-t-il eu d'autres moments d'existence de cet appariement ? Ceci induit en particulier les deux questions suivantes :

    - Le XVIIème siècle a-t-il connu un triangle de pensée semblable via en particulier les figures philosophiques de Descartes et Leibniz ?

    - Notre époque actuelle serait-elle marquée par une possible reconstitution de cette figure de pensée ?

    Notre séminaire pourra examiner ces points.

    1. Pourquoi mêler la philosophie ?

      Mais il faut se demander au préalable : pourquoi mêler la philosophie au dialogue mathématique et musique ? Somme toute, la musique n'est pas mêlée au dialogue entre mathématiques et philosophie et la mathématique ne l'est pas plus au dialogue entre musique et philosophie. Pourquoi donc la philosophie devrait-elle l'être au dialogue entre musique et mathématiques ?

      Mon hypothèse de travail serait que la philosophie y est toujours mêlée s'il s'agit bien entre mathématiques et musique d'un dialogue entre pensées (et non pas, comme on le verra, de simples applications techniques). Il s'agirait donc pour nous de prendre acte de ce que la philosophie est toujours mêlée à ce dialogue, et non pas de l'y introduire.

      Pourquoi la philosophie y est-elle mêlée ? De quel dialogue s'agit-il là entre musique et mathématiques pour que la philosophie s'y trouve mêlée ?

      Remarquons d'abord que c'est un dialogue dont la musique prend l'initiative, guère la mathématique. Si quelqu'un connaît des exemples démentant cette assertion, je serais très intéressé d'en prendre connaissance.

    2. L'oeuvre et le musicien

      Ensuite remarquons que ce qui, dans la musique, sollicite les mathématiques, c'est le musicien et nullement l'oeuvre musicale. L'oeuvre musicale et sa pensée n'entretiennent par elles-mêmes aucun rapport explicite aux mathématiques : la pensée musicale, définie comme la pensée à l'oeuvre, ne dialogue pas avec la pensée mathématique. La pensée de la pensée musicale ne le fait pas plus si l'on veut bien admettre que cette pensée de la pensée musicale est également à l'oeuvre. Seul le musicien, donc, engage un rapport explicite aux mathématiques et plus spécialement le musicien que je dirai pensif, prélevant l'épithète chez Victor Hugo. Certains musiciens pensifs donc s'adressent aux mathématiques : voilà notre point de départ.

      Notons que l'inverse ne semble malheureusement guère prévaloir : quel mathématicien pensif s'est tourné vers la musique, non pour se consoler de l'aridité de son propre domaine mais comme espace de pensée susceptible d'entrer en dialogue ave ses propres préoccupations mathématiques ? Je n'en connais pas.

    3. Dissymétrie

      Si cette relation n'est pas symétrique, c'est peut-être :

      1. que le rapport du mathématicien pensif à la pensée mathématique diffère du rapport du musicien pensif à la pensée musicale,

      2. qu'il diffère sans doute à mesure de ce que diffère également le rapport de la pensée mathématique à la pensée de cette pensée du rapport de la pensée musicale à la pensée de cette pensée (l'hypothèse à suivre serait ici que si la pensée de la pensée musicale est bien à l'oeuvre, par contre la pensée de la pensée mathématique n'est pas elle-même mathématique, ou encore que si la mathématique est bien une pensée, elle n'est pas pour autant, comme l'est l'oeuvre musicale dans son domaine propre, la pensée de cette pensée).

      Il y a donc des musiciens pensifs qui se tournent vers les mathématiques.

       

    4. Qu'est-ce qu'un musicien pensif ?

      C'est un musicien qui parle de musique, qui tente de parler la musique, qui s'y oblige même, se soumettant à l'axiome qu'on dira rohmérien : " Il faut parler de musique " (1). C'est un musicien qui tente de mettre la musique en mots, qui plonge la pensée musicale dans la langue naturelle.

      Que veut dire mettre la musique en mots, plonger la pensée musicale dans la langue ? Cela veut dire deux choses : nommer et discourir.

         

      1. Nommer

        Cela désigne ici le fait de produire des catégories, un réseau de catégories ; soit l'activité de catégoriser la pensée musicale.

         

      2. Discourir

        Il s'agit ici de produire une langue singulière apte à capter, à faire résonner par sympathie la tension, l'intension de la pensée musicale.

      Produire un réseau de catégories et une langue singulière, voilà ce que fait le musicien pensif, voilà le propre de ce qu'on peut appeler la pensivité musicienne pour la distinguer de la pensée musicale. Cette pensivité musicienne désigne ce que j'appelle autrement l'intellectualité musicale.

      Remarquons au passage que la pensée musicale, qui est l'affaire de l'oeuvre, non du musicien, se déploie essentiellement sans mots et sans langue naturelle, ce qui souligne la thèse que la pensée ne relève pas intrinsèquement de la langue et qu'il y a bien des pensées sans langage : si la pensivité musicienne se déploie dans la langue, la pensée musicale est sans langue. Notons au passage qu'on peut également soutenir une telle thèse à propos de la pensée mathématique et que le mathématicien Hadamard l'a explicitement fait dans un ouvrage méconnu : Essai sur la psychologie de l'invention dans le domaine mathématique (2).

      Retournons à notre musicien pensif, producteur de catégories et de langues, se tournant vers les mathématiques. Il peut alors le faire de deux façons que je voudrais détailler.

    5. Application

      Il y a d'abord la voie que j'appellerai de l'application.

      L'idée va être ici qu'un résultat mathématique (une formule, un énoncé, un théorème, une équation...) peut s'appliquer en musique par traduction terme à terme, par substitution de ses composantes. L'exemple-bateau est celui de Xenakis appliquant mécaniquement une formule élémentaire de la théorie des ensembles à des ensembles de hauteurs pour composer Herma. D'où la production de " formules " musicales censées être gagées sur la cohérence mathématique. Cette attitude engage un régime de croyance en un transfert possible de cohérence de la mathématique vers la musique.

      Or, pour évaluer cette croyance, c'est-à-dire pour déterminer si l'on croit ou non en cette croyance, il faut qu'intervienne la philosophie. Pourquoi ?

      En général on se contente de constater que ce type d'applications fonctionne, que par exemple 2+2 = 4 vaut aussi bien pour des notes de musique que pour les boîtes de conserve, ou que la rétrogradation de la rétrogradation est une opération neutre, qu'elle porte sur des hauteurs musicales ou sur des lettres alphabétiques. Mais pourquoi cela fonctionne-t-il ? Se poser une telle question introduit aussitôt à la philosophie.

      Je dois ajouter qu'il est assez simple de répondre philosophiquement à une telle question si l'on admet la thèse philosophique d'Alain Badiou selon quoi " les mathématiques, c'est l'ontologie " (3) c'est-à-dire ce qui peut se dire de l'être en tant qu'être, car il est alors trivial que ce qui vaut de l'être en tant qu'être vaut a fortiori pour tout étant dont la première détermination est précisément d'être, et donc en particulier pour tout étant sonore ou musical.

      Mais cette appréciation, qui est d'ordre philosophique, n'est pas neutre quant à nos problèmes car elle conduira par exemple à considérer que l'oeuvre elle-même ne saurait être entièrement régie par ces lois ontologiques à mesure du fait que l'oeuvre relève d'un sujet plus que d'un pur et simple étant et qu'entre l'être et le sujet, il y a ordres différents de la pensée (4) . Ceci entraîne qu'on ne saurait, avec des formules mathématiques (ontologiques) produire d'oeuvres musicales mais seulement ce que j'ai proposé ailleurs (5) d'appeler des pièces de musique. Ainsi une théorie de l'oeuvre musicale ne saurait être une pure et simple ontique, laquelle a rapport privilégié à la mathématique vue comme ontologie, mais doit être aussi une théorie du sujet musical, laquelle a rapport privilégié avec la philosophie vue comme théorie des sujets et/ou des vérités.

      Je dirai donc que dans la voie de l'application, la philosophie est implicitement impliquée par un régime de croyance qui reste alors infondé.

    6. Théorisation

      La seconde voie, je l'appellerai celle de la théorisation. Elle se distingue de la première par le fait de s'intéresser non plus à une formule isolée mais à une théorie mathématique comme telle c'est-à-dire

      1. à un ensemble de formules, d'équations, de théorèmes, à une pluralité donc et non plus à une entité unique ;

      2. à un ensemble articulé où un discours déductif relie entre elles les propositions si bien que leur pluralité n'a plus la forme d'un atoll ou d'un archipel mais d'un parcours ordonné ;

      3. à des propositions qui sont chacune porteuse de leur propre démonstration.

      On peut dire que la différence d'avec la voie de l'application vient de ce que le musicien pensif s'intéresse désormais non seulement au résultat mathématique mais également à sa démonstration et par là à son insertion dans une théorie mathématique particulière (par exemple la théorie des ensembles, la théorie des grands cardinaux, la théorie des modèles, la théorie des catégories mais aussi la théorie de l'intégration, telle ou telle branche de la topologie algébrique...).

      Je prendrai pour cela deux exemples prélevés dans ma propre pensivité :

      - Je me suis rapporté plusieurs fois à la théorie mathématique de l'intégration pour tenter de penser l'audition musicale ce qui m'a conduit à examiner l'histoire de la rationalité mathématique en matière d'intégrale, avec son évolution historique sur plus d'un siècle (selon les différentes conceptions de Riemann, Lebesgue, Kurtsweil-Henstock).

      - Réévaluer la proximité actuelle de pensée qu'il peut y avoir entre musique et nombre impose à mon sens d'examiner les théories mathématiques modernes du nombre, soit par exemple dans mon cas les théories des nombres ordinaux et cardinaux, ou celle des nombres surréels.

      Dans cette voie, la philosophie est explicitement impliquée car il s'agit alors de mettre en rapport deux pensées hétérogènes par rapprochement soit de concepts (par exemple celui, mathématique, d'intégration et celui, musical, d'audition ou celui, mathématique, de nombre, et celui, musical, d'oeuvre), soit de fragments de discours (par exemple le rapport de l'intégrale de Riemann à l'intégrale de Lebesgue peut être rapproché du rapport d'une première audition spontanée à une seconde audition perceptive).

      Ces rapprochements ne sont plus des traductions mécaniques ou mécanisables terme à terme mais sont plutôt des recouvrements partiels et tordus qui passent par la mise en rapport de deux régimes différents de la lettre : le régime mathématique avec ses lettres (x, a...) et symboles, et le régime musical avec ses notes et autres lettres.

       

    7. Comme si : une fiction de modèle

      Hypothèse : On pourrait dire que la logique de ce rapprochement serait de faire comme si la musique était un modèle pathologique de la théorie mathématique considérée.

      On sait en effet, par le théorème de Lowenheim-Skolem, que toute théorie cohérente admet un modèle pathologique c'est-à-dire un modèle n'ayant rien à voir avec celui pour laquelle elle a été bâtie (ceci tient au caractère forcément dénombrable de toute théorie). Mon hypothèse serait que tel ou tel fragment du monde musical serait alors un tel modèle pathologique, que par exemple l'audition musicale pourrait être " modèle " pour la théorie de l'intégration (qui bien sûr n'a nullement été établie pour ce faire).

      Dire que tout se passe comme si la musique était un tel modèle pathologique, c'est aussitôt ouvrir un espace de fiction s'il est vrai (6) qu'on peut définir la fiction comme espace du comme si. L'intérêt d'une telle fiction, et en ce point la mathématique est exemplaire, c'est de poursuivre la fiction aussi loin qu'il est possible, de faire de la fiction un enchaînement rigoureux et rationnel, non un prétexte à batifolages et rêveries.

      L'idée serait alors que quelque chose comme une vérité de l'audition musicale pourrait s'esquisser au travers d'une telle fiction s'il est également vrai, comme le posait Lacan (7), que la vérité se donne dans une structure de fiction.

      Ainsi notre musicien pensif ne peut déployer une pensée du rapport entre pensée musicale et pensée mathématique qui soit immanente au monde de la musique, pas plus d'ailleurs qu'au monde de la mathématique et que cette pensée doit passer par la philosophie s'il est vrai (8) que la philosophie est la pensée du temps rendant compossible l'existence de pensées aussi hétérogènes que celle de la mathématique, celles des autres sciences, celles des différents arts, celle de la politique...

      Il y a donc un transit philosophique requis dans ces mises en rapport, si bien que la philosophie est toujours mêlée de fait au dialogue mathématiques et musique, qu'elle le soit implicitement (comme confiance, entendue alors comme croyance en une croyance) dans la voie de l'application, ou explicitement (comme mise en pratique d'une compossibilité) dans la voie de la théorisation.

       

    8. Partages ?

      On pourrait objecter à ce transit philosophique que mathématiques et musique partagent quelques soucis ou pourquoi pas entités qui leur permettraient de dialoguer directement, sans intermédiaire. Ceci peut se soutenir au regard du fait que musique et mathématiques partageraient le nombre, ou qu'elles partageraient l'écriture.

         

      1. Partage de nombres

        La thèse serait ici que la musique est nombre, ou du moins que la musique aurait un rapport intrinsèque et spécifique aux nombres. C'est par exemple la thèse de Saint Augustin sur l'existence de " nombres sonores et corporels " (9). Mais cette thèse peut être vue comme un cas particulier de la thèse pythagoricienne, plus générale et plus ancienne, selon quoi " l'être est nombre ".

        Ce qui m'importe ici, c'est que l'une ou l'autre de ces thèses est en vérité d'ordre philosophique (et non pas musical ou mathématique) parce que l'énoncé " la musique est nombre " ne saurait être d'ordre musical, le concept de nombre ne l'étant évidemment pas. D'où que l'examen de cet énoncé implique un examen du concept mathématique de nombre qui se fasse, et c'est cela qui importe, sous l'angle d'une subjectivation extra-mathématique.

        - Prenons pour exemple le Moment Grec dont je vais bientôt parler : toute grandeur, pour un mathématicien de l'époque, ne saurait être un nombre (puisque la grandeur épinglée par la diagonale du carré n'est pas rationnelle). Ceci entraîne ce qu'on a pris l'habitude d'appeler " la crise " des irrationnels, et qui dit crise indique bien ce faisant qu'une dimension subjective est ici engagée. Mais cette crise dans la mathématique ne l'est aucunement dans la musique (où cette grandeur a pour équivalent l'octave partagée en deux). La différence patente de subjectivités au regard du même énoncé : " la grandeur 2 n'est pas un nombre " indique que le musicien pythagoricien, c'est-à-dire porteur de la conviction que la musique est nombre, devra s'intéresser au nombre du point d'une subjectivité hétérodoxe, ou encore que ce rapprochement conduira au heurt de deux subjectivations hétérogènes. Or penser la compossibilité de ces deux subjectivations hétérogènes, c'est explicitement faire de la philosophie, non de la musique ni de la mathématique.

        - Prenons l'exemple cette fois de notre époque. Des problèmes équivalents s'y donnent en matière de nombre : faut-il inclure dans le concept de nombre les nombres imaginaires, les nombres surréels (les deux voies étant, en vérité, exclusives l'une de l'autre) ? Les subjectivités mathématiques et musicales sont ici d'ordres différents, et la philosophie se définit précisément d'envisager leur compossibilisation.

         

      2. Partage d'écritures

        Musique et mathématiques sont prises ici comme partageant une inscription à la lettre. La musique est le seul art à s'inscrire ainsi à la lettre (d'où ce qu'on appelle souvent son " abstraction ") ce qui rend peut-être compte de son attrait pour le mathématicien. Mais bien sûr, comme il a déjà été relevé, lettres musicales et lettres mathématiques sont hétérogènes. Faut-il alors tenter de réduire cet écart (ce fut le projet, un peu suicidaire, de Rousseau ) (10) ou faut-il majorer cette hétérogénéité en gommant l'écriture musicale au profit de pures et simples notations (sous prétexte de rapprocher le territoire de la carte...) (11). Ces questions de rapprochement ou non entre musique et mathématiques sont des questions d'ordre philosophique.

      Reprenons notre musicien pensif en sa double activité de nomination et de mise en discours de la pensée musicale. On n'aura pas les mêmes caractéristiques et problèmes selon qu'il attaque son activité par l'une ou l'autre face.

         

      1. Théorie musicale

        Il peut partir d'un réseau catégoriel pour le mettre en discours. D'où la question : quel type de discours peut recouvrir, aimanter, articuler ces catégories ? Comment un tel réseau catégoriel peut-il faire discours ? Ces questions rejoignent des problèmes d'algèbre topologique : quelle topologie est compatible avec tel ou tel type d'algèbre discrète ? On appellera théorisation musicale cette orientation.

         

      2. Mise en langue musicienne

        Le musicien pensif peut à l'inverse partir d'une langue musicienne déployée, d'un discours captant dans ses flux et reflux les mouvements de la pensée musicale pour tenter ensuite de lui fixer des arêtes, de rehausser ses points d'ancrage, soit la question : comment catégoriser un flux discursif ? Ces questions rejoignent alors des problèmes de topologie algébrique : quelle algèbre discrète est compatible avec tel ou tel régime de continuité, de voisinages... ? On appellera mise en langue musicienne cette orientation.

    Si je me reconnais de préférence dans le premier type de musicien pensif (12), je reconnais Peter Szendy (13) en le second...

    En retenant l'image d'un chapiteau de cirque, fait de mats et d'une toile, on dira qu'on peut élever le chapiteau soit en plantant les mats pour ensuite étendre la toile sur ce réseau de piquets (théorisation), soit étaler la toile par terre pour ensuite y piquer les mats qui ainsi la rehaussent et la modèlent (mise en langue).

    En suivant cette polarité entre algèbre et topologie (les mats sont l'algèbre du chapiteau, la toile sa topologie), on dira que le musicien pensif se tourne vers les mathématiques de deux manières :

    - soit en son temps algébrique c'est-à-dire celui de la catégorisation ou nomination ; il ira alors à la recherche de concepts mathématiques, de formules, de théorèmes... ;

    - soit en son temps topologique c'est-à-dire celui de la mise en discours et partira alors à la recherche d'enchaînements mathématiques, de théories...

    Il me semble que la voie de l'application se cantonne dans la première formule quand la seconde, celle de la théorisation, peut prendre aussi en charge la seconde. D'où une limitation intrinsèque de la voie de l'application. D'autres limitations également interviennent :

    - Dans la voie de l'application, il n'y a pas vraiment d'égalité de pensée entre mathématiques et musique.

    - Comme on l'a vu, dans cette voie, la détermination philosophique reste implicite, un peu à l'état de méta-croyance.

    - Au total, il me semble que la pensitivité du musicien engagée dans cette voie de l'application est très fragile, menacée d'en rester dans un en deçà de la pensée, dans un pur et simple " ça marche ", " ça fonctionne ", de rabattre tout cela sur des techniques opératoires, de réduire la rationalité en jeu au seul calcul.

    Cette voie de l'application s'avère ainsi une menace pour le musicien pensif car elle peut être intégralement mise en oeuvre par le musicien non pensif, c'est-à-dire le musicien artisan qui ne nomme ni ne catégorise - le musicien artisan ne parle pas de la musique qu'il fait et, quand il est contraint de le faire, prélève alors ses mots dans le stock lexical de la vulgate -, le musicien artisan qui ne crée ni discours, ni langue sur la musique - quand il est sommé de faire semblant, il se coule dans le discours du musicien artiste... -.

    D'où, pour moi en tout cas, l'importance de la seconde voix, celle de la théorisation, celle où la philosophie est explicitement impliquée, celle, je le souhaite, de notre séminaire.

  2. Le Moment Grec

     

    Philosophie

     

    Mathématiques

     

    Musique

     

    VIème siècle

     

    Thalès (639-546)

       

      Pythagore (510)

     

    Vème siècle

     

    Parménide

      Zénon

      Socrate (469-399)

    Premiers Eléments, pair & impair...

      Hippase de Métaponte

      Trois premiers postulats d'Euclide

    Expériences primitives

     

    IVème siècle

     

    Platon (427-347)

      Eudoxe (408-350)

      Aristote (384-322)

      Eudème

    Livre V des Eléments

       

       

      Euclide (300)

     

     

       

      Aristoxène de Tarente

     

    IIIème siècle

     

    Archimède (280-212)

    Pour examiner ce moment (VIème-IIIème siècles av. J.-C.), je m'appuierai sur les ouvrages magistraux d'Arpad Szabo : Les débuts des mathématiques grecques (14) puis L'aube des mathématiques grecques (15) .

    Par-delà leur passionnant détail argumentaire, quel en est pour nous l'intérêt ?

    Szabo montre que la musique a partie liée avec une polémique philosophico-mathématique dans laquelle on peut prélever trois questions :

    1. Les mathématiques grecques sont-elles en discontinuité ou en prolongement de dispositifs antérieurs de pensée ?

    2. Quel rôle, en cette affaire, joue la philosophie ?

    3. Quel rôle joue ici la musique ?

    Les réponses les plus répandues, que l'étude de Szabo va contredire, sont celles-ci :

    1. La Grèce n'aurait rien commencé et ses mathématiques ne seraient que la prolongation des mathématiques babylono-égyptiennes lesquelles opéraient et calculaient déjà sur ces objets mathématiques que seraient les nombres et les figures.

    2. La mathématique proprement grecque est originairement déliée de la philosophie (en l'occurrence de Parménide) pour s'apparier ensuite aux Pythagoriciens, donc à une théorie du multiple et du nombre qui se serait déployée contre la doctrine Eléate de l'Un. Le lien ultérieur établi par Platon entre philosophie et mathématiques orientera le développement de la mathématique sous la loi métaphysique de l'oubli de l'être.

    3. La musique aurait pâti du pythagorisme (la musique est nombre) et du platonisme (récusation de la sensation pour l'intelligible pur). Elle a dû conquérir son autonomie de pensée plus tard (cf. Aristoxène ) (16) par une double rupture avec le pythagorisme et le platonisme (grâce à Aristote), établissant alors ses catégories non plus sur la base d'une arithmétique des nombres mais dans une problématique nouvelle jouant d'un espace métaphorique.

    A cela Szabo oppose ceci :

    1. 1. Invention mathématique

      La mathématique grecque est une rupture, un commencement, une discontinuité fondée non pas sur de prétendus objets mathématiques mais sur un nouveau régime de discursivité : la discursivité mathématique où il ne s'agira plus d'un ensemble de recettes, d'exemples et de calculs mais de définitions, axiomes et postulats disposés en vue de déductions. Ces déductions donnent lieu, pour la première fois dans l'histoire de la pensée, à des démonstrations et l'essence de cette nouvelle dimension démonstrative se donne dans le raisonnement apagogique ou raisonnement par l'absurde.

    2. 2. Conditionnement philosophique des mathématiques

      Le raisonnement par l'absurde, point clé de cette rupture, vient aux mathématiques de la philosophie : très précisément de Parménide qui démontre ainsi l'indivisibilité de l'Un, faisant du Fragment 8 un événement de pensée : le plus ancien raisonnement par l'absurde de l'histoire de l'humanité. On retrouvera ensuite ce raisonnement apagogique engagé dans la théorie mathématique du pair et de l'impair en vue de démontrer l'irrationalité de Ã2 (première démonstration mathématique connue). Platon s'appuiera sur ces développements mathématiques, bien antérieurs à son propre travail en sorte qu'il faille voir que sa philosophie, loin d'impulser ces mathématiques, fut surtout conditionnée par elles.

      On peut incidemment remarquer que la philosophie, conditionnant la mathématique, active le partage intra-mathématique entre arithmétique et géométrie puisque le problème de l'incommensurabilité, constitué d'abord en arithmétique, circule ensuite en géométrie (diagonale du carré). Ainsi le conditionnement philosophique aimante ce que René Guitart a appelé " la pulsation mathématique " (17).

      Szabo s'élève contre l'idée qu'il y ait eu une incompatibilité entre Pythagoriciens et Eléates et montre comment les philosophes du multiple ne font, en vérité, que faire proliférer l'Un plutôt que le nier et donc qu'ils s'appuient sur Parménide plutôt qu'ils ne le réfutent.

    3. 3. Apport musical

      La musique, plus précisément la théorie musicale, fut dès le départ, liée à cette affaire en fournissant à la mathématique des problèmes et des catégories :

      - les problèmes de la théorie des proportions (partages de l'octave), des moyennes géométriques... ;

      - les catégories de diastema (moins symphonie et accord que rapport) et de logos (relation, rapport).

      Ces problèmes vont engendrer le problème mathématique de l'incommensurabilité, d'où l'apparition de grandeurs qui ne sont pas des nombres. Ces catégories vont à partir de là appartenir aux mathématiques et y suivre leur destin propre.

      Dès l'origine (Pythagore), la théorie musicale a affaire à l'expérimentation si bien que la démarcation d'avec Aristoxène ne porte pas sur l'existence ou non d'une expérimentation musicale mais plutôt sur le type d'expérimentation et la nature du protocole adopté pour la valider : en particulier la sensation y est-elle la pierre de touche ou faut-il en passer par un raisonnement et un temps de pur intelligible ?

      Aristoxène, de ce point de vue, apparaît moins comme le libérateur d'une théorie musicale enfin constituée en-soi et pour-soi que comme celui qui

      - inaugure un traitement métaphorique des catégories, en particulier introduit un imaginaire de l'espace déplaçant le sens de la catégorie de diastema de rapport vers celui de distance ;

      - prône une empiricité fondée sur le fait ;

      - lie la théorie musicale à la physique via une physiologie de la sensation.

      Aristoxène, de ce point de vue, ne délie nullement la théorie musicale de la philosophie mais la corrèle explicitement à une autre philosophie : celle d'Aristote.

     

  3. Notre moment

    Je rassemblerai en cinq points ce que signifie pour nous, musiciens pensifs d'aujourd'hui, cette histoire :

    1. 1. Démonstration

      L'essence de la mathématique est la démonstration.

      Ses définitions, postulats, axiomes n'existent que pour être enchaînés, selon des procédures déductives, en démonstrations. Dialoguer avec la pensée mathématique implique donc de dialoguer avec ses démonstrations, pas seulement avec ses résultats et recettes. Le rapport aux mathématiques ne doit pas être purement technique mais porter sur son organisation démonstrative, sa constitution en théories.

    2. 2. Existences non constructibles

      La pierre de touche isolant l'essence du démonstratif est le raisonnement par l'absurde.

      Ce raisonnement est un pari sur l'existence établi sur la base d'une confiance en la non-contradiction de la rationalité mathématique. Le raisonnement apagogique dégage des existences non construites, parfois non constructibles. Autour de ce point s'exemplifie qu'une démonstration n'est pas une monstration.

      Tout ceci a d'immédiates résonances en musique. Je soutiendrai en effet, contre Aristoxène, qu'il y a des existences musicales qui sont non perceptibles (perceptible désigne adéquatement ce qui est montrable, exhibable en musique) et que ces existences non ordonnées à la perception sont même le coeur vivant de la musique. En particulier ces existences musicales, non alignables sur le perceptible, sont au coeur

      - de l'écriture musicale : écriture et perception musicales ne se recouvrent nullement, et l'écriture n'est nullement ordonnée à la perception (certains tentent d'y remédier en épongeant la dimension proprement écrite de la partition au profit de simples notations : j'ai argumenté ailleurs comment la pensée musicale s'y dilapide ) (18) ;

      - de l'écoute musicale, laquelle n'est aucunement une perception, ni même une audition si bien que la dimension non constructible de l'écoute musicale est de principe : l'écoute ne procède ni par construction de petites perceptions (c'est là plutôt le mode de travail propre de l'audition), ni, plus généralement, d'une quelconque construction.

    3. 3. Biconditionnement

      Entre philosophie, mathématiques et musique, il y a (il peut y avoir) un conditionnement réciproque.

      Quand il y en a un (car c'est intermittent : le moment grec est absolument singulier, étant celui d'une triple fondation), peut-être faut-il penser aussi que la musique est influencée non pas séparément par la philosophie d'un côté, la mathématique de l'autre, mais directement par leur dialogue. On aurait alors moins un schéma triangulaire qu'un diagramme en T .

       

    4. 4. Pulsations

      Ce biconditionnement (par deux disciplines simultanément), ou ce conditionnement par un dialogue exogène, agit en activant une " pulsation " intérieure à la discipline considérée.

      On a vu que le conditionnement des mathématiques par la philosophie et la musique a activé sa pulsation intérieure entre arithmétique et géométrie, autant dire pour nous entre algèbre et topologie.

      On peut voir également que le conditionnement de la philosophie par les mathématiques et la musique a activé sa pulsation entre dialectique et non dialectique (si l'on veut bien considérer, comme nous le démontre Szabo, que la dialectique de Platon procède de ce conditionnement).

      Le conditionnement de la musique par les mathématiques et la philosophie activerait de même une pulsation interne à la théorie musicale, ou à la pensivité musicienne (19). Pulsation entre nomination et mise en discours qui sont le propre de l'activité du musicien pensif ? Autres pulsations ? Ce point serait à examiner de plus près...

    5. 5. Trois formes de tutelle

      Avec Aristoxène se trouvent déjà disposées les trois voies plaçant la pensée musicale sous la loi de pensées exogènes :

      - les Pythagoriciens expriment la voie d'une tutelle mathématico-arithmétique s'exerçant sur la musique, tutelle dont St Thomas d'Aquin nous donne l'énoncé exemplaire au principe de sa Somme théologique : " Musica credit principia sibi tradita ab arithmetico " (la musique s'en remet aux principes qui lui sont livrés par l'arithmétique).

      - Aristoxène exprime la voie d'une tutelle physico-acoustique ;

      - les Harmoniciens (soient les empiristes purs de l'époque, contre lesquels Aristoxène a également bâti sa théorie) expriment la tutelle psycho-physiologique.

      Pour qui soutient, comme moi, l'en soi de la logique musicale, il y a sens à inventer une quatrième position (je renvoie pour de premières pistes à mon travail sur la logique musicale).

      Du point de vue qui est le nôtre ici, cela indiquerait à tout le moins que le musicien pensif doit s'intéresser non seulement aux démonstrations mathématiques, non seulement à leur capacité de révéler des existences non constructibles mais directement au dialogue agissant entre mathématiques et philosophie.

    Si je résume les exigences :

    - Le musicien pensif se soucie de la compatibilité entre l'ontique musicale et l'ontologie mathématique. Cela concerne donc les dimensions musicales de monde et de pièce (20): il y a des mondes de la musique, et il y a des pièces de musique, découpées dans ces mondes.

    - Le musicien pensif se soucie de la compatibilité entre le sujet musical et la théorie philosophique du sujet. Cela concerne donc la dimension musicale de l'oeuvre.

    - Pour ce faire, le musicien est à l'écoute du dialogue mathématiques-philosophie.

    Notre situation de pensée est, sous cet angle, très stimulante car il se passe, il s'est passé beaucoup de choses au cours du XXème siècle :

    - En mathématiques : pour ne citer que les aspects les plus connus : déploiement de la logique mathématisée, théorie cantorienne des infinis, théorie des ensembles, théorie des catégories..., tout ceci a déjà fait la preuve de sa capacité à stimuler la pensivité des musiciens.

    - En philosophie : le tournant langagier, la phénoménologie (qui alimente en vérité de très nombreux travaux théoriques sur la musique : Boris de Schloezer, Pierre Schaeffer...) ont déjà influencé largement les musiciens pensifs.

    - Plus encore selon moi dans le dialogue entre la philosophie et les mathématiques : soit d'un côté l'école analytique anglo-saxonne et de l'autre l'école française tendanciellement anti-épistémologique (Cavaillès, surtout Lautman, et aujourd'hui Badiou).

    Enfin il se passe quelque chose dans la théorie musicale et dans la pensivité musicienne dont ce séminaire devrait à tout le moins témoigner : le déploiement de travaux qui se tiennent à distance tant de la pure et simple application que de la seule empiricité.

     

    1. Constructions non constructivistes

Ceci autorise d'avancer dans cette voie étroite et singulière que j'appellerai celle d'une construction non constructiviste (21). La difficulté est d'apprendre à se mouvoir en mettant en oeuvre un dilemme :

- d'un côté le musicien pensif, plus exactement ici le compositeur pensif, doit construire la musique qu'il crée : en l'écrivant, car il faut l'écrire, et il n'est pas question de céder sur ce terrain de l'écriture ;

- d'un autre côté, il faut pratiquer cette écriture hors de l'esthétique constructiviste qui conçoit ultimement l'écriture comme moyen de se rendre maître de l'audition, dans la finalité d'une audition structurelle (pour utiliser un terme d'Adorno). Cela veut dire s'installer dans le dilemme entre l'écriture et l'écoute, dilemme car il ne s'agit pas de dialectiser l'une et l'autre (on dialectise écriture et perception, mais on ne saurait le faire pour écriture et écoute) et cependant il faut penser l'une et l'autre (pulsation musicale ?).

*

* *

Au total, pour le musicien qui, composant, ne fait que déposer un tout petit stock de marques et de lettres, il y a quelque confiance à gagner en l'infini de ce que saisit malgré tout sa maigre combinatoire par fréquentation de la mathématique. Qu'il se laisse alors guider dans l'infinie diversité de la mathématique actuelle par ce qui d'elle conditionne la philosophie est un bon principe : le dialogue philosophie-mathématique sera ainsi apte à intensifier la pulsation musicale entre écriture et écoute, entre oeuvre et musicien pensif.


Notes
(1) Cf. De Mozart à Beethoven, Éric Rohmer (Actes Sud)
(2) Collection Discours de la méthode. Gauthier-Villars, 1975
(3) Première édition américaine : 1945. Première édition française : 1959
(4) Cf. L'Etre et l'évenement
(5) Dans la philosophie précitée d'Alain Badiou, ceci se donnera dans le fait que le sujet procède d'un événement dont la caractéristique est que son être n'est pas fondé au sens précis où il s'autoappartient, ce qu'interdit l'ontologie mathématique ensembliste.
(6) Questions de logique (voir bibliographie annexée)
(7) Cf. Guy Lardreau : Fictions philosophiques et science-fiction (Actes Sud, 1997)
(8) Cf. Séminaires du 26 février 1969 et du 18 mai 1971.
(9) Cf. Alain Badiou : Manifeste pour la philosophie
(10) Cf. De Musica (Livre VI, C.IV, 7)
(11) Cf. Nombre, note et oeuvre musicale (voir bibliographie annexée)
(12) Cf. Gérard Grisey et alii...
(13) Par exemple, composant Dans la distance, ma première oeuvre mixte (avec électroacoustique donc), je ne savais trop que faire de la " musique " synthétisée sortant des haut-parleurs. Mon entrave s'est levée quand j'ai compris que ce qui sortait de haut-parleurs, et quelle que soit son origine (synthétique ou instrumentale), n'était pas exactement de la musique mais une image de musique. La production de cette catégorie d'image a débloqué mon travail et orienté la suite de la composition, en particulier des rapports entre musique live et images de musique.
La catégorie d'image fut ici mon point d'Archimède : ce point d'appui extérieur permettant de soulever tout un monde. Cette extériorité est celle de la pensivité musicienne à la stricte pensée musicale.
(14) Cf. Ecoute, ça promet ! (L'intellectualité musicale de Peter Szendy) Voir Samedi d'Entretemps du 28 novembre 1998
(15) Vrin, 1977
(16) Vrin, 2000
(17) Cf. Aristoxène de Tarente et Aristote : Le Traité d'harmonique, Annie Bélis (Klincksieck, 1986)
(18) Cf. La pulsation mathématique, René Guitart (L'Harmattan, 1999)
(19) Cf. Les preuves et les traces, ou les calculs qui ne s'entendent pas, Contrechamps (nème 10, 1989)
Indiquons, au passage, que le musicien pensif n'est pas exactement le musicien théoricien de la musique : une théorie de la musique prend bien en compte le réseau catégoriel mais non pas l'invention d'une langue musicienne. Le musicien pensif est donc bien, pour partie mais pour partie seulement, un théoricien de la musique.
(20) Cf. Questions de logique (voir bibliographie annexée)
(21) Cf. Une volonté musicale non constructiviste : le style diagonal de pensée in Musique, rationalité, langage : Cahier de philosophie du langage, numéro 3 (L'Harmattan 1998)


Bibliographie sur Musique et mathématiques

(F. Nicolas)

 

- Partages d'écriture : Mathématique et Musique sont-elles contemporaines ? (Cahiers du CREM, n° 1-2, 1986)

Du triangle Musique, mathématiques et philosophie.

- Le monde de l'art n'est pas le monde du pardon (I. Xenakis) Entretemps (n° 6, 1988)

Contre Xenakis et ses " applications " des mathématiques sur la musique

- Musique et ordinateur : quelques questions (Entretemps, n° 10, 1992)

- De l'instance de la lettre dans la musique (Quarto, n° 65 : Les Lettres de la jouissance, 1998)

- Nombre, note et oeuvre musicales (Actes de la 3ème ICMPC, Liège, 1994)

Le nombre et la note, le Nombre et l'oeuvre...

- Le problème de la double écriture (traditionnelle et informatique) (Montpellier, 1995)

Cf. Cahier d'analyse Dans la distance (Marc Battier - Ircam, 1997)

- Quelle unité pour l'oeuvre musicale ? (Une lecture d'A. Lautman) (Conférence Horlieu, Lyon, 1996)

Dialectiques entre propriétés intrinsèques et extrinsèques, entre local et global, théorie de l'intégration...

- La troisième audition est la bonne (De l'audition musicale conçue comme une intégration) (Musicæ Scientæ, n° 2, 1997)

Rapprochement entre théorie mathématique de l'intégration et théorie musicale de l'audition.

- Une volonté musicale non constructiviste : le style diagonal de pensée (in Musique, rationalité, langage - Cahiers de philosophie du langage n° 3, L'Harmattan, 1998)

La procédure diagonale de Cantor et le style diagonal de pensée musical.

- Questions de logique : écriture, dialectique et stratégie musicales- A paraître en anglais chez Springer-Verlag (Questions on logic : writing, dialectics and musical strategies)

Logique musicale et logique mathématique...