« On ne nourrit pas un village avec des ordures » (René Char) [1],

pas davantage un colloque avec des calomnies

 

Trois questions adressées au Colloque « Sociologie historique de l’antisémitisme culturel »

(31 mai 2007)

 

François Nicolas, compositeur, chercheur à l’Ens [2]

 

(version télédéchargeable en pdf)

 

Depuis plus d’un an, Éric Marty se répand dans les revues, émissions et colloques en traitant Alain Badiou d’antisémite, du moins en insinuant la chose sans exactement prononcer l’injure (Marty, craintif, ne veut pas s’exposer à un procès en diffamation), en répandant le soupçon, en distillant ses calomnies.

Que le personnage, pour ce faire, recoure aux procédés les plus falsificateurs, les quelques journaux qui ont rendu compte de ses pamphlets l’ont restitué.

·       Dans Libération du 17 mai 2007, Eric Aeschimann précise par exemple que « lorsque Marty dénonce Badiou pour avoir écrit : « Il faudra oublier l’Holocauste », celui-ci avait en fait écrit : « Si l’on veut résoudre le problème de la guerre infinie au Proche-Orient, il faudra arriver […] à oublier l’Holocauste », avant d’ajouter que, pour le reste, « c’est bien évidemment une nécessité, non seulement pour les Juifs, mais pour l’humanité tout entière, de ne pas oublier la destruction des Juifs d’Europe » ».

·       De même, dans le Nouvel Observateur du 24 mai 2007, Aude Lancelin dénonce la manœuvre de Marty en faisant ressortir que l’appel de Badiou à ne pas exonérer de ses responsabilités la politique israélienne par la convocation du souvenir de la Shoah n’est aucunement cette exhortation insensée à « oublier l’extermination » que Marty lui prête « calomnieusement »…

Or voilà que ce spécialiste de la diffamation (qui a déjà calomnié Gilles Deleuze, François Maspero, Giorgio Agamben, Étienne Balibar, Jean-Marc Lévy-Leblond) trouve aujourd’hui une tribune dans un colloque « scientifique » qui lui offre ainsi d’élargir son public aux musiciens.

Je suis musicien. À ce titre, j’ai été invité à ce colloque par la Société française de musicologie. Je m’étonne qu’on puisse envisager de donner la parole en ce type de colloque savant à un pamphlétaire digne des feus Gringoire ou Crapouillot. D’où mes trois questions.

 

 

Première question, aux organisateurs

 

Le « comité scientifique » affiché s’est-il prononcé sur la pertinence du propos de Marty en ce lieu, sur l’abjection d’accoler ainsi, en tête d’un programme, le nom de Badiou au mot de « collaboration » (voir la communication qui précède celle de Marty) ? ! Ceci constitue-t-il une manière acceptable de travailler sur les questions propres à ce colloque ? Qui, des organisateurs, entérine ou n’entérine pas cette infamie d’ouvrir un examen de l’antisémitisme contemporain sous le signe d’une mise en question d’Alain Badiou ?

 

 

Seconde question, à chacun

 

Il se trouve que, pour moi compositeur, la figure d’émancipation de la musique contemporaine a pris les traits singuliers de Schoenberg. J’ai écrit sur ce sujet, il y a dix ans, un livre publié par l’Ircam, La singularité Schoenberg, livre où je discutais très précisément le statut du mot « juif » dans l’opéra Moïse et Aaron (voir feuille annexe).

D’avoir soutenu que cet opéra n’était pas sioniste, que Schoenberg-Moïse y butait sur l’impossibilité, depuis l’usage fait par les nazis du mot « juif », d’en user lui-même de manière émancipatrice, d’avoir rappelé à ce titre les écrits de Georges Steiner (Le transport d’A. H.), de Paul Celan (L’Entretien sur la montagne), d’Alain Badiou (D’un désastre obscur) et de Cécile Winter (De ce qui fait que le mot juif est devenu imprononçable), en raison de tout cela, de toutes ces réflexions qui tournent en musique autour des mêmes thèmes que ceux que Badiou déploie philosophiquement, va-t-on taxer mon livre d’antisémitisme ? !!

 

 

Troisième question, aux participants à ce colloque

 

Quelle logique a aujourd’hui cette manière débridée d’accuser à tort et à travers d’antisémitisme (jusqu’à Bourdieu…) toute personne qui ne se rend pas à l’ordre marchand du monde et refuse d’abdiquer d’une pensée émancipatrice ? Quelle haine de l’universalité – de cet universel générique que théorise Badiou [3] -, quelle peur de l’émancipation politique y a-t-il au principe de ce déchaînement de la calomnie ?

Comment se fait-il que les penseurs radicaux d’une universalité émancipatrice qui, jadis, se faisaient attaquer comme « juifs apatrides et cosmopolites » se voient aujourd’hui dénoncer comme « antisémites » ? Comment se fait-il que les mêmes qui inlassablement se lèvent contre l’ordre inégalitaire et impérial du monde se faisaient traiter en 1968 de « juifs allemands » et aujourd’hui d’« antisémites » ?

Que penser de ceux qui compromettent ainsi le mot « juif » dans leur haine de toute radicalité et de 1968, qui l’embrigadent dans une réactivation du vieux combat de la droite-extrême contre l’égalité et l’instrumentent contre « l’universalité française » née de 1789 ?

Au total, cette tentative de désorienter les esprits en usant sciemment de mots à contre-emploi n’apprend-elle pas quelque chose sur notre temps et ce colloque ne devrait-il pas interroger cette entreprise systématique de désorientation qui se déploie sous couvert de dénonciation de l’antisémitisme plutôt qu’orchestrer la délation et ajouter ainsi à la confusion générale des esprits ? Et s’il s’intéresse aux nouvelles formes d’antisémitisme, ce colloque ne devrait-il pas alors interroger cette manière qu’a le délateur Marty de reprendre à l’antisémitisme ses manières traditionnelles d’insinuer, de manier sournoisement la dénégation (« bien sûr je ne dirais pas que… mais cependant, regardez bien… »), de souiller les noms (« L’odieux de cette façon d’agir : déshonorer, ensuite on attend et on voit. » René Char) ?

 


Pourquoi le mot « juif » manque à Moïse dans le Moïse et Aaron de Schoenberg

(F. Nicolas)

 

[ extraits de La singularité Schoenberg (éd. Ircam-L’Harmattan, 1997) – pp. 186-191]

 

 

 


Quelle est l’indécision propre de Moïse et Aaron, indécision qu’inscrit son inachèvement sur cette dernière phrase, chantée par Moïse : « Ô mot, mot qui me manque ! »

S’il est vrai que les œuvres de Schoenberg partagent avec le théâtre ce point que le dernier mot y est le bon, alors cette dernière phrase inscrit la décision de retenir l’opéra au seuil d’un point innommable qu’il serait désastreux de vouloir forcer.

Ce mot qui manque à Moïse et devant lequel l’œuvre décide de s’arrêter, on peut l’interpréter de trois manières selon que l’on s’attache à la dimension religieuse, musicale ou politique de l’œuvre.

·       Selon la dimension religieuse, le point sur lequel bute Moïse le croyant est la prière.

·       Selon la dimension musicale, ce qui manque à Moïse, en particulier pour convaincre son peuple, c’est la beauté.

·       Enfin, selon la dimension politique de l’opéra, le mot qui vient à manquer à Moïse est le mot « juif ».

 

*

 

Le mot qui à partir de cette fin du second acte, c’est-à-dire après la scène du veau d’or qui est somme toute moins une orgie qu’un massacre, ce mot qui vient à manquer à Moïse car il ne voit plus quel usage public en faire, ce mot est le mot « juif ». Remarquons tout d’abord que ce mot n’intervient jamais comme tel dans tout le livret, y compris celui du troisième acte. Ce mot est donc objectivement absenté par Schoenberg.

Mon hypothèse est que Moïse-Schoenberg a buté radicalement sur ce mot, sur son utilisation possible à l’époque où les nazis en faisaient l’usage massif qu’on sait. Je me réfère, pour ce faire, à toute une tradition qu’on pourrait dire apophantique sur ce point et qui voit dans l’Holocauste nazi le fait rendant désormais impossible un usage en pensée, un usage progressiste de ce mot. Je me réfère ici avant tout à la poésie de Paul Celan, ainsi qu’à son Entretien sur la montagne [4].

 

Il faut nécessairement se demander en ce point si Moïse et Aaron est un opéra sioniste. La réponse est pour moi clairement non : non seulement la musique s’arrête au seuil de la victoire de Moïse mais même cette victoire, explicitée dans le livret du troisième acte, n’est pas un panégyrique du projet sioniste, tout au contraire puisque Moïse y parle moins de la Terre promise que du désert, et défend ultimement la voie du nomadisme plutôt que celle d’une colonisation. La force et le courage de ce livret sont finalement de refuser que les bains de sang et les massacres du second acte puissent légitimer de nouveaux massacres, celui d’Aaron en premier lieu mais aussi ceux qui découlent nécessairement d’une terre à occuper et qui n’est jamais vierge d’autres peuples. On sait que les puissances occidentales ont soutenu après guerre le sionisme à mesure exacte du fait qu’elles ont toutes été compromises dans l’Holocauste nazi, ne serait-ce que par laisser-faire et indifférence au destin des Juifs d’Europe. Georges Steiner, dans un courageux livre Le transport d’A. H., a poussé la critique du sionisme jusqu’à soulever la délicate question de la pertinence ou non de la thématique du peuple élu. La célèbre phrase d’Hitler déclarant [5] qu’il ne saurait y avoir en même temps sur terre deux peuples élus nourrit son développement sur la secrète collusion entre nazisme et sionisme.

 

Le point est en tous les cas que l’opéra Moïse et Aaron n’est pas un opéra sioniste. Je sais bien qu’Arnold Schoenberg a comme individu épousé des thèses sionistes, que ce soit dans sa pièce Le Chemin biblique — où il prend cependant soin, conformément au sionisme originel, de situer la terre promise en Afrique et non pas en Palestine — ou dans sa déclaration faite à Paris à l’été 1933 de « sacrifier désormais son art à la cause sioniste » [6]— mais il faut là encore remarquer qu’il n’en fera en fait rien —.

Cependant je veux parler pas ici moins du musicien que de l’œuvre. À ce titre, il est vrai qu’un premier projet de troisième acte fut rédigé par Schoenberg qui prônait moins directement la voie du désert et qui semblait plus directement compatible avec une thématique sioniste. Toutefois là encore, il faut bien admettre que Schoenberg n’a pas tenu ce fil pour finalement accepter l’idée d’un opéra se terminant par la récitation du livret qu’on connaît. [7]

J’entends, pour ma part, que Moïse découvre à la fin du deuxième acte l’impasse de la Terre promise et qu’il tente de soutenir une voie du peuple élu qui ne le condamne pas à d’autres massacres ultérieurs, sur d’autres peuples comme il dût déjà s’y livrer contre lui-même au cours du deuxième acte. Moïse soutient somme toute la grande figure juive de l’universalité, celle d’une part où est « Juif » celui qui se dit tel — là aussi il faut récuser Sartre et son idée que serait juif celui qui serait nommé comme tel par un autre, de l’extérieur donc [8] — et celle d’autre part où se nomme « Juif » non pas celui qui se découvre appartenir à une communauté particulière mais tout au contraire celui qui assume de soutenir qu’il y a la justice et que celle-ci est pour lui la figure en acte de l’universalité. Au plus loin d’être le défenseur de particularités culturelles, le Juif ici n’existe que dans une vocation singulière à l’universalité qui passe pour lui par la forme privilégiée d’une justice prévalant sur tout ordre. Pour le Moïse de Schoenberg, la justice et l’universalité sont avant tout celles de l’idée, autrement dit de la pensée, ce qui revient à déclarer au troisième acte qu’il n’y a de destin juif que pour autant qu’il y a vocation à l’universel de la pensée. Grandeur incomparable qui a irrigué tant de destins dans une logique assumée de la diaspora : songeons, dans une époque qui reste en pensée la nôtre, à Marx, Freud, Schoenberg… Toute notre modernité s’origine de là.

Mais Moïse parle, doit parler, non plus seulement avant le nazisme mais aussi pendant et après. Et le mot « juif » est devenu pris en otage entre sa fonction d’identification sordide dans le nazisme et un usage communautarisant ouvert par le sionisme. Pris entre ces deux acceptions, le mot « juif » est devenu imprononçable, s’entend imprononçable en vérité [9], dans la vérité de son destin universel et de sa vocation singulière à la justice. Ce mot n’est plus prononçable en vérité dans la langue de la politique et ne peut plus qu’être réservé — pour combien de temps ? — à la langue privée, telle cette langue poétique que le poète Paul Celan porte à sa plus grande incandescence.

J’aime à voir dans le Moïse de Schoenberg la même retenue et la même force pour se tenir au bord d’un mot devenu comme tel sans usage émancipateur public. Pouvons-nous, aujourd’hui encore, prendre exacte mesure de cette perte ou les temps à venir devront-ils nous l’enseigner, et alors à quel prix ?

La force de l’opéra Moïse et Aaron est de mettre en scène des massacres qui ne doivent rien à l’extérieur. Elle est d’assumer que le Mal procède non point d’une autre nature — perverse, impure, étrangère — mais d’une déviation dans la quête des vérités. Et cette terrible déchéance trouve un terreau privilégié au sein même des religions. Il faut bien voir que Schoenberg a commencé son entreprise atonale par la mise en musique de poèmes de Stefan George et particulièrement de ce poème qui soutient le dernier mouvement de son II° quatuor et qui s’intitule Extase. Or ce poème propose somme toute une vision de la religion qui conjoint, en un nœud saisissant, l’extase, le sacré et la terreur, soit précisément trois signifiants capitaux dans tout désastre de la pensée [10]. Ne retrouve-t-on d’ailleurs pas, au principe de l’orgie sanglante du second acte, cette extase, ce sacré et cette terreur ? N’indiquent-ils pas clairement que pour Schoenberg le désastre qui s’annonce en ce début des années 1930 est aussi ce qui menace de l’intérieur le thème même d’une Terre promise, d’un peuple qui ne serait élu qu’au titre de la promesse d’un territoire à disputer aux autres peuples ? Le Moïse de Schoenberg ne cède pas sur le destin universalisant de son peuple. Et c’est me semble-t-il à ce titre que le mot « juif » lui paraît devoir être retenu, ne plus faire l’objet d’un maniement public, rester en quelque sorte d’usage privé.

 

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[1] Titre d’une affiche rédigée puis placardée par René Char, début 1946, dans le village de Céreste (Basses-Alpes).

Fin 1945, René Char et son maquis fut l’objet d’une campagne de calomnies (accusation de marché noir !) : « On assiste depuis quelque mois à une chasse en règle des patriotes. L’odieux de cette façon d’agir : déshonorer, ensuite on attend et on voit. ». Début 1946, la vérité fut rétablie mais une autre campagne de dénonciations calomnieuses repartit de plus belle. Char alla coller son affiche dans le village d’où partait la diffamation : « Je [vous rends] juge et témoin d’une mauvaise action qui a déshonoré aussi bien ceux qui l’ont provoqué que ceux qui se sont appuyés sur elle pour diffamer et tenter de salir qui n’a de leçon d’honnêteté et de patriotisme à recevoir de personne. […] Nous ne demanderons pas aux grenouilles de rougir et d’avoir honte. Leur sang glacé le leur interdit. Je leur demanderai seulement la prochaine fois d’être moins bêtes, à défaut d’être moins ignobles. »

[2] fnicolas [at] ens.fr

[3] D’où le caractère précieux du travail philosophique d’Alain Badiou pour qui entreprend aujourd’hui de penser à nouveaux frais les questions de l’heure. Je l’ai fait tout récemment, pour mon compte de musicien, dans un séminaire (« mathématiques, musique et philosophie ») de l’Ens : En quoi la philosophie de Logiques des mondes (Alain Badiou) peut servir au musicien (12 mai 2007).

Texte : www.entretemps.asso.fr/Nicolas/2006.2007/sur.LDM.htm

Vidéo : www.diffusion.ens.fr/index.php?res=conf&idconf=1642

[4] Traduction de Stéphane Mosès (1990) :

« Le Juif s’en alla, et avec lui s’en alla son nom, l’imprononçable. »

« Le Juif, tu le sais, qu’a-t-il en fait qui lui appartienne vraiment, qui ne soit emprunté, prêté et jamais rendu. »

« Je le demande et le redemande, qui donc, lorsque Dieu l’a fait naître Juif, s’en vient avec un bien qui lui appartienne vraiment ? »

« Quand le Juif s’en vient et en rencontre un autre, c’en est bientôt fini du silence, même dans la montagne. Car le Juif et la nature, cela fait deux. »

« Le bâton fait silence, la pierre fait silence, et le silence n’est pas un silence, aucun mot ne s’y est tû ni aucune phrase, c’est juste une pause, c’est un trou de paroles, une place vacante. »

« La pierre, à qui s’adresse-t-elle ? À qui donc, cousin, veux-tu qu’elle s’adresse ? Elle ne s’adresse pas, elle parle, et celui qui parle, cousin, ne s’adresse à personne, il parle parce que personne ne l’écoute, personne et Personne, et alors il dit, lui, et non sa bouche et non sa langue, il dit et lui seul : Entends-tu ? »

[5] Cf. Hitler m’a dit d’Hermann Rauschning (p. 269 de l’édition de 1939)

[6] Cf. Stuckenschmidt (Schoenberg) p. 383…

[7] Luigi Nono soutient pour sa part (cf. ses Écrits, p. 226) que le véritable troisième acte de Moïse et Aaron serait Un Survivant de Varsovie. Il y a là l’idée, me semble-t-il — mais je ne suis pas sûr de bien comprendre en ce point l’intention de Nono — que l’Holocauste serait la conséquence tragique du deuxième acte. Mais alors en quel sens ? Et si les massacres du second acte préfigurent les massacres nazis, en quel sens comprend-il alors ceux-là ?

[8] Cf. Réflexions sur la question juive… À quel titre serait-ce d’ailleurs une question, et pour qui ?

[9] Sur ce point, voir la très remarquable conférence de Cécile Winter : De ce qui fait que le mot juif est devenu imprononçable (Séminaire de travail sur la philosophie, Lyon — juin 1992) dont j’extraie la conclusion : « Le mot juif, s’il a une histoire autre qu’hitlérienne, a sauté dans le vide avec les combattants du ghetto de Varsovie. Je crois que c’est aussi la proposition de Paul Celan : le mot juif désormais n’appartient à personne et c’est du point qu’il appartient à personne qu’on pourrait éventuellement le réemployer, non en tant que collectif ou substance mais en tant qu’adjectif de personne, comme un nom singulier, un nom propre de personne. »

[10] Cf. Alain Badiou : D’un désastre obscur (Éditions de l’aube, 1991)