Collectif anti-crack

Réunion du samedi 10 novembre 2001

Bilan de notre mobilisation

Nous avons rempli notre principal objectif : la libération des rues du quartier (et singulièrement du quadrilatère rues du département, de Tanger, du Maroc, d'Aubervilliers) des bandes de dealers qui se les accaparaient. Nous n'avons pas pour cela constitué de milices privées mais avons manifesté dans ces rues en criant : « La police doit faire son travail ! » La police s'est en effet remise au travail et les résultats sont désormais là.
Bien sûr le trafic de crack n'a pas cessé dans le quartier : les dealers et les crackers sont toujours là, avec leurs risques d'agression, leurs nuisances, etc. Mais le phénomène est désormais dispersé, les dealers sont désormais sur la défensive, ils ont perdu de leur arrogance, les rues sont à nouveau praticables, le trafic se fait essentiellement dans des lieux privés (squats) et non plus au vu et au su de tous, et en particulier des enfants de la bibliothèque Hergé.
Ce résultat a été validé par les pouvoirs publics (commissariats, municipalités) qui nous ont tous dit leur détermination de maintenir le dispositif actuel le temps qu'il faudrait.
L'avenir est donc éclairci, au moins jusqu'à l'été prochain (2002) où il nous faudra renforcer notre vigilance (le trafic se relance aux beaux jours, la police a moins d'effectifs l'été et nous serons alors après les campagnes électorales !)
En attendant, nous proposons d'arrêter notre mobilisation, de mettre en veille le Collectif et de mettre en place un groupe de vigilance d'une dizaine de personnes, couvrant systématiquement le quartier et surveillant que les bandes de dealers ne se réapproprient pas une portion de l'espace public (rues, impasses, passages, squares, points, etc.). Ce groupe pourra être prévenu par un numéro de téléphone affiché en sorte de pouvoir enquêter sur toute situation inquiétante du quartier. Si nécessaire, ce groupe contactera les pouvoirs publics pour s'informer de leur réaction à la nouvelle situation. Ultimement, ce groupe réactivera si nécessaire la mobilisation du Collectif : nous pourrons alors d'autant plus facilement relancer nos manifestations que nous connaissons désormais beaucoup de monde

Pourquoi nous avons rempli notre objectif ? Car la mobilisation a été très importante à échelle du quartier : cf. le ras-le-bol évident de tous, avec la sensation que cela ne pouvait plus durer. Mais aussi parce que nous avons mené notre bataille avec « 12 atouts » dans notre camp (voir récapitulatif là-dessus)

La dispersion du trafic dépend d'autre chose que d'un simple effort policier, fut-il maintenu pendant longtemps : l'effort policier peut disperser les bandes, il ne peut supprimer les trafic. La réduction du trafic dans le quartier dépend aussi de la rénovation urbaine et d'un plan général anti-drogue.
C'est pour cela que nous nous sommes donnés un mois pour rencontrer les pouvoirs publics. Cf. le papier « Nos rencontres » listant celles-ci, et particulièrement les comptes rendus des réunions avec Dreyfus et Madec.

 

Rénovation
Celle-ci devrait s'accélérer tant dans le X° que surtout dans le XIX° (voir les comptes rendus des visites aux deux maires).
Le point opaque reste ici le XVIII° et ce qu'il en sera de l'îlot Caillé (rue Caillé, bas de la rue d'Aubervilliers, etc.).
D'où la proposition de monter une réunion avec les habitants de cette zone, en l'étendant au squat du 10 rue de Tanger et à d'autres maisons de la rue du département.

 

Plan antidrogue.
La Mairie de Paris et les municipalités n'ont ici visiblement pas d'idées très nettes. Elles font du bricolage, au coup par coup, sans avoir de lignes directrices.
Les seules politiques relativement cohérentes qui s'affichent sont
- celle de la tolérance zéro, avec mise en prison systématique (d'où construction de nombreuses prisons !
- celle des centres de shoot (copiées sur la Suisse et Francfort) avec dépénalisation de toutes les drogues !
Y a-t-il troisième voie : celle de l'application effective de la loi de 1970 et d'une véritable politique des soins ? Cette hypothèse de nos amis du XVIII° (Entraide 18) n'est pas encore très claire pour nous...
Nous omettons volontairement une quatrième voie, qui tendanciellement s'apparenterait à une voie d'extrême droite et qui consisterait à monter des milices privées « faisant le ménage » dans les rues à coups de battes de base-ball Nous avons bien sûr déclaré dès le départ notre opposition à cette orientation.

À l'évidence, plusieurs formations politiques vont se réclamer de notre mobilisation pour mettre en avant leur solution au problème de la drogue : solution américaine ou solution helvétique, exemple de New York ou exemple de Genève. Nous ne pensons pas que le collectif anti-crack comme tel ait à se prononcer sur ce point.
Chacun par contre peut le faire à sa manière et en son nom propres en dehors du collectif. Pendant le temps de notre mobilisation, des personnes, adhérant par ailleurs à telle ou telle formation politique, ont participé à nos manifestations pour demander que la police se remette au travail et disperse les bandes de dealers occupant les rues. Ces gens pouvaient bien sûr continuer par ailleurs leur propre travail politique en dehors du collectif. Une fois notre mobilisation arrêtée, ceci ne pourra que continuer.
Si nous devons dans l'avenir nous remobiliser tous ensemble au nom du collectif contre le trafic de crack dans le quartier, ce sera à nouveau sur des objectifs précis, et en indifférence aux partis politiques.

Il y a les plus grands chances qu'aucun choix politique cohérent ne soit vraiment fait au niveau de Paris en matière de politique anti-drogue, et qu'il n'y ait donc que des rafistolages, bricolages, rustines au gré des circonstances. Cela peut être cependant dangereux car inefficace et ultimement irresponsable.
Les points qui nous apparaissent clairs au sortir de notre enquête :
- Nous nous sommes battus pour étouffer dans l'uf la constitution d'une nouvelle « scène ouverte » du crack. Il faut étouffer dans l'uf toute nouvelle tentative. Une fois constituée, une telle scène devient très difficile à déloger.
- Il n'y a pas de sens à transposer pour le crack un dispositif conçu pour l'héroïne et profitant donc de l'existence de produits de substitution (qui n'existent pas pour le crack). Ainsi les centres d'accueil, qui peuvent orienter les héroïnomanes vers des centres de méthadone, ne peuvent avoir ce sens pour les crackers. Aussi sont-ils alors essentiellement de simples centres sociaux, incapables de réellement orienter les crackers « vers la sortie » de leur addiction.
- Les centres d'accueil se justifient soit sur les lieux d'un trafic déjà existant (ce qui n'est pas le cas dans notre quartier), soit doivent être installés partout dans Paris. Il n'y a donc pas de sens à établir dans les seuls X° et XIX° de tels centres d'accueil si d'autres centres ne sont pas simultanément ouverts dans tous les autres arrondissements parisiens. Pas de mesure particulière donc pour le X° ou XIX° !

 

Nos propositions :
0. Mettre en veille le Collectif comme tel.
1. Organiser un groupe de vigilance
2. Garder le contact entre nous grâce à « notre » salon de thé et à « notre » liste Internet.
3. Organiser une rencontre avec ceux qui habitent au coeur du trafic, ceux qui souffrent du trafic dans des lieux cette fois privés et non plus publics (« Îlot Caillé ») et monter une association d'habitants ad hoc.
4. Pour ceux que cela intéresse, et sous un autre nom que celui du Collectif : monter un groupe de réflexions sur les politiques anti-drogue. Nous précisons qu'une échéance significative existe d'ores et déjà : la table ronde du XVIII° le samedi 8 décembre prochain. Qui veut y participer ? Qui a des propositions à y faire ?
5. Continuer de manifester notre solidarité avec les gens et associations du XVIII° en participant à leurs manifestations et rassemblements.