Le Lundi de la cinquième voix

Sur Bernard Lortat-Jacob : Chants de Passion (coll. " La voie esthétique ", Cerf, Paris, 1998)

 

Samedi 26 février 2000 (Ircam)

 

François Nicolas


Je ne suis pas ethnomusicologue et suis même relativement ignorant des pratiques de cette discipline. Si j'ai pris l'initiative de cette rencontre autour du beau livre de Bernard Lortat-Jacob et si j'ai choisi de l'interroger ce matin, ce n'est donc pas en m'autorisant de quelque compétence particulière ou de quelque distinction savante. C'est, plus simplement, et comme il convient en général aux choses de la pensée, en m'autorisant de moi-même, m'autorisant en particulier de l'intérêt qu'a suscité en moi la lecture de ce livre.

 

 

I

 

Je commencerai en relevant quelques pratiques chroniquées dans cet ouvrage qui me sont apparues tout à fait remarquables.

Trois choses m'ont frappé - de plus savants que moi diront peut-être si ce qui me semble là exceptionnel s'avère relativement fréquent dans ce type de pratiques musicales -.

 

I.1

En premier lieu, il y a bien sûr la quintina, cette " petite quinte " ou " cinquième voix " qui à la fois " sort " du choeur et tombe du ciel, réponse féminine quasi transcendantale à l'appel de quatre hommes, soudés par leur chant. La découverte de ce phénomène ne saurait, pour un musicien, se réduire au plaisir d'une trouvaille acoustique et ce livre montre bien comment une telle surprise, constamment attendue et renouvelée, excède pour les individus qui l'engendrent un simple geste de prestidigitation sonore.

Un choeur d'hommes astreint à faire sortir du corps collectif de leur voix groupées cette enveloppe en surplomb, quelle plus juste image donner de ce que peut être une prière musicale ? Même le grégorien, cette prière musicale pourtant exemplaire, semble à côté un balbutiement. Je ne dis pas cela par comparaison des beautés sonores ; je ne prétends pas que celle des habitants de Sardaigne dépasse celle des bénédictins. J'énonce seulement la supériorité de ce chant au nom d'un trait caractéristique de toute prière : elle est d'abord prière pour la prière elle-même , prière pour être vraie. Et que font donc nos chanteurs de Sardaigne si ce n'est prier pour que leur prière soit justifiée par l'advenue de la quintina, entendue comme réponse de la Vierge à leur adresse collective ? Soit également l'idée qu'on ne prie jamais seul et que toute prière, pour être vraie, doit assumer une dimension collective.

Il y a ainsi, en cette pratique, une rencontre exceptionnelle entre chant et prière qui me semble devoir former paradigme en matière de prière musicale.

 

I.2

En second lieu, ce livre présente des musiciens qui ont un rapport singulier à ce qu'on pourrait appeler une partition implicite, partition dont il semble bien, à lire l'auteur, qu'elle ait d'ailleurs dû exister il y a plus de quatre siècles .

Pour le tenant que je suis de l'idée qu'une partition est l'inconscient d'une oeuvre, il y a quelque jouissance particulière à découvrir une telle pratique où la discipline d'une écriture joue d'autant plus souverainement que cette écriture n'est jamais présentée, étant devenue imprésentable puisqu'oubliée et même forclose. L'auteur a cependant la générosité de nous la restituer dans les annexes de son livre, ce qui suggère qu'une telle écriture continue d'opérer, même si elle reste enfouie au plus inaccessible des consciences.

On comprend à cette occasion que cette transcription excède celle qu'on peut faire de simples improvisations. La transcription d'une improvisation n'a de statut qu'anecdotique, restant extérieure à l'improvisation elle-même, et ne se nouant guère à la musique ainsi produite. Dans notre cas, l'alliance est d'une tout autre nature, plus étroite, plus troublante aussi si l'on se mêle, comme le livre somme toute nous y invite, d'écouter ces chants partition en mains. Car il s'agit bien là de la partition de ces chants, non d'une simple cartographie annexe . Il y aurait, sous ce seul chef, matière à d'amples développements.

 

I.3

Enfin, et corrélé au point précédent, il y a place dans cette musique traditionnelle pour un travail sur la variation qui m'a semblé, lui aussi, assez remarquable. On perçoit qu'il y a une histoire des interprétations de cette partition implicite, le musicien qui se propose d'y ajouter une variante jusque-là inconnue le faisant alors avec les mêmes soins, les mêmes scrupules, les mêmes exigences qu'un interprète d'une sonate de Beethoven face à ses tempi ou que celui d'une partita de Bach face à ses ornements.

Ce souci de respect d'un texte (restant sans support matériel mais cependant présent dans les consciences) en même temps que d'invention donne au mot " tradition " (qui nomme dans ce contexte ce nouage complexe de fidélité et de création) un sens très vivant, le mot " tradition " désignant ici ce que l'on nommerait ailleurs " partition ". Le caractère implicite de la partition se convertit alors dans le caractère explicite d'une tradition, cette dernière n'étant plus le nom d'une pure et simple répétition mais celui d'un lieu où il est possible de créer, où il est requis d'ajouter pour diversifier les formes d'existence musicale.

À ces trois titres (quintina, partition implicite, variations d'une tradition), ce livre a conquis mon intérêt et je souhaitais en remercier son auteur.

 

 

II

 

Dans ce même ouvrage les paysans de Sardaigne nous donnent une leçon sur ce que veut dire aimer la musique.

" Le chant doit être toujours commenté et raisonné " (206) [D'où] les discussions incessantes sur le chant (231)

[Et Bernard Lortat-Jacob de s'émerveiller devant] une société [...] où l'on n'hésitait pas à se disputer pendant des heures sur l'opportunité d'une variante musicale. (232)

Sans parole et sans dispute, pas d'amour du chant qui vaille nous disent ainsi ces musiciens. Prenant à la lettre leur leçon, je dirai : l'amour que porte ce livre pour la musique n'existerait pas non plus sans paroles à son endroit (nous sommes réunis ce matin à cet effet) mais aussi sans un peu de disputes et de controverses. C'est donc au titre de cette leçon musicale donnée par les chanteurs de Sardaigne que je vais maintenant prolonger mon intervention par une vaste interrogation sur ce livre. Je n'ai en effet qu'une question véritable à lui poser et j'utiliserai à cet effet le temps d'intervention qu'il me reste.

 

Ce livre me semble partagé secrètement par deux orientations qui ne sont pas aisément conciliables. Je voudrais mettre en évidence ces deux orientations de pensée pour ensuite interroger leur coexistence (pacifique) dans ce livre, tentant pour ma part de les opposer là où le livre tenterait plutôt de les apparier.

 

II.1

La première orientation est la plus massive, la plus évidente. Elle peut se dire ainsi : le musical adhère au social, au psychologique, au religieux, bref à la situation humaine dont il procède. Cette orientation saisit la musique comme pratique enserrée dans une culture (c'est sa dimension passive) mais également comme pratique actrice de sens. Ce type d'inscription se fait par des opérations de liens, d'attachement, d'adhérence, de connexité : leur emblème me semble correctement caractérisé par la catégorie de sens.

Le livre convoque à l'exposé de cette thèse un vocabulaire très riche. Je me permets de le relever pour en exhausser la diversité.

Le chant n'est pas seulement une affaire de technique, c'est aussi une façon d'être ensemble. (30)

L'harmonie acoustique résulte directement de l'harmonie sociale et ne peut naître sans elle. (10)

Une voix ne fait pas que produire du son. [...] Sous le chanteur il y a toujours l'homme. [...] Le chant ne fait qu'assurer le relais d'une vie de tous les jours et ne peut exister sans celle-ci. Il n'est qu'un moment particulièrement intense. (202)

L'art d'être ensemble [...] renvoie à une conception générale de la culture que je fais également mienne , définie essentiellement comme l'art de s'émouvoir ensemble. (15)

La fonction spirituelle du chant (35)

Le temps social prolonge naturellement le temps musical. (203)

Récapitulons le vocabulaire de l'adhérence et de la connexité.

Il y a

- les substantifs : liens, harmonie, culture, entente, réplique, fonctions, rôle, confusion, relais, expression, société... ;

- les verbes : résulter, figurer, témoigner, prolonger, associer, correspondre, garantir, mobiliser, passer par... ;

- et les adverbes : ensemble, derrière, sous...

On a ainsi une vision extrêmement diversifiée du réseau enserrant les pratiques musicales dans les autres pratiques humaines si bien que l'on retrouve dans la musique ainsi produite la chair et le corps des hommes qui s'y sont engagés.

Dans ce versant du livre, la musique est conçue comme pratique humaine adhérant à la situation dans laquelle elle prend racine, pratique qui à la fois reflète et agit l'ensemble des déterminations de cette situation. D'où les dimensions sociologiques, psychologiques, religieuses de ces chants...

 

II.2

Je voudrais maintenant faire entendre, de l'intérieur même de ce livre, une seconde voix qui me semble dire autre chose.

Là encore, commençons par un bouquet de citations.

Contradiction fondamentale de la pratique chorale : privilégier l'esthétique du chant ou l'esprit confrérique. (85)

Le chant a cet étrange pouvoir de transfigurer à la fois les rapports et les visages. [...] Cette transfiguration se lit sur le visage même des chanteurs. (202) Il arrive même que, sous l'expression tendue d'un chanteur, on retrouve difficilement celui dont les traits nous sont pourtant familiers. (203)

Les réels cantori se comptent sur les doigts d'une main. Ce chiffre restreint, s'appuyant sur les jugements des plus sévères, rappelle l'exigence du chant. (208)

La quintina a la vertu d'une grâce en même temps qu'elle invite au ravissement ; lorsqu'elle " sort ", c'est de façon si étrange que son existence semble appartenir au monde surnaturel. (210)

Ces extraits visent à exhausser une dimension de ce livre, quantitativement moins présente mais plus intense à mon goût.

Il s'agit d'abord de la quintina, saisie non plus dans sa genèse mais dans l'émerveillement de son apparition. Il y a ici un mot-clé : celui de sortie, puisqu'il nous est indiqué à différentes reprise que la quintina " sort ", ou plutôt " doit sortir ". Le vocabulaire indique par lui-même non plus la connexité mais le saut, non plus la prolongation mais le pas franchi hors de soi, non plus la familiarité des situations mais l'étrangeté d'une advenue.

Il y a aussi ces exigences longuement détaillées du chant, exigences partagées par ceux qui en sont les acteurs et qui manifestent qu'en vérité, c'est le chant qui fait les chanteurs plutôt que l'inverse. Je veux dire par là : empiriquement formulé, ce sont bien sûr les paysans qui font le chant, et un paysan qui fait du chant, cela s'appelle empiriquement un chanteur. Mais si l'on saisit la musique comme espace d'exigence s'imposant à celui qui la pratique beaucoup plus que comme espace de déploiement d'un soi préexistant, alors c'est bien le chant et son existence propre qui convoque des hommes pour le servir, qui fonde leur existence de chanteurs, qui inaugure leur être musicien. C'est bien pour cela qu'il nous est dit que les réels cantori se comptent sur les doigts d'une main et que cette rareté n'est plus l'effet d'une décision censitaire, d'un quota imposé par quelque prieur mais s'impose à quiconque comprend un tant soit peu ce que veut dire l'exigence du chant comme telle, exigence qui n'est plus un souci de représentation sociale mais constitue un en-soi et un pour-soi autonomes.

Dans ce même registre où chant et musique affirment leur autonomie par rapport aux fonctionnalités existantes, on peut relever ces innombrables disputes où la pratique du chant, censée assurer une meilleure socialisation, s'avère foyer de troubles et de conflits plus encore que de paix et d'entente. Bien sûr on pourrait répondre, ce que fait le livre, qu'il s'agit là somme toute d'une catharsis, et que toute paix sociale pour être telle a besoin d'un lieu où exprimer ses conflits latents pour mieux les canaliser ou les résorber . Mais il semble clair que la pratique du chant excède cette fonction cathartique, à tout le moins par le fait qu'elle met en jeu une discipline qui dispose d'une vaste autonomie lui permettant de résister aux tentatives de l'aligner sur des objectifs extérieurs. L'espace du chant a une cohérence qui lui est propre et qui va se mettre à dicter ses préceptes. Et c'est aussi à ce titre qu'on peut comprendre les disputes des chanteurs, sans entièrement les aligner sur l'ordre des oppositions ordinaires.

 

J'aimerais prendre pour emblème de cette autonomie le jour du Lundi dont l'auteur se demande :

Pourquoi est-ce le lundi qui est fêté et non un autre jour de la semaine ? Nul ne le sait et aucune raison liturgique ou historique ne semble pouvoir apporter de réponse. (58)

Cet écart du lundi apparaît creusé de l'intérieur même de la pratique du chant et figurer un pas de côté, un clinamen pourrions-nous dire (selon le vocabulaire d'une tout autre culture). À tout le moins ce Lundi figure la torsion de l'ordre liturgique sous la poussée d'une énergie exogène, plus proprement musicale.

Mais d'autres catégories inscrivent avec plus d'acuité l'existence d'une coupure, d'un bond hors du monde ordinairement réglé. Le mot peut-être le plus significatif est dans ce livre celui de transfiguration et il n'est que de voir les admirables photos qui parsèment son parcours pour en attester. Le visage transfiguré n'est plus celui du paysan, père de famille, attaché à sa communauté, à son sang et à son rang mais celui du chanteur en tant précisément qu'il se trouve, un moment, inventé par le chant auquel il participe, chanteur créé par le chant à l'émergence duquel il contribue en lui prêtant son corps. Derrière ce visage, la face familière s'estompe car il s'agit désormais d'un autre, non plus de l'homme lié à sa place et à ses calculs, mais un sujet nouveau, un être engendré par le chant et procédant désormais d'une autre loi. Le chant, pour tous ces gens, c'est aussi cela : l'existence d'un régime possible du sensible qui se détache de l'ordre réglé des liens et relations coutumières, qui institue sa discipline propre, ses exigences autonomes, et profile des conquêtes valant en soi et non plus pour d'autres.

De ce point de vue, l'existence de cette autonomie constituante du chant rend compte d'une partie de cette difficulté relevée par l'auteur à ce que dire et faire se recouvrent entièrement . Si en matière de chant on ne dit pas exactement ce que l'on fait, ni ne fait exactement ce que l'on dit, ce n'est pas uniquement pour ces raisons ordinaires de la vie des hommes qui font que ces derniers ne sauraient être transparents à eux-mêmes et que la conscience de soi ne saurait être la caractéristique du sujet moderne. C'est ici plus essentiellement parce que celui qui dit est toujours autre que celui qui a fait s'il est vrai que faire du chant, c'est devenir chanteur sous les lois propres du chant et donc autre que celui que l'on est lorsqu'on se prépare à revêtir l'aube de l'Oratoire. C'est que celui qui parle du chant n'est plus en train de chanter et qu'il est ipso facto redescendu de son mont Tabor, dépris de la transfiguration et retombé à son être ordinaire, à ses déterminations coutumières d'animal humain, qui parle et communique.

 

II.3

En tous ces points, je lis la confrontation de deux approches qui me semblent inconciliables. Dans la première, ce sont les hommes qui font le chant. Dans la seconde, c'est le chant qui prélève ses serviteurs et les invente à l'aune de ses exigences propres.

Si la première peut légitimement s'inscrire sous les catégories de culture et de sens, la seconde devrait alors s'inscrire sous celles d'art et de vérité, pour peu, bien sûr, qu'on entende les unes et les autres dans leur incompatibilité de plans, qu'on adopte l'idée d'un décrochage sans mesure entre deux sphères Pascal dirait entre deux ordres et sans que ceci ne nous impose pourtant de quitter le terrain d'un athéisme tranquille et d'un matérialisme de pensée.

Il me semble qu'une grandeur de ce livre tient à ce qu'il confronte l'une et l'autre de ces orientations, sans se laisser capter par celle qui bénéficie d'une hégémonie naturelle, du moins dans un livre d'ethnomusicologie .

Ce livre, finalement, me semble tourner autour d'un centre absent, que la conclusion de l'auteur laisse d'ailleurs deviner lorsqu'il nous raconte combien sa pratique de confrère, au coeur de l'Oratoire, a conduit à déqualifier ses positions savantes antérieures et combien vu de l'intérieur les choses lui sont apparues autres, tout à la fois plus intenses et plus volubiles, à distance d'une parole instruite et objectivante.

Il est pour moi extrêmement frappant que ce centre absent centre que je pourrais dire être la question d'un art musical universel, diagonalisant les particularités culturelles soit ici présenté comme agissant au coeur même d'une culture musicale dont on aurait pu penser, avant de lire ce livre, qu'elle aurait été uniquement vouée à reproduire les structures de parenté, de communauté, de sociabilité. Or voilà que loin d'être uniquement ce triste outil de distinction sociale dont un Bourdieu nous rabat les oreilles, croyant découvrir un nerf de la guerre quand il ne fait que phraser laborieusement ce que connaît tout un chacun, la musique apparaît apte à constituer un autre ordre, somme toute un de ces ordres de la pensée qui ne valent qu'en soi et pour soi, loin de toute fonctionnalité et de tout utilitarisme.

De ce point de vue, il me semble que nos confrères de Sardaigne auraient pu dire du chant ce que le mathématicien Jacobi écrivait des mathématiques :

" M. Fourier avait l'opinion que le but principal des mathématiques était l'utilité publique et l'explication des phénomènes naturels ; mais un philosophe comme lui aurait dû savoir que le but unique de la science, c'est l'honneur de l'esprit humain, et que sous ce titre, une question de nombres vaut autant qu'une question du système du monde. "

Pour nous musiciens, la musique est aussi affaire d'honneur de l'esprit humain, et une question d'intonation pour nous vaut tout autant qu'une question de sociologie ou d'organisation du monde. Il me semble que les confrères de Sardaigne en ce sens sont les confrères de tous les musiciens et que, loin d'être réduit à leur pré carré, à leur village, à leur coutumes, à leur culture, à leur gastronomie, à leur dialecte, leur chant vaut celui de tout autre en ce qu'il n'est tendanciellement normé par rien d'autre que lui-même et qu'en ce point les rites, codes, coutumes, habitudes sont déposés : non pas annihilés, mais tout simplement déqualifiés, rendus indifférents devant la quintina qui sort du corps sonore et enveloppe leur chant de son voile protecteur.

Ainsi cette culture , loin d'être repliée sur sa reproduction, configure un centre absent car au-delà d'elle. Que tel ou tel réfléchisse cet au-delà sous les traits d'une transcendance d'ordre religieux n'est pas ici essentiel. Ce qui importe, c'est que soit pointé un au-delà possible de la culture, de la reproduction sociale, de la distinction identitaire, et cela, c'est somme toute la musique comme art qui en cette affaire le porte et le matérialise.

Si le nom de cet écart de l'art musical par rapport aux déterminations culturelles et rituelles est ici celui de quintina, cinquième voix venant nommer un excès immaîtrisé, si le nom du lieu susceptible d'accueillir cet écart est celui de Lundi, alors il convient de mettre notre matinée de discussion et disputes musicales sous ces deux noms et, débaptisant notre Samedi d'Entretemps, de le renommer, en écart à toute caractérisation empirique, le Lundi de la cinquième voix.

Encore faut-il que nous ayons pour cela le ravissement d'une advenue singulière et inattendue. La descente de l'ethnomusicologie sur l'Ircam, ce lieu de la modernité technique, figurant l'écart escompté d'une " petite quinte ", il nous faut remercier Bernard Lortat-Jacob de nous en avoir fourni la grâce.