D'un conditionnement réciproque entre musique et philosophie

(Une lecture du livre d'Anne Boissière : Adorno. La vérité de la musique moderne)

 

Samedi 24 novembre 2001, IRCAM

François Nicolas

 

 

Le livre d'Anne Boissière nous invite à nous interroger sur la place d'Adorno dans la pensée musicale contemporaine. La thèse principale de l'ouvrage - Adorno est avant tout philosophe et ses interventions sur la musique relèvent principalement de philosophie - me semble de la plus grande importance. Réévaluer, à la lumière de cette thèse et de ce livre, l'apport proprement musical d'Adorno est une tâche restant devant nous. Je livre ici quelques réflexions élémentaires de méthode pour éclairer cette perspective.


­­­­­­­­

Adorno est à ma connaissance le seul philosophe du 20ème siècle qui ait été également compositeur, le seul philosophe d'envergure précisons, c'est-à-dire ayant déployé une philosophie propre (sa « dialectique négative ») et ne s'étant pas cantonné aux tâches, si nécessaires soient-elles, d'historien de la philosophie, de commentateur des philosophies l'ayant précédé. Ses compositions de jeunesse attestent d'un compositeur doué, aux prises avec les questions musicales de son temps. En ce sens Adorno ne rend rien à ses prédécesseurs les plus célèbres : Nietzsche au 19ème siècle et Rousseau au 18ème. Il est même sans doute le plus doué musicalement des trois.
Cette corrélation philosophie-musique ainsi singulièrement pratiquée par Adorno a cependant une portée générale qui peut s'indiquer par une double question :
1) De quelle manière une philosophie peut-elle être conditionnée par la musique de son temps ?
2) De quelle manière une philosophie peut-elle en retour conditionner la musique de son temps ?
Il est ici probable que musique conditionnant ainsi une philosophie et musique conditionnée en retour par cette philosophie ne sauraient être exactement les mêmes : si une philosophie est conditionnée par une oeuvre musicale, l'éventuel conditionnement en retour qu'exercera alors cette philosophie ne prévaudra guère sur cette même oeuvre car lorsqu'une philosophie conditionne la musique de son temps, c'est aussi que cette dernière est encore embryonnaire, ou n'a pas encore su constituer un champ suffisamment propre.
Dans le cas présent, celui d'Adorno, ceci indique que si la philosophie d'Adorno fut conditionnée par la musique de l'École de Vienne, cette philosophie a exercé son influence en retour sur la musique de l'après-guerre plutôt que sur celle de Schoenberg, Berg ou Webern.
J'inscris ce faisant les rapports entre musique et philosophie sous la catégorie du conditionnement. Je me place ainsi dans l'horizon de la philosophie développée par Alain Badiou pour lequel la philosophie ne peut se déployer que sous la quadruple condition qu'il existe des processus de vérité dans les sciences, dans les arts, dans la politique et dans l'amour.
Je ne suis pas moi-même philosophe ; je suis musicien : disons compositeur et musicien pensif. Il ne m'est d'autre rapport possible à la philosophie qu'en décidant sous quelle philosophie particulière m'inscrire. C'est donc à partir de cette proposition philosophique singulière que je me propose d'interroger moins la philosophie d'Adorno que ce que nous en dit Anne Boissière dans son livre, si didactique.

La philosophie d'Adorno peut être lue pour partie comme une tentative de mettre la philosophie sous condition de ce qui se passe en musique au tournant du 20ème siècle. En quoi les oeuvres de Mahler, Schoenberg, Berg et Stravinsky sont-elles en état de conditionner la pensée philosophique vivante ? Plus précisément, en quoi incitent-elles la philosophie adornienne à remodeler la dialectique héritée d'Hegel ? De quelle manière la philosophie doit-elle, peut-elle saisir le contenu de vérité de ces oeuvres en sorte d'en faire jouer les effets intra-philosophiques ? Le travail d'Adorno par rapport à Stravinsky et Schoenberg serait en ce sens analogue à celui de Nietzsche par rapport à Wagner et Bizet (1) ou de Rousseau par rapport à Rameau et la musique italienne...
Ceci présuppose, bien sûr, premièrement que ces différentes philosophies accordent aux oeuvres musicales qu'il puisse y avoir en jeu des « contenus de vérité », deuxièmement que ces « contenus de vérité » soient en état de requérir la philosophie, non seulement pour qu'elle les reformule dans le langage philosophique des concepts et non plus dans celui des idées sensibles mais aussi pour qu'elle reconfigure à partir d'eux un nouveau temps de la pensée.
Adorno nomme « dialectique négative » le nouveau temps de la pensée que prescriraient les oeuvres musicales mentionnées. Le caractère normatif de son point de vue philosophique est alors identifiable à son concept de « musique informelle » puisque ce concept désigne une musique à venir plutôt qu'une musique déjà là dont le philosophe n'aurait plus qu'à se saisir, avec ses outils conceptuels propres.
C'est en ce point que le conditionnement réciproque, ou biconditionnement, se dessine : si les oeuvres musicales de Vienne conditionnent la philosophie en exigeant d'elle une refonte de la dialectique hégélienne pour qu'elle arrive à se tenir à hauteur des nouveaux « contenus de vérité » produits par ces oeuvres, Adorno assume également un retour de cette « dialectique négative » sur la musique sous forme d'une prescription philosophique s'exerçant sur la musique, prescription qu'il nomme « musique informelle ». Ce double mouvement est également décelable chez nos deux autres philosophes compositeurs s'il est vrai que pour Nietzsche le nom propre Bizet désigne une prescription sur ce que devra être la musique de l'avenir plutôt que la saisie de ce qui serait entièrement déjà à l'oeuvre chez Bizet. Et de même pour Rousseau dans son rapport à la musique italienne. Il est d'ailleurs clair que son propre travail compositionnel vise à établir la musique que sa philosophie appelle de ses voeux plutôt qu'il ne la trouve déjà là, prête à configurer le temps.

Que se passe-t-il exactement dans ce conditionnement en va-et-vient ?

Je n'aborderai pas cette question dans tous les développements philosophiques qu'elle mériterait. D'abord je ne suis pas philosophe. Ensuite je n'ai pas fait à l'égard d'Adorno le travail qui permettrait d'avancer des réponses philosophiques satisfaisantes. Enfin, il s'agit d'épingler ainsi ces questions du point de la musique plutôt que de la philosophie, et ce au titre à la fois de mon identité subjective de musicien et de la nature particulière du lieu qui nous accueille, lieu musical et non pas philosophique.
Comment les questions précédentes sont-elles alors intelligibles à partir de leur versant musical ?

En ce point, le livre d'Anne Boissière nous est précieux, à nous musiciens. Il nous rappelle que les nominations rencontrées dans le discours d'Adorno (dialectique négative, contenu de vérité, musique informelle, etc.) sont des concepts philosophiques, non des catégories musicales ou musiciennes. Il ne faut donc pas prendre les livres qu'Adorno consacre à Mahler, à Berg, à l'alternative Schoenberg/Stravinsky comme étant à proprement parler des livres d'analyse musicale, des ouvrages d'un musicien pensif avançant les catégories aptes à réfléchir musicalement ces oeuvres. Anne Boissière nous rappelle que ces livres sont de philosophie et qu'à ne pas les prendre comme tels, on transforme indûment des concepts philosophiques en simples notions musicales, on confond le champ propre de la philosophie (avec ses enjeux, ses méthodes, ses références) et celui de la pensée musicienne (avec ses propres enjeux, ses propres méthodes, ses propres références). Bref, on ne fait plus ni travail philosophique, ni travail musicien. Ce point est une idée force de ce livre dont il faut relever le tranchant.
Il est malheureusement devenu trop fréquent, dans un certain discours musicologique, de citer à tout propos Adorno sans se soucier du statut philosophique des énoncés convoqués. On ne traite pourtant pas un concept philosophique comme on traite une notion musicienne. Pour ne donner qu'un exemple de l'importance des différentes positions d'énonciation pour un même énoncé, on peut voir que la même phrase toute simple « la musique est un art » n'a pas du tout le même contenu de pensée selon que cet énoncé est pris dans une énonciation musicienne ou philosophique.
· Pour un musicien, la musique ne se définit pas, n'a pas à se définir, et l'art en général n'existe pas comme tel : le musicien n'en a pas le concept ; pour lui il y a seulement une pluralité des arts. Pour le musicien l'énoncé « la musique est un art » indique que la musique relève d'un des arts possibles, non d'un simple phénomène culturel ; elle relève que la musique peut être une pensée sensible et pas seulement un reflet du monde, une simple opinion rendue sensible.
· Pour le philosophe par contre, énoncer que « la musique est un art » revient à inscrire le concept de musique sous celui philosophique d'art. Cela passe donc par l'établissement d'un concept de l'art et par une définition philosophique de la musique apte à inscrire la seconde sous le concept d'art. Par exemple, dans le champ de la philosophie d'Alain Badiou, cela pourrait donner quelque chose comme : « l'art est procédure faisant vérité du sensible, et la musique est cette procédure qui, opérant dans le champ de l'audible, produit des vérités ayant forme sensible de temps (musical) » (2).
S'il est assez clair pour tous que le vocabulaire adornien de dialectique négative, musique informelle, contenu de vérité, etc. est d'ordre philosophique et ne saurait tel quel se transposer dans le champ musical, la question est déjà moins claire à propos de notions qu'Adorno engage dans l'analyse concrète d'oeuvres musicales telles celles de percée, de variante ou de matériau mobilisées par exemple dans son travail sur Mahler. Il est pourtant assez habituel de rencontrer ces termes, prélevés dans le dispositif philosophique d'Adorno, et réinjectés tels quels dans un discours de type musicologique, termes alors dépourvus de consistance de pensée et servant de totem au discours musicologique pour indiquer à bon compte la modernité musicale.
Si l'on veut rompre avec ce pillage journalistique d'Adorno, et tout le livre d'Anne Boissière nous y invite, que faut-il faire ? Que peut-on faire d'Adorno si l'on est musicien, et non pas philosophe, si l'on est conscient à la fois de l'abîme existant entre ces deux disciplines de pensée et de leur possible conditionnement réciproque ?
S'il est des usages musiciens qui paraissent impossibles à établir - ceux par exemple des concepts philosophiques dialectique négative, contenu de vérité, etc. - , faut-il en dire autant pour des concepts plus concrets tels ceux de percée, de variante, de matériau, et même de musique informelle ?
Ou encore : si le musicien, en un sens, n'a que faire du conditionnement musical s'exerçant sur la philosophie - c'est là affaire somme toute de philosophe -, il ne peut cependant rester indifférent aux effets en retour que cette philosophie ainsi conditionnée peut lui renvoyer. Si un philosophe de l'envergure d'Adorno et de sa qualité musicienne énonce quelque chose comme : « le contenu de vérité des oeuvres musicales modernes se configure sous le schème d'une musique informelle à venir », comment un musicien pensif, ouvert donc au fait que « la musique ne pense pas seule », pourra-t-il ignorer cette énonciation et comment pourra-t-il (devra-t-il ?) se laisser conditionner par elle ?
Anne Boissière ne s'engage pas exactement dans cette voie. Elle restaure la consistance philosophique propre du discours adornien sans pour autant prendre position sur un effet en retour de la philosophie sur la musique.

Essayons donc d'esquisser ici un pas de plus et de nous demander comment une philosophie donnée peut conditionner un art, la musique par exemple ?
1) Elle peut d'abord aggraver ce qui existe déjà et qu'elle saisit. Heidegger disait que la philosophie aggrave toujours les problèmes dont elle s'empare. Ce faisant la philosophie va priver l'artiste concerné d'une certaine légèreté, de cette innocence nécessaire à son propre dynamisme créateur. Le mettant sous les feux de la rampe philosophique, elle disperse les zones d'ombre constituant les trésors mêmes du processus créateur. La philosophie affecte ici l'artiste, non l'oeuvre d'art. Elle peut ainsi stériliser le musicien comme l'oeuvre de Sartre Saint Genet a pu stériliser le Genet romancier, et l'orienter vers une séquence purement théâtrale de son oeuvre littéraire, ou comme l'intérêt déclaré d'un Heidegger a peut-être accentué la pose pontifiante d'un René Char.
2) Quand la philosophie saisit la musique pour en profiler l'avenir, affecte-t-elle et de quelle manière les musiciens ?
Si l'on met de côté la part du discours musicologique universitaire et académique qui va proliférer sur cette nouvelle ressource par gloses et commentaires, si l'on exclut également les musiciens épigonaux qui vont appliquer ce qu'ils prennent pour un programme musical - entreprise stérile, cela va sans dire -, que reste-t-il ?
Il faut d'abord bien voir que la musique ne saurait être conditionnée par la philosophie comme celle-ci l'est par celle-là. La musique ne saurait saisir un « contenu de vérité » dans une oeuvre philosophique et profiler à partir de là un nouveau temps de la pensée musicale, ne serait-ce que parce que la philosophie ne produit pas par elle-même de vérités et se contente de saisir celles que produisent les disciplines qui la conditionnent. Que la philosophie puisse conditionner la musique ne saurait donc se dire au même sens que celui par lequel on déclare que la musique peut conditionner la philosophie.
Une première dissymétrie peut se formuler ainsi :
- ce qui de la musique conditionne la philosophie, ce sont les oeuvres musicales ;
- ce qui de la musique est conditionné par la philosophie, ce sont les musiciens.
On le voit très clairement dans notre cas Adorno : Anne Boissière nous rappelle que ce sont les oeuvres musicales qui importent dans la philosophie d'Adorno, mais on voit bien que ses propres concepts philosophiques influencent en retour des discours de musiciens, non à proprement parler des oeuvres musicales.

D'où deux propositions sur le contenu possible de ce conditionnement en retour de la philosophie sur les musiciens.
1) Le musicien porte un souci singulier : celui d'inscrire le monde de la musique dans un rapport minimal aux autres mondes de la pensée. Le musicien n'appartient au monde de la musique que temporairement ; et, régulièrement, quand la musique s'arrête, le musicien se trouve déjeté hors de ce monde. En ce sens, l'individu musicien n'est pas autant étranger au souci philosophique (celui d'une compossibilité entre les différentes vérités) que peut l'être l'oeuvre musicale. Si le propre de la philosophie est bien de configurer un temps de la pensée (et un temps n'est pas un monde mais bien ce qui peut contemporanéiser plusieurs mondes), alors les catégories de pensée que la philosophie fournit peuvent être des outils pour le musicien : des outils pour penser son mode propre d'inscription dans le monde de la musique, son mode propre d'articulation à ce monde, lui qui, comme individu, se trouve quotidiennement écartelé entre le monde de l'art et les autres.
2) Le travail propre du musicien est aussi et surtout de projeter, imaginer, préfigurer l'oeuvre à venir, cette oeuvre qui ultimement l'aura fait plutôt qu'il ne l'aura faite mais qui, pour l'instant, prend la forme d'un vis-à-vis fantomatique. Tout musicien est ainsi face à l'oeuvre à venir, à créer, à composer, comme l'est Madame Muir devant le fantôme du capitaine Gregg dans le film de Mankiewicz. Et c'est en ce point que la philosophie peut conditionner son travail : en l'aidant à faire apparaître les contours d'un fantôme, comme dans le film le portrait du capitaine aide Gene Tierney à constituer un vis-à-vis fécond avec le fantôme.
En cette acception, la philosophie conditionnerait le musicien (non l'oeuvre) en lui configurant des fantômes avec lesquels dialoguer le temps d'un processus de création, le temps que ces fantômes s'évanouissent derrière une nouvelle existence concrète devenue de part en part musicale. Et tel est bien d'ailleurs le cas dans le film mentionné puisque les échanges avec le capitaine fantomatique débouchent sur l'écriture d'un livre... (3)
« Musique informelle » serait ainsi pour le musicien le nom d'un fantôme qui lui est offert, candidat au dialogue, spectre venant visiter l'atelier du musicien pour l'appeler au travail d'un échange et d'une confrontation. Le musicien s'entretiendrait ainsi avec la philosophie d'Adorno comme on pourrait le faire avec un fantôme venant visiter les pièces de son atelier.
Ainsi là où la philosophie saisit le contenu de vérité d'une oeuvre, s'en empare sous la forme de concepts nommant un nouveau temps de la pensée, le musicien, à l'inverse, dissout les concepts philosophiques en de simples notions musicales, cet échange n'étant destiné qu'à se consumer et dilapider par là une énergie de pensée apte à l'émergence de l'oeuvre. Bref, le concept philosophique serait pour le musicien le carburant transmuant les catégories musiciennes en opérations proprement musicales et entretenant leur mise à l'oeuvre.


­­­­

Anne Boissière se tient en amont de ces questions. Elle nous rappelle la cohérence philosophique des écrits d'Adorno sur la musique, et, je l'ai mentionné, apprécier les effets intraphilosophiques de ces écrits est hors de mon propos. Mais quand un musicien se trouve confronté à cette restauration de la dignité philosophique des concepts, quand on lui retire des rayons musicologiques de sa bibliothèque des livres en lui rappelant qu'ils appartiennent en fait aux rayons philosophiques, doit-il pour autant se désoler d'une perte pure et simple ou n'est-il pas plutôt en droit de dire: « Ne dissipons pas ce fantôme car il n'est pas nécessairement appareillage pédant, lest académique et boursouflure universitaire, mais il peut également être ce vis-à-vis évanescent avec lequel échanger ces idées qui mènent à une pensée véritablement musicale : celle qui sera à l'oeuvre. »
Anne Boissière, restaurant la dimension proprement philosophique des écrits musicaux d'Adorno, nous invite d'autant plus à les relire en musicien, en interrogeant leur transparence plutôt que leur consistance, en les traversant de nos catégories de musiciens plutôt qu'en éprouvant leur résistance. Ce livre, reconstituant la cohérence philosophique d'Adorno, nous en restitue paradoxalement, à nous musiciens, le contenu musical fantomatique. Autant dire qu'il incite le fantôme d'Adorno à venir visiter à nouveau les ateliers contemporains des musiciens, particulièrement des compositeurs, et donc singulièrement ces murs de l'Ircam. Peut-être est-ce là une incitation à prolonger cette séance pour examiner dans le détail les effets de certaines philosophies sur la musique contemporaine.
Merci pour ce livre qui nous y incite.


Notes
(1) On peut tenir, il est vrai, que Nietzsche étant anti-philosophe - ce que n'est pas Adorno -, son rapport à l'art comme à la politique est d'une nature tout à fait particulière (voir les écrits sur ce point d'Alain Badiou). Je ne rentrerai pas ici dans ces détails plus proprement philosophiques.
(2) Je ne cite pas ici Badiou mais avance une fiction philosophique, envisageable dans son dispositif de pensée.
(3) Que ce livre consiste précisément dans les Mémoires du capitaine ne serait pas sans résonance si l'on voulait filer plus avant notre métaphore...