LĠhtrophonie
musicale : vers une terza pratica ?
Raisonances avec le pome Douze (1918) dĠA. Blok
(Sminaire
Babel, 4 octobre 2014)
Franois
Nicolas
Vido : http://youtu.be/S_pbPATWYRk
Cadre
gnral
Comment
continuer lĠart musical en assumant les impasses cratrices de la modernit au
XXĦ sicle ?
Une orientation gnrale sĠaffirmant
entre deux fronts :
Ni table rase
Ç rvolutionnaire È, ni continuit conservatrice mais extension par
adjonction (le paradigme en est prlev dans la mathmatique : extension
algbrique par Dedekind et extension gnrique par Cohen). Ni abandon ni
conservation donc, mais refonte globale [1]
lĠpreuve dĠune adjonction relativement [2]
htrogne. Ni nihilisme actif (ultramodernisme :
jeu technologique), ni nihilisme passif (traditionnalisme :
enjeu narratif) mais raffirmation dĠun possible largissement du monde-MusiqueÉ
Hypothses
musicales de travail
1.
Il sĠagit dĠadjoindre la musique un rassemblement
de prosodies linguales, diversifies en plusieurs langues, quĠon propose
dĠappeler un chÏur bablien.
Adjoindre nĠest pas simplement ajouter : cĠest incorporer (en lĠoccurrence
musicaliser ces prosodies sans raboter leur spcificit linguale).
On prsentera un exemple concret de ce
type de travail sur le pome Le condamn
mort de Jean Genet.
2.
LĠextension musicale souhaite se constituera
sous le nom gnrique dĠÇ htrophonie È.
Il sĠagit de reprendre le mme type de
geste que celui que Monteverdi, sous le nom de secunda pratica, a engag au dbut du XVIIĦ,
refondant lĠart musical par adjonction de la mlodie tonalement
harmonise lĠancienne polyphonie modalement
contrepointe.
DĠo lĠide de placer cette entreprise
sous le signe dĠune possible terza pratica. [3]
Htrophonie
QuĠappellera-t-on
ici Ç htrophonie È ?
On
la distinguera dĠune part de la polyphonie
classique (si les deux partagent une pluralit de voix, lĠhtrophonie traite
de voix disparates [4]),
dĠautre part du collage post-moderne
(le montage htrophonique ne se fait
pas par prlvement de parties-voix pralablement existantes, en particulier
dans les polyphonies antrieures). DĠo la formalisation de ce rseau
dĠoppositions dans lĠhexagone suivant :
Principe
de rduplication
Une
htrophonie, pour tre vraiment htrophonie, doit se
Ç rdupliquer È (au sens que Kierkegaard donne cette notion).
Exemples de rduplication
Chez Pascal : parler humblement (et
non pas orgueilleusement) de lĠhumilit, douter du scepticisme quĠon prne (et
non pas le prcher dogmatiquement) [5].
Chez Kierkegaard : soutenir
Ç un rapport absolu lĠabsolu È (et, corollairement, relativiser le
relativisme - plutt que lĠabsolutiser : voir Auguste Compte posant
Ç tout est relatif, et cela seul est absolu È) ; Ç veiller
au ÒcommentÓ È (sans dissocier donc forme et contenu [6]).
Mais galement : penser de manire
contemporaine le contemporain [7],
noncer lĠnonciation [8],
etc. [9]
LĠhtrophonie
doit donc rdupliquer son htrognit dĠassemblage lĠintrieur de chacune
de ses voix, lesquelles devront ainsi relever dĠun type nouveau –
Ç htrophonique È - de voix :
une voix intrinsquement composite.
Corollaire :
lĠhtrophonie musicale va se jouer tout autant dans la succession
chronologique que dans la superposition synchronique.
Prcision
Le
rythme (dont, au demeurant, la posie fait tout autant que la musique grand cas [10]),
et corollairement le geste ou le phras,
ne suffit pas Ç faire musique È : pour Ç faire
musique È, il faut dialectiser le rythme au phnomne musical spcifique
des hauteurs dfinies (qui configure la matire mme de la musique, tout de
mme que la langue configure la matire mme de la posie [11]).
Il sĠagira donc que lĠhtrophonie envisage soit bien une refonte globale des
anciennes catgories harmonico-mlodiques (voire thmatiques [12])
et pas seulement du travail rythmique et gestuel.
Deux
questions consquentes
1. QuĠest-ce
que lĠhtrophonie dĠune linarit disparate ?
Pour aborder ce point, on se tournera
vers le pome Douze (1918)
dĠAlexandre Blok [13]
dont on analysera la dimension htrophonique (diversit de parlers corrle
une diversit dĠnonciations) [14].
On prendra ainsi mesure du fait que la proposition htrophonique peut
sĠavancer sous deux modalits duales : musicaliser les langues potiques,
ou potiser Ç lĠesprit de musique È (Blok [15]).
2. QuĠest-ce
quĠun montage htrophonique entre
voix htrophoniques ?
La refonte htrophonique suggre que
composer sĠy annonce sous le signe de lĠentrelacement [16]
plutt que du contrepoint, du nouage plutt que de la construction, de la
tresse plutt que de lĠaccolage, dĠun travail sur les parties musicales plutt
que sur les lments, et - en un sens mtaphorique - dĠun humour plutt que
dĠune ironie.
On prsentera ici une premire tape de
ce travail de longue haleine : Didon
& ne [17].
Il
en va somme toute de Ç justice È [18]É
SĠagissant
de composer une compatibilit musicale
entre identits diverses et relativement autonomes (il ne sĠagit pas de les
Ç intgrer È ou de les Ç assimiler È), de crer donc un
espace commun coordonn et dirig plutt quĠuniformis ou homognis, on
rapprochera lĠhtrophonie vise du paradigme idologico-politique dĠune justice (htrophonique) largie plutt
que dĠune fraternit (polyphonique) restreinte [19].
Cadre gnral
Comment continuer lĠart musical en
assumant les impasses cratrices de la modernit au XXĦ sicle ?
Continuer ?
Triple tentation : fuite en avant dans la technologie, retour en arrire
et refuge dans une tradition, abandonner !
Remarque
1 – Abandonner nĠest pas une formule rhtorique : il y a toujours le
choix dĠabandonner la musique, la composition musicale (voir les longs silences
de bien des compositeurs, commencer, la fin de leur vie, par ceux de
Rossini, Ives ou Sibelius – mais il y aussi le suicide, exemplairement
– si je puis dire – celui de Bernd Alois Zimmermann aprs son Requiem pour un jeune pote).
Remarque
2 - Les bifurcations subjectives sont toujours triples : on peut rpondre
Ç oui È, Ç non È, ou rpondre par un silence !
DĠo
lĠintrt pour moi de lĠhexagone des oppositions, fait du croisement de deux
triangles.
Ces
trois Ç rponses È constituent pour moi une manire de cder mon
dsir de musique : je compose parce que lĠoffre de musique contemporaine
ne me satisfait pas ; je nĠy trouve pas la musique que je souhaiterais
entendre. Je compose pour ajouter une musique au monde-Musique contemporain.
CĠest
en mme temps paradoxal car jĠcoute trs trs peu la
musique que jĠai dj compose ! JĠaime - en gnral
(pas toujours !) – la musique que jĠai compose mais je ne mĠy
complais pas comme je peux me complaire dans la musique de Jean-Sbastien BachÉ
La
musique que jĠai dj compose me sert essentiellement de tremplin pour en
ajouter une autre, pour continuer, pour tracer un sillage, pour dessiner une traverse
musicale du monde contemporain.
Ne
pas cder implique de produire de nouvelles affirmations : la simple
Ç rsistance È nĠy suffit aucunement.
On
touche ici aux limites idologico-politique du thme de la rsistance. Et pour
rsister durablement, il ne suffit pas dĠun refus ; il y faut un refus
motiv par la conviction dĠun autre possible. Sinon, la rsistance conduit, tt
ou tard, une rsignation.
LĠimpulsion
de rsister lĠabjection est premire, primaire. On ne peut sĠen tenir l. Il
y faut ensuite le travail dĠune affirmation : affirmation dĠune
possibilit que lĠabjection laquelle on rsiste veut prcisment annuler.
Le
point capital est dĠaffirmer de nouveaux possibles : on nĠest pas condamn
au monde tel quĠil volue et lui rsister pour retarder les consquences
dsastreuses de cette volution.
On
nĠest pas condamn sortir du monde-Musique
(travail sur le son) ou grer son acadmisation (technologique ou
traditionnaliste).
Je
dirai, de manire un peu provocatrice, et je demande mes amis du jazz de mĠen
excuser dĠavance : le monde-Musique
nĠest pas le continent du jazz, lequel, mon sens, est mort au cours des
annes 70 quand son grandiose parcours a rejoint celui de lĠimprovisation
contemporaine, comme un fleuve-affluent en rejoint un autre, plus vaste, pour
sĠy perdre. Soit un parcours plein de pripties du Blues et du Gospel au Free
Jazz dont les derniers leaders – ceux prcisment qui ont ralli lĠart musical
contemporain – sĠappellent Art Ensemble of Chicago, Antony Braxton, Muhal Richard Abrams, Ed Blackwell et Cecyl TaylorÉ
JĠaime
distinguer 6 types de subjectivit face au type suivant de question :
comment ne pas cder sur un dsir quand lĠide, au principe du dsir en
question, est confronte la disparition de lĠÇ objet È qui la matrialisait
dans une situation donne ?
Prenons
ici lĠexemple dĠun dsir que je dirais de rvolution
– mais lĠon pourrait interprter ce mme formalisme propos de lĠide musique ou posie ou thtre T/t,
etc.
Je
note R lĠide de rvolution et r une rvolution concrte envisageable dans une
situation donne. JĠappelle d(R) lĠide de rvolution tenue pour dsirable et
je note /r sa contemporanit avec une situation rvolutionnaire concrte r.
Soit
donc un prsent rvolu, devenu donc pass, qui fut structur par cette ide
dsirable de Rvolution d(R) dveloppe en prsence de rvolutions alors
effectives- je formalise cela : d(R)/r.
Songez
la situation subjective en 68, lĠpoque o les rvolutions semblaient
lĠhorizon gnral de lĠmancipation politique, commencer par la Rvolution
culturelle dans le temple mme du Ç socialisme È (cĠest--dire
toujours du Ç socialisme dĠtat È car Ç socialisme È est
une catgorie de lĠtat quand Ç communisme È est une catgorie de la
politique), cĠest--dire en Chine.
Ma
question est : que devient ce dsir en lĠabsence ultrieure de toute
perspective rvolutionnaire, quand Ç r È a disparu), quand
lĠobjet-rvolution fixant le dsir de Rvolution sĠest effac de la
situation ?
Et
je distingue partir de l 6 modes de subjectivation :
-
deux figures du nihilisme (selon quĠil est actif
ou passif) : lĠune prne la
renonciation toute ide, tout dsir (avec, en gros, lĠargument
suivant : ce genre de dsir est dangereux ; on ne saurait affirmer
sans courir de risues extravagants ;
rsignons-nous la double ngation, la logique du Ç moindre mal È
plutt quĠ celle dĠun Bien), et lĠautre prne quĠil nĠy a de dsir soutenable
que de rien, un rien qui ne saurait en effet tre mis lĠpreuve de sa
prsence ou de son absence concrtes (ici, il faut un dsir – contre le
bouddhisme ou lĠataraxie du premier – mais il ne peut y avoir que de
dsir du rien comme tel : puisquĠon ne va pas clamer Ç Vive le
moindre mal ! È, on clamera : Ç Viva
la muerte ! È)
-
trois figures subjectives qui, pour moi, sont
des menaces subjectives (je ne me sens pas personnellement menac par les
deux nihilismes proprement
dits) : la nostalgie, la mlancolie et lĠactivisme ; la nostalgie sĠafflige de la permanence de
lĠancien dsir en lĠabsence mme de tout objet susceptible de le matrialiser ;
la mlancolie est ronge par lĠextinction dĠun dsir ancien face un objet
toujours prsent mais ayant perdu tout son charme et ses promesses ;
lĠactivisme, lui, nĠa de cesse de substituer un objet lĠautre pour mieux
prserver la flamme menace de sĠteindre sans contrepartie –
lĠactivisme consomme et brle dĠincessants nouveaux objets pour ne pas avoir
rinterroger le vieux dsir, cĠest--dire dans notre exemple la vieille ide de
rvolution ;
-
reste alors une figure, que jĠappelle ici celle
de la refonte, qui dsigne la
disposition que je mĠattache clarifier et suivre dans la priode : celle
dĠune refonte de lĠancienne ide R en une nouvelle ici note ı (pour dsigne,
dans ce contexte, la politique). Il sĠagit ici dĠengager une refonte de
lĠancienne ide pour en dgager une potentialit plus vaste jusque-l inaperue
ou mal rehausse. Il sĠagit de passer une nouvelle ide, un nouveau dsir
– celui de politique mancipatrice plutt que celui de rvolution –
lequel dsir aura certes sĠprouver au contact des nouvelles ralits mais ne
sera plus troitement dpendant, dans son existence mme, de lĠexistence ou non
de tels objets concrets – en lĠoccurrence de telle ou telle rvolution
(victorieuse, prolonge, etc.).
Je
ne compte pas ici deux figures subjectives supplmentaires, quĠil faudrait
faire figurer orthogonalement en son centre : le retrait (la disparition,
le suicideÉ) et la trahison (la dnonciation du dsir initial
comme tratologie).
Mon
point est donc ici : refondre le dsir de musique selon quelle mutation
endogne de son enjeu, en vitant
-
le nihilisme passif : le jeu musical sans
enjeu (on continue car il faut bien vivre) ; exemples : composer
encore des fugues, mais bien sr pas tonales (ce serait l du nihilisme passif,
traditionnaliste : exercices dĠcole) – voir Hindemith et
Chostakovitch ; jouer les standardsÉ
-
le nihilisme actif : lĠenjeu serait la
destruction systmatique de la musique (de son criture propre, de ses instruments
propres) par promotion dĠartefacts vides de pense (la performance, la simple
notation, lĠordinateur, les nouvelles technologies, etc.).
-
la nostalgie de la musique classique (comment ne
pas la comprendre ? Il faut sĠen mfier comme il convient de se mfier de
ses propres dfauts, ceux-l mme quĠon sait ineffaables) ;
-
la mlancolie dĠun dsir musical teint face aux
chefs dĠÏuvre musicaux existants (cĠest la voie dpressiveÉ) ;
-
lĠactivisme dĠun remplacement indfini des objets :
se prendre de passions fugaces et rptes pour tel ou tel nouveau courant (le spectralisme, la saturation, la dconstruction lachenmanienne, la performanceÉ), traverser une poque par
ricochets successifs la surface des diffrentes situations rencontresÉ
Pour
continuer, il faut donc transformer une affirmation (celle que jĠai formalise
ici par la transformation de R en ı et que jĠai nomme refonte).
Musicalement,
je propose de transformer lĠaffirmation polyphonique en affirmation
htrophonique.
LĠessentiel,
comme on va le voir, est quĠil ne sĠagisse pas dĠune pure et simple
substitution (ce serait la logique de lĠactivisme) mais dĠune transmutation qui
nĠannule donc pas ce qui est subsum (lĠide de politique nĠannule pas celle de
rvolution mais la surmonte ; comme on va le voir, lĠide dĠhtrophonie
ne se dresse pas Ç contre È celle de polyphonie mais lĠenveloppe par
le haut).
Une orientation gnrale sĠaffirmant entre deux fronts :
Ni
table rase Ç rvolutionnaire È, ni continuit conservatrice [20]
mais extension par adjonction (le paradigme en est prlev dans la
mathmatique : extension algbrique par Dedekind et extension gnrique
par Cohen). Ni abandon ni conservation donc, mais refonte globale [21]
lĠpreuve dĠune adjonction relativement [22]
htrogne. Ni nihilisme actif (ultramodernisme :
jeu technologique), ni nihilisme passif (traditionnalisme :
enjeu narratif) mais raffirmation dĠun possible largissement du monde-MusiqueÉ
Adjonction-extension ?
Cf. expos mamuphi du 5 avril 2014.
Le
travail en jeu peut sĠanalyser comme constitution progressive dĠun rseau
coordonn de mots, puis de noms, enfin dĠnoncs.
Tout
cet expos sur les vertus extensives de lĠadjonction peut ainsi se concevoir
comme lĠadjonction au discours du musicien pensif dĠun seul mot : le mot htrophonie, en tant que ce mot peut nommer quelque nouvelle possibilit et autorise dĠnoncer sur la future extension vise.
Pour penser une
terza pratica par adjonction et extension,
mthode, la mthode propose estÉ
dĠadjoindre un mot
au discours du musicien pensif: le mot htrophonie
puis dĠen tirer
toutes consquences de nomination et dĠnonciationÉ
(soit une logique de rduplication puisquĠil sĠagit de penser
lĠadjonction par une adjonction particulire!)
Remarque :
je travaille sur ce type dĠextension par adjonction trs exactement depuis
lĠanne 2000 car jĠai commenc alors par travailler sur lĠide de Time-phonie pour Duelle : adjonction de la Time et effet dĠextension vis sur
lĠancienne polyphonie.
CĠest
donc une problmatique dj ancienne, qui prend ici un nouveau tourÉ
Voir
la note 2 : importante.
QuĠen
est-il aussi de la question de lĠadjonction-extension en architecture ?
JĠen parlais rcemment avec lĠun de mes fils qui est architecte et qui
travaille sur les questions dĠextension de btiments donns : comment la
greffe architecturalement pense dĠune nouvelle Ç extension È modifie-t-elle
la composition dĠensemble, rclaire-t-elle lĠancien
btiment, son site, etc. ?
Voir
la note 3 : importante
Adjoindre,
ce nĠest pas seulement ajouter, et ce nĠest ajouter nĠimporte quoi. Il sĠagit
toujours plus ou moins dĠadjoindre une nouvelle espce dans un mme genre.
De
ce point de vue, ajouter un film ou des images la musique nĠest sans doute
pas une adjonction susceptible dĠengager une extensionÉ
Pour
nous : adjoindre de nouvelles espces de voix – dĠo lĠimportance
sur laquelle on va revenir avec notre principe de rduplication :
lĠhtrophonie ne saurait se limiter de nouveaux types dĠassemblage dĠanciens
matriaux (on dira : lĠhtrophonie nĠest pas un collage).
Hypothses musicales de travail
3.
Il sĠagit dĠadjoindre la musique un
rassemblement de prosodies linguales, diversifies en plusieurs langues, quĠon
propose dĠappeler un chÏur bablien.
Adjoindre nĠest pas simplement ajouter : cĠest incorporer (en lĠoccurrence
musicaliser ces prosodies sans raboter leur spcificit linguale).
On
prsentera un exemple concret de ce type de travail sur le pome Le condamn mort de Jean Genet.
Attention :
jĠentre ici dans mes hypothses de travail. Je ne prescris nullement que
toute htrophonie susceptible dĠengager une terza pratica doive tre de ce
type !
Exemple
du pome de Genet. Lecture Ç ordinaire È, puis lecture
Ç musicalement rythm et mtr È.
LĠenjeu
est subtil : le pome doit prserver sa prosodie – sa phonologie
tant phontique que de phras – mais celle-ci doit apparatre Ç musicalise È.
Ç Musicalis È ici ne veut pas dire Ç intgr È ou
Ç assimil È (comme le rpublicanisme colonial de ce pays tend
lĠimposer : Ç pas de foulards, et on doit voir votre
nombril ! È). Ç Musicalis È veut dire Ç incorpor È
ce qui fait musique : ici, le rythme mtr.
Du
ct de la musique, lĠimpratif catgorique est de rendre musicalement justice
lĠautonomie littraire du discours accueilli. Autonomie relative, comme le
plus souvent, mais autonomie !
4.
LĠextension musicale souhaite se constituera
sous le nom gnrique dĠÇ htrophonie È.
Il
sĠagit de reprendre le mme type de geste que celui que Monteverdi, sous le nom
de secunda pratica, a
engag au dbut du XVIIĦ, refondant lĠart musical par adjonction de la mlodie tonalement harmonise lĠancienne polyphonie modalement contrepointe.
DĠo
lĠide de placer cette entreprise sous le signe dĠune
possible terza pratica. [23]
Voir
ma confrence de Belgrade (note 4).
Ici
sĠouvre une vaste tche : rinterprter, comme je le propose, la secunda pratica de
Monteverdi (dbut du XVIIĦ) comme une adjonction-extension.
LĠhypothse
est ici : adjonction dĠune mlodie dĠun type nouveau (Ç tonalement harmonise È, ce qui suppose bien sr
lĠinvention de la tonalit, effective la fin du XVIĦ) qui gnre une extension
de lĠancienne polyphonieÉ
JĠai
esquiss comment on peut suivre la composition de cette adjonction-extension en
suivant fil gnral propos : cration de mots, puis de noms, enfin
dĠnoncs (bien sr mots, noms et noncs proprement musicaux – et non pas musiciens).
Laissons
aujourdĠhui cela pour nous concentrer sur nos tches en matire de terza pratica.
Htrophonie
QuĠappellera-t-on ici
Ç htrophonie È ?
On
la distinguera dĠune part de la polyphonie
classique (si les deux partagent une pluralit de voix, lĠhtrophonie traite
de voix disparates [24]),
dĠautre part du collage post-moderne
(le montage htrophonique ne se fait
pas par prlvement de parties-voix pralablement existantes, en particulier
dans les polyphonies antrieures). DĠo la formalisation de ce rseau
dĠoppositions dans lĠhexagone suivant :
Rappel
de cette formalisation hexagonale : 4 types de relations ; 3
dĠopposition (donc de Ç ngation È), 1 dĠimplication.
En
rouge, lĠopposition ou ngation classique (alternative).
En
bleu, lĠopposition ou ngation intuitionniste (incompatibilit).
En
vert, lĠopposition ou ngation paraconsistante (coexistence).
En
noir, lĠimplication ou infrence (affirmation subalterne).
Le
modle le plus simple de cette formalisation thorique est avec {<, >, =}
en bleu et {², ³, } en vert
LĠide
ici est que :
-
ce que la polyphonie exclut absolument, cĠest
lĠexistence dĠune htrognit entre ses Ç voix È, cette
htrognit mme que partagent htrophonie et collage ; la polyphonie
suppose une homologie de ses voix – elles peuvent tre hirarchises (la
basse continue des fondamentales, la mlodie de la voix suprieure, les deux
voix intermdiaires qui compltent le tissage de la matire harmonique) mais
elles sont de facture homogne (elles rpondent au mme critre quand ce
quĠest une voix) ;
-
ce que le collage exclut absolument, cĠest que
ses diffrentes composantes (ou parties) puissent tre subsumes comme Ç voix È
diffrentes dĠun mme ensemble, cette notion mme de Ç voix È que
partagent polyphonie et htrophonie.
QuĠest-ce
alors que lĠhtrophonie exclurait absolument, qui serait cela mme que
partagent collage et polyphonie ?
JĠavais,
dans un premier temps (voir lĠannonce de cette sance), inscrit Ç parties communes È, pour indiquer
que les diffrentes parties dĠune polyphonie ou dĠun collage partagent, chacunes de leur ct, un commun ; mais ce nĠest pas
entirement satisfaisant.
Je
pourrais inscrire Ç univocit È
pour indiquer
á
quĠune polyphonie ou quĠun collage sĠavance dans
lĠvidence univoque de leur identit globale de polyphonie ou de collage :
il est facile de trancher sĠil sĠagit de lĠun ou de lĠautre. Il ne lĠest plus
du tout en matire dĠhtrophonie : Sinfonia de Berio est-il une
htrophonie ? Plus gnralement les pratiques italiennes des annes 60 : Nono, Maderna... et
surtout Brio et CalvinoÉ (Frdric
Maintenant) ?
á
que la manire dont lĠhtrophonie peut faire un est
toujours problmatique : lĠun de la polyphonie est lĠun de
lĠhomogne ; lĠun du collage est lĠun de lĠhtrogne, aussi nettement
compt-pour-un que ne le fait la mathmatique par ses parenthses : {un
cheval, une table, une lettre, une figure} pose un ensemble. On pourrait ici dire que lĠhtrophonie chappe au
fameux principe de Leibniz (pour quĠil y ait un tre, il faut dĠabord quĠil y ait un tre), quĠil est toujours prilleux de dcompter
Ç une È htrophonie, quĠil est plus concevable de penser quĠil y a de lĠhtrophonie dont une Ïuvre
donne va matrialiser Ç une figure È et en dcouper Ç une
tranche ÈÉ
Je
pourrais galement inscrire ici Ç non rduplication È (au sens que
lĠon va donner ce terme) sĠil est vrai que le collage ne rduplique
pas ses Ç noncs È dans sa position dĠnonciation – le collage
travaille par prlvements . dans
des images ordinaires, non dans de prcdents collages (chaque partie nĠest pas
dj en elle-mme un collage). Mais quĠen est-il exactement de la
polyphonie ? Une voix de la
polyphonie peut-elle dj tre par elle-mme une voix polyphonique (au sens de
la voix fusionnant 2 en 1 quĠon trouve chez Bach, Mozart, Schumann, SchoenbergÉ [25]) ? Je ne le pense pas !
Peut-tre
vaut-il mieux pour le moment garder ce sommet sans nom (dĠo le x) : lĠenjeu de ce travail tant
prcisment dĠarriver dgager le nom qui convient, sachant quĠil y en aura
peut-tre plusieurs selon le type dĠhtrophonie constitue.
Notons
dĠailleurs que le sommet Ç O È de lĠhexagone A-E-I-O-U-Y est
classiquement celui qui se trouve sans
nom dans les langues usuelles (voir ce que nous en avait dit Jean-Yves Beziau le 5 novembre 2011) : cĠest une notion qui
ncessite le plus souvent une priphrase (avec ngation) car il nĠy a pas de
mot simple pour la nommer – par exemple la notion du Ç pas
tous È (aucun ou quelques-uns mais pas tous) si lĠon part de lĠopposition
intuitionniste tous ou aucun (le troisime terme tant alors quelques-uns mais pas tous) ; mais
galement ne pas dire (O) qui nĠest
pas taire (E), ne pas montrer (O) qui nĠest pas cacher (E)É
Principe de rduplication
Je
propose ce principe. Il ne va pas de soi. On peut ne pas le retenir.
Je
suis ici engag dans la constitution intellectuelle et la composition musicale
dĠune forme particulire dĠhtrophonie.
Une htrophonie, pour tre vraiment
htrophonie, doit se Ç rdupliquer È (au sens que Kierkegaard donne
cette notion).
Exemples de rduplication
Chez
Pascal : parler humblement (et non pas orgueilleusement) de lĠhumilit,
douter du scepticisme quĠon prne (et non pas le prcher dogmatiquement) [26].
Chez
Kierkegaard : soutenir Ç un rapport absolu lĠabsolu È (et,
corollairement, relativiser le relativisme - plutt que lĠabsolutiser :
voir Auguste Compte posant Ç tout
est relatif, et cela seul est absolu È) ; Ç veiller au ÒcommentÓ È
(sans dissocier donc forme et contenu [27]).
Mais
galement : penser de manire contemporaine le contemporain [28],
noncer lĠnonciation [29],
etc. [30]
LĠhtrophonie doit donc rdupliquer son
htrognit dĠassemblage lĠintrieur de chacune de ses voix, lesquelles devront
ainsi relever dĠun type nouveau – Ç htrophonique È - de voix : une voix intrinsquement composite.
Une
htrophonie doit donc tre la mise en rapport htrogne de voix
intrieurement htrognes. Autant dire quĠune htrophonie doit a minima
mobiliser pour ses voix diffrents types dĠhtrognit : les diffrentes
voix dĠune htrophonie (notons ce point : on conserve la catgorie de
Ç voix È pour nommer les composantes de lĠhtrophonie) doivent tre
intrieurement htrognes des titres divers ; il ne doit pas y avoir
homognit ou homologie des htrognits (rduplication donc !).
Posons :
une htrophonie doit engager une htronomie de ses htrognits.
Dans
mon propre travail, cette htronomie prend a minima la forme dĠune double
htrognit : lĠune dĠordre linguale (pour ce que je vais appeler un
chÏur bablien), lĠautre dĠordre musicale (pour la partie proprement instrumentale).
Corollaire :
lĠhtrophonie musicale va se jouer tout autant dans la succession
chronologique que dans la superposition synchronique.
CĠest
en ce point que lĠhtrophonie se spare du collage et sans doute aussi de la
polyphonieÉ
Il
faut donc inventer une htronomie du discours lui-mme – si
Ç voix È dsigne a minima ce qui constitue un discours comme tel -,
ici discours Ç musical È et discours Ç littraire È.
Rappel :
discours nĠest aucunement ici en
corrlation avec langage.
Je
renvoie par exemple au Ç Discours du tableau È du regrett Franois
WahlÉ
JĠaccorde
une particulire importance cette structure de discours pour la musique comme
art, pour la musique comme pense et pas seulement comme jeu : la musique
fait discours du son, discours musical
bien sr (ceci nĠest donc pas une suppose dfinition de la musique – le
musicien nĠa aucunement dfinir la musique !,
cĠest mme un de ses traits subjectifs particuliers !).
Discours renvoie logique, et discours musical renvoie
donc logique musicale : cĠest lĠexistence dĠune logique proprement
musicale qui autorise de parler dĠun discours musical.
Et
lĠexistence du solfge (cette
criture spcifiquement musicale) est ce qui matrialise la possibilit mme
dĠune telle logique discursive spcifiquement musicale (sur tout ceci, voir mon
monde-Musique).
Pour
information, samedi prochain, en ce mme lieu (samedi 11 octobre), je
discuterai du premier tome de cet ouvrage avec le philosophe Andrea Cavazzini dans le cadre du sminaire mamuphi.
Prcision
Le rythme (dont, au demeurant, la posie
fait tout autant que la musique grand cas [31]),
et corollairement le geste ou le phras,
ne suffit pas Ç faire musique È : pour Ç faire
musique È, il faut dialectiser le rythme au phnomne musical spcifique
des hauteurs dfinies (qui configure la matire mme de la musique, tout de
mme que la langue configure la matire mme de la posie [32]).
Il sĠagira donc que lĠhtrophonie envisage soit bien une refonte globale des
anciennes catgories harmonico-mlodiques (voire thmatiques [33])
et pas seulement du travail rythmique et gestuel.
Ceci
pour moi, compositeur, est trs important ; il me faut en effet
constamment croiser deux soucis, deux hantises, deux nvroses : celle du
rythme et celle de lĠharmonie.
La
premire mĠinterdit les trains de dures rgulires – sĠil nĠy a pas de
travail rythmique local, il nĠy a pas vraiment composition (dĠo lĠimportance
pour moi des gestes rythmiques, des Gestalts – le point relve dĠune difficult
particulire : on ne produit pas de Gestalt rythmique par simple addition
de dures, soit trop rgulires, soit trop irrgulires). La seconde mĠinterdit
dĠun ct les timbres spectraux, de lĠautre les accords neutres : dans les
deux cas, il nĠy a pas de discours proprement harmonique.
Composer
pour moi, cĠest donc a minima croiser une discursivit rythmique et une
discursivit harmonique.
Incontestablement
le plus dur aujourdĠhui est la seconde exigence : comment rinventer une
discursivit harmonique qui ne soit pas tonale ? Le XXĦ sicle, mon
sens, a majestueusement chou sur ce front.
Faut-il
rappeler ici que les checs sont minemment fconds et quĠil faut donc
remercier nos devanciers qui ont su produire ces checs que, sans eux, nous
ignorerions compltement ?
Je
mĠy attaque pour ma part par des techniques harmoniques Ç largies È
(on revient lĠextension) : celle des accords arc-en-ciel ou ·12.
JĠessaie dĠinventer pratiquement
des enchanements harmoniques – des sortes de fonctionnalits harmoniques
dĠun type nouveau – entre ·12. Pour cela, je ne peux entirement me
passer de la question des fondamentales – proprit proprement acoustique
des accords, dans le cadre dĠun temprament donn (pour ma part, je conserve le
temprament gal). Il sĠagit donc dĠune extension des fonctionnalits
harmoniques adosses la logique des fondamentales, logique qui a trouv dans
le cadre tonal un panouissement singulier mais qui ne sĠy rduit pas.
Je
nĠai pas la thorie de tout cela – je ne la cherche pas trop
dĠailleurs ; je travaille empiriquement, au cas par cas, en faisant
confiance mon oreille de musicien.
Il
sera peut-tre toujours temps plus tard dĠen faire la thorie rtrospective.
Deux questions consquentes
1. QuĠest-ce que lĠhtrophonie
dĠune linarit disparate ?
Pour
aborder ce point, on se tournera vers le pome Douze (1918) dĠAlexandre Blok [34]
dont on analysera la dimension htrophonique (diversit de parlers corrle
une diversit dĠnonciations) [35].
On prendra ainsi mesure du fait que la proposition htrophonique peut
sĠavancer sous deux modalits duales : musicaliser les langues potiques,
ou potiser Ç lĠesprit de musique È (Blok [36]).
Lire
le pome en franais dans ma Ç translation ÈÉ
Htrophonie
de 8 nonciations diffrentes : ce nĠest donc pas la polyphonie embote
du Coup de ds (o il nĠy a pas
disparit dĠnonciation entre les diffrentes voix du texte).
1.
I : nonciation dĠun individu (identifi ou non) ; ex. PetrouchkaÉ
2.
D : dialogue - entre interlocuteurs
(identifis ou non) ; ex. entre Petrouchka et Vanka
3.
C : nonciation dĠun collectif (plus ou
moins identifi) ; ex. les 12 Gardes Rouges
4.
N : Ç nous È collectif nonant
un collectif comme tel, Ç rdupliqu È
donc ;
5.
G : nonciation gnrique ( interlocuteur
identifi ou non)
6.
S : slogans
7.
B : bruits
8.
R : rcitant anonyme
2. QuĠest-ce quĠun montage htrophonique entre voix htrophoniques ?
La
refonte htrophonique suggre que composer sĠy annonce sous le signe de
lĠentrelacement [37]
plutt que du contrepoint, du nouage plutt que de la construction, de la
tresse plutt que de lĠaccolage, dĠun travail sur les parties musicales plutt
que sur les lments, et - en un sens mtaphorique - dĠun humour plutt que
dĠune ironie.
On
prsentera ici une premire tape de ce travail de longue haleine : Didon & ne [38].
Toute
premire exprience, alors engage sous un autre nom – celui de Time-Phonie - : Duelle (dj allemand, anglais, russe et
franais).
Deuxime
exprience, cre dans des conditions invraisemblables de bricolage et de
je-mĠen-foutisme : Didon & ne
Ç ChÏur
bablien È 3 voix – franais parl, latin en sprechgesang
(parl-chant), anglais chantÉ
Htrophonie
instrumentale entre les deux pupitres et interne chaque pupitre (mais les
instrumentistes en question ont massacr la partitionÉ).
Malgr
tout, quelque chose passe, je crois, ou jĠespreÉ
On
y peroit bien, je pense, que lĠun est ici devenu quivoque : il y a des
Ç moments dĠun È, qui oprent (ou devraient oprer, si cĠtait tout
simplement bien jou – je ne parle pas dĠinterprt) comme nouages temporaires,
points dĠentrelacement entre brins dĠune tresse (comme on vrifie quĠune tresse
est ou non noue, quĠun nÏud borromen est bien borromen en dplaant ses
brins et en prouvant comment ils sĠentrelacent effectivement).
Troisime
exprience : Douze.
Passer
4 voix dans le chÏur bablien. Tester le russe et lĠallemand.
Problme
singulier : ces deux langues relvent dĠune mme logique syllabo-tonique. Je nĠai donc, avec ces 4 langues, que 3
logiques phonologiques sur les 4 que je voudrais mobiliser.
Rappel :
(attention : cet hexagone nĠest plus celui dit des
oppositions !)
Didon &
ne
puis Douze devraient constituer deux
tapes pralables la composition de mon vaste galit Ġ68 o je composerai un chÏur bablien de 6 langues (3, 4
puis 6 : je ne pense pas quĠil soit possible de dpasser les 6).
Il en va somme toute de
Ç justice È [39]É
SĠagissant de composer une compatibilit musicale entre identits diverses et
relativement autonomes (il ne sĠagit pas de les Ç intgrer È ou de
les Ç assimiler È), de crer donc un espace commun coordonn et
dirig plutt quĠuniformis ou homognis, on rapprochera lĠhtrophonie vise
du paradigme idologico-politique dĠune justice
(htrophonique) largie plutt que dĠune fraternit
(polyphonique) restreinte [40].
Tout
ceci, qui concerne une possible alliance renouvele entre musique &
langues (soit le thme mme de notre sminaire), nĠest pas indiffrent la
politique au sens large, disons lĠidologico-politique.
1.
Premier temps : ce projet, pour moi, vise
franchir un pas musical.
Je lĠinscris depuis longtemps sous le
signe de cette maxime dĠAdorno (philosophe que je nĠapprcie gure mais
musicien de got et de talent) :
Ç LĠart a besoin de quelque chose qui
lui est htrogne pour devenir art. È
ÒKunst bedarf eines ihr Heterogenen, um es zu werdenÒ.
(LĠart et les arts, 1966).
2.
Deuxime temps : il sĠagit que la musique
rende justice aux pomes quĠelle mobilise et quĠelle accueille en son monde.
3.
Troisime temps : ce type de rapport
musique-langues peut constituer un ventuel Ç modle È pour les nouvelles
thories idologico-politiques lĠÏuvre en ce dbut de XXIĦ sicle.
Comment ?
Peut-tre
dj par la dualit entre fraternit
et justice.
Je
la dispose ainsi dans un rcent essai mathmatico-politique :
La
fraternit, pour moi, nĠest pas – ne peut tre – universelle :
il y faudrait un pre commun, un Dieu le Pre donc !
Fraternit se dit dĠun
partage subjectif circonstanci : dĠune situation partage selon la mme
ligne de partage subjectif, vcue et traverse selon la mme ligne de combat. Fraternit se dit dĠun mme processus subjectif
partag.
Justice dsigne tout
autre chose : une vertu qui nĠest pas spare des autres mais qui rside
prcisment dans sa capacit rendre compossible dĠautres vertus,
indpendantes entre elles.
Justice est ce qui
sĠattache compossibiliser les trois vertus de courage, dĠintelligence et de discipline
(sĠentend bien sr dĠauto-discipline).
Justice
dsigne ainsi lĠhtrophonie de trois vertus !
JĠinscris
cela dans un dernier hexagone – mon dada !
Trois
dangers en lĠabsence de justice : lĠillimitation (pas dĠauto-limitation), lĠactivisme (la rptition bte), le constructivisme
(sans le courage pour affronter le hasardeux, lĠimprvisible, lĠinattendu).
JĠinscris
ici la justice sous le signe de lĠhomme – de lĠindividu masculin –
parce que (cĠest un des enjeux du livret de mon Didon & ne) je pense que la contradiction hommes-femmes (dont
je suis friand et sur laquelle je ne veux pas cder mme si tout lĠpoque
voudrait quĠon lĠabandonne) se joue aussi comme contradiction (non antagonique,
cela va de soi) entre justice-homme et amour-femme : je pense
quĠune femme sĠattache compatibiliser dĠautres
vertus que ces trois et sous un autre nom que justice : sous celui
dĠamour, qui nĠinscrit pas alors pour elle une htrophonie (est-ce un type spcifique
de polyphonie, diffrent de celui qui prside la fraternit masculine ?
Je laisse ici cette questionÉ).
Entendez-moi
bien : je ne dis pas quĠune femme nĠest pas capable de justice pas plus
quĠun homme nĠest pas capable dĠamour. Je dis simplement quĠun homme se sent
requis de compatibiliser lĠhtrogne des vertus sous
le nom de justice, et quĠune femme sĠattache constituer lĠamour en puissance
gnrale de rayonnement et de fertilisation.
O
il sĠavre donc que le sujet est vaste, que chacun est susceptible de lĠaborder
selon des raisonances varies :
tout de mme quĠil ne sĠagit aucunement dans ce sminaire de se mettre dĠaccord
sur une htrophonie donne (celle par exemple que je promeus dans mon propre
travail) - la directive est ici clairement Ç que cent htrophonies
sĠpanouissent ! È , tout de mme il ne sĠagit aucunement de
sĠunifier sur la porte idologico-politique quĠon peut reconnatre tel ou
tel type dĠhtrophonie.
Le
seul point que je voulais souligner ainsi et sur lequel je conclurai est que ce
type dĠadjonction-extension est gros de multiples raisonances de types trs divers, que ceci constitue mes yeux un
gage de sa puissance affirmative et donne donc penser que notre sminaire
peut se dployer selon des chemins trs divers.
***
[1]
ce qui nĠest pas dire totale : certaines catgories doivent tre abandonnes (par
exemple en musique celle de thme, en
politique celle de parti ⟹
pour la posie ?, le cinma ?, le thtre ?É ).
[2]
Le Ç relatif È est ici capital : ce qui est adjoint doit tre
une espce Ç de type nouveau È dans un mme genre maintenu (par
exemple un nombre de type nouveau – Ç irrationnel È - parmi des nombres de type ancien
– Ç rationnels È, et non pas une figure parmi des nombres ou
des quationsÉ), ici un mme genre
Ç musical È (par exemple, on ne passera pas du musical au sonoreÉ).
[3]
Voir ma confrence : Pour une terza pratica tendant le monde-Musique par adjonction
dĠhtrophonies (25 avril 2014 - Twelfth International Conference of the Department of Musicology of the
Faculty of Music in Belgrade)
http://www.entretemps.asso.fr/Nicolas/2014/Terza-pratica.htm
[4]
Il faudra prciser le sens exact de cette disparit, propre lĠhtrophonieÉ
[5]
Ç Peu parlent de lĠhumilit
humblement ; peu de la chastet chastement ; peu du pyrrhonisme en
doutant. È
[6]
Pas plus que la fin ne justifie les moyens, un Ç contenu È
abstraitement fix ne saurait Ç justifier È une Ç forme ÈÉ
[7]
Une thorie de la musique contemporaine doit tre thorie en un sens contemporain du termeÉ
[8]
Kierkegaard : Ç LĠultime
rduplication, qui est de dire : Òmoi, [untel]Ó È
[9]
Amusons-nous un instant : tolrer lĠintolrance, admettre la libert des ennemis
de la libert, etc.
[10]
Voir par exemple de Jacques Roubaud Description
du projet (en particulier sa section VI) – d. nous (2014)
[11]
Ç La posie est mmoire de la langue È
J. Roubaud
[12]
Sur ce point, je me spare de Boulez car il me semble que le thmatisme renvoie
une conception rcusable de la subjectivation comme Ç prise de
conscience ÈÉ
[13]
Pome au principe dĠun projet de cantate htrophonique (en quatre
langues : russe, franais, allemand, anglais) en hommage au prochain
centenaire de la Rvolution dĠOctobre. Ce projet se situe entre mon rcent Didon & ne (en trois
langues : latin, franais, anglais) et le futur galit Ġ68 (en six langues : franais, arabe, latin, russe,
allemand et anglais).
[14]
On confrontera cette disparit celle, dĠun type diffrent, qui phrase tout
autrement Le coup de ds de MallarmÉ
[15]
Tout spcialement dans Douze
Ç lĠesprit de musique È propre la Rvolution bolchvique
[16]
Voir mon expos : La notion
dĠentrelacs, claire par le thorme dĠAlexander (12 dcembre 2013, Qui-vive, cin 104 de Pantin) http://www.qui-vive.org/decembre2013/Entrelacs.htm
[18]
Justice rendue par la musique aux pomes quĠelle accueille, justice entrelaant
des vertus disparates (courage, intelligence et discipline), justice comme
figure dĠune humanit collectivement mancipe de son animalit naturelle (Badiou :
La Rpublique de Platon).
[19]
Dans un cadre non religieux, et sans Dieu-Pre universel, il nĠest de
fraternit que restreinte une situation donne : entre ceux qui la
partagent selon un mme procs subjectifÉ
[20] Ç La destruction est
un phnomne aussi traditionnel que la construction. En dtruisant, nous
restons les mmes esclaves de lĠancien monde : contrevenir aux traditions,
cĠest galement une tradition. È A. Blok (lettre Maakovski - 30
dcembre 1919)
[21] ce qui nĠest pas dire totale : certaines catgories
doivent tre abandonnes (par exemple en musique celle de thme, en politique celle de parti
⟹ pour la posie ?, le cinma ?, le thtre ?É ).
[22] Le Ç relatif È est ici capital : ce qui est adjoint
doit tre une espce Ç de type nouveau È dans un mme genre maintenu
(par exemple un nombre de type nouveau – Ç irrationnel È - parmi des nombres de type ancien
– Ç rationnels È, et non pas une figure parmi des nombres ou
des quationsÉ), ici un mme genre
Ç musical È (par exemple, on ne passera pas du musical au sonoreÉ).
[23] Voir ma confrence : Pour
une terza pratica tendant le monde-Musique par
adjonction dĠhtrophonies (25 avril 2014 - Twelfth International Conference of the
Department of Musicology of the Faculty of Music in Belgrade)
http://www.entretemps.asso.fr/Nicolas/2014/Terza-pratica.htm
[24] Il faudra prciser le sens exact de cette disparit, propre
lĠhtrophonieÉ
[25]
Voir La singularit Schoenberg,
p. 160É
[26] Ç Peu parlent de
lĠhumilit humblement ; peu de la chastet chastement ; peu du
pyrrhonisme en doutant. È
[27] Pas plus que la fin ne justifie les moyens, un
Ç contenu È abstraitement fix ne saurait Ç justifier È une
Ç forme ÈÉ
[28] Une thorie de la musique contemporaine doit tre thorie en un sens contemporain du terme
(voir mon monde-Musique)
[29] Kierkegaard : Ç LĠultime
rduplication, qui est de dire : Òmoi, [untel]Ó È
[30] Amusons-nous un instant : tolrer lĠintolrance, admettre la
libert des ennemis de la libert, etc. (la dmonstration se ferait par
lĠabsurde : rcuser ces maximes est incompatible avec la rduplicationÉ).
[31] Voir par exemple de Jacques Roubaud Description du projet (en particulier sa section VI) – d. nous (2014)
[32] Ç La posie est
mmoire de la langue È J. Roubaud
[33] Sur ce point, je me spare de Boulez car il me semble que le
thmatisme renvoie une conception rcusable de la subjectivation comme
Ç prise de conscience ÈÉ
[34] Pome au principe dĠun projet de cantate htrophonique (en
quatre langues : russe, franais, allemand, anglais) en hommage au
prochain centenaire de la Rvolution dĠOctobre. Ce projet se situe entre mon
rcent Didon & ne (en trois
langues : latin, franais, anglais) et le futur galit Ġ68 (en six langues : franais, arabe, latin, russe,
allemand et anglais).
[35] On confrontera cette disparit celle, dĠun type diffrent, qui
phrase tout autrement Le coup de ds
de MallarmÉ
[36] Tout spcialement dans Douze
Ç lĠesprit de musique È propre la Rvolution bolchvique
[37] Voir mon expos : La
notion dĠentrelacs, claire par le thorme dĠAlexander (12 dcembre 2013,
Qui-vive, cin 104 de Pantin) http://www.qui-vive.org/decembre2013/Entrelacs.htm
[39] Justice rendue par la musique aux pomes quĠelle accueille,
justice entrelaant des vertus disparates (courage, intelligence et
discipline), justice comme figure dĠune humanit collectivement mancipe de
son animalit naturelle (Badiou : La
Rpublique de Platon).
[40] Dans un cadre non religieux, et sans Dieu-Pre universel, il
nĠest de fraternit que restreinte une situation donne : entre ceux qui
la partagent selon un mme procs subjectifÉ