Concert théâtral

 

De Babel à Gaza à travers la Bible (avec la poésie d’Adonis)

 

 (مِنْ  بَابَل  إِلَى  غَـزَة   مِنْ خِـلَالِ  ٱلْـكِـتَابِ  ٱلْـمُـقَدَّسِ   )مَـعَ  شِعْـرِ  أَدُونِيس

 

 

mardi 10 mai 2011 (20h30)

Église luthérienne du Bon-Secours

20 rue Titon, Paris 11°

 

Direction musicale : François Nicolas

 

Compagnie Les Rugissants

Mise en espace : Grégoire Letouvet

 

Récitants et chanteurs :

Valéria Altaver, Carlos Andreu, Madonna et Georges Daccache,

Simon de Gliniasty, Grégoire Letouvet

 

Musiciens :

Hélène Bass (violoncelle), Alexis Coutureau (contrebasse),

Corentin Giniaux (clarinettes), Corentin Lallouet (hautbois),

François Nicolas (piano & orgue), Jean-Baptiste Paliès (percussions)

 

Photos de Taysir Batniji                      

Sommaire

 

1.     Babel : Un déluge de langues… [1] 3

2.     Genèse (I) : Hâjar [2] 5

3.     Genèse (II) : Ismaël [3] 17

4.     Psaume : Psaume pour le temps présent [4] 24

5.    Proverbes [5] 27

6.     Job : L’assurance d’un Juste [6] 29

7.     La bonne nouvelle se dit « Justice » [7] 31

8.     Golgotha : « Mon fils, mon fils, pourquoi m’as-tu abandonné ? » [8] 32

9.     Actes des militants : La route peu fréquentée de Jérusalem à Gaza… [9] 39

 

 

 

 

avec ma très amicale reconnaissance

 

à Mohammed Aïouaz, Youssef Chédid, Georges Daccache, Ali Ibrahim, El Hocine Messadek et Abdelfattah Nissabouri

 

pour leur contribution à l’établissement minutieux des textes en arabe

comme à tous les amis qui m’ont secondé dans les différentes langues de Babel…

 

Babel

« Humanité, houle déferlante, déluge de langues… »                 Adonis [10]                       بَـشَـرٌ،  تَــمُـوجُ  حُـشُودُهُمْ،  طُوفَانَ  أَلْـسِـنَـةٍ

 

 

Arabe

bacharun tamûju Huchûduhum Tûfâna ’alsinatin

ba-cha-run ta--ju Hu-chû-du-hum --na ’al-si-na-tin

بَـشَـرٌ،  تَــمُـوجُ  حُـشُودُهُمْ،  طُوفَانَ  أَلْـسِـنَـةٍ

Français

Humanité, houle déferlante, déluge de langues

Hu-ma-ni-, hou-le dé-fer-lan-te, dé-lu-ge de lan-gues

 

Grec ancien

Anthrôpoi, kuma rêgnuménon, reuma glôssôn

An-thrô-poi, ku-ma rê-gnu-mé-non, reu-ma glô-ssôn

Άνθρωποι, κμα ρηγνύμενον, ρεῦμα γλώσσων [11]

Latin

Humanum genus, fluctus impetuosus, diluvium linguarum

Hu-ma-num ge-nus, fluc-tus im-pe-tu-o-sus, di-lu-vi-um lin-gua-rum

 

Portugais

Humanidade, rebentamento de ondas, dilúvio de línguas

Hu-ma-ni-da-de, re-ben-ta-men-to de on-das, di--vi-o de lín-gu-as.

 

Anglais

Humanity, swelling waves,  floods of languages

Hu-ma-ni-ty, swel-ling waves, floods of lan-guages

 

Allemand

Menschheit, strömende Brandung, Schwall von Sprachen

Mensch-heit, strö-men-de Bran-dung, Schwall von Spra-chen

 

Italien

Umanità, marèggio dilagànte, dilùvio di lìngue

U-ma-ni-, ma--ggio di-la-gàn-te, di--vio di lìn-gue

 

Russe

Tcheloviechestvo, priboj boushoujouchiy potopom jazykov

Tche-lo-vie-ches-tvo, pri-boj bou-shou-jou-chiy po-to-pom [pa-to-pam] ja-zy-kov

Человечество, прибой бушующий потопом языков

Че-ло-ве-чес-тво, при-бой бу-шу-ю-щий по-то-пом я-зы-ков

Espagnol

Humanidad, oleaje desbordante, diluvio de lenguas

Hu-ma-ni-dad, o-lea-je des-bor-dan-te, di-lu-vio de len-guas

 

Japonais

djinlui, koudaké tchilu alanami, guéngo no koüzui

[ jinrui, kudake chiru aranami, gengo no közui ]

djin-lui, kou-da-ké tchi-lu a-la-na-mi, guén-go no koü-zui

人類、荒波、言語洪水

Persan

bachariyat, XîzÂbe Xorûchân, ToRyâne zabânhâ

ba-cha-ri-yat, Xî-zâ-be Xo-rû-chân, ToR-yâ-ne za-bân-

بـشـریت،  خیـزاب  خـروشان،  طـغیان  زبانـها

[ بَـشَـرِیَتْ،  خِیـزَابِ  خُـرُوشَانْ،  طُغْـیَانِ  زَبَانْـهَا ]

Néerlandais

Mensheid, beukende branding, talenvloed

Mens-heid, beu-ken-de bran-ding, ta-len-vloed

 

Catalan

Humanitat, onejada desbordant, diluvi de llengües

Hu-ma-ni-tat, o-ne-ja-da des-bor-dant, di-lu-vi de llen-gües

 

Hébreu

enochut naHchol mithappeXet mabbul safot [12]

e-no-chut naH-chol mit-hap-pe-Xet mab-bul sa-fot

אֱנוׂשׁוּת  ןַהְשׁוׂל  מתהפּפּכׄת  מַבּוּל  שָֹפוׂת

Polonais

tchouovietchenstvo, napierajontsa fala, potop jenzykouf

tchouo-vie-tchen-stvo, na-pie-ra-jont-sa fa-la, po-top jen-zy-kouf

  człowieczeństwo, napierajacą fala, potop języków

[ czło-wie-czeń-stwo, na-pie-ra-ja-cą fa-la, po-top ję-zy-ków ]

Basque

Gizadi, uhain urrakor, hizkuntza uholde

Gi-za-di, u-hain  u-rra-kor, hiz-kun-tza  u-hol-de

 

 

 

***

Hâjar [13]             [14] هَاجَـرٌ

Une femme, exilée, morte-vivante, et son fils

.اِمْـرَأَةٌ.  نُـفِـيَتْ،  حَيَّـةٌ - مَيِّـتَـةٌ،  وَٱبْـنُـهَا

Lune, entre mes seins, lune de pierre, jadis blessure…

قَـمَـرٌ،  بَيْـنَ  ثَدْيَيَّ،  قَـمَـرٌ  مِنْ  حَـجَـرٍ،  كَانَ  جُرْحًا

À l’exil nous fûmes condamnés. Est-ce cela, la Révélation ?

هَجَّـرَتْـنَا  تـعَالِيـمُـهُ.  أَذَلِـكَ  وَحِيٌ ؟

L’exil est devenu ma demeure, une araignée pour tout voisin.

وَأْرِي  بِٱسْـمِـكِ  ٱلنَّـفِيَ  بَيْـتًا،  لَا  جَارًا  سِـوَى  عَنْـكَـبُوتٍ

L’exil, une promesse-pierre, départ entre moi et moi-même.

اَلنَّـفِيُ،  وَعْـدٌ - حَـجَرْ،  رَحِيـلٌ  بَيْـنَ  نَفْـسِي  وَنَفْـسِي

Est-elle deux, son corps et son nom ?

أم  تُـرَاهَا  إِثْـنَـتَان - جِسْـمُـهَا  وَٱسْـمُـهَا ؟

Son corps est dans un lieu, quand son nom vacille dans le non-lieu.

.جِسْـمُـهَا  فِي  مَـكَانٍ  وَٱسْـمُـهَا  يَـتَـرَنَّـحُ  فِي  لَا  مَـكَانْ

Quelle est cette terre, quel est son nom ?

أَيّ  أَرْضٍ،  وَمَاذَا  تُـسَـمَّى - هَـذِهِ  ٱلْأَرْضُ ؟

La terre d’exil est prière.

.أَرْضُ  نفْـيٍ.  صَـلَاةٌ

La terre qui fut silence et sommeil commence à parler, ouvre ses paupières, s’engouffre sous mon vêtement.

.اَلتُّـرَابُ  ٱلَّـذِي  كَانَ  صَمْـتًا  وَنُومًا  هُوَ  ذَا  ٱلْآنَ  يَنْـطِـقُ،  يَفْـتَـحُ  أَجْـفَانَـهُ  يَـتَـغَلْـغَلُ  تَـحْـتَ  ثِـيَابِي

Pourquoi ne courtiserais-je pas les rivages de ma terre, ses forêts, les montagnes et leurs abîmes ?

لِـمَاذَا  لَا  أُصَاحـبُ  شُـطَّانَ  أَرْضِي  وَغَابَاتِـهَا،  وَٱلْـجِـبَالَ  وَأغْـوَارَهَا ؟

Sa terre est sa plaie.

.أَرْضُـهَا  جُرْحُـهَا

Ni eau, ni blé.

.لَا  مَاءَ،  لَا  زَرْعَ

L’horizon dessiné par la main du soleil est désert.

.اَلْـفَـضَاءُ،  كَـمَا  رَسَـمَتْـهُ  يَـدُ  ٱلشَّمْـسِ،  قَفْـرٌ

Et dans mes pas un désert ; ma couche, ma tête et mon cœur : un désert.

.وَفِي  خَـطَواتِي،  قَفْـرٌ - وَفِـرَاشِي،  وَرَأْسِي  وَقَلْـبِـي  قَفْـرٌ

Je secoue cet espace trop lourd -

.وَأُزَحْـزِحُ  هَـذَا  ٱلثّــقِيـلَ  ٱلْـفَـضَاءْ

 

je ne possède que ce désert.

.لَيْـسَ  لِي  غَيْـرُ  هَـذَا  ٱلْعَـرَاءْ

Crépuscule total, crépuscule des égarés.

.غَـسَـقٌ  شَامِـلٌ.  غَـسَـقٌ  ٱلضَّائِـعـينْ

Mon crépuscule est mon amant.

.غَـسَـقِي  عَاشِـقِي

Que dirais-je à mon enfant ?

مَا  أَقُولُ  لِـطِفْـلِي ؟

Mon angoisse en toi est que la prophétie ne frôle que l’écume des paroles.

.قَـلَـقِي  فِيـكَ  أَن  ٱلنَّـبُوَّةَ  لَا  تُـلَامِـس  إِلَّا  زَبَـدَ  ٱلْـكَـلِـمَاتِ

Dirais-je à mon enfant : tu n’es pas arrivé comme un soleil ni comme une source, tu es venu chaîne et loi ?

هَلْ  أَقُولُ  لِـطِفْـلِي -  لَمْ  تَـجِـئْ  مِثْـلَ  شَمْـسٍ،  لَمْ  تَـجِـئْ  مِثْـلَ  نَبْـعٍ  جِئْـتَ  قَيْـدًا  وَشَرْعًا ؟

Mon enfant ressemble à un lézard rôti vivant sur le feu, le feu de la paternité.

.هُـوَذَا  طِفْـلِي  ٱلْآنَ،  كَٱلضَّبِّ،  يُشْـوَى  عَـلَى  ٱلنَّارِ  نَارُ ٱلْأُبُـوَّةِ،  حَيًّا

Le sable connaît-il la trace que laisse le lézard ?

أَتُـرَى  يَعْـرِفُ  ٱلرَّمْـلُ  مَا  تَكْـتـبُ  ٱلضَّبُّ ؟

Mon enfant est crépuscule [15].

طِفْـلِي  غَـسَـقٌ  شَامِـلٌ

Hâjar allaite l’enfant de ses illusions.

.هَاجَـرٌ  تُـرْضِـعُ  ٱلطِّفْـلَ  أوهَامَـهَا

Qu’est-ce que la ville, ô bédouin ?

مَا  ٱلْـمَـدِيـنَـةُ  يَا  أَيُّـهَا  ٱلْـبَـدَوِيُّ ؟

Ce sont les spectres de nos aïeux.

تِلْـكَ  أَشـبَاحُ  أَسْـلَافِـنَا

Que cette ville devienne bélier !

! لـيـتَ  هَـذِي  ٱلْـمَـدِيـنَـةَ  كَبْـشٌ

Je l’offrirai à mon enfant, offrande de refus en proclamant le décès de la paternité. Comment ? Pour quelle raison nous a-t-il ici abandonnés ?

إِذًا،  كُنْـتُ  قَـدَّمْـتُـهَا  لِـطِفْـلِي  قُرْبَانَ  رَفْـضٍ،  وَأَعْـلَنْـتُ  مَوْتَ  ٱلْأُبُـوَّةِ.  مَاذَا ؟  وَلِـمَاذَا  رَمَانَا  هُـنَا ؟

Que dirais-je à un enfant en exil dès le berceau ?

مَا  أَقُولُ  لِـطِفْـلٍ  يَـتَـغَرَّبُ  فِي  مَهْـدِهِ ؟

Dirais-je : la couche de ton père est drapée d’oubli ?

أَأَقُولُ : نَـسِيـتُ  فِـرَاشَ  أَبِيـكَ ؟

Ô toi l’homme accroupi dans le dictionnaire de la Révélation, qui es-tu ?

أَيُّـهَا  ٱلذَّكَـرُ  ٱلْـمُـتَـرَبِّـعُ  فِي  مُعْـجَـمِ  ٱلْـوَحْـي،  مَنْ  أَنْـتَ ؟

Ô père, pourquoi Dieu ne s’effraie-t-il pas de ce que tu as commis ?

يَا  أَيّـهَا  ٱلْأَبُ  كَيْـفَ  لَا  يَنْـفُـرُ   ٱللَّـهُ  مِـمَّا  فَـعَلْـتَ ؟

Dis-moi : pourquoi n’est-il pas scandalisé ?

وَقـلْ  لِي : كَيْـفَ لَا  يَغْـضَـبُ ؟

Pourquoi le ciel perd-il la raison si un rocher se rebelle et jette une fleur sous sa fenêtre ?

لِـمَاذَا  تُـجَنُّ  ٱلسَّـمَاءُ،  إِذَا  ٱنْـتَـفَــضَتْ  صَخْـرُةٌ  وَرَمَتْ  وَرْدَةً  تَـحْـتَ  شُبَّاكِـهَا ؟

Pourquoi toi, l’absent éclairant qui n’éclaire que nos illusions et cela même qui ne s’illumine pas, pourquoi ne viens-tu pas ?

لِـمَاذَا  أَيُّـهَا  ٱلْـغَائِـبُ  ٱلْـمُـضِيءُ  ٱلَّـذِي  لَا  يُـضِيءُ  غَيْـرَ  أَوْهَامِـنَا،  غَيْـرَ  مَا  لَا  يُـضَاءُ،  لِـمَاذَا  لَا  تَـجِيءُ  إِلَيْـنَا ؟

Les vagues de notre Histoire sont immobiles.

.مَوْجُ  تَارِيخِـنَا  جَامِـدٌ

Le chef de la tribu est un absurde fougueux.

.رَأْسُ  ٱلْـقَـبِيـلَـةِ  عَـبَـثٌ  جَامِـحٌ

Pourquoi ne vois-tu pas comment nous nous enlisons dans nos corps, toi l’absent qui ne vient pas ?

لِـمَاذَا، لَا  تَـرَى  كَيْـفَ  نُوغِـلُ  فِي  جَـسَـدَيْـنَا،  أَيُّـهَا  ٱلْـغَائِـبُ  ٱلَّـذِي  لَا  يَـجِيءْ ؟

Toi qui étais mon époux, mon angoisse est que ma tête est pleine de ton vide, et ton plein est redondance de « nous ».

أَنْـتَ   ٱلَّـذِي  كُنْـتَ  زَوْجِي،  قَـلَـقِي  أَنَّ  رَأْسِي  مَـلِيءٌ  بِـفَـرَاغِـكَ،  أَنَّ  إِمْـتَـلَاءَكَ  لَغْـوٌ  بِــ”نَحْـنُ“.  ء

Déclin.

.إِنْـحِـدَارٌ

Passants déconcertés, dites : « Dans la sagesse de la Révélation, la fraternité est-elle meurtre ? »

عَابِـرُونَ،  حَـيَارَى،  قُولُواْ : أَتُـرَاهَا  ٱلْأُخُوَّةُ  فِي  حِكْـمَـةِ  ٱلْـوَحْيِ  قَتْـلٌ ؟

 

Il est temps de rejoindre l’ombre.

.حَانَ  وَقْـتُ  ٱلدُّخُولِ  إِلَى  ٱلظِّـلِّ

Que dirais-je à ce ciel dont les règles m’ont asservie ?

مَا  أَقُولُ  لِـتِلْـكَ  ٱلسَّـمَاءِ   ٱلَّـتِي  ٱسْـتَعْـبَـدَتْـنِي  تـعَالِيـمُـهَا ؟

Le ciel me voile.

.اَلسَّـمَاءُ  حِـجَابٌ  عَـلَيَّ

Le ciel est décombres d’un minéral énigmatique.

.اَلسَّـمَاءُ  بـقَايَا  مَعْـدِنٍ  غَامِـضٍ

Laisse-moi, ô ciel, à cette cendre, à ma poitrine brisée, à ma passion qui gît cadavre.

.أُتْـرِكيـنِي،  يَا  هَـذِهِ  ٱلسَّـمَاءُ  إِلَى  كَيْـدِ  هَـذَا  ٱلْـغُـبَارِ،  إِلَى  صَدْرِي،  إِلَى  شَـغَـفِي ـ رَاقِـدًا  جُثَّـةً

Jette mon corps où tu voudras !

! إِقْـذِفْ  بِـجِسْـمِـي  أَنَّى  تَـشَاءْ

Fermez la porte du ciel, fermez !

! أَقْـفِـلُواْ  بَابَ  تِلْـكَ  ٱلسَّـمَاءِ  عَـلَى  أَهْـلِـهَا،  أُقْـفِـلُواْ

Un corps généreux ne frappe pas à cette porte, ni n’accepte d’y entrer.

.جَـسَـدٌ  طَيِّـبٌ  لَا  يَدُقُّ  عَـلَى  بَابِ  تِلْـكَ  ٱلسَّـمَاءِ،  وَلَا  يَدْخـلُ

Mes péchés à l’égard de la divinité sont-ils illimités ?

أَتُـرَاهَا  خَـطَايَاي  فِي  لَوْحِ  هَـذِي  ٱلْأُلُوهـة،  لَا  حصْـرَ  يَرْقَى  إِلِيـهَا ؟

 

Pourquoi donc Dieu a-t-il privilégié certains de ses enfants ?

لِـمَاذَا  مَيَّـزَ  ٱللَّـهُ  مَابِيـنَ  أَبْـنَائـهِ ؟

S’il y a vraiment un Seigneur, pourquoi ne dit-il pas à ses enfants : Vous êtes égaux ?

إِنْ  كَانَ  ثَمَّـةَ  رَبٌّ  أَحَـدٌ  وَاحِـدٌ،  فَـلِـمَاذَا  لَا  يَـقُولُ  لِأَبْـنَائِـهِ : سَـوَاءٌ  كُـلُّـكُمْ ؟

Pourquoi donne-t-il à celui-ci la demeure de celui-là ?

لِـمَاذَا  يُعْـطِي  لِـهَـذَا  بَيْـتَ  ذَاكَ ؟

Pourquoi permet-il à celui-ci de régner ordonnant à l’autre de lui être esclave et serviteur ?

لِـمَاذَا  يُبْـيـحُ  لِـهَـذَا  أَن  يَـسودَ،  ويأْمُـرُ  هَـذَا  أَنَّ  يكون  لَـهِ  خَادِمًا  وَعَبْـدًا ؟

Le chemin vers Dieu est-il grammaire et conjugaison ?

أَتُـرَاهَا  ٱلطَّـرِيـقُ  إِلَى  ٱللَّـهِ  نَحْـوٌ  وَصَرْفٌ ؟

Un livre veille sur mon corps.

.كِـتَابٌ  يَتْـعهّـد  جِسْـمِي

Il n’énonce que les dires du crépuscule.

.لَا  يَـقُولُ  سِـوَى  مَا  يَـقُولُ  ٱلْـغَـسَـقْ

Mes pas forment mon livre, et ma langue forme mes pas.

.خَـطَـوَاتِي  كِـتَابِي،  لُـغَـتِي  خَـطَـوَاتِي

Je pars et reviens, feuillet de poussière, page d’étincelles, phrases qui se croisent dans les ténèbres.

.أَرُوحُ  وَأَغْـدُو  صَفْـحَـةً  مِنْ  غُـبَارٍ،  صَفْـحَـةً  مِنْ  شَـرَارٍ،  جُـمَـلٌ  تَـتَـقَاطـعُ  فِي  ظُـلُـمَاتِ

Cette femme est une langue mise en sommeil [16].

.هَـذِهِ  ٱلْـمَرْأَةُ  لُـغَـةٌ  نُوِّمَتْ

Sur mes pieds une herbe s’est penchée.

اِنْـحَـنَتْ  نَبْـتَـةٌ  عَلَى  قَـدَمَيَّ

J’entends autour de moi l’herbe gémir.

.أَسْـمَـعُ  ٱلْـعُشْـبَ  حَوْلِي  يَـئِـنُّ

Elle murmure : « Là, ce sont des couches dans l’attente de leurs visiteurs. »

يَهْـمِـسُ : هَـذِي  فُـرُشٌ  تَـتَـرقَّـبُ  زُوَّارَهَا

L’herbe est lignes, la terre un cahier, et je suis l’encre de ce lieu.

أَلنَّـبَاتُ  سُـطُورٌ  وَٱلثَّـرَى  دَفْـتَـرٌ  وَأَنَا  حِبْـرُ  هَـذَا  ٱلْـمَـكَانْ

Voici une femme qui allaite de ses humeurs le temps et les gens.

.هَـذِهِ  ٱمْـرَأَةٌ  تُرْضِـعُ  ٱلْـوَقْـتَ  وَٱلنَّاسَ  أَحوالَـهَا

Je ne me sens pas vivante si je n’étreins un autre corps.

.لَا  أُحِـسُّ  بِِـأَنَّيَ  أَحْـيَا  إِذَا  لَمْ  أُعَانِـقْ  جَـسَـدًا  آخَـرًا

Je m’ouvre – terre bouleversée.

.أَتَـصَـدَّعُ - أَرْضًا  زُلْـزِلَتْ

Mon corps est argile d’amour.

جَـسَـدِي  طِيـنُ  حُـبٍّ

Hâjar est-elle notre origine ?

أَتُـرَى  هَاجَـرٌ  أَصْـلُـنَا ؟

Mon corps est une guenille, disent leurs Écrits.

.جَـسَـدِي  خِرْقَـةٌ،  تَـقُولُ  تـعَالِيـمَـهُمْ

Je persiste dans l’ignorance de moi-même.

.وَمَا  زِلْـتُ  أَجْـهَـلُ  نَـفْـسِي

Mon délire est-il ma raison, et mon espoir mon oppression ?

أَتُـرَى  هَـذَيَانِي  عَقْـلِي،  وَرَجَائِي  أَنِّي  مَخْـنُوقَـةٌ ؟

Une révolte insiste.

.هَيَّـجَانٌ  يُـلِـحُّ

Il se peut que la terre se relève, sans commandant, et sans tutelle.

.رُبَّـمَا  تَنْـهَـضُ  آلْأَرْضُ  :  لَا  آمِـرٌ،  لَا  وِصَايَـه

Je suis l’insomnie de la lumière dans la langue-mère.

.أَرَقُ  ٱلضَّوْءِ  فِي  ٱللُّـغَـةِ-ٱلْأُمِّ

Mon angoisse se nourrit du sable.

.فَـزَعِي  يَـتَـقَوَّتُ  رَمْـلًا

Seuls nous restent nos décombres.

.لَمْ  يُـعُدْ  بَيْـنَـنَا  غَيْـر  أَشْـلَائِـنَا

Le soleil aujourd’hui est couleur du corbeau.

شَمْـسُ  هَـذَا  ٱلنَّـهَارَ  غُـرَابِيَّـةٌ

Les dents des cieux tombent rongées.

.أَلسَّـمَاوَاتُ  جَوْفَاءُ،  أسْـنَانُـهَا  تَـتَـسَاقَـطُ  مَنْـخُورَةً

Le soleil aujourd’hui est couleur d’adieu.

.شَمْـسُ  هَـذَا  ٱلنَّـهَارَ  وَدَاعيّـةٌ

Ne suis-je que simple allégorie ?

أَتُـرَانِي  أَعِيـشُ  مُـجَازًا ؟

La nuit des humains ligotée avec les lianes des prophéties est angoissante.

.قَـلَـقِي  أَنَّ  لَيْـلَ  ٱلْـبَـشَرْ  مُوثَـقٌ  بِـحِـبَالِ  ٱلنُّـبُـوَّاتِ

Autour de moi le désordre des sables et le désordre des vents.

.حَوْلِي  فَوْضَى  رِمَالٍ،  وَفُوضَى  أَرْيَاحٍ

Il se peut que leur histoire imprime sa trace sur le sable.

.نَـتَـوَقَّـعُ  أَنْ  يَـتَـحَوَّلَ  تَارِيـخُـهَا  إِلَى  خَـطِّ  رَمْـلٍ

Comme moi, le soleil a pleuré telle une herbe  refusant de révéler son nom.

بِـكَـتِ  ٱلشَّمْـسُ  مِثْــلِي  وَبِـكَتْ  عُشْـبَـةٌ  لَمْ  تَـبُحْ  بَٱسْـمِـهَا

Qu’elle est amère la route vers Zamzam !

! اَلطَّـرِيـقُ  إِلَى  زَمْـزَمٍ  مُرَّةٌ

Suis-je devenue telle un caillou ?

تَـرَانِيَ  أَصْـبَحْـتُ  مِثْــلَ  حَـصَاةٍ ؟

Ici se croisent les chemins ouverts par l’exil ainsi que tous ceux qui se livrèrent à l’effacement puis disparurent.

.أَلدُّرُوبُ  أَلَّـتِي  فَـتَـحَتْـهَا  ٱلْـمَـنَافِي  تَـتَـلَاقَى  هُـنَا  وَٱلَّـذِيـنَ  مَـحَوْاْ  وَٱمَّـحُواْ

Ils ont dit : « Demain, la mort sera égorgée. »

.قَالُواْ  :  غَـدًا  يُـذْبَـحُ  ٱلْـمَوْتُ

Quand sera-t-elle immolée, et en quel lieu ?

فَـمَـتَى  يُـذْبَـحُ  ٱلْـمَوْتُ،  فِي  أَيّ  وَقْـتٍ،  وَأَيّ  مَـكَانٍ ؟

Et je répète en ce moment les paroles que l’air lui-même, au désespoir des arbres, n’a pas dites.

.وَأُرَدِّدُ  فِي  هَـذِهِ  ٱللَّـحَـظَاتِ  ٱلْـكَـلَامَ  ٱلَّـذِي  لَمْ  يَـقُلْـهُ  أَلْـهَـوَاءُ  لِـيَـأسِ  ٱلشَّـجَرْ

Vois comme les choses se distinguent de leur nom, comme s’ébranle la terre de la parole.

أَرَى  كَيْـفَ  يُفْـصَـلُ  بَيْـنَ  ٱلْـمُـسَـمَّى  وَأَسْـمَائِـه  وَتُـزَلْـزَلُ  أَرْضُ  ٱلْـكَـلَامْ

J’aspire au sommeil dans une houle qui veille.

.كَمْ  أُحِـنُّ  إِلَى  ٱلنَّوْمِ  فِي  مَوْجَـةٍ  لَا  تَـنَامْ

Mon sang adore le chant.

.دَمِي  يَعْـشِـقُ  ٱلْـغِـنَاءْ

Nous ne voyons que les traces de la poussière, nous n’entendons que ce qu’elle chante.

لَا  نَـرَى  غَيْـرَ  نَسْـجِ  ٱلْـغُـبَارِ  وَغَيْـرَ  تآويـلِـهِ،  وَنَسْـمَـعُ  شَـبَّابَـةَ  ٱلْـغُـبَارْ

Autour de moi une lumière qui n’éclaire pas.

حَوْلِي  ٱلْآنَ  نُورٌ  وَلِـكِنْ  لَا  يُـضِيءُ

Le fuseau du soleil n’a pas de fil hormis la paille.

.مِغْـزَلُ  ٱلشَّمْـسِ  لَا  خَيْـطَ  فِيـهِ  سِـوَى  ٱلْـقَـشَّ

Les anges sont-ils aujourd’hui dans l’insouciance ?

أَتُـرَاهَا  ٱلْـمَـلَائِـكَـةُ  ٱلْـيَوْمَ،  فِي  غَفْـلَـةٍ ؟

Hâjar entreprend de tracer la route vers l’impossible.

هَاجَـرٌ  تَرْسُـم  ٱلدَّلِيلَ  لِلطَّـرِيـقِ  إِلَى  ٱلْـمُـسْـتَـحِيلْ

Suis-je ici tempête, mon enfant [est-il] sable ?

أَتُـرَانِي  هُـنَا  عَاصِـفَـةٌ  وَطِفْـلِيَ  رَمْـلٌ ؟

Hâjar et son fils sont prisonniers des ténèbres.

.هَاجَـرٌ  وَٱبْـنُـهَا  أَسِيـرَان  فِي  ظُـلُُـمَاتٍ

Guidons-les !

! لِـنَهْـدِهِـمِ

 

***

Ismaël [17]      إِسْـمَاعِيـل

 

I. Paroles d’Ismaël

كَـلِـمَاتُ  إِسْـمَاعِيل

I.1 - « Drapé dans mon sang, je marche. Des laves me dirigent et des éboulis m'orientent. »

.مُـتَـدَثِّـرًا  بِـدَمِي،  أَسِيـرُ -  تَـقُودُنِي / حِـمَـمٌ،  وَيَهْـدِيـنِي  رُكَامٌ

I.2 - « Et moi, banni par toutes les tribus, embrassé dans les blessures, j'em­brasse la terre assassinée

.وَأَنَا  ٱلذِّي  نَـبَـذَتْـهُ  كُـلُّ  قَـبِيـلَـةٍ / وَخَـرَجْـتُ  تَـحْـضُـنُـنِي  ٱلْـجِـرَاحُ،  وَأَحْـضُـنُ  ٱلْأَرْضَ  ٱلْـقَـتِيـلَهْ

I.3 - et je dresse mon campement dans mon sang. Je guette l’étincelle-guide. »

.أَبْـنِي  خِـيَامِيَ  فِي  دَمِي / أَتَـسَـقَّـطُ  ٱلشَّـرَرَ  ٱلدَّلِيـلَ

I.4 - « Désert des livres qui s'effritent - dé­sert, collier de sables dont les cara­vanes sont le fil. »

.صَحْـرَاءَ  مِنْ  كُـتُـبٍ  تَـمُوتُ، / صَحْـرَاءُ - عِقْـدٌ  مِنْ  رِمَالٍ،  وَٱلْـقََـوَافِـلُ  خَيْـطُـهُ

I.5 - « Mes ruines m'apostrophent et mon discours me nie. »

.يَصْـرُخُ  بِي  حُـطَامِي / وَيُـكَادُ  يَنْـكُـرُنِي  كَـلَامِي

I.6 - « J’ai dit adieu, et le déclin s’est im­primé sur mon front. »

.وَدَّعْـتُ،  وَارْتَـسَـمَ  ٱلْأُفُولُ  عَـلَى  جَـبِِيـنِي

I.7 - « Je me souviens d’une nation obsédée jusqu’au délire par ses ultimes ves­tiges, fauve sans tête qui se couronnait maître. »

.أَذْكُـرُ  أُمَّـةً / تَهْـذِي  بِآخِـرِ  مَا  تَـبَـقَّى:  وَحْـشٌ  بِـلَا  رَأْسٍ،  يُـتَوِّجُ  نَفْـسَـهُ / رَبًّا

I.8 - « Nation fière d’un trône d’os, cité des langues coupées et piétinées, va erre ! »

أُمَّـةٌ / تَزْهُو  بِـعَرْشٍ  مِنْ  عِـظَامٍ. / مَـدِيـنَـةُ  أَلْـسُـنٍ / قُـطِـعَتْ  وَدِيـسَتْ / اِذْهَبْ  وَطُفْ

I.9 - « Demande au corbeau de l’alphabet le corps d’Ismaël ! Ismaël est l’atlas des temps. »

.(أَوْ  سَلْ  غُـرَابَ  ٱلْأَبْـجَـدِيَـةِ - جِسْـمَ   إِسْـمَاعِيـلِ،  )إِسْـمَاعِيـلُ  خَارِطَـةُ  ٱلْـعُـصُورْ

II. La terre d'Ismaël

أَرْضُ  إِسْـمَاعِيل

II.1 - Un feu lui vient d’une terre en suspens endormie sous un oreiller.

.نَارٌ  تَـجِيءُ  إِلَيْـهِ  مِنْ  أَرْضٍ  تَـعُومُ

II.2 - Les rêves d’Ismaël sont prosternés, et son front est de poussière.

.أَحْـلَامُ  إِسْـمَاعِيـلَ  جَاثِيـةٌ،  وَجَبْـهَـتُـهُ  تُـرَابٌ

II.3 - Ismaël n'est qu’une voix sans espace,  une voix où tout s’étrangle.

.مَا  كَانَ  إِسْـمَاعِيـلُ  إِلَّا / صَوْتًا  يُـقَاتِـلُ  بَعْـضُـهُ  بَـعَـضًا،  وَلَيْـسَ  لَـهُ  فَضَاءٌ

II.4 - Son ombre est une terre ouvrant ses champs comme des lits, une terre of­ferte.

.ظِـلُّـهُ / أَرْضٌ  تَـمُـدُّ  حُـقُولَـهَا  سُـرُرًا،  وَتُهْـدَى

II.5 - Et pour son ombre, il y a des pa­trouilles de nuit.

.وَلِـظِـلِّـهِ / عَـسَـسٌ،  وَيَنْـكَـجَـرِيَّـةٌ

II.6- Mais Ismaël est blessure.

.لَـكِـنَّ  إِسْـمَاعِيـلَ  جُرْحٌ

 

 

II.7 - Le poumon des temps s’est déchiré. La terre est loque de tisserand.

.رِئَـةُ  ٱلْعُـصُورِ  تَـمَـزَّقَتْ / وَٱلْأَرْضُ  خِرْقَـةُ  حَائِـكٍ

II.8 - Un poète hurle : « Mon peuple est ho­rizon de sang, et l’horizon pour l’hori­zon se fait énigme. »

.يَصْـرُخُ  شَاعِـرٌ: / شَعْـبِي  فَـضَاءُ  دَمٍ،  وَيَلْـتَـبِـسُ  ٱلْفَـضَاءُ  عَـلَى  ٱلْفَـضَاءْ

III. Qui es-tu, Ismaël ?

مَنْ  أَنْـتَ  إِسْـمَاعِيـلُ ؟

III.1 - Qui es-tu, Ismaël ?   Tes pas sont une hémorragie de livres.

.مَنْ  أَنْـتَ  إِسْـمَاعِيـلُ ؟   نَازِفَـةٌ  خُـطَاكْ / كُـتُـبًا  يُـلَمْـلِـمُـهَا  حُوَاةٌ

III.2 - En chaque lettre, un gouffre ; en chaque virgule, un mirage, un verbiage, et une vaticination…

…فِي  كُـلِّ  حَرْفٍ  حُفْـرَةٌ / فِي  كُـلِّ  فَاصِـلَـةٍ  سَـرَابٌ / حَشْـوٌ،  وَرَجْـمُ  خُـرَافَـةٍ

III.3 - Tu m’as scindé en deux. De moi, tu as séparé mon sang.

.شَـطَرْتَـنِي / وَفَـصَلْـتَ  بَيْـنَ  دَمِي  وَبَيْـنِي

III.4 - On a dit que pour toi le soleil est une outre et la terre une assiette.

...قِيْـلَ  ٱلشَّمْـسُ  عِنْـدَكَ  جَـرَّةٌ،  وَٱلْأَرْضُ  صَحْـنٌ

IV. Paroles du crépuscule

كَـلِـمَاتُ  ٱلْـغَـسَـفِ

IV.1 - « Je t’invite, Ismaël.

.أَدْعُوكَ،  إِسْـمَاعِيـلُ

 

IV.2 - Le vin de notre pacte est tiré, et la table du crépuscule baigne dans son extase. »

.خَمْـرَةُ  عَهْـدِنَا / سُـكِـبَـتَ،  وَمَائِـدَةُ  ٱلْـغَـسَقْ / فِي  زَهْـوِهَا

IV.3 - « J’inaugure la fin : je ne suis pas de ta lignée - je m'en arrache. »

.أَفْـتَـتِـحُ  ٱلنِّـهَايَـةَ:  لَسْـتُ  نَسْـلَكْ / أَجْـتَـثُّ  نَفْــسِيَ  مَنْـهُ

IV.4 - « J’achève ce que tu as commencé et je dresse banquet au portique des temps. »

.أُنْـهِي  مَابَـدَأْتَ - أُقِيْـمُ  فِي  بَهْـوِ  ٱلْـعُـصُورِ  وَلِيـمَـتِي

IV.5 - « Je m’arrache de toi et, créateur, je prélude au commencement.

.أَجْـتَـثُّ  نَفْـسِيَ  مِنْـكَ / وَأَفْـتَـتِـحُ  ٱلْـبِـدَايَـةَ،  خَالِـقًا

IV.6 - Je crée le jeu, tel le visage de Dieu na­geant dans les eaux de l’alphabet. »

.لَـعِـبًا  كَـوَجْـهِ  ٱللّٰـهِ  يَسْـبَـحُ  فِي  مِيَاهِ  ٱلْأَبْـجَـدِيهْ

IV.7 - « À nouveau, j’apprends les mots et maîtrise leurs secrets.

.مِنْ  أَوَّلٍ،  أَتَـعَـلَّـمُ  ٱلْـكَـلِـمَاتِ،  أُتْـقِـنُ  سِـرَّهَا

IV.8 - Et je dis : mes racines sont jeu, er­rance en liesse, révélation transfigu­rant toute lumière en passion et sillon­nant la poussière à la façon des sources. »

.وَأَقُولُ : جَذْرِيَ / لَـعِـبًا،  وَتِيـهُ  مَـبَاهِـجٍ، - / كَشْـفٌ  يُـدَشِّـنُ  كُـلَّ  ضَوْءٍ / شَـغَــفًا،  وَيَفْـتَـرِشُ  ٱلتُّـرَابَ  كَـمِـثْـلِ  نَبْـعٍ

IV.9 - « Et je dis : mes ancêtres sont passion d’espace, de cette passion qui a tissé son voile avec le corps de l’air pour que m’habille l’aube. »

.وَأَقُولُ :  أَسْـلَافِي  هَوَىًا / عَـشِـقَ  ٱلْـفَـضَاءَ،  وَصَاغَ  مِنْ  جَـسَـدِ  ٱلْـهَـوَاءِ  شِـرَاعَـهُ / وَالْـفَجْـرُ  يُـلْـبِـسُـنِي  مَـبَاذِلَـهُ

IV.10 - « Mon désespoir est un masque. Ma colère, une gazelle farouche gardée par un enfant. »

.يَأْسِي  قِـنَاعٌ / غَـضَـبِي  غَـزَالٌ  نَافِـرٌ  يَرْعَاهُ  طِفْـلٌ

 

IV.11 - « Pour pouvoir écouter le murmure de gorge du crépuscule, sa voix, j’ai of­fert mes encriers aux feuilles des sai­sons.

.لِـيَـكُونَ  لِي  أَنْ  أَسْـمَـعَ  ٱلصَّوْتَ  ٱلذِّي  هَـمَـسَتْـهُ  حُنْـجُـرَةُ  ٱلْـغَـسَقْ، / أَعْـطَيْـتُ  أَوْرَاقَ  ٱلْـفُـصُولِ  مَـحَابِـرِي

IV.12 - En ce corps-là, que j’ai nommé Patrie et qui a vécu sans patrie, je me suis drapé de ma poésie comme d’un suaire.

.فِي  ذَلِـكَ  ٱلْـجَـسَـدِ  ٱلذِّي  سَـمَّيْـتُـهُ / وَطَـنًا،  وَعَاشَ  بِـلَا  وَطَـنٍ، / وَلَـبِسْـتُ  شِعْـرِي  كَالْـكَـفَنْ

IV.13 - J’ai offert aux tuiles enneigées mes poèmes pour les réchauffer.

.أَعْـطَيْـتُ  قِرْمِيـدَ  ٱلثُّــلُوجِ  قَـصَائِـدِي / دِفْـئًا  لَـهُ

IV.14 - Aux cils du vent, j’ai offert mes fe­nêtres. J’ai offert le plus beau de mon enfance à Ismaël. »

.أَعْـطَيْـتُ  أَهْـدَابَ  ٱلرِّيَاحِ  نَـوَافِـذِي / أَعْـطَيْـتُ  إِسْـمَاعِيـلَ  أَجْـمَـلَ  مَا  رَأَتْـهُ  طُـفُولَـتِي

IV.15  Ainsi parla le crépuscule.

.قَالَ  ٱلْـغَـسَقْ

V. Le crépuscule guide

اَلْغَـسَـقُ  ٱلدَّلِـيل

V.1 - Ismaël entre en crépuscule.

.إِسْـمَاعِيـلُ  يَدْخُـلُ  فِي  ٱلْـغَـسَقْ

V.2 - Dictée d’un désert dont le rythme est tête qui roule.

.إِمْـلَاءَ  صَحْـرَاءٍ،  وَرَأْسُـكَ -  طَائِـحًا،  إِيـقَاعُـهَا

V.3 - Et la nature entre en extase de crépus­cule. Mon sang est l’ode du crépus­cule.

.وَتَبْـتَـهِـجُ  ٱلطَّـبِيـعَـةُ  بِالْـغَـسَقْ / وَدَمِي  نَـشِيـدٌ  لِلْـغَـسَقْ

 

V.4 - Le voilà, je le salue, le créateur aux doigts gelés.

.هُـوَذَا  أُصَافِـحُ  خَالِـقًا / جَـمَـدَتْ  أَصَابِـعَهْ

V.5 - Le voilà, le crépuscule grandiose. Je vais dessiner sur ma main son étoile.

.هُـوَذَا،  سَـأَرْسُـمُ  كَوْكَـبَ  ٱلْـغَـسَـقِ  ٱلْـمُـضِيءِِ  عَـلَى  يَـدَيَّ

V.6 - Le voilà, le crépuscule-guide.

.هَـذَا  هُـوَ  ٱلْـغَـسَـقُ  ٱلدَّلِـيلْ

V.7 - L’épaule du jour est blessée, et la nuit boite.

.كَـتِـفُ  ٱلنَّـهَارِ  جَـرِيـحَـةٌ،  وَٱللَّـيْـلُ  يَعْـرُجُ

V8 - Ce qui fut a été. Citadins et bédouins, dictionnaire d’un mythe.

.مَا  كَانَ  كَانْ / حَـضَـرٌ  وَبَدْوٌ - مُعْـجَـمٌ  لِـخُـرَافَـةٍ

V.9 - Assis sur la pierre de l’oracle, un singe m’observe :

:قِرْدٌ  عَـلَى  حَـجَـرِ  ٱلتَّـنَـبُّـئِ  جَالِـسٌ / يَرْنُو  إِلَـيَّ  كَـأَنَّـنِي  قِـدِّيسُـهُ

V.10 - lui dirai-je qu’Ismaël est mon feu, que Hâjar est mon foyer et Abraham un gla­cis ?

أَأَقُولُ  إِسْـمَاعِيـلُ  نَارِيَ،  هَاجَـرُ / بَيْـتِي،  وَإِبْـرَاهِيـمُ  بَرْدٌ ؟

V.11 - Et je dis que Hâjar n’est pas émigrée.

.وَأَقُولُ  هَاجَـرُ  لَمْ  تُـهَاجِرْ

V.12 - J’ai offert mon siècle à la poussière, tel un spectre installé dans le sein de l’éclipse pour une histoire qui va venir et dont j’entends presque les pas.

.أَعْـطَيْـتُ  عَصْـرِي  لِلْـغُـبَارِ،  دَخَلْـتُ  فِي  رَحِـمِ  ٱلْأُفُولْ / طَيْـفًا  لِـتَارِيـخٍ  يَـجِيءُ، -  أَكَادُ  أَسْـمَـعُ  خَطْـوَهُ

 

V.13 - Du corps des lieux ne reste que pous­sière; je l’ai enlacée, acte et argile de créateur.

.لَمْ  يَبْـقَ  مِنْ  جَـسَـدِ  ٱلْـمَـكَانِ  سِـوَى  ٱلتُّـرَابِ / حَـضَنْــتُـهُ  طِيـنًا،  وَضَرْبَـةَ  خَالِـقٍ

VI. Nous

نَحْـنُ

VI.1 - Crépuscule, le ciel heurte nos pas.

.غَـسَـقٌ  وَتَرْتَـطِـمُ  ٱلسَّـمَاءُ  بِـخَطْـوِنَا

VI.2 - Et nous avons peur rien qu’à toucher le pain…

 … وَنَـخَافُ  مِنْ  جَـسِّ  ٱلرَّغِيـفِ

VI.3 - Nous allons déclamer le verset des en­trailles, la tentation du premier chaos.

.سَـنُعْـلِـنُ  آيَـةَ  ٱلْأَحْـشَاءِ،  وَوَسْـوَسَـةَ  ٱلسَّدِيـمِ  ٱلْأَوَّلِـي

VI.4 - Dans la forêt des choses, nous déchif­frons un roc ambigu.

.فِي  غَابَـةِ  ٱلْأَشْـيَاءِ، -  نَقْـرَأُ  صَخْـرَةً / غَـمُـضَتْ

VI.5 - Nous écoutons le murmure d’un jas­min, tout ce qui vibre au cœur des champs.

.نَسْـمَـعُ  مَا  تُـوَشُوِشُ  يَاسَـمِيـنَه / وَيَـدُورُ  فِي  خَـلَـدِ  ٱلْـحُـقُولْ

VI.6 - L’univers est d’encre et la poésie pré­lude à la lucidité.

.اَلْـكَوْنُ  حِبْـرٌ / وَالشِّعْـرُ  فَاتِـحَـةُ  ٱلْـعُـقُولْ

Et nous émancipons la langue ensevelie.

.وَنُـحَـرِّرُ  ٱللُّـغَـةَ  ٱلدَّفِيـنَهْ

 

***


Psaume [18]

Psaume pour le temps présent

مَزْمُورٌ  اَلْأَيَّامِ  ٱلْـحَاضِـرَةِ

Ô ami du désespoir et de l’espérance,

يَا  صَـدِيـقَ  ٱلْـيَأْسِ  وَٱلرَّجَاءِ

l’espérance a émigré sur les épaules d’un nuage.

عَـلَى  كَـتِـفَي  غَـمَامَـةٍ  هَاجَـرَ  ٱلْأَمَـلُ

Il y a une heure qui ne vient pas.

ثَمَّـةَ  سَاعَـةٌ  لَا  تَأْتِي

Les cendres de nos jours jonchent la terre.

رَمَادُ  أَيَّامِـنَا  عَـلَى  ٱلْأَرْضِ

Chemin qui ne sais commencer !

أَيـهَـذَا  ٱلطَّـرِيـقُ  ٱلَّذِي  يَجْـهَلْ  أن  يـبـدأَ

Nous avons besoin que quelque chose naisse.

ثَـمَّـةَ  حَاجَـةٌ  لِأَنَّ  يُولَـدُ  شَيْءٌ  مَا

Où, mais où trouver un nouveau jour ?

أَهُـنَا  أَهُـنَالِـكَ  يَوْمٌ  آخَـر؟

Où trouver la résurrection des racines, la résurrection des noces, des ports et des récitants, la résurrection des mers ?

أَهُـنَا  بَعْـثُ  ٱلْـجُـذُورِ،  بَعْـثُ  أعْـرَاسِـنَا  وَٱلْـمَـرَافِـئِ  وَٱلْـمُنْـشِـدِيـنِ،  بَعْـثُ  ٱلْـبِـحَارِ

Nos paroles sont sans héritier.

كَـلِـمَاتُـنَا  لَا  وَرِيـث  لِـهَا

Ô monde paré du rêve et de la nostalgie !

يَا  عَالَـمًا  مـزيـنًا  بِالْـحُلْـمِ  وَٱلْـحَـنِيـنِ

Qu’importe le possible !

مَا  هَـمَّ  ٱلْـمُمْـكِـنُ

Dans nos hymnes nous cherchons un monde qui commence à la pointe du monde.

فِي  تَـرَاتِيـلِـنَا  نَبْـحَـثُ  عَنْ  عَالَـمِ  يَبْـدَأُ  فِي  طَـرَفِ  ٱلْـعَالَـمِ

Le monde n’est que choix.

وَلِلْـعَالَـمِ  إِخْـتِـيَارٌ

Nous découvrons à notre époque une intonation et un timbre.

نَكْـتَـشِـفُ  نَبْـرَةً  لِـعَصْـرِنَا  وَغُنَّـةً

La disparition nous lie à tout ce qui est autre.

اَلضَّـيَاعُ  يوحِّـدنَا  بِـسِـوَانَا

Entre nous s’échange une langue pour la distance que nul autre ne comprend.

بِيـنـنَا  لُـغَـةٌ  لِلْـمَـسَافَـةِ  يـجـهـل  ألْـفَاظـهَا  سِـوَانَا

 

 

Nous voici entamant un dialogue avec la langue vénérable.

وَهَا  نَحْـنُ  نَبْـتَـدِئُ  ٱلْـحِـوَار  بيـني  وبين  ٱللُّـغَـةِ  ٱلْـعَـرِيـقَـةِ

Ô langue des décombres !

يَا  لُـغَـةُ  ٱلْأَنْـقَاضِ

Nous bâtirons sur l’abîme, nous demeurerons sur le cratère du futur.

فَوْقَ  ٱلْـهَاوِيَـةِ  سـنـبـني،  ولـسوف  نـظـلّ  فِي  فوهـة  ٱلْـمُسْـتَقْـبَـل

De la soie des poèmes nous tissons un ciel neuf.

نَنْـسِـجُ  بِـحَـرِيرِ  ٱلْـقَـصَائِـدِ  سَـمَاءً  جَـدِيـدَةً

Notre ciel est de sable.

سَـمَاؤَنَا  ٱلرَّمْـل

La terre est lavée sous nos pas.

تَحْـتيَ  ٱلْأَرْضُ  مـغـسولـةٌ

Nous grandissons et les gens grandissent avec nous. Les humains !

نَكْـبُـرُ  وَيَكْـبُـرُ  ٱلنَّاسُ.  ٱلنَّاسُ!                   ـ

Notre feu marche sur la ville.

نَارُنَا  تَـتَـقَـدَّمُ  نَحْـوَ  ٱلْـمَـدِيـنَـةِ

 

***

Proverbes

Livre des proverbes (Bible) [19]

Chaque principe une lumière… (6, 23) [20]

اَلشَّـرِيـعَـةُ  نُورٌ

ach-cha--εa-tu    -run.

Qui trace une ligne survit. (16, 17) [21]

حَافِـظٌ  نَفْـسَـهُ  حَافِـظٌ  طَـرِيـقَـهُ

-fi-Zun naf-sa-hu     -fi-Zun Ta--qa-h(u).

Vient la brute, vient le mépris, vient l’ordure, vient la honte. (18, 3)

جَاءَ  ٱلشِّـرِّيـرُ  وَٱلْاَحْـتِـقَارُ  وَٱلْـهَـوَانُ  وَٱلْـعَارُ

-’a_ch-chir--ru   wa_l-aH-ti--ru   wa_l-ha--nu   wa_l-εâ-ru.

 

Proverbes arabes

À chaque langue, un nouvel homme

كُـلُّ  لِـسَانٍ  بِـإِنْـسَانٍ

kul-lu li--nin    bi-’in--nin.

L'âne a fait le philosophe… puis il est mort.

تَـفَلْـسَـفَ  ٱلْـحِـمَارُ...  فَـمَاتَ

ta-fal-sa-fa_l-Hi--ru    fa--t(a).

Le commencement du feu est une étincelle.

اَلنَّارُ  أَوَّلُـهَا  شَـرَارَةٌ

an--ru ’aw-wa-lu- cha--ra-tun.

Il suffit d’une étincelle pour allumer un incendie.

مُعْـظَـمُ  ٱلنَّارِ  مِنْ  مُسْـتَصْـغَـرِ  ٱلشَّـرَارَةِ

muε-Za-mu_n--ri min mus-taS-Ra-ri_ch-cha--ra-ti.

Quand le destin tombe, l’espace se rétrécit. [22]

إِذَا  نَـزَلَ  ٱلْـقَـضَاءُ  ضَاقَ  ٱلْـفَـضَاءُ

’i-zâ na-za-la_l-qa-Dâ-’u   Dâ-qa_l-fa-Dâ-’u.

Les murs servent aux fous de papier à écrire.

اَلْـحِيـطَانُ  وَرَقُ  ٱلْـمَـجَانِيـنِ

al---nu wa ra-qu_l-ma---n(i).

Job-Ayoub [23]              أَيُّوب

 

Il y avait dans un pays arabe un homme du nom de Job. Cet homme intègre et droit était le plus grand de tous les fils de l’Orient. Satan suggéra : « Est-ce bien gratuitement que Job est ainsi ? ». Et les malheurs s’abattirent sur Job…

 

 

L’assurance d’un Juste : paroles de Job

 

[17, 12] Ils ont mis la nuit pour le jour et prétendent que la lumière longe les ténèbres !

يَجْـعَـلُونَ  ٱللَّيْـلَ  نَـهَارًا،  وَعَـلَى  ٱلرُّغْـمِِ مِِـنَ  ٱلظُّلْـمَـة  يَـقُولُونَ : " إِِنَّ  ٱلنُّـهورَ  قَـرِيـب ! "                   ـ

[13, 4] Vous rapiécez des mensonges, vous êtes des médecins de néant.

أََمَّا  أَنْـتُمْ  فَـمُـنَافِـقُونَ،  وَكُـلُّـكُمْ  أَطِـبَّاءَ  جَـهَـلَـة.

[31, 35] Qui me fera trouver quelqu’un qui m’écoute ?

آه  مَنْ  لِيْ  بِِـمَنْ  يَسْـتَـمِعْ  لِي ؟

[17, 15] Mon espérance, qui l’entrevoit ?

مَنْ  يُـعَايِنْ  رَجَائِي ؟

[6, 11] Où est ma force pour que j’espère encore ?

مَا  عَـسَى  قُوَّتِي  حَـتَّى  أَنْـتَـظِـرَ ؟

[6, 10] J’aurais du moins cette consolation de n’avoir pas renié.

فَـتبْـقَى  لِيَ  تَعْـزِيَـةٌ  وَبَهْـجَـةٌ  أَنَّـنِي  فِي  خِـضَـمِّ  آلْاَمِي  لَمْ  أَجْـحَدْ  كَـلَامَ  ٱلْـقُـدُّوس

[27, 5-6] Jusqu’à la mort, je maintiendrai mon intégrité. Je suis rompu à la justice, et n’y renoncerai pas. Ma conscience ne blâme aucun de mes jours.

حَتَّى  أُسْـلِـمَ  ٱلرُّوحَ  لَن  أَعْـزِلَ  كَـمَالِي  عَنِّي.  تََـمَـسَّكْـتُ  بِـبِـرِّي  وَلَن  أَرْخِيـهِ.  ضَـمِيـرِي  لَنِ  يُـعَيَّـرُ  يَوْمًا  مِنْ  أَيَّامِي

[19, 4] Même s’il était vrai que j’aie erré, ceci ne regarderait que moi.

.إِحْـسِـبُونِي  ضَـلَلْـتُ  حَـقًا،  فَـضَـلَالِي  يَعْـنِيـنِي  وَحْـدِي

[13.18] Je sais que la justice est de mon bord.

.لَا  بُـدَّ  أَن  أَتَـبَـرَّرُ

[19, 29] La justice de ma cause sera reconnue.

.إِنَّ  هُـنَاكَ  قَـضَاءْ

[19, 23-24] Que l’on écrive mes paroles, les fixe dans un livre et d’un burin de fer et de plomb, qu’on les incise dans le roc.

.مَنْ  لِي  بِـأَنْ  تُكْـتَـبَ  أَقْـوَالِي  وَمَنْ  لِي  بِـأَنْ  تُـحْـفَـرَ  فِي  سِفْـرٍ

 بِـإِزْمِيـلٍ  مِنْ  حَـدِيـدٍ  وَبِٱلرَّصَاصِ  أَنْ  تُنْـقَـشَ  فِي  ٱلصَّخْـرِ  لِـلْأَبَـدِ ؟

[17, 9] Le juste s’attache à sa route et persévère dans l’effort.

.أََمَّا  ٱلصَّـدِّيـقُ  فَـيَـتَـمَـسَّـكُ  بِـطَـرِيـقِـهِ،  وَيَزْدَادُ  ٱلطَّاهِـرُ  ٱلْـيَـدَيْـنِ  قُـوَّةً

 

***

La bonne nouvelle se dit « Justice » [24]

 

Paroles de Jésus [25] :

 

« Malheur à vous les riches ! Joie à ceux qui ont faim et soif de justice ! »

وَيْـلٌ  لَـكُمْ  أَيُّـهَا ٱلْأَغْـنِـيَاءُ !   ـ

  طُوبَى  لِلْـجِـيَاعِ  وَٱلْعِـطَاشِ  إِِلَى ٱلْـبِـرِّ !  ـ

Golgotha                 جُلْــجُــلَــةٌ

Poème de François Nicolas

traduction : El Hocine Messadek et Mohammed Aiouaz

 

[ Le fils [F] est dans le lointain ; le père [P] est au centre de la scène. ]

F.I.1 - Père, ne vois-tu pas que je brûle ? [26]

أَبِي،  أَلْاَ  تَـرَى  إِنِّي  أَحْــتَـرِقُ ؟

F.I.2 - Père, ne vois-tu pas que je meurs en silence à tes côtés ?

أَبِي،  أَلْاَ  تَـرَى  إِنِّي  أَمُوتُ  فِي  صَمْــتٍ  إِلَى  جَانِـبِـكَ ؟

F.I.3 - Père, ne vois-tu pas ton fils qui s’embrase et qui hurle ?

أَبِي،  أَلْاَ  تَـرَى  أَنَّ  ٱبْـنَـكَ  يَحْـتَـرِقُ  وَيَصْـرُخُ ؟

F.I.4 - Père, que fais-tu donc, que fais-tu endormi quand je souffre ?

أَبِي،  مَاذَا  تَفْـعَـلُ ؟  لِـمَاذَا  تَـنَامْ  بِٱلنَّوْمِ   وَأَنَا  أُعَانِي ؟

F.I.5 - Père, pourquoi dors-tu ainsi quand ton enfant appelle ?

أَبِي،  لِـمَاذَا  تَـنَامُ  هَـكَــذَا  عِنْـــدَمَا  يُــنَادِيـكَ  ٱبْــنُـكَ ؟

F.I.6 - Père, père, pourquoi m’abandonner ainsi aux flammes sans un regard ?

أَبِي،  أَبِي،  لِـمَاذَا  تَـتْـرُكُـنِي  أَلْـتَـهِـبُ  دُونَ  نَظْــرَةٍ  وَاحِـدَةٍ ؟

P.I.1 - Je t’entends mal, mon fils, tu sais, je t’entends mal.

.لَا  أَسْــمَـعُـكَ  جَـيِّـدًا  يَا  ٱبْــنِي،  وَأَنْــتَ  تَعْــرِفُ  إِنِّي  لَا  أَسْــمَـعُـكَ  جَـيِّـدًا

P.I.2 - Mon fils, les pères sont parfois fatigués.

.اِبْــنِي،  إِنَّ  ٱلْآبَاءُ  يَتْـعَـبُونَ  أَحْــيَانًا

P.I.3 - Mon fils, j’en sais si peu, mes bras sont lourds, ma tête est toute vide.

.اِبْــنِي،  إِنِّـي  لَا  أَعْــرِفُ  إِلَّا  ٱلْــقَـلِيــلَ،  وَذِرَاعَايَ  ثَـقِيــلَانِ،  وَرَأْسِي  فَارِغٌ  كُــلِّـيًا

P.I.4 - Fils chéri, tes paupières sont en feu, ton visage est de braise ?

اِبْــنِي  ٱلْــعَـزِيــزُ،  إِنَّ  حَاجِـبَيْـــكَ  يَشْـــتَــعِـلَانِ،  وَوَجْــهُـكَ  يَلْـتَـهِـبَ  كَالْـجَمْـرِ ؟

P.I.5 - Mon fils, pourquoi ne m’as-tu pas éveillé cette nuit ?

اِبْــنِي،  لِـمَاذَا  لَمْ  تُوقِظْــنِي  هَــذِهَ  ٱللَّـيْــلَـةَ ؟

F.II.1 - Père, cette nuit est celle de tous les incendies.

.أَبِي،  إِنَّ  هَــذِهِ  ٱللَّيْــلَـةَ،  هِيَ  لَيْــلَـةُ  كُُـلِّ  ٱلْــحَـرَائِــقِ

F.II.2 - Père, père, je crie de toutes mes forces, mes poumons n’ont plus d’air.

.أَبِي،  أَبِي،  إِنِّي  أَصْــرُخُ  بِـكُلِّ  قِـوَايَ،  وَلَمْ  يَـعُدْ  فِي  رِئَـتَيَّ  هَـوَاء

F.II.3 - Père, je pleure toutes mes larmes, je n’ai plus rien déjà pour calmer la fournaise.

.أَبِي،  لَـقَدْ  جَفَّتْ  دُمُوعِي  مِنَ  ٱلْــبُـكَاءِ،  وَلَمْ  يَبْــقَ  لِي  مَا  أُهَـدِّئُ  بِهِ  هَــذَا  ٱلْـوَطِيــسِ

F.II.4 - Père, j’ai mal aux yeux, mon ventre se calcine et les croûtes me grillent.

.أَبِي،  عَيْــنَايَ  يُؤُلِـمَانِـنِي،  وَبَطْــنِي  يَـتَـفَحَّـمُ، وَبَـقَايَا  جُـرُوحِي  تُخْــدِشُـنِي

F.II.5 - Père, reconnais-tu ma voix ? Mes sanglots m’affaiblissent et je suis déjà loin.

.أَبِي،  هَلْ  عَـرَفْــتَ  صَوْتِي ؟  إِنَّ  غَـزَارَةُ  دُمُوعِي  تُنْـــهِـكُـنِي  وَقَدْ  صِرْتُ  بَـعِيــدًا

 

P.II.1 - Mon fils, fils adoré, je te discerne mal.

.اِبْــنِي،  اِبْــنِي  ٱلْـحَـبِيـــبُ،  إِنِّي  لَا  أُمَـيِّـزُكَ  جَـيِّـدًا

P.II.2 - Ô fils, je ne t’abandonne pas ; je marche, tu sais, et je te cherche.

.آهِ،  يَا  اِبْــنِي،  إِنِّي  لَنْ  أَتَـخَـلَّى  عَنْــكَ ؛  وَأَنْــتَ  تَعْـلَـمُ  إِنِّي  أَمْــشِي  وَأَبْــحِـثُ  عَنْــكَ

P.II.3 - Mon fils, il est si dur d’entrouvrir les yeux.

.اِبْــنِي،  إِنَّـهُ  يَصْــعُـبُ  عَـلَيَّ  أَنْ  أَفْــتَـحَ  عَيْــنَيَّ

P.II.4 - Mon fils, je t’extrairai des flammes, mais où es-tu couché ?

اِبْــنِي،  سَأُخْــرِجُـكَ  مِـنَ  هَــذَا  ٱلـلَّـهَبِ،  فَـأَيْــنَ  أَنْــتَ  مُسْـتَلْـقِ ؟

F.III.1 - Père, pourquoi ne viens-tu pas ? Je suis là, je te vois.

أَبِي،  لِـمَاذَا  لَا  تَأْتِي  هُـنَا  فَـإِنِّي  هُـنَا  أَنْــظُـرُ  إِلَيْــكَ ؟

F.III.2 - Père, il n’est plus temps d’attendre, je me meurs.

.أَبِي،  لَمْ  يَـعُدْ  هُـنَاكَ  وَقْــتٌ  لِلْـإِنْــتِـظَارِ،  فَـإِنِّي  أَمُوتُ

F.III.3 - Père, pourquoi ne me sauves-tu pas ? Pourquoi ainsi me laisser seul ?

أَبِي،  لِـمَاذَا  لَا  تُنْــقِـذُنِي ؟  لِـمَاذَا  تَتْــرُكُـنِي  هَـكَـذَا  وَحِيــدًا ؟

F.III.4 - Père, qu’as-tu donc, pourquoi es-tu d’un coup si pâle ?

أَبِي،  مَا  بِـكَ ؟  لِـمَاذَا  أَصْــبَحْــتَ  فِي  وَهْـلَـةٍ  بِـهَـذِهِ  ٱلشُّـحُوبَـةِ ؟

F.III.5 - Père, c’est moi qui crépite à tes flancs, c’est mon crâne qui éclate, c’est mon dos qu’on attise.

.أَبِي،  فَـأَنَا  هُوَ  ٱلَّـذِي  يَـتَـفَرْقَـعُ  مِنْ  أَجْــلِـكَ،  وَجُمْــجُـمَـتِي  تَنْــفَـجِـرُ،  وَظَهْــرِي  يَحْــتَـرِقُ

 

F.III.6 - Père, père, pourquoi ne me parles-tu pas ?

أَبِي،  أَبِي، لِـمَاذَا  لَا  تُـكَـلِّـمُـنِي ؟

P.III.1 - Mon fils, ma langue m’étouffe, mes dents se creusent.

.اِبْــنِي،  إِنَّ  لِـسَانِي  يُخْــنُـقُـنِي،  وَأَسْــنَانِي  تَخْــتَـفِي

P.III.2 - Mon fils, la salive envahit mon palais et mes ongles se rétractent.

.اِبْــنِي،  إِنَّ  ٱللُّـعَابَ  يَغْــمُـرُ  حَـنَـكِي،  وَأَظِافِـرِي  يَـتَـقَـلَّـصُونَ

P.III.3 - Mon fils, je suis là et j’accours et je ne bouge pas.

.اِبْــنِي،  إِنِّي  هُـنَا  أَهْـرِِعُ  وَلَا  أَتَـحَـرَّكُ

P.III.4 - Mon fils, laisse-moi un instant, laisse-moi prendre force.

.اِبْــنِي،  دَعْــنِي  لَـحْــظَـةً،  دَعْــنِي  أَسْــتَـعِيــدُ  قِـوَايَ

P.III.5 - Mon fils, fils léger, j’arrive, je prends élan.

.اِبْــنِي،  اِبْــنِي  ٱلرَّهِيــفَ،  إِنِّي  آتٍ،  إِنِّي  مُنْــطَـلِـقُ  ٱلْـعِـنَانَ

F.IV.1 - Père, ma chevelure s’embrase.

.أَبِي،  إِنَّ  شَعْــرِي  يَحْــتَـرِقُ

F.IV.2 - Père, les brandons brûlent mes cils, les braises gonflent mes lèvres.

.أَبِي،  أَلْـسِـنَـةُ  ٱلنِّيــرَانِ  تُـحْــرِقُ  جُـفُونِي،  وَٱلْـجَمْــرُ  يَنْــفُـخُ  شَـفَـتَايَ

F.IV.3 - Père, n’attends pas plus longtemps, les tisons lèchent mes joues, la cendre emplit ma bouche.

.أَبِي،  لَا  تَنْــتَـظِـرُ  طَـوِيـلًا،  فَٱللَّـهَـبُ  يُـلَامِـسُ  خُـدُودِي،  وَٱلرَّمَادُ  يَـمْــلَـأُ  فَـمِي

 

F.IV.4 - Père, j’ai mal aux jambes, l’étau me broie et la fumée m’étouffe.

.أَبِي،  إِنَّ  سَاقَـيَّ  تُؤْلِـمَانِـنِي،  وَٱلْـخِـنَاقُ  يُـضَــيَّــقُ  عَلَيَّ،  وَٱلدُّخَّانُ  يَخْــنُـقُـنِي

F.IV.5 - Père, je ne reproche rien ; je t’aperçois et tu ne me vois pas.

.أَبِي،  إِنِّي  لَا  أَلُومُـكَ  فِي  شَيْءٍ ؛  فَـأَنَا  أَلْـمَـحُـكَ،  وَأَنْــتَ  لَا  تَـرَانِي

F.IV.6 - Père, lève les yeux un instant et contemple ton fils qui flambe sans un bruit.

.أَبِي،  إِرْفَعْ  عَيْــنَيْــكَ  لَـحْــظَـةً،  وَتَـأَمَّلْ  اِبْــنَـكَ  ٱلَّـذِي  يَحْــتَـرِقُ  فِي  صَمْــتِ

F.IV.7 - Père, regarde mon lit incendié, mes habits dévastés.

.أَبِي،  أُنْــظُرْ  إِلَى  سَـرِيـرِي  ٱلَّـذِي  ٱحْــتَـرِقَ،  وَثِـيَابِي  ٱلْـمُـبَعْـثَـرَةَ

F.IV.8 - Père, regarde les jouets de ton fils qui grillent avec lui.

.أَبِي،  أُنْــظُرْ  لُـعَـبَ  ٱبْــنِـكَ  ٱلَّــتِي  تَـحْــتَـرِقُ  مَـعَـهُ

F.IV.9 - Père, ne t’endors pas quand je te nomme, quand j’attends la fraîcheur de tes mains.

.أَبِي،  لَا  تَـنَمْ  لَـمَّا  أُنَادِيـكَ  وَلَـمَّا  أَنْــتَـظِـرُ  نُـعُومَـةَ  يَدَيْــكَ

P.IV.1 - Mon fils, encore un peu de temps, je reprends mes esprits, je ne sais où je suis.

.اِبْــنِي،  زِدْنِي  قَـلِيــلًا  مِنَ  ٱلْــوَقْــتِ  لِأَسْــتَرْجِـعَ  ذَاكِـرَتِي  فَـأَنَا  لَا  أَعْــرِفُ  أَيْــنَ  أَنَا

P.IV.2 - Mon fils bien-aimé, es-tu déjà si loin que je n’entende rien de tes plaintes, de tes cris ?

اِبْــنِي  ٱلْـحَـبِيــبُ،  هَلْ  أَنْــتَ  بِـهَـذَا  ٱلْـبُعْــدِ  حَـتَّى  لَا  أَسْـمَـعُ  شَيْــئًا  مِنْ  شَكْــوَاكَ  وَصَرْخَاتِـكَ ؟

P.IV.3 - Tu riais autrefois, tu chantais des eaux claires, tu aimais les jeux purs.

.فَـقَدْ  كُنْــتَ  تَضْـحَـكُ  مَـرَّاتٍ،  وَتُـغَـنِّي  لِـلْـمِـيَاهِ  ٱلصَّافِيَّـةِ  وَتُـحِـبُّ  ٱلْأَ لْـعَابَ  ٱلْـخَالِـصَـةَ

 

F.V.1 - Ô père, je dois te dire adieu. Ma peau n’est plus que plaie et mes genoux grésillent, mes orbites se dilatent.

.آهِ، يَا أَبِي، يَـجِـبُ  أَنْ  أَقُولَ  لَـكَ  وَدَاعًا، فَـبَـشَـرَتِي  لَمْ تَـعُـدٍ  سِـوَى  جُرْحًا  وَرُكْـبَـتَايَ  تَـتَـكَـمَّـشَانِ  وَمِحْـجَـرَايَ  يَـتَـمَـدَّدَانِ

F.V.2 - Ô père, il va être trop tard. Ma nuque se brise, ma langue se consume.

.آهِ،  يَا  أَبِي،  سَـيَـفُوتُ  ٱلْأَوَانُ  فَـقَـفَايَ  تَـتَـهَـشَّـمُ،  وَلِـسَانِي  يَلْـتَـهِـبُ

F.V.3 - Père, vite, il n’est que temps.

.أَبِي،  أَسْــرِِعْ  لِقَدْ  حَانَ  ٱلْأَوَانُ

F.V.4 - Père, père, je meurs et tu n’auras rien fait.

.أَبِي،  أَبِي،  أَنَا  أَمُوتُ  وَأَنْـتَ  لَنْ  تَفْـعَـلَ  شَيْــئًا

F.V.5 - Père, il est trop tard déjà, tu sais.

.أَبِي،  أَنْــتَ  تَعْــلَـمُ  أَنَّ  ٱلْــوَقْــتَ  قَدْ  فَاتَ

F.V.6 - Père, gentil père, mon doux père, adieu !

.أَبِي،  أَبِي  ٱلطَّـيِّــبُ،  أَبِي  ٱلْـحَـنُونُ  وَدَاعًا

P.V.1 - Mon fils, je suis à tes côtés depuis le commencement.

.اِبْــنِي،  إِنِّي  إِلَي  جَانِـبِـكَ  مُنْــذُ  ٱلْــبِدَايَـةِ

P.V.2 - Mon fils, je t’accompagne et je ne peux rien faire.

.اِبْــنِي،  إِنِّي  أُرَافِـقُـكَ  دُونَ  ٱلْــقُدْرَةِ  عَـلَى  فِعْــلِ  شَيْءٍ

P.V.3 - Mon fils, je te regarde, je te caresse et je te pleure.

.اِبْــنِي،  إِنِّي  أَنْــظُـرُ  إِلَيْــكَ،  وَأُلَامِـسُـكَ  وَأَبْـكِيــكَ

 

P.V.4 - Mon fils, un père n’est qu’un homme misérable, aux bras si courts, aux pensées si étroites.

.اِبْــنِي،  إِنَّ  ٱلْأَبَ  مَا  هُوَ  إِلَّا  مُـجَـرَّدَ  رَجُـلٍ  بَائِـسٍ،  قَـصِيـرِ  ٱلذِّرَاعَيْــنِ،  وَضَـيِّــقَ  ٱلْأُفُـقِ

P.V.5 - Mon fils, je ne suis pas bourreau. Un père est une maigre chose, un nom porté, un froncement de sourcils.

.اِبْــنِي،  أَنَا  لَسْــتُ  جَـلَّادًا.  فَـأَلْأَبُ  هُوَ  مُـجَـرَّدُ  شَيْءٍ  نَـحِيــلٍ،  وَ ٱسْــمٍ  مَحْــمُولٍ،  وَحَـوَاجِـبَ  مَدْكُوكَـةٍ

P.V.6 - Mon fils, un père est toujours plus petit que son fils.

.اِبْــنِي،  إِنَّ  ٱلْأَبَ  دَائِـمًا  أَصْــغَـرُ  مِنْ  اِبْــنِـهِ

P.V.7 - Mon fils, ce serait bien à toi de me sauver, de me bercer.

.اِبْــنِي،  مِنَ  ٱلْــمُسْــتَحْــسَـنِ  أَنَ  تُنْــقِـذْنِي  أَنْــتَ،  وَتُـهَدْهِـدُنِي

P.V.8 - Mon fils, je tiens ta tête entre mes mains et je baise tes yeux et je noie mon visage dans tes cheveux dorés.

.اِبْــنِي،  إِنِّي  أَشُـدُّ  رَأْسَـكَ  بَيْــنَ  يَـدَيَّ،  وَأُقَـبِّــلُ  عَيْــنَيْــكَ،  وَأُغْــرِقُ  وَجْــهِي  فِي  شَعْــرِكَ  ٱلذَّهَـبِيَّ

P.V.9 - Mon fils, la charge était trop lourde.

.اِبْــنِي،  إِنَّ  ٱلْــحِمْــلَ  كَانَ  جِـدُّ  ثَـقِيـلًا

P.V.10 - Mon fils, nul n’est coupable, vois-tu. [27]

.اِبْــنِي،  أَلَا  تَـرَى  لَا  يُوجَـدُ  مُـتَّـهَـمٌ

P.V.11 - Mon fils, mon fils, pourquoi m’as-tu abandonné ? [28]

اِبْــنِي،  اِبْــنِي،  لِـمَاذَا  تَـرَكْــتَـنِي ؟

 

***

La route peu fréquentée de Jérusalem à Gaza…

Actes des Apôtres (8, 26-39) [29]

 

 

(26) L’Esprit s’adressa à Philippe : « Pars vers le Sud sur la route peu fréquentée qui descend de Jérusalem à Gaza ! Elle est déserte. »

: ثُمَّ  إِنَّ  مَـلَاكَ  ٱلرَّبِّ  كَـلَّـمَ  فِيـلِـبُّـسَ  قِائِـلًا

«  قُمْ  وَاذْهَبْ  نَحْوَ  ٱلْـجَـنُوبِ،  عَـلَى  ٱلطَّـرِيـقِ  ٱلْـمُنْحَـدِرَةِ  مِنْ  أُورُشَـلِيـمَ  إِلَى  غَـزَّةَ  ٱلَّـتِي  هِيَ  بَـرِّيَّـةٌ  »

Aber der Engel des Herrn redete zu Philippus und sprach: „Stehe auf und gehe gegen Mittag auf die Straße, die von Jerusalem hinabgehet gen Gaza, die da wüste ist.

А Филиппу Ангел Господень сказал: «встань и иди на полдень, на дорогу, идущую из Иерусалима в Газу, на ту, которая пуста.»

(27-28) Philippe partit sans tarder. Il trouva sur la route un Africain retournant chez lui qui lisait la prophétie :

: فَـقَامَ  فِيـلِـبُّـسُ  وَذَهَـبَ.  وَإِذَا  رَجُـلٌ  حَـبَـشِيٌّ  وَهُوَ  يَقْـرَأُ  ٱلـنَّـبِيَّ  أَشَعْـيَا

Und er stund auf und ging hin. Und siehe, ein Mann aus Mohrenland, welcher war über ihre ganze Schatzkammer, der war kommen gen Jerusalem, anzubeten, und zog wieder heim und saß auf seinem Wagen und las den Propheten.

Он встал и пошел. И вот, муж Ефиоплянин, евнух, хранитель всех сокровищ ее, приезжавший в Иерусалим для поклонения, возвращался и, сидя на колесницесвоей, читал пророка.

 

 

 

 

 

 

 

(32) « On le mena comme on mène un mouton à l’abattoir.

.وَأَمَّا  فَصْـلُ  ٱلْـكِـتَابِ  ٱلَّذِي  كَانَ  يَقْـرَأُهُ  فَـكَانَ  هَـذَا »

„Er ist wie ein Schaf zur Schlachtung geführt.“

«как овца, веден был Он на заклание.

(33) Humilié, justice ne lui a pas été rendue. Qui fera le récit de sa descendance ? Sa vie est effacée de la surface de la terre. »

«  فِي  تَـوَاضُـعِـهِ  اَنْـتُـزِعَ  قَـضَاؤُهُ،  وَجِيـلُـهُ  مَنْ  يُخْـبِـرُ  بِـهِ ؟   لِأَنَّ  حَـيَاتَـهُ  تُنْـتَـزَعُ  مِـنَ  ٱلْأَرْضِ  »

In seiner Niedrigkeit ist sein Gericht aufgehoben. Wer wird aber seines Lebens Länge ausreden? denn sein Leben ist von der Erde weggenommen.“

В уничижении Его суд Его совершился. Но род Его кто разъяснит? ибо вземлется от земли жизнь Его.»

(34) L’Africain demanda à Philippe : « De qui parle-t-on ? »,

« فَـأَجَابَ  ٱلرَّجُـلُ  فِيـلِـبُّـسَ  وَقَالَ : «  عَنْ  مَنْ  يَـقُولُ  ٱلنَّـبِيُّ  هَـذَا  ؟

Da antwortete der Kämmerer dem Philippus und sprach: „Ich bitte dich, von wem redet der Prophet solches?“

«Евнух же сказал Филиппу: прошу тебя сказать: о ком пророк говорит это?»

(35) et Philippe lui annonça la bonne nouvelle.

.فَـفَـتَـحَ  فِيـلِـبُّـسُ  فَاهُ  وابْـتَـدَأَ  مِنْ  هَـذَا  ٱلْـكِـتَابِ  فَـبَشِّـرَهُ

Philippus aber tat seinen Mund auf und predigte ihm das Evangelium.

Филипп отверз уста свои и благовествовал ему.

 

 

 

(36) Arrivés à une halte offerte par un point d’eau, l’Africain demanda : « Qu’est-ce qui m’empêche d’adhérer ? »,

« وَفِيـمَا  هُـمَا  سَائِـرَانِ  فِي  ٱلطَّـرِيقِ  أَقْـبَـلَا  عَـلَى  مَاءٍ،  فَـقَالَ  ٱلْـحَــبَـشِيٌّ : «  مَاذَا  يَـمْـنَـعُ  أَنْ  أَعْـتَمِـدَ ؟

Und als sie zogen der Straße nach, kamen sie an ein Wasser. Und der Kämmerer sprach: „Siehe, da ist Wasser; was hindert's, daß ich mich taufen lasse?“

Между тем, продолжая путь, они приехали к воде; и евнух сказал: «вот вода; что препятствуетмне креститься?»

(38) et Philippe l’incorpora.

. فَـعَـمَّـدَهُ  فِيـلِـبُّـسُ

Und Philippus taufte ihn.

И Филипп крестил его.

(39) Alors l’Esprit enleva Philippe, et l’Africain poursuivit sa route vers Gaza, désormais tout joyeux.

. وَلَـمَّا  صَـعِـدَا  مِنَ  ٱلْـمَاءِ،  خَـطَـفَ  رُوحُ  ٱلرَّبِّ  فِيـلِـبُّـسَ،  فَـلَمْ  يُبْـصِرْهُ  ٱلْـحَــبَـشِيٌّ  أَيْـضًا،  وَذَهَـبَ  فِي  طَـرِيـقِـهِ  فَـرِحًا

Da sie aber heraufstiegen aus dem Wasser, rückte der Geist des Herrn Philippus hinweg, und der Kämmerer sah ihn nicht mehr; er zog aber seine Straße fröhlich.

Когда же они вышли из воды, Дух Святый сошел на евнуха, а Филиппа восхитил Ангел Господень, и евнух уже не видел его, и продолжал путь, радуясь.

 

***



[1]  Sur un vers d’Adonis

[2]  Adonis (2007) : Histoire qui se déchire sur le corps d’une femme

[3]  Adonis (1983) : Ismaël

[4]  Adonis (1961) : Chants de Mihyar le Damascène

[5]  Bible (Livre des Proverbes) & Proverbes arabes

[6]  Bible (Livre de Job)

[7]  Bible : Les Évangiles (Lc 6, 24 & Mt 5,6)

[8]  F. Nicolas (« Père, ne vois-tu pas que je brûle ? » : S. Freud, La Science des rêves)

[9]  Bible : Actes des Apôtres 8, 26-39

[10] Ismaël (1983) – trad. F. Nicolas

[11] (esprit rude) = le "h" anglais, allemand ou arabe      (esprit doux) = pas d'expiration      ' = accent aigu (tonique)      ~  = accent circonflexe (la voix monte et descend).

[12] ch, u, h, H, X : comme en arabe

[13] Histoire qui se déchire sur le corps d’une femme (Mercure de France, 2008) - traduction (révisée par mes soins) de Houria Abdelouahed

[14] Petit rappel sur Abraham et Hâjar, Ismaël et Isaac (Genèse, chapitres 16, 21 et 25)

Ismaël/Ismaïl (’ismâεîl) [« Dieu a entendu »] est le premier fils d’Abraham/Ibrahim (’ibrâhîm). Sa mère, Agar/Hajar (hâjar) [« l’émigrée »], seconde femme d’Abraham, était l’esclave égyptienne de Sarah/Sara (sâra) (la première épouse, stérile, d’Abraham) qui l’offrit à son mari. La jalousie de Sarah, son dépit devant l’auto-émancipation de Hâjar, la peur enfin que son fils tardif Isaac/Ishaq (’isHâq) ait à partager avec son frère aîné l’héritage d’Abraham condamnèrent Hâjar et Ismaël à la relégation dans le désert. Ils y furent sauvés de la mort par Yahvé/Allah (’allâh) qui promit à Ismaël, devenu frère aîné d’Isaac - et futur oncle de Jacob-Israël/Yacoub-Israïl (yaεqûb-’isrâ’îl) - que sa nombreuse descendance (marquée d’une circoncision spécifique - à la puberté, non à la naissance) formerait un grand peuple.

[15] Mot à mot : « Mon enfant est un crépuscule total. »

[16] Traduction de départ : « endormie ». Mais le mot à mot serait « qui a été endormie »…

[17]Ismaël (1983) - traduction (révisée par mes soins) de C. Abdelamir et S. Sautreau

[18] Chants de Mihyar le Damascène (1961) – traduction (révisée par mes soins) d’Anne Wade Minkowski

[19] Trad. en français de Pierre Alferi et Jean-Jacques Lavoie (Bayard)

[20] Traduction littérale de l’arabe : « La loi est une lumière. »

[21] Traduction littérale de l’arabe : « Celui qui se préserve préserve sa voie. »

[22] Seconde partie d’un vers de poésie…

[23] Petit rappel sur Job (voir le Livre de Job) : Job/Ayoub (’ayyûb) habitait le pays d’Uts, situé en Édom (au sud-est de la mer Morte). Appartenant à une nation ennemie d’Israël et de Juda, il n’était sûrement pas descendant d’Isaac. Était-il pour autant descendant d’Ismaël ? Certains en conviennent, par exemple Louis Massignon : « Job, un Arabe de Bosra, en Hauran… » (lui assignant ainsi une origine cette fois en Syrie du sud, au nord-est du lac de Galilée…).

[24] Évangiles (Sermon des Béatitudes) : Lc 6, 24 – Mt 5,6

[25]yasûε pour les arabes chrétiens, et εîsâ pour les arabes musulmans (cf. le Coran)

[26]  « Vater, siehst du denn nicht daß ich verbrenne ? » [« Père, ne vois-tu pas que je brûle ? »] Sigmund Freud (Traumbuch - La Science des rêves)

[27]« De quoi brûle-t-il sinon du poids des péchés du père. […] L’héritage du père, c’est son péché. » Jacques Lacan (Séminaire XI, p. 35)

[28] Cf. en araméen « Élôï, Élôï, lama sabaqthani ? » [« Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »] Jésus (Mc 15, 34)

[29]  Petit rappel du contexte: cet épisode (post-Pentecôte) met en scène la première conversion à la nouvelle foi, en l’occurrence celle d’un Éthiopien.