Pour une politique de soins aux toxicomanes,

contre la politique de réduction des risques !

 

 

Après Act Up (qui prône la légalisation du crack et de l’héroïne), ses affiches noires et un premier « Collectif » d’été (plutôt éphémère…), voici des émules d’Act Up and Co (ASUD…), des affiches bleues et un second « Collectif », cette fois d’automne… Les affiches noires étaient agressives et insultantes pour les gens du quartier. Les nouvelles affiches bleues sont lénifiantes, sans aspérités, pleines de bons sentiments et de généreuses intentions : tout le monde sera ainsi facilement d’accord sur le fait qu’en matière de crack, « le problème reste intact », qu’il faut s’attaquer au « problème de fond » et ne pas se contenter d’un « déplacement provisoire de la consommation », qu’il convient de constituer « une solidarité entre arrondissements », de « traiter le problème à la racine plutôt que le déplacer ». Et qui oserait objecter à ce touchant souhait d’une « véritable réflexion, ouverte et réfléchie » [sic !] ?

 

Mais pourquoi cette eau de rose, et ce soudain intérêt pour le quartier Stalingrad venant de gens qui jusque-là n’y ont guère été présents ? Quels sont les enjeux réels de cette poussée d’affiches qui occupent les murs du quartier une fois les dealers partis ?

 

Il s’agit visiblement de tenter de remettre en selle la politique de réduction des risques, qui a pourtant fait naufrage, ce que la population du 18° arrondissement maintenant  sait pertinemment. Discutons donc de cette politique, de ses objectifs, de ses résultats !

 

Une désastreuse politique de réduction des risques

 

Le Collectif anti-crack a critiqué la politique de réduction des risques car

• elle ne fait que déplacer les problèmes en substituant deux drogues (la méthadone et le subutex) à une autre (l’héroïne) ;

• elle argumente qu’il n’est plus nécessaire de soigner les toxicomanes de leur dépendance et qu’il suffit de les soigner des maladies infectieuses ;

• elle s’enorgueillit des économies budgétaires qu’elle réalise et planifie la diminution des places de post-cures ;

• elle ne traite plus que des conséquences (les méfaits latéraux de la drogue : infections, etc.) en déclarant qu’il ne sert plus à rien de combattre la drogue elle-même ;

• elle veut nettoyer les seringues mais se refuse à nettoyer leur contenu ;

• elle en appelle à la constitution de salles de shoot (sûr moyen, pourtant, d’enfermer les héroïnomanes dans leur servitude volontaire au lieu de les aider à s’en libérer), à la création de droguatoriums comme un Le Pen a souhaité des sidatoriums ;

• elle en vient à prôner la légalisation du crack et de l’héroïne (Act Up milite pour cette légalisation depuis 1998) ;

• elle excuse les dealers en en faisant des gens au service des toxicomanes.

 

Le travail du Collectif anti-crack

 

Contre cette politique de réduction des risques, désastreuse en matière de combat contre la drogue — et cela les habitants du 18° arrondissement ne le savent que trop —, le Collectif a prôné une politique de soins.

Le Collectif anti-crack a toujours travaillé en coordination avec les quartiers voisins du 18°, manifestant ainsi avec eux dès octobre puis décembre 2001.

Le Collectif anti-crack n’a jamais demandé aucun privilège pour le quartier Stalingrad mais seulement que la police y fasse son travail ordinaire contre les criminels, en l’occurrence contre les dealers de crack. C’est à la police d’arrêter les dealers, non à des milices privées. Et, avec le crime, il n’y a pas de complaisance qui vaille.

Le Collectif anti-crack a refusé de confondre les dealers (criminels à arrêter) et les toxicomanes (il ne sert à rien de les emprisonner au motif qu’ils sont dépendants).

Le Collectif anti-crack avait bien conscience que se réapproprier l’espace public accaparé dans le quartier par le trafic de crack n’était qu’un des aspects (nécessaires !) du problème. C’est pour cela qu’il a avancé la proposition d’une politique globale de soins aux toxicomanes, politique qui vise à s’attaquer à la racine des problèmes.

 

Qu’est-ce que la politique de soins prônée par le Collectif anti-crack ?

 

En deux mots, cette politique de soins veut privilégier l’action sur la demande de drogues en faisant diminuer le nombre de toxicomanes en France, nombre qui ne cesse de croître depuis 30 ans : 2000 héroïnomanes accros en 1970, 180 000 en 2000 ! [1]

• La police doit certes lutter contre l’offre de drogues, mais lutter contre la drogue passe surtout par une réduction de la demande de drogues.

• Se battre contre la demande de drogues est l’affaire de tous et ne saurait être seulement celle des pouvoirs publics. La lutte contre la drogue (lutte qui n’est pas une guerre !) est évidemment une lutte sans fin, comme l’est la lutte contre le crime, menée par l’humanité depuis Caïn. Ce n’est pas là une raison pour l’abandonner, tout au contraire : c’est ce qui en atteste précisément l’importance permanente !

• Pour restreindre la demande de drogues, il faut d’abord une prévention qui décourage les jeunes d’entrer dans la drogue et plus seulement qui leur conseille de freiner leur consommation de drogues !

• Il faut ensuite encourager les toxicomanes actuels à sortir de leur servitude volontaire, à se sevrer et conquérir une abstinence. Pour cela il faut multiplier par trois les places de post-cures que la politique de réduction des risques n’a cessé de faire diminuer ces dernières années.

• Il faut également mettre en place un Samu toxicomanie qui aille à la rencontre des toxicomanes et leur offre de prendre du recul par rapport à la rue.

• Il ne faut plus que la politique en matière de drogues soit commandée par de simples questions d’économies budgétaires.

 

Cette politique de soins incommode manifestement Act Up and Co. Il est vrai qu’ils sont pour la légalisation du crack, de l’héroïne, de la cocaïne, et qu’ils sont fiers de déclarer : « Drogués on l’est, drogués ça nous plaît ! » (Toxipride [sic !] du 7 juin 1998 [2]). Grand bien leur fasse !

 

Pour un débat public ? Chiche ?

 

Politique de soins ou politique de réduction des risques ? Tel est donc l’enjeu qui surplombe aujourd’hui notre quartier.

Notre proposition est alors celle-ci : puisque les affiches bleues en appellent d’un débat avec toutes les parties (« sans exclure personne ») et d’une « réflexion réfléchie »…, pourquoi ne pas débattre de ces propositions politiques faites en juin dernier par l’ex-Collectif-anticrack ? Ne constituent-elles pas des « réponses sérieuses aux problèmes liés à la toxicomanie de rue » ?

Nous proposons pour cela une rencontre publique, confrontant les arguments de chacun, le jeudi 14 novembre à 19 h 30 au café Palais de Oued-Rhiou.

 

Des membres de l’ex-Collectif-anticrack

06 76 58 18 27               

Stalingrad@noos.fr       www.entretemps.asso.fr/Stalingrad



[1] Cf. Drogues et dépendances, Indicateurs et tendances 2002, OFDT, page 38

[2] Cf. Act Up, une histoire par Didier Lestrade (Denoël – 2000), page 402