Zurban n°60 (17 au 23 octobre 2001)

« Non à la drogue, non au racket, non à l'insécurité ! »

© Vincent Rosenblatt


Stalin-crack

Tous les mardis soir, depuis plus d'un mois, les riverains de la place de la Bataille-de-Stalingrad manifestent contre le crack. Ras-le-bol et SOS.

En un mois, quatre manifestations. Pas de doute, les habitants de Stalingrad sont déterminés à se réapproprier leur quartier victime du crack. Déterminés à en finir avec ce triste ballet quotidien entre dealers et usagers dans les cours d'immeubles. A chaque manifestation du mardi soir, les mêmes slogans et la même question : «Que fait la police ?» «Nous demandons simplement à la police de dissoudre les rassemblements mafieux qui vivent grâce et pour le crack», réclame François Nicolas à la tête du collectif de riverains.
Mais pas si simple de faire le ménage. «Arrêtons de dire que la police se tourne les pouces», s'énerve Roland Maucourant, commissaire principal des 10e, 18e et 19e arrondissements. Une présence en uniforme supplémentaire ne réglera rien. Elle ne fera que déplacer le problème dans un autre quartier. L'inquiétude des riverains est légitime, mais la toxicomanie est un phénomène de société. Les toxicomanes méritent un traitement médical. Nous arrêtons régulièrement quelques dealers pour diluer le phénomène et le rendre supportable.» En clair, le premier flic du nord de Paris n'est pas favorable à une politique ultrarépressive façon New York. Un point de vue partagé par les associations de prévention comme Coordination 18. «Lorsqu'on discute dans la rue, on s'aperçoit que le sentiment de rejet s'atténue quand les habitants connaissent les usagers, des membres de leur famille parfois», explique Pierre Leyrit, directeur de l'association. Hervé Rossignol responsable du sleep-in (accueil de nuit) de la rue Pajol (18e) est plus pragmatique. Depuis sept ans, son havre de paix au milieu de la jungle de la Chapelle apporte une aide d'urgence aux toxicomanes. «Au moins, lorsqu'ils sont ici, ils n'emmerdent pas les riverains», lâche-t-il crûment. La solution passe peut-être provisoirement par ce type de structure. En octobre 2000, Bertrand Delanoë, alors en route pour l'Hôtel de Ville, avait reconnu que Paris était très en retard dans ce domaine. Les chiffres lui donnent malheureusement raison. Paris compte un seul sleep-in, celui de la rue Pajol justement, qui peut héberger 30 toxicomanes maximum, et une poignée de lieux d'accueil et d'écoute.

Grégoire Queinnec