1. Concentrer notre cible sur le trafic de crack
Le trafic de crack est pour nous habitants le cur du problème
de la drogue. C'est ce trafic qui organise le plus de dealers,
c'est lui qui rend fous les drogués. C'est contre ce trafic
que nous concentrons nos actions.
2. Viser la dispersion du trafic.
Notre objectif : que ce trafic soit dispersé. Ce trafic
est installé au vu et au su de tout le monde. Nous agissons
pour sa dispersion, sans avoir pour autant à prendre position
sur le travail complémentaire de la police (les arrêter
ou non) et de la justice (les condamner ou non).
3. La police doit faire ce travail.
Pour disperser ce trafic, nous demandons que la police patrouille
jour et nuit aux endroits même où ce trafic s'est
installé. Ce trafic s'installe aux endroits où il
peut trouver tranquillité. Il suffit de rompre cette tranquillité
pour qu'il soit contraint de se disperser et d'aller voir ailleurs.
Nous ne voulons pas monter des milices privées pour faire
ce travail. C'est à la police de faire son travail sur
ce point.
4. Notre méthode : les habitants reprennent possession
de l'espace public.
Tracts, affiches, débats, discussions ; enchaîner
les manifestations, le tout sur place, en particulier aux abords
même du trafic. Redonner confiance aux habitants, au quartier.
Allier habitants et commerçants.
Ce sont aux pouvoirs publics de venir sur place plutôt qu'à
nous d'aller dans leurs locaux. Le problème aujourd'hui
n'est plus d'information mais de volonté et de décision.
Seule une mobilisation résolue et prolongée des
habitants pourra contraindre les pouvoirs publics et la police
à faire leur travail.
Le risque principal : la lassitude, notre lassitude devant l'inertie
de l'État et ceux qui nous chantent les sirènes
de la concertation, des commissions, des rapports, etc. C'est
pour cela qu'il est essentiel de concentrer nos forces sur le
travail auprès des habitants. C'est de lui que dépendra
le succès pratique de notre mobilisation.
5. Disperser ce trafic aux endroits dont nous nous sommes
immédiatement responsables.
Ce que deviennent drogués et dealers hors de nos quartiers
ne relève pas de notre responsabilité. Nous ne nous
considérons pas responsables de tous et en tout lieu, ce
qui serait d'ailleurs absurde. Les drogués sont avant tout
responsables d'eux-mêmes. Nous ne sommes pas leurs parents,
leurs thérapeutes, leurs tuteurs. S'ils continuent ailleurs,
cela relève de leur responsabilité, non de la nôtre.
Nous agissons là où nous sommes et tenons notre
expérience à la disposition de chacun. C'est cela
la vraie responsabilité, et non les discours généraux
et nuls.
6. Questions laissées volontairement de côté
· La question d'une éventuelle dépénalisation
de la drogue en France peut sans doute se poser. Nous ne prenons
pas position sur ce point. Notre conviction, à tout le
moins : la drogue serait-elle dépénalisée
en France que le crack resterait interdit en raison de sa dangerosité
particulière, comme l'absinthe est interdit en France depuis
plus d'un siècle lors même que l'alcool y est autorisé.
Il y a donc sens à se mobiliser contre le trafic de crack
sans s'encombrer de la question d'une éventuelle transformation
de la législation existante.
· La question du travail social et sanitaire en direction
des drogués mérite également discussion.
On peut avoir sur cette question des avis très partagés
Notre proposition est de nous tenir à l'écart de
cette dimension. Nous agissons dans l'urgence et localement. Un
éventuel assèchement du marché de la drogue
par resocialisation des drogués (si tant est que ce soit
envisageable) ne pourrait prendre que des années. On ne
peut laisser pendant des années les enfants menacés
quotidiennement par ce trafic ! Il faut agir tout de suite pour
eux. Quand ils auront été agressés, ce sera
trop tard.
· Nous ne prenons pas position sur les questions proprement
politiques : « politique » contre la drogue, «
politique » de l'État, partis « politiques
», etc. Notre action est collective et publique. Elle n'est
pas pour autant « politique » stricto sensu.
· Ces questions, volontairement laissées de côté,
peuvent être par ailleurs abordées par qui le souhaite
dans un autre cadre. Différentes orientations « politiques
» nous semblent ici compatibles avec notre propre mobilisation
sans que nous visions à les homogénéiser.
7. Propositions pratiques.
· Coordonner des manifestations dans chaque quartier concerné,
en le faisant savoir.
Par exemple manifester tous les mardi soir simultanément
dans trois lieux différents, un par arrondissement (sans
doute suffira-t-il de deux lieux car Stalingrad conjoint les 10ème
et 19ème). Ou organiser deux manifestations par semaine,
une dans chaque lieu (par exemple mardi : Stalingrad, jeudi dans
le 18ème) avec délégation représentative
des autres quartiers.
· Avoir un matériel commun pour ce faire : tracts,
affiches, communiqués de presse, liens entre sites internet,
etc.
· Travail commun pour toucher d'autres publics de nos quartiers.
Exemple : contacter les responsables des mosquées et églises.
Contacter systématiquement écoles, crèches,
parents d'élèves Leur proposer des réunions
publiques.
· Travail commun pour aller coller des affiches aux lieux
mêmes du trafic, pour y diffuser nos tracts et appeler les
habitants à nous rejoindre.
· Réfléchir à la suite, si ceci n'aboutit
pas rapidement (courant octobre) : permanences publiques avec
panneaux (plus faciles à tenir à quelques-uns qu'une
manifestation), perturbations des prochaines réunions électorales
sur nos quartiers, occupations de lieux publics
Tout ceci constitue des propositions, à discuter samedi.
Il nous est toujours possible d'adopter une ligne de coordination
plus « basse » que celle ici proposée, préservant
plus nettement la diversité de nos histoires, par exemple
en décidant plus simplement de nous tenir au courant de
nos actions respectives.