COMMUNIQUÉ (30 octobre 2005)

 

Exercice illégal de la toxicomanie ?

 

Quel serment d’Hippocrate serait compatible avec la pratique d’une intoxication proclamée « médicalisée » ?

Suffirait-il donc qu’un acte soit pratiqué par un médecin pour être promu « médicalisé » ?

Nous posons ainsi cette question aux médecins envisageant de collaborer avec EGO pour créer clandestinement une salle de shoot : des différentes versions du serment d’Hippocrate et du code de déontologie médicale délimitant l’éthique d’une clinique digne de ce nom, quelle est votre version ?

En particulier l’interdit suivant (« Je ne remettrai à personne du poison, si on m’en demande, ni ne prendrai l’initiative d’une pareille suggestion ») y trouve-t-il bien sa place ?

 

Après l’affaire du sang contaminé, se prépare-t-on à une nouvelle affaire d’empoisonnement « médicalisé » ?

 

*

 

Questions aux médecins

 

Notre temps semble à ce point désorienté (voir les émissions de France-Culture « Nous sommes tous dans le brouillard » !) que la délimitation élémentaire entre actes criminels et actes honorables peut être brouillée par les promoteurs de quartiers libres aux drogues.

Les tenants des salles de shoot font ainsi usage courant de l’épithète « médicalisé », laissant ainsi entendre qu’il suffirait qu’un médecin pratique un acte pour ipso facto légitimer cet acte, lui donner le statut de « soin médical » et l’élever à la dignité d’une « clinique thérapeutique ».

Le sophisme ici mis en œuvre (l’idéologie de la réduction des risques est bâtie sur des paralogismes) consiste à poser que ce serait la qualité de médecin qui ferait la qualité médicale de l’acte, et non l’inverse.

Que nous sachions pourtant, c’est au nom d’une certaine caractérisation préalable de ce qu’est la médecine qu’on peut juger si tel ou tel acte relève bien de la médecine et si tel ou tel praticien mérite alors le nom de médecin, non celui de charlatan, ou de criminel. C’est au nom d’une délimitation de ce que « clinique » veut dire qu’on pourra juger si telle ou telle personne est un bon clinicien, et non pas un escroc.

Ce n’est donc pas le titre de médecin qui autorise de nommer « médical » chacun des actes posés, fût-il effectué dans le cadre d’un cabinet : a-t-on jamais nommé viol « médicalisé » les pratiques de tel ou tel médecin déchu ? Parle-t-on d’empoisonnement « médicalisé » quand un docteur Petiot officie ? On parle seulement d’actes criminels commis par des gens se réclamant indûment du titre de médecin

 

À l’écart de l’immense majorité, quelques médecins semblent, dans ce pays, prêts à aider des toxicomanes à continuer de s’intoxiquer, non seulement à l’héroïne mais qui plus est à la cocaïne et au crack, et cela au nom de l’aide « humanitaire » et de la compassion « citoyenne »… Ben voyons ! Qui ne connaît les justifications extravagantes que tout criminel sait trouver à ses actes ?

 

La médecine s’est dotée de serments, codifiant ce qui relève d’elle et ce qui à ses propres yeux serait inacceptable. Déroger à ce code pour un médecin, c’est s’abaisser, et se corrompre.

Sachant qu’il y a plusieurs versions en circulation d’un tel serment-code, nous demandons : avec quelle version du code de déontologie médicale une aide à l’intoxication serait-elle compatible ?

 

Nous lisons et nous interrogeons :

·         « Chaque médecin est responsable de ses décisions et de ses actes. » (article 69 du Code de déontologie)

Comment la communauté des médecins demandera-t-elle des comptes aux médecins qui seraient prêts à favoriser la consommation de crack ?

·         « Je ne remettrai à personne du poison, si on m’en demande, ni ne prendrai l’initiative d’une pareille suggestion » (Serment d’Hippocrate)

Favoriser la consommation de crack, est-ce vraiment compatible avec cet interdit ?

·         « Mon état ne servira pas à favoriser le crime. » (Serment médical de l’Ordre des médecins)

Participer à une salle de shoot, n’est-ce pas favoriser le crime, a minima des dealers qui fourniront le crack à consommer ?

·         « Il est interdit aux médecins de délivrer des médicaments non autorisés. » (article 21 du Code de déontologie)

L’héroïne serait-elle devenue le « médicament des héroïnomanes », le crack celui des crackés, le sang contaminé celui des hémophiles, le plomb celui des enfants des taudis, l’amiante celui des ouvriers du bâtiment, le virus aviaire celui des paysans, ad libitum… ?

Au total, nous demandons au médecin prêt à s’engager avec EGO et Coordination Toxicomanies 18 dans l’installation (clandestine) d’une salle de shoot : quel est votre serment d’Hippocrate, celui qui pour vous délimite une éthique de la médecine ?

 

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