« Time to
act : global apathy towards HIV/AIDS is a crime against
humanity »,
Lancet vol.360 30 novembre 2002
En voilà une inconséquence ! Le mois dernier, nous décernions à Robert Feecham du Fonds Mondial, et à ses hôtes de « Libération » le titre de plus vilains du mois pour le même énoncé semble-t-il, ce mois-ci nous voulons saluer l’article du Lancet. Et bien oui, il y a l’énoncé et il y a la situation dans laquelle il se trouve prononcé. Dans le premier cas, parole de collabo, c’est un crime contre l’humanité j’y participe ! (comme nous l’a précisé le premier décembre le Pr. Kazatchkine, où l’on reconnaîtra le cri princeps du collabo : « si on ne le faisait pas, çà serait pire »). Dans le cas présent, c’est un crime contre l’humanité, je le dénonce, on est dans le cadre d’une discussion « au sein du peuple », ne craignons pas de le dire, qui porterait sur témoignage ou bien action , dénonciation ou politique.
En l’occurrence
l’article a le double intérêt, et le double mérite,
d’être signé par un groupe de médecins connus dans le
domaine (c’est peut-être bien la première fois) et de tenir
une proposition sur le monde –un seul monde, et pas deux-.
Le groupe des signataires est
déjà mondial : argentin, canadien, hollandais, indien, italien, ougandais, québecquois
.(Nous remarquons bien sûr
l’absence de tout français : est-ce parce que, comme
le disait l’autre jour plaisamment un très jeune ami,
« bien sûr, bobo, çà vient de
collabo » ?). Les chiffres et les considérations
qu’il propose sont aussi délibérément mondiaux, et
placés sous la dédicace d’un paysan du Malawi, Fred
Minandi , traité dans le cadre d’un des programmes de
Médecins Sans Frontières , venu à Barcelone avec cette
organisation pour y intervenir sur les traitements.
Les chiffres :
L’ONUSIDA estime que
plus de 60 millions de personnes ont été infectées par le
VIH : un tiers de ces personnes sont mortes.
Sur les 40 millions de
personnes atteintes aujourd’hui par le VIH, 28 millions vivent en Afrique
sub-saharienne, 6 millions en Asie du sud et du sud-est, 1,5 million en
Amérique latine, 500 000 dans les Caraïbes, 1 million en Europe de
l’est et Asie centrale, 1 million en Extrême-Orient et dans le
Pacifique, 500 000 en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, 500 000 en Europe de
l’ouest et 1 million en Amérique du nord.
L’espérance de
vie est aujourd’hui de 47 ans en Afrique sub-saharienne : elle
serait de 62 ans sans le VIH/SIDA.
Le Fonds Mondial créé sur les instances de
Kofi Annan était supposé disposer de 10 billions de dollars par
an, fournis par les différents pays du monde au prorata de leur produit
national. Il ne dispose que de 2,1 billion pour les cinq prochaines
années, soit 4% de ce que Kofi Annan demandait pour l’année
dernière.
Les
considérations :
Sont cités cinq pays importants par leur population,
le développement de l’épidémie, les choix qu’ils ont à
faire et l’insuffisance de leur réponse : la Russie, le
Nigeria, l’Inde, l’Ethiopie et la Chine. Considérer le monde
comme multiplicité de pays et donc de possibles nous paraît une
bonne chose. La même considération prévaut lorsqu’il
s’agit d’exemplifier le fait que « l’argent
existe » : Canada, Chine, Etats-Unis.
Finalement, ce texte parle au
présent , considère qu’il y a un monde et déclare que toute vie
compte : « The fate of people like Fred Minandi rests on
our actions and the actions of ours leaders. The time to act is
now », telle est la phrase finale.
Après quoi les
militants que nous sommes peuvent demander quelle est l’action
envisagée, et remarquer que les phrases qui précèdent
immédiatement la conclusion sont les
suivantes : « Inaction against HIV/AIDS today is a crime
against humanity that cannot be tolerated any longer. Immediate action is needed to
move this issue forward and must start by ensuring that political leaders fulfil their commitments on a local,
regional and global basis without
further delay ».
Nous remarquions lors de la
réunion du 10 janvier que
pays et action vont de pair (l’absence des pays au moment de conclure est
ce qui jette le doute sur l’action). Entre les deux termes, il y a
réciprocité. Nous proposons une maxime sur pays et monde. La
France peut fournir les traitements, elle doit le faire. Le pays existe de ce
qu’il peut mettre en œuvre et ce qu’il peut mettre en
œuvre fait qu’il existe. C’est pourquoi notre
déclaration est coextensive à la proposition militante, et
personne ne n’y trompe. La réaction d’apathie qui lui est
opposée se formule toujours comme : il n’ y pas la France
c’est l’Europe, pas l’Europe c’est
l’Amérique et ainsi de suite.[1]
En ce début
d’année, nos saluts et nos vœux les plus chaleureux à
l’hétéroclite petite internationale des militants qui
mènent à leur façon dans leurs pays l’universelle
bataille pour l’accès aux traitements Nous sommes heureux de
pouvoir désormais nous y compter.
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