[Lacan, Télévision, p.40]
Partir du non-rapport, toujours fondamental chez Lacan.
« Reste, dit François Nicolas, l'hypothèse
extrême, qu'il me faut compter comme l'hypothèse
0, ou + 1, qui serait celle d'un non-rapport : il n'y aurait pas
de rapport de la musique et de la psychanalyse. Cette hypothèse
fixerait alors pour cible à notre séminaire l'exploration
d'une inexistence plus encore que d'un impossible. » («
Comment la musique peut-elle penser avec la psychanalyse ? »
II, fin).
J'ai toujours été frappé par le silence de
la psychanalyse sur la musique, si je me réfère
au peu d'écrits classiques sur la question : Freud, rien,
Lacan : presque rien. Exception : Theodor Reik, Variations
sur un thème de Mahler, mais en le lisant de près,
je trouvais qu'il n'y avait jamais guère qu'un commentaire
des textes mis en musique par Mahler, voire quelques aperçus
sur la fantasmatique de Mahler, mais jamais rien, par exemple,
sur l' « intérieur » de la musique, tel que
: qu'est-ce qu'un accord de septième de dominante pour
la psychanalyse ?
Alors que, par exemple, Schopenhauer, dont je parlerai plus loin,
peut écrire : « La cadence parfaite demande à
être précédée de l'accord de septième
sur la dominante, comme le désir le plus pressant peut
seul être suivi de l'apaisement le plus profond et d'une
pleine tranquillité. » (1)
Il y eut aussi le N°9 de Musique en jeu, de 1972 :
« Psychanalyse et musique », avec notamment un article
de Guy Rosolato : « Répétitions », et
un de Dominique Jameux : « Jeu de maux », à
quoi il faut ajouter quelques écrits d'Alain Didier-Weil
: à propos de la perception chez l'auditeur : « De
quatre temps subjectivants » (Ornicar ? N°8,
hiver 1976-7) et un chapitre entier, consacré entre autres
au temps musical, « Le temps de l'autre : la musique »,
dans son ouvrage Les trois temps de la loi (Seuil, 1995).
Non-rapport :
Ce n'est pas que Freud, malgré ses affirmations (ou ses
dénégations), fût si sourd qu'il le dit à
quoi que ce soit de musical : il analyse la voix de Sarah Bernhardt
(c'est du théâtre, mais enfin ), il loue les chansons
d'Yvette Guilbert (il est vrai qu'il la connaît), il raconte
dans un style digne des Marx Brothers une représentation
de Carmen en Italie, et on s'aperçoit qu'il connaît
cet opéra par cur. Peut-être ne voulait-il pas donner
dans le conformisme conservateur de Vienne, dont Theodor Reik
nous relate l'opposition entre Strauss, chéri de la bourgeoisie
réactionnaire, et Mahler, prisé des progressistes.
Lacan a seulement énoncé que la musique et l'architecture
étaient arts suprêmes (Séminaire non publié,
dont je ne retrouve pas la référence). Diego Masson
lui fit connaître Gesualdo. Il allait couramment aux concerts
du Domaine musical. Il semblait ne pas vouloir s'exprimer sur
la musique.
Symptôme, chez les deux auteurs, d'un non-rapport.
Ce non-rapport pourrait s'appuyer (si j'ose dire !) sur trois
abîmes, que j'évoquerai rapidement :
1° Si l'inconscient est structuré comme un langage
(thèse de Lacan), le langage musical n'est pas défini
comme le langage de Saussure : ou en tout cas, en laissant de
côté toute considération linguistique, on
ne peut repérer de processus primaires dans la musique
au sens où Freud en fait les procédés par
excellence du rêve, du symptôme, etc. et au sens où
Lacan les reprend (le déplacement et la condensation).
2° La voix comme objet a de Lacan n'est pas
« la voix humaine », pas même la voix au sens
où Barthes parle de son grain (« Le grain de la voix
», article paru justement dans le N°9 de Musique
en jeu) et Jacques-Alain Miller va jusqu'à dire que
la voix comme objet a, cause du désir, dans la pulsion
invocante donc, ne s'entend pas : « La voix lacanienne,
dit-il, la voix au sens de Lacan, non seulement ce n'est pas la
parole, mais ce n'est rien du parler. [] À cet égard,
la voix, dans l'usage très spécial que Lacan fait
de ce mot, est sans doute une fonction du signifient ou
mieux, de la chaîne signifiante en tant que telle. »
Et encore : « La voix donc, on ne s'en sert pas ; elle habite
dans le langage, elle le hante. Il suffit de dire pour qu'émerge,
surgisse la menace que vienne au jour ce qui ne peut se dire.
Si nous parlons autant, si nous faisons nos colloques, si nous
bavardons, si nous chantons et si nous écoutons les chanteurs,
si nous faisons de la musique et si nous en écoutons, la
thèse de Lacan comporte que c'est pour faire taire ce qui
mérite de s'appeler la voix comme objet a. »
(2)
3° Le champ des affects en psychanalyse correspond-il
mieux aux effets de la musique ? On aperçoit aisément
une différence entre nos passions vécues et les
sentiments que la musique évoque en nous. Tout le monde
sait qu'il y a sens à redire, après d'autres, que
« la musique n'exprime rien ». Les commentateurs s'en
tirent par des projections injustifiées : ce jour-là,
le compositeur était dépressif, triomphant, amoureux.
C'est toujours vrai, donc toujours indémontrable.
Mais bien entendu, il faut faire aussitôt de chacun de ces
rapports impossibles un réel (« l'impossible, c'est
le réel », thèse de Lacan).
Psychanalyse appliquée :
Comment poser la question ? Parmi les modes de rencontre entre
psychanalyse et musique déduits par François Nicolas
dans son article cité, la catégorie de compatibilité
m'a retenu, avec l'idée d'un conditionnement réciproque,
dû à l'époque : un certain structuralisme
de mise entre psychanalyse lacanienne et musique sérielle,
par exemple (comme avec l'anthropologie lévi-straussienne,
ou la mythologie selon Dumézil (3)).
La psychanalyse, à la supposer évoquer la musique,
de Freud à Lacan, l'aurait fait plutôt en allant
de ce qu'on pourrait appeler une « voie profonde »
à une « voie structurale ». Autrement dit,
on sera passé de présupposés affectifs sur
la musique (qu'on trouve chez Theodor Reik, par exemple) à
des présupposés structuraux, de même qu'on
serait passé de l'impressionnisme à Cézanne,
et dans la musique elle-même, de la musique impressionniste
au sérialisme, à l'abandon de la tonalité,
etc. Sans trop s'attacher aux dates, puisque Freud est objectivement
contemporain de l'École de Vienne en musique, mais certainement
pas subjectivement. Est-il même contemporain de Mahler,
qu'il reçoit pourtant en consultation. ?
Cette connivence visible (audible) ne relève en tout cas
pas de la psychanalyse appliquée. Rappelons-nous : «
La psychanalyse ne s'applique, au sens propre, que comme traitement,
et donc à un sujet qui parle et qui entende. » [Lacan,
« Jeunesse de Gide », in Écrits, p.747]
Ce qui entraînerait à la rigueur quelque psychanalyse
du sujet écoutant (ou écouté), (ce qui rejoint
en partie la démarche d'Alain Didier-Weil), mais non de
la musique elle-même, non de la pensée de
la musique.
Le point de vue lacanien serait donc : comment la musique fait-elle
avancer la psychanalyse ? On verra qu'en réalité,
lorsque l'on est au cur de la réflexion entre la psychanalyse
et un autre art, on a du mal à distinguer lequel des deux
fait « avancer » l'autre, parce que le rapprochement
suscite une espèce d'intersection, d'indivision entre les
deux. L'art orne le trou de « La Chose », et la Chose
est donc traitée avec l'art. : « Tout art, dit Lacan,
se caractérise par un certain mode d'organisation autour
de ce vide. » (4) De même, lorsque Lacan parle d'Hamlet,
dont il refuse de faire un cas clinique, rien ne l'empêche
d'appliquer tout de même à Shakespeare des interprétations
qui étaient la théorie du désir, mais s'appliquent
aussi, ne fût-ce que comme interprétations, au texte
de Shakespeare, qu'il lui arrive même de changer ; ainsi,
à propos de la phrase « The body is with the king,
but the king is not with the body » : « Remplacez
le mot roi par le mot phallus, dit Lacan, et vous vous apercevrez
que c'est justement ce dont il s'agit, etc. » [Le Séminaire,
LivreVI, Le désir et son interprétation,
séance du 29 avril 1959, in Ornicar ? N°26/27,
p.43]. Bien plutôt, de telles applications sont de mise
; ainsi « La confusion d'Ophélie et de Phallos n'a
pas besoin de voisins, elle apparaît dans la structure.
» [séance du 8 avril 1959, in Ornicar ? N°25,
1982, p.35] La psychanalyse, qui ne s'applique pas à une
uvre entière, autorise cependant des applications locales
qui sont en réalité des interprétations.
On distingue donc ici l'opération de déplacement
(de mot) que Lacan effectue, du diagnostic clinique sur Hamlet,
auquel il se refuse.
Repartons d'un point de vue général, et qui tienne
compte de ce qu'on dit en général sur la musique
: qu'elle a un côté mathématique et un côté
expressif ou affectif. Ne méprisons pas ces vues communes.
Elles m'incitent à partir, à l'opposé, du
point de vue original de Schopenhauer sur la musique : une des
vues les plus originales qui soient dans l'histoire de la philosophie
(avec Platon sans doute). Schopenhauer reprend d'abord la définition
de Leibniz : « Exercitium arithmeticae occultum nescientis
se numerare animi (« Un exercice d'arithmétique
inconscient, dans lequel l'esprit ne sait pas qu'il compte »).Ceci
pour la part mathématique de la musique. À cette
définition exacte, mais prise d'un point de vue «
inférieur » aux yeux de Schopenhauer, il substitue
cette autre, qui tient compte selon lui d'un point de vue «
infiniment élevé » : « Musica est
exercitium metphysices ocultum nescientis se philosophari animi
» (« La musique est un exercice de métaphysique
inconscient, dans lequel l'esprit ne sait pas qu'il fait de la
philosophie »).
Nous nous inspirerons de ce point de vue.
Un noeud borroméen :
Peut-on donner une définition de la musique par la
psychanalyse ? Oui, si la psychanalyse s'avise de ses rapports
impossibles avec la musique, qui sont, me semble-t-il, de trois
ordres (reprise des trois impossibles du début) :
1° Du point de vue de la structure, qu'il faut préférer
à la question du langage. Or la « structure la plus
largement pratique des données de notre expérience
» [Écrits, p.804-5], est, pour Lacan, dans la psychanalyse,
le temps rétroactif. Le sujet prend conscience que l'après-coup
fait retour sur le déjà là, etc. De même
la musique délinéarise le temps, jusqu'au point
que Mozart se disait, dans une lettre, embrasser d'un seul regard
ou d'une seule perception intérieure, immédiate
ou instantanée, l'ensemble du morceau qu'il venait de composer
dans sa tête, et qu'il ne lui restait plus qu'à transcrire.(6)
Mais cette impression d'unité de vision n'a lieu que dans
l'espace mathématique de la musique, où s'expérimente,
s'éprouve concrètement le plaisir de nombres que
l'on ne peut nombrer, de calculs que l'on ne peut effectuer, d'équilibres
que l'on ne peut évaluer, de temporalités qui se
divisent exactement ou non, de commensurabilités et d'incommensurabilités,
d'anticipations et de rétrospections, et tout cela sans
le savoir : il y a bien là des lois, mais elles nous sont
inconnues, et cela vaut aussi pour le compositeur, qui connaît
les lois de composition d'une sonate, d'une fugue, mais s'affronte
aussi à des lois d'un autre ordre, qu'il découvre
au fur et à mesure. De même que chaque cas clinique
fait exception à la structure où on voudrait le
ranger, de même, chaque fugue de Bach découvre ce
qui déroge aux lois de la fugue. C'est pourquoi toute grande
oeuvre musicale est grosse d'avenir : penser à tout ce
que Schönberg déclare devoir à ses prédécesseurs,
et qu'il expérimente cependant à partir d'eux de
façon créatrice.
2° Non pas la voix, sans doute, mais quelque chose
comme le discours, car il y a en musique des phrases, des affirmations,
des interrogations, etc., en bref quelque chose qui rend audible
le discours de l'Autre, comme ce que Lacan dit du théâtre,
où « il est clair que l'inconscient se présentifie
là sous la forme du discours de l'Autre, qui est un discours
parfaitement composé. » (Le Séminaire,
livre VI cité, séance du 18 mars 1959, in Ornicar
? N°25, p.17), sauf qu'en musique, on n'a affaire à
aucun sens explicite. (On sait combien de chansons populaires
ont servi de cantus firmus à la musique religieuse,
non qu'on eût, en ces heureux temps, ignoré la différence
du profane et du sacré, mais parce qu'il y avait sans doute
effet de discours (affirmation) dans de telles phrases. Il s'agit
ici du « ça parle » de la musique. De ce point
de vue, la musique, c'est l'inconscient lui-même.
Phrase à retirer aussi vite qu'on l'affirme, mais enfin
Il s'agit presque même d'un Autre non barré auquel
on aurait comme accès, sans savoir cependant ce qu'il peut
bien dire : un discours latent devenu manifeste tout en restant
incompréhensible.(Alain Didier-Weil évoque même
l'idée de « l'Autre fiable », op. cit.
p. 270).
3° Les affects enfin. C'est une thèse (orale)
d'Alain Badiou que la musique traite de ces deux passions que
sont la joie et la tristesse, et de nulle autre, ou du moins les
autres doivent se présenter par l'entremise ou dans la
guise de ces deux-là. Ce sont des affects analogiques
: la preuve en est la distribution que la musique modale grecque
effectuait entre les caractères contrastés de ces
modes, ou la musique tonale entre le majeur et le mineur (voire
entre la diatonique et le chromatique), ou un grand nombre de
théories musicales extra-européennes entre des modes
pacifiants et des modes excitants, et jusqu'aux craintes politiques
de certains États sur les effets du jazz, etc. Ce sont
des sentiments esthétiques, la preuve en est que
joie et tristesse dans la musique sont censées faire plaisir,
comme les Leçons des Ténèbres doivent
causer la suprême jouissance de la douleur rachetée,
ou comme la musique de Wagner qui rend malade, mais pour son bonheur,
Madame Verdurin. La musique a une fonction thérapeutique
au sens le plus large (non clinique) : elle afflige, elle anéantit,
elle apaise, elle réveille, elle rassérène,
elle encourage, etc. par le moyen de la joie musicale et de la
tristesse musicale.
Évoquant le gay sçavoir comme la vertu qui s'oppose
à la tristesse comme lâcheté morale, Lacan
le définit comme ceci : « non pas comprendre, piquer
dans le sens, mais le raser d'aussi près qu'il se peut
sans qu'il fasse glu pour cette vertu, pour cela jouir du déchiffrage.
» [Télévision, p.40] Ne s'agit-il pas
dans la musique, non d'exprimer des contenus, mais de proposer
du déchiffrage ? C'est même un terme musical qui
a son prix !
D'où l'idée d'un noeud borroméen qui nouerait
la structure de la musique, qui est de l'ordre du réel,
le Discours, qui est de l'ordre du symbolique, et les deux affects
de joie et de trsitesse, qui sont de l'ordre de l'imaginaire.
Du point de vue de la psychanalyse, il y a alors le triple
rapport suivant : d'analogie avec la structure, d'allusion au
discours, de catharsis dans les affects. [voir schéma]
Il ne s'agit pas là des effets sur l'auditeur, il s'agit
bien de ce qui se trame, se noue dans la composition même
(inconscient « parfaitement composé », dit
Lacan, ce qui est justement le paradoxe !), comme les commentateurs
de la Poétique d'Aristote expliquent bien que la
crainte et la pitié sont dans la tragédie elle-même,
et non dans l'âme du spectateur. (7)
La catharsis est dans la chose, et non dans le sujet.
Mais du même coup, et de même que le symptôme
s'ajoute au nud borroméen comme quatrième rond du
nud, on peut ajouter un rond au « nud musical », pour
rendre compte de l'intégration de l'auditeur dans le processus.
Car le sujet est dans la structure.
Ce qui donnera, car rien ne nous arrête dans cette élucubration,
deux définitions de la musique du point de vue de la psychanalyse
(car il en faut deux, non pas comme chez Schopenhauer, l'inférieure,
leibnizienne, et la sienne, supérieure, mais une structurale
et une subjective) :
Définition théorique : « La musique est l'exercice
de psychanalyse inconscient du sujet qui ne sait pas qu'il jouit
du déchiffrement. »
Définition clinique : « la musique est un exercice
inconscient d'une cure où le sujet ne sait pas qu'il guérit.
» (8)
Bien entendu, il s'agit d'une guérison musicale, la petite
phrase de Vinteuil, si on veut.
C'est une phrase (symbolique). Elle revient (réel), et
elle sauve (imaginaire).
(1) Arthur Schopenhauer, Le Monde comme volonté et comme représentation, §52 (fin du Livre III, trad. A. Burdeau, PUF, 1966, p.1198).
(2) Jacques-Alain Miller, « Jacques Lacan et la voix », in Quarto (revue de l'École de la Cause freudienne ACF Belgique) N°54, juin 1994 (reprise d'un exposé fait lors d'un colloque sur la voix à Ivry le 23 janvier 1988). Si Miller a raison, la cure analytique, qui suppose que le sujet s'ouvre quelque accès à cet objet a, cause de son désir, et donc, ne fait pas « taire la voix comme objet a », exclut la musique. Il n'y a donc pas de musicothérapie. Ou plutôt, de même qu'il y a une psychothérapie en disjonction avec la psychanalyse, musicothérapie et psychanalyse sont en exclusion réciproque. Bien entendu, « dans la pratique », comme on dit, on peut tout mélanger.
(3) On lira là-dessus un examen de ces conditions dans Le périple structuraliste, de Jean-Claude Milner (Seuil, 2002). Notamment p.62, note 9, et le rejet de Frazer. Lévi-Strauss et Dumézil sont en un sens à Lacan ce que Robertson Smith et Frazer furent au Freud de Totem et tabou.
(4) Lacan, Le Séminaire, Livre VII (Seuil, p.155). Plus loin (p.157), Lacan dit que dans l'art, il y a « un refoulement de la Chose ». Il caractérise par exemple l'architecture comme organisation autour du vide, et donne le temple comme exemple. On pourrait aisément en déduire que la musique organise le silence, au sens où le voix comme objet a est une guise de la Chose, du vide (voir note 2). D'où les banalités sur le silence qui après la musique de Mozart est encore du Mozart, etc.
(5) On sait que dans Le Monde comme volonté et comme représentation, son ouvrage central,
Schopenhauer ajoute à chacun des chapitres du livre un supplément tout à fait important : aussi bien le chapitre XXXIX, supplément au livre troisième, intitulé « De la métaphysique de la musique », est-il le texte le plus important sur la musique écrit par lui, notamment par sa destinée dans le wagnérisme (à noter cependant que Wagner a lu Schopenhauer assez tard, et fait plus état d'une convergence plutôt que d'une influence. Même position de Freud, mais cette fois-ci à l'endroit de la métaphysique de l'amour, supplément XLIV au livre quatrième). Mais le §52 du livre III contient déjà la thèse principale de la position tout à fait originale de Schopenhauer sur la musique : « La musique, en effet, est une objectité, une copie aussi immédiate de toute la volonté que l'est le monde, que le sont les Idées elles-mêmes dont le phénomène multiple constitue le monde des objets individuels. Elle n'est donc pas, comme les autres arts, une reproduction des Idées, mais une reproduction de la volonté au même titre que les Idées elles-mêmes. » (Op. cit. p.329)
(6) Je ne retrouve pas la référence. Elle fut citée et commentée l'autre jour par Philippe Sollers lors de sa rencontre avec Jacques-Alain Miller du 17 janvier. (Alain Didier-Weil intitule un sous-chapitre de son livre : « Forclusion du temps », op. cit. p.266 ).
(7) Aristote, Poétique, traduction de Jean Lallot et Roselyne Dupont-Roc (Seuil, 1980) p. 188-193.
(8) En latin, si on y tient, cela donne (je ne change pas animus en subjectum) :
Definitio clinica : Musica est exercitium psychanalyseos occultum nescientis se decifrando frui animi.
Definitio theorica : Musica est exercitium curae analyticae occultum nescientis se sanari animi.