Association Michel Philippot


BULLETIN n°3

(Juin 1998)

 

 

Sommaire

Page 1 : Assemblée générale 1998 (Patrick Choquet)

Page 5 : Les Variations - Paraphrases de Michel Philippot (Anna-Stella Schic-Philippot)


Assemblée générale 1998

 

Vie de l'association

 

Fidèle à ses objectifs, notre jeune association a uvré sans relâche pendant cette première année d'existence. En restant aussi proche que possible de l'article 2 de nos statuts - promouvoir la mémoire de la pensée de Michel Philippot, soutenir la diffusion de ses uvres et de ses écrits, prolonger les diverses résonances de son activité - même si la partie la plus visible de notre action relève des hommages (qui furent nombreux), nous avons mené de front une série de travaux dont la réalisation du colloque &laqno; Les enjeux musicaux de la prise de son » se veut un prolongement de l'action de Michel dans un domaine pour lequel il a tant combattu.

À l'heure des bilans, parlons de ces émouvants hommages :

- Inauguration d'une plaque sur sa maison natale à Verzy, suivie d'une chaleureuse réception offerte par les Champagnes Fresnet-Decotte.

- Inauguration d'une plaque à Vincennes et, le même jour, importante manifestation organisée par la mairie.

- Soirée à la SACEM :

Présentation du film de Jean Cherasse

Concert de l'Ensemble de Ville d'Avray

- Messe en l'église Saint Paul - Saint Louis à Paris

- Concert à l'Ambassade du Brésil

- Concert à l'UPIC

- Plusieurs émissions sur France-Musique

Certes, l'association n'était pas à l'origine de tous ces hommages. Elle était, pour la plupart, étroitement liée à la réalisation, et toujours représentée.

La structuration en commissions (1- publications, 2- colloques, 3- radio, 4- concerts, 5- disques) a donné lieu à des travaux de natures fort différentes :

1. Près de 2 000 pages d'articles saisies, classement, demandes d'autorisations aux différents éditeurs. Il est envisagé une auto-édition de recherche d'environ 100 exemplaires.

D'autre part, Jean-Michel Bardez pense possible l'édition de l'étude de Michel Philippot sur les &laqno; Variations Diabelli » vers la fin de l'année. Contact est pris avec les Éditions Main-D'uvre.

2. François Nicolas et Sébastien Noly qui dirigeront le Colloque &laqno; Les enjeux musicaux de la prise de son » le 13 mars au CDMC considèrent qu'à part quelques changements de dernière minute toujours possibles, le programme est prêt.

3. Dans la mesure où l'association ne dispose pas de ses propres moyens de radiodiffusion, après les hommages de l'année passée, on observe un calme provisoire de cette commission.

4. La commission &laqno; concerts » pense qu'il est souhaitable d'inclure des uvres de Michel Philippot. En effet l'idée du concert consacré en totalité aux uvres de Michel, aussi séduisante soit-elle, ne semble pas la meilleure, d'une part faute de moyens financiers importants et, d'autre part, parce qu'elle tend à marginaliser le compositeur. Rappelons que sur le site Internet vous pouvez trouver le catalogue complet des uvres de Michel Philippot avec la mention détaillée des formations.

5. La totalité des enregistrements de la semaine Michel Philippot a été répertoriée et une sélection &laqno; technique » proposée. D'autres enregistrements plus anciens (vinyle ou bandes) pourraient également figurer sur un CD.

Le site Internet dans lequel sont diffusés les bulletins, le catalogue et des articles de Michel Philippot a été ouvert en début d'année. Vous pouvez le consulter à l'adresse suivante :

http://www.entretemps.asso.fr/Philippot.html

 

Finances

Les comptes s'établissent comme suit :

Recettes Dépenses

Cotisations 6 510 Frais postaux 1 760,10

Dons 900 Alimentation 522

Imprimerie 319,60

Matériel 589

Provisions colloque 4 219,30

Total 7 410 Total 7 410

Nouveaux tarifs d'adhésion :

Membres actifs : 100 F (étudiants 50 F)

Membres bienfaiteurs 200 F et plus (inchangé)

 

Bureau

Le bureau est reconduit, et viennent s'y ajouter trois membres. Ce qui donne comme nouvelle composition :

- Président : Patrick Choquet

- Vice-Présidents : Sébastien Noly, Nicolas Papadimitriou

- Secrétaire : Joëlle Choquet

- Secrétaire adjointe : Laurence Fung

- Trésorier : François Leclère

- Trésorier adjoint : Isabelle Fohrt

- Membre associé : Christian Hugonnet

Patrick Choquet (Président de l'Association)


Les Variations - Paraphrases de Michel P. Philippot

 

Quand les élèves des classes de composition de l'Université de Sao Paulo, au Brésil, ont argumenté à leur professeur Michel Philippot qu'il était impossible d'étudier et de connaître tous les styles musicaux, que le temps leur manquait, etc., il a décidé de leur démontrer le contraire. Je reprends ici ses propres paroles reproduites dans l'édition de la 1re Série de Variations, en 1979 par les Éditions Salabert :

&laqno; En effet, depuis déjà assez longtemps, je disais à mes élèves qu'un Compositeur digne de ce nom, devait, non seulement connaître tous les styles et toutes les formes de l'écriture musicale, mais encore être capable de les pratiquer afin de pouvoir, en toute liberté, construire son propre style, découvrir et faire épanouir sa propre personnalité. Je résolus, donc, de tenter cette suite d'exercices de style, à la fois comme une démonstration, et comme une suite de leçons, destinées à être commentées dans mes classes d'écriture musicale. »

 

Cette 1re série de 12 Variations - Exercices de style, sur le thème de la 1re Gymnopédie de Satie, adopte donc les techniques d'écriture des compositeurs suivants : Guillaume de Machaut, Roland de Lassus, Girolamo Frescobaldi, J.-S. Bach, Mozart, Beethoven, Chopin, Liszt, Wagner, Debussy et Duke Ellington.

Il y a une 11e Variation où il se parodie lui-même, et, selon ses propres paroles, ce fut celle qui lui a donné le plus de travail - à part la « Fugue » de Bach, aussi assez laborieuse, selon ses dires -. Le succès a été immédiat, étant facile de percevoir l'humour qui caractérisait la personnalité de Michel et qui, malgré la rigueur de l'écriture (pas du tout à la manière de) imprégnait l'œuvre ; comme il disait : « des vertus pédagogiques dans une grande rigueur stylistique ».

C'était manifeste qu'il s'amusait à faire ces Variations, la compétence jouant avec l'humour ; comme par exemple dans « Il sospiro » de Liszt, devenu « Un petit soupir », ou dans « Satie'Rik », hommage à Duke Ellington qu'il aimait, ainsi que le jazz, qu'il avait bien du plaisir à jouer. Après le succès de cette 1re Série, on lui demandait pourquoi ne pas avoir &laqno; fait » un Brahms, ou un Fauré, entre autres.

C'est alors qu'il décida d'en faire une deuxième série, cette fois en prenant un thème brésilien recueilli par Villa-Lobos dans son « Guide Pratique ». Il choisit donc les compositeurs, une époque et un style : Perotinus Magnus, Gesualdo da Venosa, J.-P. Rameau, Domenico Scarlatti, Joseph Haydn, Franz Schubert, Robert Schumann, Johannes Brahms, Gabriel Fauré, Arnold Schoenberg, lui-même et Johann Strauss.

Selon ses propres paroles, quelques particularités doivent être commentées : « Dans la Variation Perotinus Magnus, les premières mesures sont une citation de l'organum Sederunt Principes. En plus, cette Variation devrait, avec toute rigueur musicologique, s'appeler organum triplum et non quadruplum. J'ai fait cette concession pour éviter cette confusion sur le nombre de voix. Pour la variation Arnold Schoenberg, j'ai choisi comme référence, le 3e Mouvement de la Suite op.29 qui est, précisément, un thème avec variations sur une mélodie populaire allemande. J'ai utilisé la même série que Schoenberg, en déplaçant une note. »

Et il finit le texte de présentation en disant : « En ce qui concerne la dernière Variation, la Valse de Strauss, observons qu'il s'agit, pour la première fois dans l'histoire de la musique, d'une pièce viennoise, écrite par un français, sur une mélodie brésilienne. »

Un disque, un 78 tours, fait au Brésil, a connu un succès immédiat et a été épuisé en peu de temps. Différents éléments ont marqué, aussi bien l'élaboration de cette œuvre que leur audition. Ainsi par exemple lors d'une master-class au New-England Conservatory de Boston (USA) où je jouais la résolution « apaisante » du thème du « Prélude de Wagner » (référence à Tristan et Isolde) a déclenché le rire de la salle. Lors d'une autre occasion, je me suis permise de faire une blague avec quelques collègues devant lesquelles, j'ai joué la « Mazurka » de Chopin, disant que l'on venait de découvrir cette nouvelle Mazurka en Pologne ; et, en général, après l'audition d'une des séries ou des deux - au Brésil comme en Allemagne - on sentait l'ambiance joyeuse qui s'était créée, l'attention et la curiosité pendant la description des différents styles se transformant en plaisir.

Depuis, Michel manifestait son désir de voir cette œuvre divulguée en France. Sa maladie et sa disparition ont empêché ce vu de se réaliser, mais en moi subsistait le désir de concrétiser ce qui était l'une de ses volontés, des derniers temps de sa vie.

Après sa mort, nous avons donc décidé, l'Association Michel Philippot et moi-même, de publier un recueil de ses écrits. Et, cherchant parmi la quantité d'articles les plus divers, j'ai retrouvé un texte où il décrit sa propre démarche pour l'élaboration de la première série de variations : il y prend comme témoins les compositeurs choisis et établit une forme de dialogue avec eux ; ce texte, lu par Guy Moign, avec beaucoup de verve et d'humour, dans un concert à l'Ambassade du Brésil, a rencontré beaucoup d'intérêt et de succès.

Lors d'une visite amicale à Pierre Garnier, président d'AUVITEC, je lui racontai ce qui me tracassait : arriver à réaliser le désir de Michel ; et cela bien que je ne voulais plus jouer, ayant perdu toute raison de continuer. Et Pierre Garnier me répondit : « On va le faire ! ». Il organisa tout dans sa résidence au Moulin : le personnel pour l'enregistrement - conduit par Bruno Gaulier -, tout le matériel, piano Steinway, bonne volonté, gentillesse, cœur grand ouvert.

Ainsi fut fabriqué ce CD amusant, empreint de l'humour de Michel, une offre d'ami à tous ses amis. L'inclusion du texte a été décidée pour compléter le CD avec cette note d'originalité si spéciale à l'écoute. L'immense effort physique et moral que m'a demandé cet enregistrement n'est rien devant la grandeur et la générosité de Pierre Garnier à qui je dois une éternelle gratitude.

 

Anna-Stella Schic-Philippot