Didon & ne
tude chorale (16 minutes)
pour trois voix et deux instrumentistes
Franois Nicolas
(2014)
Didon : soprano (latin - en Sprechgesang)
ne : tnor (anglais - chant)
Chur : rcitant (franais – cantillation recto tono).
Le mtre et le tempo sont, dun bout lautre, immuables : 6/4 avec noire=120
Deux voix disposent de leur propre mtre et de leur propre tempo :
Didon : 5/4 pour noire=100
Le Chur : 4/4 pour noire=80
On ne saurait trop recommander aux diffrentes voix de travailler en priorit :
- dabord la prononciation minutieuse du texte,
- puis sa prosodie, rythme par son tempo propre et musicalement note,
- enfin – et seulement enfin – sa ligne vocale spcifique.
Dans lexcution de toutes les parties vocales, la restitution du texte et le jeu lingual des rles thtraux constituent laspect principal.
La langue procde dun rythme daccents o les mots sagglomrent librement autour des syllabes accentues. Celles-ci sont notes en noir selon un rythme globalement isochrone. On ne craindra pas ici de ctoyer parfois la logique du swing.
La langue relve dune diction syllabique, privilgiant la fluidit sans distinguer brves et longues. Les accents doivent rester de stricte prosodie.
La notation retenue met laccent sur la sparation phonologique (et non pas syntaxique) des syllabes - ce-tte fe-mme plutt que cet-te fem-me – et, plus largement, sur lenchanement consonantique : fe-mm/a-ccom-plie plutt que fem-me_ac-com-plie.
La langue privilgie une diction syllabique jouant de la distinction brves et longues (sans tenir compte des lisions) et de la scansion propre laccent tonique de mot.
Les syllabes longues sont indiques en gras. La syllabe dappui du mot (quand celui-ci comporte plus dune syllabe longue) est souligne.
On accordera une particulire attention la prosodie du texte, et tout spcialement larticulation de ses consonnes.
Compte tenu de la grande varit des prononciations du latin, on explicite ci-suit la phontique prne pour ce texte.
Les consonnes finales – tout spcialement les s - ne sont jamais muettes : ex. nefas , crudelis
Les consonnes gmines sont surarticules en deux phases, lune dimplosion, lautre dexplosion : ex. dis-simulare , tyran-ni , sup-plicia
le c se prononce la romaine en s : tacitusque ;
le g est un g dur comme dans Edgar ; suivi dun u , il se prononce gou : tangunt , sanguine ;
le h est toujours muet ;
les m et n se prononcent sparment (il ny a pas de nasales en latin) : etiam , tantum , omni , non , quondam
le q , qui est toujours suivi dun u , se prononce kou : quid , ou kw : antiquum ;
le r est apical ;
le s se prononce s (et pas z) ;
le t se prononce dur (comme dans tomate) ;
le v se prononce v : verum
le x sarticule en deux consonnes ks (comme dans taxi ou excs ) ;
le y est ici une voyelle – voir donc la suite.
le e se prononce Ԏ en syllabe ouverte et ԏ en syllabe ferme (avec consonne qui suit). On notera systmatiquement les ԏ en sorte que, par dfaut, les e soient tous prononcs comme des Ԏ.
le u se prononce ou ;
le y se prononce comme notre y : hymenos , Libyc , tyranni , Tyrii
On accordera une attention particulire aux quatre diphtongues :
= a
au = aou ou aw (cf. out en anglais)
oe = o
eu = Ԏou ou Ԏw
La partition est partage en deux blocs : celui des voix, celui des instruments.
Le rle du Chur peut tre tenu par une seule personne. Il est rcit pour devenir brivement cantill (recto tono) lors des quelques phrases profres en latin ou en anglais – on choisira dans ce cas une des hauteurs de laccord suivant :
La polyphonie des voix (htrophonie sans contrepoint) doit relever en priorit du jeu lingual, lattention portant sur ce qui est dit, sur la langue qui le dit, sur les rapports thtraux entre les trois rles. La composante plus proprement musicale – celle qui sattache des hauteurs et des intensits notes – doit rester subordonne la premire (la brve partie centrale B faisant ici exception).
ce titre, les indications de modes de jeu pour les voix ont t dlibrment minores en sorte de laisser place linterprtation thtrale des rles tenus, laquelle ne saurait tre musicalement note.
Concernant spcifiquement le rle de Didon, on a eu recours trois couleurs pour suggrer les rapports entre trois tonalits affectives : la colre, la froideur, la tendresse.
Cette htrophonie privilgie lautonomie (relative) des voix et leur entrelacement global plutt que des rencontres locales.
Le piano et les percussions alternent deux types de relation lensemble :
- commentaires et ponctuations : la priorit est ici dՎcouter les autres en sorte de caler son intervention en fonction deux (le plus souvent, le rythme et lintensit nots laissent alors linstrumentiste une certaine marge de manuvre) ;
- discours autonome : la priorit est ici lengagement discursif individuel (il faut alors privilgier son propos sur la synchronie minutieuse et locale davec les autres pupitres).
Entre les deux instruments, la polyphonie, nouveau, nest pas strictement contrapuntique (le contrepoint est ventuellement affaire interne de chaque pupitre) : elle relve dune htrophonie faisant tresse ou entrelacs.
Luvre doit sentendre comme lhtrophonie de ces deux htrophonies, lune dordre lingual, lautre dordre musical.
Sans craindre que localement ou rgionalement, telle htrophonie lemporte en volume sonore sur lautre, globalement, les deux doivent tre conduites galit, sans hirarchie du type avant-arrire, principal-secondaire, figure-fond : il sagit, au total, dՎcouter lՎcartlement entre musical et lingual.
***
Luvre sattache un seul moment de lamour mythique entre Didon et ne : celui de leur sparation, lorsque ne quitte furtivement Carthage pour reprendre sa qute dun site o refonder Troie.
Cette scne se concentre sur la scne faite par Didon son amant prparant sa fuite. Elle confronte une femme disposant lamour en foyer central de lexistence et un jeune homme enqutant sur une justice quil sait devoir rtablir quelque part sans bien savoir en quoi exactement elle consiste.
Entre amour fminin et justice masculine, pas de synthse ici mais la dure vrit dune disjonction.
Le premier mot du livret est coutons , le dernier est cartlement : somme toute, il sagit donc dՎcouter lՎcartlement entre Didon et ne, mais galement entre lhtrophonie linguale des voix (mobilisant simultanment trois langues diffrentes) et lhtrophonie musicale des instruments.
Trois voix ? Trois rles, trois langues, trois tempi, trois manires de prosodier et rythmer la langue, trois modes de vocalisation. Au total, trois dialectiques au musical.
- Didon parle latin. Son texte est librement emprunt Virgile (quatrime livre de LՃnide) et prosodi sans tenir compte du mtre potique originel (lhexamtre dactylique). Didon recourt essentiellement au parl-chant (SprechGesang) et son rythme est fond sur la distinction, propre la langue latine, des syllabes brves et longues. Son tempo est celui de la noire 120. Par son parl-chant, Didon campe la frontire du musical et du lingual.
- ne parle anglais, chantant cette langue dun bout lautre. Son rythme est fond sur laccentuation propre langlais (les syllabes sagglutinant autour du point dappui spcifique dun mot ou dun syntagme). Son tempo est celui de la noire 100. ne, par le chant, est incorpor la musique, mais, par son tempo propre, en cart intrieur.
- Enfin le Chur parle franais en le rcitant. Son rythme est fluide : conformment la prosodie du franais, la phrase est lance dun trait, la syllabisation jouant de faibles carts de dures et daccents. Son tempo est celui de la noire 80. Le Chur se tient en retrait interne la musique ce qui saccorde la nature commentatrice de son propos.
En un bref moment, Didon et ne se retrouvent autour de la langue franaise pour se remmorer leur treinte amoureuse. De mme le chur fait de brves incursions (cantilles recto tono) tant dans le latin de Didon que dans langlais dՃne.
Au total, les trois voix se superposent (selon trois tempi diffrents) plutt quelles ne dialoguent, composant ainsi une tresse (plutt quun contrepoint) qui, mme musicalement note, reste dessence linguale.
Les deux pupitres (piano et percussions) alternent les rles musicaux en une srie de blocs juxtaposs plutt quen dveloppement continu dun bout lautre de luvre. La logique musicale densemble relve ce faisant dune sorte de montage musical, composant un kalidoscope de propositions que les trois voix viennent traverser, sillonner, retourner. Au total, lhtrophonie instrumentale se densifie progressivement au cours de luvre, circulant de propositions trs ares vers une prolifration chevele.
Au total, luvre est composite : elle se dploie selon deux faces simultanes, lune musicale, lautre linguale. Ce faisant, il ne sagit ni de mettre en musique un texte (en lassimilant dans la musique, comme dans le lied ou lopra) ni de l accompagner musicalement (en disposant la musique en fond et dcor, comme dans le mlodrame) mais dentrelacer deux faces htrognes coexistant de manire relativement autonome. Disons : une htrophonie entre deux types dhtrophonie : lun lingual, lautre musical.
Cette uvre est ainsi lՎtude (au sens musical du terme) de rapports dun type nouveau entre une musique instrumentale et un parler choral quon dira bablien.
Ce faisant, sagirait-il dune histoire damour entre un texte et une musique, dune histoire de justice entre eux (la musique sattachant rendre justice dun texte), dun partage entre ces deux rapports possibles ?
tout le moins, il sagit dune tude chorale, exprimentant un rapport paroles/musique qui fasse rsonner le rapport amour/justice cartelant Didon & ne .
***
Perfide !
Dissimulare etiam sperasti, perfide, tantum posse nefas, tacitusque mea
decedere terra ?
Nec te noster amor, nec te data dextera quondam, nec moritura tenet crudeli
funere Dido ?
Quin etiam hiberno moliris sidere classem, et mediis properas aquilonibus
ire per altum, crudelis ?
Quid, si non arua aliena domosque ignotas peteres, sed Troia antiqua
maneret, Troia per undosum peteretur classibus quor ?
Mene fugis ?
Per ego has lacrimas dextramque tuam te, quando aliud mihi iam miser
nihil ipsa reliqui, per conubia nostra, per inceptos hymenos, si bene quid de
te merui, fuit aut tibi quicquam dulce meum, miserere domus labentis, et istam
oro, si quis adhuc precibus locus, exue mentem.
Te propter Libyc gentes Nomadumque tyranni odere, infensi Tyrii.
Te propter eundem exstinctus pudor, et qua sola sidera adibam, fama prior.
Cui me moribundam deseris, hospes ?
Quid moror ?
Saltem si qua mihi de te suscepta fuisset ante fugam suboles, si quis mihi
paruulus aula luderet neas, qui te tamen ore referret, non equidem
omnino capta ac deserta uiderer.
*
Nam quid dissimulo, aut qu me ad maiora reseruo ?
Num fletu ingemuit nostro ?
Num lumina flexit ?
Num lacrimas uictus dedit, aut miseratus amantem est ?
Qu quibus anteferam ?
Nusquam tuta fides.
Eiectum litore, egentem excepi, et regni demens in parte locaui.
Amissam classem, socios a morte reduxi.
Heu furiis incensa feror!
Neque te teneo, neque dicta refello.
I, sequere Italiam uentis, pete regna per undas !
Spero equidem mediis, si quid pia numina possunt, supplicia hausurum
scopulis, et nomine Dido spe uocaturum.
Sequar atris ignibus absens, et cum frigida mors anima seduxerit artus,
omnibus umbra locis adero.
Dabis, improbe, pnas !
Audiam et hc Manis ueniet mihi fama sub imos.
*
Il ny a damour que nos amours. Il ny a que notre amour
pour soutenir le monde.
*
Cur mea dicta neget duras demittere in auris.
Quo ruit ?
Exspectet facilemque fugam uentosque ferentis.
Non iam coniugium antiquum, quod prodidit, oro.
Tempus inane peto, requiem spatiumque furori, dum mea me uictam doceat
fortuna dolere.
Extremam hanc oro ueniam.
*
En, quid ago ?
Iliacas igitur classes atque ultima Teucrum iussa sequar ?
Quiane auxilio iuuat ante leuatos, et bene apud memores ueteris stat
gratia facti ?
Quis me autem, fac uelle, sinet, ratibusue superbis inuisam
accipiet ?
Quid tum, sola fuga nautas comitabor ouantes, an Tyriis omnique manu stipata
meorum inferar, et quos Sidonia uix urbe reuelli, rursus agam pelago, et uentis
dare uela iubebo ?
*
Pro Iuppiter, ibit hic et nostris inluserit aduena regnis ?
Non arma expedient, totaque ex urbe sequentur, deripientque rates alii
naualibus ?
Ite, ferte citi flammas, date tela, impellite remos !
Quid loquor, aut ubi sum ?
Qu mentem insania mutat ?
Infelix Dido, nunc te facta impia tangunt.
Tum decuit, cum sceptra dabas.
En dextra fidesque, quem secum patrios aiunt portare Penates !
Non potui abreptum diuellere corpus, et undis spargere ?
Non socios, non ipsum absumere ferro Ascanium, patriisque epulandum ponere
mensis ?
Verum anceps pugn fuerat fortuna: fuisset !
Quem metui moritura ?
Faces in castra tulissem, implessemque foros flammis, natumque patremque
cum genere extinxem, memet super ipsa dedissem.
Si tangere portus infandum caput ac terris adnare necesse est, hic
terminus hret: at bello audacis populi uexatus et armis, finibus extorris,
auxilium imploret, uideatque indigna suorum funera !
Nec, cum se sub leges pacis iniqu tradiderit, regno aut optata luce
fruatur, sed cadat ante diem, mediaque inhumatus harena !
Hc precor, hanc uocem extremam cum sanguine fundo.
***
coutons !
coutons Didon la malheureuse, cette femme dchane !
Son amour vient de sombrer. Ne surnagent que dpit et furie.
Sur quel cueil, un tel naufrage ?
Devant les siens, ne a ratur lintimit partage. Et lintrieur dune femme, amoureusement explor au fil des nuits, se voit rpandu parmi les pierres, expos au soleil de quiconque.
Voici une femme bafoue, gant retourn, viscres lair, tendre cume devenue bave.
Les tensions qui accordaient ce corps attendri par la possession ne sont plus contenues dans quelque enlacement.
Voici Didon perdue, tourbillonnant fbrile dans le chaos de ses rages.
Quel tait cet amour dune Phnicienne pour un Troyen, cette couture dune femme accomplie et dun jeune homme inabouti ? Mritaient-ils ce dsastre ?
coutons-les !
I am passing through, coming from Troy, going I know
not where to restore a Justice that fate has entrusted to me.
My quest is not complete: I must learn from my father
what is lacking in my charge. An encounter awaits me in the cave of the living
dead, beyond Charon and the Styx.
Carthage is only a resting place. I know courage,
learnt from the Greeks. From my odyssey I know the intelligence of unforeseen
situations. But I also know without knowing it, that justice is yet more.
And see
here Dido adds her love, and prepares an encounter in this corner of Africa.
You have taught me, Dido, the love of mouths and of
voices, of overlapping breaths, of searching fingers and the languages of
palms.
But what have you murmured in the cave of our nights?
What have you whispered to the cradle of my eyelids?
With what secret have you dressed yourself, opaque compass for the temples of a man?
Great minds against themselves conspire. [1]
*
Elle lui a murmur :
Il ny a damour que nos amours. Il ny a
que notre amour pour soutenir le monde.
Il ny a que nos corps enlacs pour accueillir ce qui nous vient au bord des lvres du fond des mers, de lhorizon sableux et des toiles brouilles.
Elle lui a chuchot :
Pour revivre il suffit quՈ tes lvres
jemprunte
le souffle de mon nom murmur tout un soir. [2]
*
Infelix Dido !
Hic / sunt lacrym rerum, et mentem mortalia tangunt. [3]
Il ny a, il ny a que nous. Il ny a que les amants.
*
You have revealed to me, Dido, dual life, double
passion, love doubled with silk and spit.
But justice, Dido? This cause that urges me since the
Greeks razed Troy and swore to the world: Let none remember it!
How to attach our nocturnal meetings to this beyond?
Nest pas sage qui joue au sage !
Justice? A virtue! Love? A passion! Virtue protects passion, without adopting it. Words of Troy!
Nest pas juste qui soustrait un amour ! La vertu ne peut se nourrir de contraires !
Paroles de sage !
I am still too young, Dido, to weave passions and
marry virtues.
I do not know how to respond to your love - a
supplement that overflows and diverts - other than by subtraction.
Botte de paille que ce jeune homme mesur face Didon assure dans sa
dmesure !
Voici de sourdes nergies libres par le sisme ; les voil qui
traversent cette femme et sengouffrent entre un amour barr et le dpart
interdit.
I must retie
the thread of the seas, and of the capricious winds.
I must leave,
Dido, and resume my wandering.
The courage that I learnt in the face of the Greeks fails me in the face of a woman.
I ask your
forgiveness, I barely have the strength. I cannot make an alliance. I remain
weak, and I flee from you.
I carry my flight
like a fault. I pass my turn. I am sorry, Dido!
Remember me! [4]
Entre la certitude dun amour ici et la promesse dune justice
ailleurs, qui aura eu raison ?
Dun ct cette femme mure dressant sa tente o le hasard la
conduite ; de lautre ce jeune homme incertain qui erre de rive en rive.
droite une femme qui pousse arrire, campe sur le socle dun prsent
aim ; gauche un homme tir avant par laimant dun futur.
I sought a sister, I fell upon a wife
Et rien entre les deux, rien pour conjurer lՎventrement de cet
amour !
Rien que nous, participants cet cartlement.
***
Didon |
Dido |
ne |
Aeneas |
Chur |
|
|
|
|
coutons ! coutons Didon la malheureuse, cette
femme dchane ! Son amour vient de sombrer. Ne
surnagent que dpit et furie. Sur quel cueil, un tel
naufrage ? |
Perfide ! Esprais-tu, perfide,
dissimuler ton forfait et quitter sournoisement cette terre ? Rien ne te retient donc, ni
notre amour, ni notre alliance,
ni
Didon condamne la mort ? En plein hiver, tu te htes
dappareiller et daffronter la haute mer avec ses vents hostiles, cruel
ne ! Si tu ne cherchais un nouveau
lieu et une terre inconnue, si lantique Troie tait encore debout, si tu ne
souhaitais que revenir en ce bercail, oserais-tu dfier ainsi la mer
dmonte ? Tu me fuis donc ? |
Perfide ! Dissimulare etiam sperasti, perfide, tantum posse nefas, tacitusque mea decedere
terra ? Nec te noster amor, nec te data dextera quondam, nec moritura tenet crudeli funere Dido ? Quin etiam hiberno moliris sidere classem, et mediis properas
aquilonibus ire per altum, crudelis ? Quid, si non arua aliena domosque ignotas peteres, sed Troia antiqua
maneret, Troia per undosum peteretur classibus quor ? Mene fugis ? |
|
|
|
Je ten prie : par mes
larmes et ta promesse, puisque, dans mon malheur, je nai que ces recours, par notre union et les premiers pas de notre passion, si tu mas accord quelque mrite, si tu as trouv en moi quelque douceur, par tout ceci, prends piti dune
existence qui vacille et, je ten
conjure, si tu restes encore sensible ces prires, renonce ton
ide ! cause de toi, les peuples
nomades et les tyrans qui mentourent
se
lvent, hostiles. cause de toi, ma pudeur se
voit fltrie, et ce renom dantan qui mՎgalait aux toiles ressort souill. Toi qui fus mon hte, qui
mabandonnes-tu ainsi, presque morte ? quoi dsormais dois-je
mattendre ? Ah, si du moins tu mavais laisse une postrit avant de
dguerpir ! Ah, si du moins un petit ne sous mes yeux jouait dans mon
palais
me rappelant tes traits, je me verrais dj moins abuse et dlaisse ! |
Per ego has lacrimas dextramque tuam te, quando aliud mihi iam miser nihil
ipsa reliqui, per conubia nostra, per inceptos hymenos, si bene quid de te
merui, fuit aut tibi quicquam dulce meum, miserere domus labentis, et istam
oro, si quis adhuc precibus locus, exue mentem. Te propter Libyc gentes Nomadumque tyranni odere, infensi Tyrii. Te propter eundem exstinctus pudor, et qua sola sidera adibam, fama
prior. Cui me moribundam deseris, hospes ? Quid moror ? Saltem si qua mihi de te suscepta fuisset ante fugam suboles, si quis mihi
paruulus aula luderet neas, qui te tamen ore referret, non equidem omnino capta ac deserta
uiderer. |
|
|
Devant les siens, ne a ratur
lintimit partage. Et lintrieur dune femme, amoureusement explor au fil
des nuits, se voit rpandu parmi les pierres, expos au soleil de quiconque. Voici une femme bafoue, gant
retourn, viscres lair, tendre cume devenue bave. Les tensions qui accordaient ce corps
attendri par la possession ne sont plus contenues dans quelque enlacement. Voici Didon perdue, tourbillonnant
fbrile dans le chaos de ses rages. Quel tait cet amour dune Phnicienne
pour un Troyen, cette couture dune femme accomplie et dun jeune homme
inabouti ? Mritaient-ils ce dsastre ? coutons-les ! |
Que devrais-je me cacher ?,
lavenir pourrait-il me rserver le pire ? Mes pleurs lont-ils
affect ? A-t-il seulement tourn les
yeux vers moi ? A-t-il, vaincu, pleur son
tour ? A-t-il eu piti de celle quil aimait ? Quel pire encore
supposer ? Aucune confiance nulle
part ! Quand il tait naufrag et
dmuni, je lai accueilli et, insense, jai partag avec lui mon royaume. Jai sauv de la mort sa
flotte naufrage et ses compagnons. Hlas, les Furies semparent
de mon esprit et emportent mon corps ! |
Nam quid dissimulo, aut qu me ad maiora reseruo ? Num fletu ingemuit nostro ? Num lumina flexit ? Num lacrimas uictus dedit, aut miseratus amantem est ? Qu quibus anteferam ? Nusquam tuta fides. Eiectum litore, egentem excepi, et regni demens in parte locaui. Amissam classem, socios a morte reduxi. Heu furiis incensa feror ! |
Je suis passant, venant de
Troie, allant je ne sais o rtablir une Justice quun destin ma confie. Ma qute nest pas
complte : je dois apprendre de mon pre ce qui manque ma charge. Un rendez-vous
mattend dans la caverne des morts-vivants, au-del de Charon et du Styx. Carthage nest quun repos. Je
sais le courage, appris contre les Grecs. Jai compris au fil de mon odysse
lintelligence des situations imprvues. Mais je sais aussi sans savoir que
la justice est plus encore. Et voici que Didon ajoute son
amour, et me fixe rendez-vous sur ce recoin dAfrique. |
I am passing through, coming from Troy, going I know not where to
restore a Justice that fate has entrusted to me. My quest is not complete: I must learn from my father what is lacking
in my charge. An encounter awaits me in the cave of the living dead, beyond
Charon and the Styx. Carthage is only a resting place. I know courage, learnt from the
Greeks. From my odyssey I know the intelligence of unforeseen situations. But
I also know without knowing it, that justice is yet more. And see here Dido adds her love, and prepares an
encounter in this corner of Africa. |
|
Non, je ne te retiens
pas ! Non, je ne rfute pas tes paroles ! Va, poursuis ta chimre au gr
des vents, cherche un royaume par-del les mers ! Sil y a encore une justice
sous les cieux, jespre – oui, jespre – que tu puiseras tes malheurs grands seaux contre les
cueils et que tu appelleras souvent
Didon ! Absente, je te poursuivrai de
sombres feux, et lorsque la mort glace maura scinde de mon corps, je
demeurerai l, tapie dans lombre. Et tu seras alors chti,
cruel ! Et je lapprendrai par la
grande rumeur roulant aux enfers. |
Neque te teneo, neque dicta refello. I, sequere Italiam uentis, pete regna per undas ! Spero equidem mediis, si quid pia numina possunt, supplicia hausurum
scopulis, et nomine Dido spe uocaturum. Sequar atris ignibus absens, et cum frigida mors anima seduxerit artus,
omnibus umbra locis adero. Dabis, improbe, poenas ! Audiam et hc Manis ueniet mihi fama sub imos. |
Tu mas appris, Didon, lamour
des bouches et des voix, les respirations qui se chevauchent, les doigts qui
fouillent les chevelures et les langues qui pousent les paumes. Mais que mas-tu murmur dans
la grotte de nos nuits ? Quas-tu chuchot au berceau de mes
paupires ? De quel secret tes-tu pare,
boussole opaque aux tempes dun homme ? |
You have taught me, Dido, the love of mouths and of voices, of
overlapping breaths, of searching fingers and the languages of palms. But what have you murmured in the cave of our nights? What have you
whispered to the cradle of my eyelids? With what secret have you dressed yourself, opaque
compass for the temples of a man? |
Great
minds against themselves conspire. |
Il ny a damour que nos amours. Il ny a que notre amour
pour soutenir le monde. |
Il
ny a, il ny a que nous. Il ny a que les amants. |
Elle lui a murmur : Il ny a damour que nos amours.
Il ny a que notre amour pour soutenir le monde. Il ny a que nos corps enlacs pour
accueillir ce qui nous vient au bord des lvres du fond des mers, de
lhorizon sableux et des toiles brouilles. Elle lui a chuchot : Pour revivre il suffit quՈ tes
lvres jemprunte / le souffle de mon nom murmur tout un soir. |
||
Pourquoi oppose-t-il des
oreilles de plomb mes paroles ? O se prcipite-t-il
ainsi ? Quil attende au moins quelque
vent favorable sa frileuse dbandade ! Mais je ninvoquerai plus
cette ancienne alliance quil a trahie. Je ne demande quun court
rpit, quun bref moment pour ponger ma fureur, le temps dapprendre pleurer ma dfaite. Jimplore cette ultime faveur. |
Cur mea dicta neget duras demittere in auris. Quo ruit ? Exspectet facilemque fugam uentosque ferentis. Non iam coniugium antiquum, quod prodidit, oro. Tempus inane peto, requiem spatiumque furori, dum mea me uictam doceat
fortuna dolere. Extremam hanc oro ueniam. |
|
|
Infelix Dido ! Hic / sunt lacrym rerum, et
mentem mortalia tangunt. |
|
|
Tu mas rvl, Didon, la vie
duelle, la passion double, lamour doubl de soie et de salive. Mais la justice, Didon ?,
cette cause qui mexige depuis que les Grecs ont ras Troie et ont jur la
face du monde : Que nul ne sen souvienne ! ? Comment adjoindre nos
rendez-vous nocturnes cet au-del ? |
You have revealed to me, Dido, dual life, double passion, love doubled
with silk and spit. But justice, Dido? This cause that urges me since the Greeks razed
Troy and swore to the world: Let none remember it! How to attach our nocturnal meetings to this beyond? |
|
Que puis-je faire
maintenant ? Vais-je rallier leurs
vaisseaux et me plier aux dernires exigences des Troyens ? Ne me sont-ils pas redevables
de les avoir nagure secourus et nont-ils
aucune reconnaissance pour cet ancien bienfait ? supposer que je le veuille,
qui me laissera monter bord et qui
accueillera sur son fier navire une femme dsormais hae ? Mais que faire dautre ?
Seule, fugitive, accompagnerai-je ces marins triomphants ? Ou, entoure
de la foule des miens, vais-je mՎlancer et rejeter la mer ceux-l mmes
que jy ai arrachs ? Vais-je livrer leurs voiles aux temptes ? |
En, quid ago ? Iliacas igitur classes atque ultima Teucrum iussa sequar ? Quiane auxilio iuuat ante leuatos, et bene apud memores ueteris stat
gratia facti ? Quis me autem, fac uelle, sinet, ratibusue superbis inuisam
accipiet ? Quid tum, sola fuga nautas comitabor ouantes, an Tyriis omnique manu
stipata meorum inferar, et quos Sidonia uix urbe reuelli, rursus agam pelago,
et uentis dare uela iubebo ? |
La justice ? Une
vertu ! Lamour ? Une passion ! La vertu protge la passion,
sans ladopter. Paroles de Troie ! |
Justice? A virtue! Love? A passion! Virtue protects
passion, without adopting it. Words of Troy! |
Nest pas sage qui joue au
sage ! Nest pas juste qui soustrait
un amour ! La vertu ne peut se nourrir de contraires !
Paroles de sage ! |
Oh, Dieu ! LՎtranger
sen ira-t-il donc en ayant
leurr notre pays ? La ville ne prendra-t-elle pas
les armes pour le poursuivre ? Et notre flotte ne sortira-t-elle pas le
combattre ? Htez-vous, incendiez, lancez,
tirez, ramez ! Mais que dis-je ? O
suis-je ? Quelle folie emporte ma
raison ? Malheureuse Didon, est-ce
maintenant que tu dcouvres tes torts ? Cest en lui remettant ton
trne que tu aurais d rflchir ! |
Pro Iuppiter, ibit hic et nostris inluserit aduena regnis ? Non arma expedient, totaque ex urbe sequentur, deripientque rates alii
naualibus ? Ite, ferte citi flammas, date tela, impellite remos ! Quid loquor, aut ubi sum ? Qu mentem insania mutat ? Infelix Dido, nunc te facta impia tangunt. Tum decuit, cum sceptra dabas. |
Je suis encore trop jeune,
Didon, pour tresser les passions et marier les vertus. Et je ne sais rpondre ton
amour - supplment qui dborde et dtourne - que par la soustraction. |
I am still too young, Dido, to weave passions and marry virtues. I do not know how to respond to your love - a
supplement that overflows and diverts - other than by subtraction. |
Botte de paille que ce jeune homme
mesur face Didon assure dans sa dmesure ! Voici de sourdes nergies libres par
le sisme ; les voil qui traversent cette femme et sengouffrent entre
un amour barr et le dpart interdit. |
Voil ce que vaut la parole de
qui pourtant hrite dune haute ligne ! Et je nai su me saisir de son
corps pour le mettre en pices, pour le disperser sur les flots ? Et je nai su exterminer ses
compagnons par le fer, je nai su offrir son fils en sacrifice sur lautel du
pre ? Lissue dun tel combat eut t indcise, soit ! Mais qui aurais-je craint, puisque je vais
mourir ? Jaurais moi-mme mis le feu
son camp, jaurais moi-mme enflamm le pont de ses navires, et jaurais moi-mme ananti le pre avec le fils en mimmolant
au mme brasier ! Sil est vraiment ncessaire que cette tte infme atteigne un port et aborde une
terre, quil en soit ainsi ! Mais quau moins, tourment dans la guerre par un peuple
farouche, banni de chez lui, ne en soit
rduit implorer secours la vue des siens
projets dans une mort indigne,
et
que, livr aux lois dune paix inique,
il
ne puisse jouir ni de son royaume ni de la gloire escompte mais quil tombe avant son heure et demeure sans spulture
au milieu des sables ! Voici ma prire, et voici
lultime vu que je scelle de mon sang. |
En dextra fidesque, quem secum patrios aiunt portare Penate ! Non potui abreptum diuellere corpus, et undis spargere ? Non socios, non ipsum absumere ferro Ascanium, patriisque epulandum
ponere mensis ? Verum anceps pugn fuerat fortuna : fuisset ! Quem metui moritura ? Faces in castra tulissem, implessemque foros flammis, natumque patremque cum genere extinxem, memet super ipsa dedissem. Si tangere portus infandum
caput ac terris adnare necesse est, hic terminus hret : at bello
audacis populi uexatus et armis, finibus extorris, auxilium
imploret, uideatque indigna suorum funera ! Nec, cum se sub leges pacis iniqu tradiderit, regno aut optata luce fruatur, sed cadat ante diem, mediaque
inhumatus harena ! Hc precor, hanc uocem extremam cum sanguine fundo. |
Je dois renouer le fil des
hautes mers et des vents capricieux. Je dois partir, Didon,
reprendre ma longue errance. Le courage face aux Grecs face
une femme me fait dfaut. Je te demande pardon, je nai
gure la force. Je ne peux faire alliance. Je reste faible, et je te fuis. Jemporte ma fuite comme une
faute. Je passe mon tour. Pardon, Didon ! Souviens-toi de
moi ! Je cherchais une sur, je suis tomb sur une femme |
I must retie the thread of the seas, and of the capricious winds. I must leave, Dido, and resume my wandering. The courage that I learnt
in the face of the Greeks fails me in the face
of a woman. I ask your forgiveness, I barely have the strength. I cannot make an alliance.
I remain weak, and I flee from you. I carry my flight like a fault. I pass my turn. I am sorry, Dido! Remember me! I sought a sister, I fell upon a wife |
Entre la certitude dun amour ici et
la promesse dune justice ailleurs, qui aura eu raison ? Dun ct cette femme mure dressant sa
tente o le hasard la conduite ; de lautre ce jeune homme incertain
qui erre de rive en rive. droite une femme qui pousse arrire,
campe sur le socle dun prsent aim ; gauche un homme tir avant par
laimant dun futur. |
|
|
|
|
Et rien entre les deux, rien pour conjurer lՎventrement de
cet amour ! Rien que nous, participants cet
cartlement. |
Dido
and Aeneas
Performance Notes
(Translation: Matthew Lorenzon)
Voices
Dido: soprano (Latin, Sprechgesang)
Aeneas: tenor (English, singing)
Choir: narrator (French, recto tono cantillation)
Percussion
Two rototoms
Six wood-blocks
One vibraphone
Eight toms
Sticks
-
Snare drumsticks
-
Soft timpani mallets
-
Vibraphone mallets: Hard / Medium / Soft
Tempi
The metre and the tempo are the same throughout: 6/4, crotchet = 120.
Two voices have their own metre and their own tempo:
-
Dido: 5/4, crotchet = 100
-
The choir: 4/4, crotchet = 80
Languages
I cannot stress enough that the different voices should prioritise:
-
First of all, the meticulous pronunciation of the
text.
-
Then its prosody, with its own and notated rhythm.
-
Finally (and last of all) its specific vocal line.
The principal aspect of the performance of all the vocal parts is the
reproduction of the text and the lingual game of the theatrical roles.
English
pronunciation
The
language proceeds by a rhythm of accents where the words freely agglomerate
around accented syllables. These are notated in black according to a globally
isochronic rhythm. We will not hesitate here to refer sometimes to the logic of
swing.
French pronunciation
The language uses a syllabic diction, privileging fluidity without
distinguishing between shorts and longs. The accents should remain strictly prosodic. The notation puts the
accent on the phonological separations (and not the syntaxical divisions) of
the syllables: ce-tte fe-mme rather than cet-te fem-me and,
more generally, on the sequence of consonants: fe-mm/a-ccom-plie
rather than fem-me_ac-com-plie.
Latin pronunciation
The language privileges a syllabic
diction playing on the distinction of shorts and longs (without taking account
of elisions) and on the scansion proper to the tonic accent of the word.
The
long syllables are indicated in bold. The stressed syllable of a word (when it
has more than one long syllable) is underlined. We will accord particular
attention to the prosody of the text, especially the articulation of the
consonants
Due to the large variety of
pronunciations of latin, we will make our chosen phonetic system explicit here.
Consonants
The final consonants (especially the
s) are never mute. For example nefas, crudelis
...
. The geminate consonants are overarticulated in two phases: one by implosion,
the other by explosion. For example, dis-simulare, tyran-ni,
sup- plicia...
The c is
pronounced as s: tacitusque.
The g is a
hard g like in Edgar ; followed by a u, it is pronounced gou :
tangunt, sanguine.
The h is always
mute.
The ms and
ns are pronounced separately (there are no nasals in latin): etiam, tantum, omni, non, quondam ...
The q, which
is always followed by a u, is pronounced kou: quid, or kw: antiquum.
The r is
rolled.
The s is
pronounced s (and not z).
The t is hard
(as in tomato).
The v is
pronounced v: verum
The x is
pronounced as two consonants ks (as in taxi or excess).
The y is a
vowel—as below.
Vowels
The e is
pronounced Ҏ as an open syllable and ҏ as a closed syllable (with the
consonant that follows). I will systematically mark out the ҏ so that, by
default, the es are all pronounced as Ҏ.
The u is
pronounced ou.
The y is
pronounced as our y: hymenos, Libyc, tyranni, Tyrii
Diphtongues
We will accord particular attention to the four diphthongs:
-
Ҿ = a
-
u = aou or aw (Such as in out in English)
-
oe = o
-
eu = Ҏou or Ҏw
General Balance
The score is divided into two blocks: that of the
voices and that of the instruments.
The voices
The role of the choir can be held by one
person. It will be cantillated recto tono, at a freely-determined pitch held
from one end to the other. The polyphony of voices (heterophony without
counterpoint) should preferably arise from the lingual play, the attention
weighing on what is said, on the language in which it is said, on the
theatrical rapports between the three roles. The more properly musical
part—that which is given by the notated pitches and dynamics—should
remain subordinate to the first (the brief central part B being an exception).
In this way, the indications of modes of play for the voices have been
deliberately reduced in order to leave room for the theatrical interpretation
of the roles, which could not be musically notated.
Specifically concerning the role of Dido, I
have had recourse to three colours to suggest the rapports between three
affective tonalities: anger , coldness and tenderness.
This heterophony privileges the (relative)
autonomy of the voices and their global interweaving rather than their local
combinations.
The Instruments
The piano and the percussion alternate two types of relation to
the ensemble:
-
Commentaries and punctuations: Here the priority is to
listen to the other performers and introduce the interventions at the right
time (most often, the notated rhythm and dynamics leaves the instrumentalist
some room to move).
-
Autonomous discourse: Here the priority is individual
discursive engagement (one must privilege the parts intentions in its
meticulous and local synchrony with the other parts).
Between the two instruments, the
polyphony is not strictly contrapuntal (the counterpoint is ultimately the
internal affair of each part): it arises from a heterophony making a weave or
intertwining.
In sum
The work must be heard as the
heterophony of these two heterophonies, the one of a lingual order, the other
of a musical order. One need not worry that, locally or regionally, one
heterophony wins out in volume over another. Globally, however, the two must be
led to equality, without the hierarchies of foreground-background,
principal-secondary or figure-foundation: the point is, in sum, to hear the gap
between the musical and the lingual.
Programme Notes
(Translation: Matthew Lorenzon)
Libretto
The work explores a single
moment in the mythic love between Dido and Aeneas: that of their separation,
where Aeneas furtively leaves Carthage to return to his quest to find a site to
refound Troy.
The piece concentrates on the
scene made by Dido in front of her lover preparing his flight. She produces a
confrontation between a woman displaying love in the central foyer of existence
and a young man inquiring into a justice that he knows he should re-establish
somewhere without knowing in what exactly it consists.
Between feminine love and
masculine justice, there is no synthesis here but the hard truth of a
disjunction. The first word of the libretto is Listen, the last is
separation : in sum, the point is to hear the dismemberment between Dido
and Aeneas, but equally between the lingual heterophony of the voices
(simultaneously mobilising three different languages) and the musical
heterophony of the instruments.
Voices
Three voices? Three roles,
three languages, three tempi, three manners of prosody and rhythm in language,
three modes of vocalisation. In total, three musical dialectics.
-
Dido speaks Latin. Her text is freely borrowed from
Virgil (fourth book of the Aeneid)
and prosodised without taking account of the original poetic metre (dactylic
hexameter). Dido essentially resorts to speech-song (Sprechgesang) and its rhythm is founded on the distinction, proper
to the Latin language, of short and long syllables. Her tempo is that of a
crotchet = 120. Through her speech-song, Dido camps at the frontier of the
musical and the lingual.
-
Aeneas speaks English, singing this language from one
end of the work to the other. His rhythm is founded on the accentuation proper
to English (the syllables agglomerating around a specific point of stress of a
word or a syntagm). His tempo is that of a crotchet = 100. Aeneas, through
song, is incorporated into music, but, through his own tempo, at an interior
distance.
-
Finally, the chorus speaks French like a reciter. Its
rhythm is fluid. Conforming to the prosody of French, the phrase is delivered
with one trait, the syllabication playing on weak differences of durations and
accents. Its tempo is that of a crotchet
= 80. The chorus is held at an internal distance from the music, which
agrees with its commentative purpose.
In a brief moment, Dido and Aeneas find each other around the French
language to recall their amorous embrace. The chorus makes brief incursions as
much into the Latin of Dido as into the English of Aeneas. In total, the three
voices are superposed one on another (according to three different tempi)
rather than forming a dialogue. They compose in this way a weave (rather than a
counterpoint) that, even though musically notated, remains in essence lingual.
Instruments
The two sections (piano and percussion) alternate
musical roles in a series of juxtaposed blocks rather than in continuous
development throughout the work. The musical logic of the ensemble arises from
a sort of musical montage, composing a kaleidoscope of propositions that the
three voices come to traverse, form wakes in, and turn upside down. In total,
the instrumental heterophony becomes progressively denser throughout the work,
passing from well spaced-out to frenzied propositions.
Choral Study
Overall, the work is composite. It deploys itself
according to two simultaneous faces, the one musical, the other lingual. In
doing this, it neither sets a text to music (in assimilating it into music,
as in lieder or opera) nor does it musically accompany a text (by supporting
the text or acting as dcor, as in melodrama) but interweaves two heterogeneous
faces coexisting in a relatively autonomous manner. In other words: a
heterophony between two types of heterophony: one lingual, the other musical.
This work is in this way the study (in the musical
sense of the term) of rapports of a new type between an instrumental music and
a speaking choir that we could call Babelian.
In doing this, is this a story of love between a text
and a music, a story of justice between them (does the music try to do justice
to a text?), of a separation between its two possible rapports? At the very
least, it is a choral study, an
experiment with a rapport between words and music that makes the rapport between
love and justice resonate, separating Dido and Aeneas.
*