Théorie de l’écoute musicale (7) : Théorie de la Forme musicale

 (ENS, 13 mai 2004)

François Nicolas

 

Argumentaire

Les différents modes musicaux de l'entendre (percevoir, auditionner, écouter, comprendre, ouïr) conçoivent différemment la Forme d’un morceau de musique. Il s’agira de caractériser la manière singulière dont l'écoute conçoit et élabore la Forme d’une œuvre.

Pour cela, en s’aidant du poème (G. M. Hopkins), on catégorisera l’inspect que thématise l'écoute en le différenciant de l’aspect (mode du comprendre), du schème (mode de l’ouïr) et de la Gestalt (mode du percevoir) ; ce faisant, l’audition s’avèrera indifférente au souci de Forme, sa totalisation d’éléments constituant sa seule forme de synthèse.

Puis, en s’aidant cette fois du mathème (A. Lautman), on formulera l’engendrement de l’inspect par l’intension.

Moment-faveur examiné : dans La Chute d'Icare (Brian Ferneyhough)

 

 


I. Introduction

Fin du cours précédent :

— Le moment-faveur délivre une dimension privilégiée pour suivre le travail de l’œuvre, à l’œuvre… Cette dimension privilégiée (« la violence », dans Structures II), étant une dimension parmi d’autres, va être l’opérateur pour « suivre » le travail de l’œuvre non seulement le long de cette dimension mais également dans toutes les autres. Cette dimension va « paramétrer » le travail selon toutes les dimensions. Cette dimension instaure un « fil d’écoute ».

Paramétrer ? Cf. logique du rythme, comme dialectique du même et de l’autre : le jeu des différences le long d’une dimension rythme les évolutions de cette dimension. Ce rythme particulier devient alors la référence pour situer, relativement à lui, les autres rythmes (c’est-à-dire les différenciations immanentes aux autres dimensions).

Le tressage de ces différents rythmes analytiques produit un Rythme synthétique dont le nerf est le rythme de la dimension privilégiée.

— « En même temps », le moment-faveur lègue une question (une équation différentielle) : quelle est l’intension à l’œuvre (quelle est la fonction ƒ qui satisfait à l’équation) ? Point important : cette fonction recherchée est elle-même une synthèse (car elle met à contribution toutes les dimensions). La production de la synthèse précédente (forme quadratique chez Lautman, synthèse rythmique ici) — qui se fait dans le mouvement même de résolution de l’équation au fil de la dimension privilégiée — ne tient pas lieu de résolution de l’équation : ƒ ≠ R !

— L’écoute, après le moment-faveur, qui se fait le long du fil d’écoute (dimension privilégiée par rapport à laquelle se mesurent désormais toutes les différences), génère le Rythme (synthèse R) comme sous-produit, non comme son véritable but. L’écoute en fait est écoute non pas du Rythme mais de l’intension c’est-à-dire de la fonction ƒ recherchée. Intégrer l’équation, trouver la fonction ƒ, dégager l’intension se fait aussi au fil de l’écoute car la solution (ƒ, ou intension) ne va pas se donner comme une formule (statique : une combinaison formulable, objectivable, disons des hauteurs, durées, intensités et timbres) mais comme une puissance dynamique, une manière de mettre toutes ces dimensions en rapport en sorte que cette synthèse soit dynamique, prenne forme d’un projet, d’une médiation, ou d’un « en avant », etc. En un sens, cette intension ne sera jamais objectivée : elle ne prendra jamais la forme d’une formule-objet. Cette intension sera connue, car éprouvée à  l’écoute, comme dynamique, comme création de temps, comme impulsion, élan, etc. Elle ne sera pas saisissable : cette intension est l’esprit de l’œuvre plutôt que son corps.

— Ainsi le travail de l’écoute produit latéralement du Rythme (comme synthèse dont le nerf est le fil d’écoute) mais ce travail est un suivi à la trace de l’intension. Le travail de l’écoute dépose donc une synthèse rythmique, dégage comme sous-produit une telle synthèse rythmique dans le geste même où il s’agit d’épouser l’intension à l’œuvre.

— Le résultat principal de ce travail n’est pas la synthèse rythmique, ni le dégagement d’une formule de l’intension — la production de ƒ comme objet — puisque l’intension ne reste appréhendée que dans sa dynamique locale et de proche en proche. L’idée est alors qu’il va bien y avoirproduction d’un résultat global objectivé et que ce résultat va être une Forme conçue comme inspect de l’œuvre (lequel sera produit par « intégration » de l’intension le long de la ligne d’écoute).

 

La Forme musicale est donc elle-même une synthèse. La Forme se bâtit au fil d’une analyse (l’écoute est une analyse).

La Forme est une saisie synthétique de l’œuvre qui va pouvoir prendre différentes figures selon qu’elle procède de l’écoute ou des autres modes de l’entendre.

 

Reprendre les maigres éléments de débat contemporain sur la Forme musicale.

Situer l’intension hopkinsienne par rapport à l’intentio de St Augustin et d’Hopkins.

Distinguer aspect d’inspect.

Donner en musique les mathèmes de l’inspect et de l’aspect. Aspect => comprendre.

Conclure sur d’autres approches de la Forme par les trois autres modes de l’entendre.

 

II. L’énigme de la Forme musicale

La catégorie de Forme musicale est devenue problématique dans la musique de l’après-guerre.

II.1 Boulez, « au seuil de la Forme »

Qu’il suffise pour cela de rappeler que Boulez achevait son Penser la musique aujourd’hui sur un « terme provisoire » qu’il présentait ainsi : « Avant d’aborder la forme, nous avons tenté d’opérer une synthèse de la technique actuelle. » [1] « Nous arrivons au terme de notre investigation sur la technique proprement dite, au seuil de la forme. » [2]  Or Boulez n’a jamais rédigé le chapitre annoncé sur la forme [3]. On trouve bien quelques considérations générales dans Point de repère [4] mais l’examen de cette question s’y fait à l’ombre de cette déclaration liminaire : « Parler de forme en général est devenu très difficile » [5]. Autant dire que les écrits de Boulez sur la forme n’ont guère l’acuité qu’ils ont sur d’autres dimensions musicales.

II.2 L’œuvre ouverte…

Il faut également rappeler qu’à la charnière des années 50 et 60 une mode a prévalu qui, sous l’emblème de l’« Œuvre ouverte », récusait le caractère normatif de « La Grande Forme » et en appelait d’une ouverture des Formes artistiques, de la nécessaire pluralisation des Formes d’une même œuvre [6]. Là aussi, ce qui nous reste de cette expérience prend le tour d’une suspension, d’une butée ou même d’une défaillance plutôt que d’une percée ou d’une recomposition du concept de Forme musicale.

Bref, les années d’après-guerre ne nous lèguent guère de nouvelles conceptions d’où repartir.

II.3 Contre la forme architectonique

La théorie musicale antérieure à la seconde guerre avait légué une Forme conçue comme architecture générale de l’œuvre (en général qui lui préexistait). D’où découlaient quelques grands types de plans (la forme-sonate, la forme-rondeau…) que la théorie musicale [7] déclarait aptes à structurer le développement d’une œuvre particulière (une sonate, un rondo…).

Les musiciens de l’après-guerre ont opposé à cette conception architectonique de la forme deux objections :

1) L’une, venue de la phénoménologie — qu’on retrouve explicitement sous la plume de Boulez [8] — relève que la forme (pré)conçue sur le papier [9] et la forme vécue ne sont pas les mêmes.

2) L’autre relève qu’avec la fin du système tonal, chaque œuvre est devenue une pièce entièrement singulière, redevable d’un nom propre et non plus d’un nom commun, puisqu’elle se dote d’un parcours entièrement original qu’elle invente au fur et à mesure de sa progression plutôt qu’il ne lui est livré prêt-à-effectuer.

Le fait est que nulle théorie de la Forme ne s’est véritablement reconstituée à partir de ces deux objections si bien qu’il faut admettre que la musique contemporaine en est restée en matière de Forme à une théorie négative (comme on parle de théologie négative pour indiquer qu’on ne saurait attacher à Dieu que des prédicats négatifs).

Franchir le cap d’une théorie affirmative de la Forme implique a minima de faire siens les deux prédicats négatifs légués par l’après-guerre :

1. la Forme musicale n’est pas une architectonique (éventuellement préétablie) ;

2. la Forme de toute œuvre est une singularité, non la particularisation d’un schéma général.

D’où la Forme comme dégagée au fil de l’intension, laquelle est éminemment singulière (c’est le nom même de la singularité ou mieux de la singularisation : c’est ce qui dans la singularité est singularisant, c’est le singularisant de la singularité).

III. Récréation : l’intentio chez St Augustin

On trouve « ce » terme chez St Augustin, précisément lorsqu’il parle du temps. Parenté avec notre catégorie ?

Cf. j’avais évoqué dans un cours précédent la trilogie : extension, intension et distension… On retrouve ces trois termes chez St Augustin. En quel sens ?

 

Quelques mots sur ce jeu de catégories augustiniennes qui apparaissent dans Les Confessions lorsqu’Augustin expose sa conception du temps [10].

Confessions (Livre XI, XXIX.39)

…, non in ea quæ futura et transitura sunt, sed in ea quæ ante sunt non distensus sed extensus, non secundum distentionem sed secundum intentionem…[11]

Littéralement : « et, tourné non pas vers le futur (ce qui sera) et ce qui est transitoire (= éphémère) mais vers ce qui est devant moi (le présent), (je serai) non pas distrait, mais attentif, non pas dans la distraction/dispersion (de tout mon être, la dissipation, le divertissement ?), mais dans la concentration (l’unité de mon être)… »

Soit : « et, tourné non pas vers le futur et ce qui est transitoire, mais vers le présent, non pas distrait mais attentif, non pas dans la dispersion de mon âme mais sa concentration… »

 

Cf. « Cette mystérieuse intentio dont parle saint Augustin à la fin du livre XI des Confessions (§ xxix, 39), qui n’est ni la relation normale à l’avenir, ni une extase au sens plotinien, mais le mouvement décrit par saint Paul (Phil. 3, 13-14) et que certains théologiens, reprenant sous forme verbale le participe employé par l’apôtre, avaient appelé “épectase”. » Yvon Brès [12]

On a ici la création d’un présent. L’opérateur de présent(ification), de constitution d’un présent, non d’un futur, est l’intension.

 

Quelques  remarques, en se reportant au texte latin :

1) Augustin introduit ses notions dans la modalité d’un verbe plutôt que d’un substantif. Cette distinction a son importance : Augustin pense l’agir plutôt que l’action, le tendre vers plutôt que la tension, etc. Cette orientation nous interpelle : il s’agit sans doute pour nous de théoriser ce que veut dire qu’écouter la musique plutôt que de théoriser l’écoute musicale. Ce qui nous intéresse, ce sont les verbes — entendre, écouter, comprendre, percevoir, auditionner, ouïr —, les gestes. Les nommer comme verbes préservent la proximité maximale avec la pratique musicale quand user de substantifs introduit une conceptualisation supplémentaire, qui rapproche la catégorie musicienne (qui nous intéresse) du concept philosophique homonyme. La directive serait donc de nous tenir, autant qu’il est possible, aux verbes plutôt qu’aux substantifs, de nous cramponner au percevoir la musique sans le faire équivaloir trop ingénument avec une perception.

2) Les verbes avec lesquels pense Augustin sont au nombre de 5 et non pas de 2 ou 4 : tendere, distendere, intendere, adtendere, extendere ; soit le radical tendere et les préfixes dis-, ad-, ex-, in-. En français : tendre, attendre, étendre, distendre et notre entendre (tentio : tension — adtentio : attention — distentio : distension-détente — extentio : extension — intentio : intention-intensité).

Ceci donne, dans le texte des Confessions :

·       praesens intentio (l’intention présente) [13]

·       in totum expectatio mea tenditur (mon attente se tend vers l’ensemble) [14]

·       distenditur uita huius actionis meae (toute mon activité est distendue [partagée entre mémoire et attente]) [15]

·       praesens adest attentio mea (mon attention reste présente) [16]

·       non distentus, sed extentus, non secundum distentionem, sed secundum intentionem (non distendu mais étendu, non selon une distention mais selon une intention) [17] — ici extentio et intentio s’équivalent en contraposition à distentio… —. [18]

IV. Aspect et inspect

Prenons comme délimitation de la Forme ceci : la Forme d’une œuvre donnée est ce qui la saisit dans son ensemble à partir de son déploiement sonore (plutôt qu’à partir de la partition).

On distinguera donc la Forme de l’architecture de l’œuvre (préétablie ou non, peu nous importe) si l’on entend par architecture de l’œuvre cette structuration en grandes masses, en vastes parties qu’on dégage en se tenant face à l’œuvre, dans une extériorité examinatrice plutôt qu’au fil endogène d’une écoute. Le véhicule privilégié d’une telle structuration architecturale est alors sa partition car c’est elle qui dispose le face à face de manière suffisamment stable.

Notre problème devient alors : quels rapports y a-t-il entre Forme et architecture d’une œuvre ?

Les deux catégories (Forme et architecture) ont en commun de désigner une saisie d’ensemble de l’œuvre (par opposition à une saisie partielle ou régionale) mais la Forme est une saisie qui procède de manière intrinsèque au déroulement sonore quand l’architecture opère de manière extrinsèque par appropriation de l’œuvre en sa simultanéité écrite. Le problème du rapport entre Forme et architecture participe alors de cette question : dans quelles conditions y a-t-il solidarité / indépendance entre propriétés intrinsèques et propriétés extrinsèques ?

IV.1.a. Propriétés intrinsèques et extrinsèques

Tout ceci a été philosophiquement ressaisi entre les deux guerres par Albert Lautman.

Albert Lautman propose d’appeler propriétés intrinsèques d’un être (ou propriétés internes, propriétés de structure) les propriétés indépendantes de la position de cet être dans l’espace. Elles appartiennent donc en propre à cet être et constituent ce que Lautman appelle une analytique. Les propriétés extrinsèques (ou propriétés d’insertion, propriétés de situation), elles, traduisent la solidarité d’un être et de l’univers au sein duquel il est plongé et elles constituent ce que Lautman appelle une esthétique.

Dans quel cas ces deux types de propriété sont-elles ou ne sont-elles pas indépendants ? Comment peut-on concevoir une interaction des unes sur les autres ? Lautman donne ici deux exemples de démarches philosophiques :

• Leibniz incarne la voie qui intériorise les propriétés extrinsèques en les projetant en propriétés intrinsèques. Il tente en effet de réduire les rapports que la monade soutient avec toutes les autres monades en propriétés internes, enveloppées dans l’essence de la monade individuelle. D’où une sympathie universelle qui se projette en chaque monade, laquelle représente exactement l’univers à sa manière.

• À l’opposé Kant postule une stricte distinction sans réduction possible des unes aux autres en remarquant l’incongruence de figures symétriques qui ne sont donc pas superposables (telles les mains gauche et droite). Ces différences entre ces figures résultent en fait de la différence des places qu’occupent ces corps dans l’espace sensible et non pas d’une différence dans les propriétés internes de ces corps. D’où, selon Kant, une distinction entre la raison qui ne peut que caractériser de façon abstraite les propriétés intrinsèques des corps géométriques (raison analytique donc, pour reprendre les termes de Lautman) et l’intuition sensible (ou intuition qu’on pourrait dire esthétique) qui appréhende la position dans l’espace de ces corps et se réfère à l’orientation de l’espace entier.

Sur cette base, Lautman examine les propriétés mathématiques de l’anneau de Möbius : là où le fait d’être non-orientable constitue une propriété intrinsèque de cet anneau, le fait par contre d’avoir un seul côté est pour ce même anneau une propriété essentiellement extrinsèque (par exemple dans un espace non euclidien, un tel anneau peut être bilatère !). On se trouve donc ici apparemment face à une stricte distinction des propriétés, un étroit cloisonnement entre propriétés intrinsèques de structure et propriétés extrinsèques de situation.

Or — surprise mathématique — on démontre que dans un espace orientable à n dimensions, il y a pour une variété à n-1 dimensions équivalence entre le fait d’être bilatère et le fait d’être orientable et, réciproquement, équivalence entre le fait d’être unilatère et le fait d’être non-orientable. Donc les propriétés géométriques de relation se laissent ici dans une très large mesure exprimer en propriétés algébriques intrinsèques et l’on voit alors s’évanouir la distinction kantienne d’une esthétique et d’une analytique.

 

En résumé, une bande de Moebius est à la fois inorientable et unilatère, mais le fait d’être non-orientable constitue une propriété intrinsèque de cette bande alors que le fait d’avoir un seul côté est pour cette même bande une propriété essentiellement extrinsèque ; or ces propriétés n’ont aucune raison a priori d’être solidaires (on montre mathématiquement qu’une bande de Möbius, plongée dans certains espaces, pourra ne plus être unilatère lors même qu’elle restera toujours inorientable puisque cette propriété lui est intrinsèque).

IV.1.b. Bande de Möbius musicale

En musique, une bande de Möbius, c’est une rétrogradation associée à un renversement, par exemple ceci prélevé dans une de mes premières œuvres : Passage II (1985), pour trois flûtes :


Passage II (pour trois flûtes, 1985 – Éd. Jobert) : mesures 33-48


Si on distingue les trois flûtes par les lettres A, B et C, on a la structure suivante :

Ainsi, si vous repliez le second système sur le premier (selon un pli horizontal), vous obtenez une superposition qui indique que ce second système est la reprise du premier selon une inversion générale du haut et du bas si bien que l’ensemble de ce passage peut être conçu comme la circulation sur une bande de Moebius de huit mesures de long, le second système ne représentant alors qu’un second tour parcouru à l’envers du premier.

IV.1.c. Aspect et inspect

Il y a, dans cette bande de Moebius musicale, corrélation entre une symétrie inversée pour l’œil et une désorientation pour l’oreille, donc entre propriété extrinsèque (maniée par l’écriture et la partition, ici la symétrie) et propriété intrinsèque (appropriée par l’oreille, ici la désorientation).

Si l’on appelle aspect de l’œuvre ses propriétés extrinsèques, comment nommer ses propriétés intrinsèques ?

Je recourrai pour ce faire à un terme anglais prélevé chez le poète Gerard Manley Hopkins inscape qu’il est d’usage de traduire par le néologisme français inspect. De quoi s’agit-il ?

Pour Hopkins, l’inspect désigne la forme singulière des choses lorsque cette forme est saisie de l’intérieur de la chose.

L’inspect d’une chose — d’un arbre, d’un oiseau, d’une aurore boréale… —, c’est sa forme, son design, sa Gestalt, ce qui fait qu’elle apparaît comme une, un apparaître-en-un mais en tant qu’apparaître pour-soi. L’inspect d’une chose, c’est la chose comptée-pour-une de l’intérieur même de son apparaître.

IV.1.c1. Aspect et inspect architecturaux

Un exemple, emprunté à l’architecture.

Si certains d’entre vous connaissent la cathédrale de Royan, cathédrale construite par Perret après la seconde guerre, elle se situe sur les hauteurs d’une colline et son apparence extérieure ne donne guère envie de la visiter. Pour qui s’y risque cependant, la découverte de la nef n’en est que plus saisissante surtout si vous pénétrez par l’entrée latérale située à proximité du chœur : vous vous trouvez d’un coup plongé sous une voûte incroyablement élancée qui jette au ciel ses bras de béton et fait appel irrésistible du regard vers les hauteurs. Là où l’aspect de la cathédrale était celui d’un tas presque informe à force de conformisme, la même cathédrale appréhendée de l’intérieur se présente comme orientation illuminée par une transcendance. L’inspect de cette cathédrale s’oppose ainsi du tout au tout à son aspect.

Relevons ce point : vous ne pouvez d’un seul regard totaliser l’intérieur d’une cathédrale car il vous faut constamment vous tourner pour prendre mesure de la globalité de l’espace intérieur et il n’y a aucun point de vue interne d’où embrasser la totalité de son élan. Pour prendre mesure du geste architectural dans sa globalité, il vous faut parcourir l’espace, tourner et retourner la tête et ce n’est qu’en récapitulant cet ensemble de sensations qu’il vous devient alors possible d’accéder à l’inspect de cet édifice.

L’historien de l’art Panovsky distinguait l’art roman de l’art gothique par une articulation différente entre façade et espace intérieur : la façade d’une cathédrale gothique présente sa structure intérieure (on peut y lire par exemple l’étendue des bas-côtés) quand une façade romane ne présage pas du plan interne [19]. En ce sens on dira que la cathédrale de Royan relève d’un rapport de type roman entre aspect et inspect puisque les deux y sont fortement dissociés.

V. Intension et inspect

Revenons sur les rapports entre intension et inspect. Illustrons cela par quelques exemples non musicaux.

V.1 Hopkins

Pour Hopkins, l’intension d’une chose relève de sa dynamique, de son énergie apte à soutenir la statique de l’inspect. L’intension gage la force interne de la chose, sa concentration propre. L’intension est à la force ce que l’inspect est à la forme. L’intension participe du dramatisme des choses quand l’inspect relève plutôt de leur esthétisme intérieur. L’intension, c’est ce qui soutient, par une circulation intérieure de flux, une tension propre à établir l’inspect.

Hopkins écrit par exemple : « J’ai eu l’intension du cheval » comme pour dire : « j’ai éprouvé ce qu’il éprouve, j’ai sympathisé avec son dynamisme propre, j’ai participé de l’existence du cheval comme être bondissant et non plus seulement saisi sa courbe propre, fût-ce de l’intérieur de lui-même ».

L’intension touche au vouloir propre de la chose ; elle requiert son épaisseur et non plus seulement son étendue.

V.1.a. Un ballon

Prenons un premier exemple, trivial, celui d’un ballon : son inspect serait sa forme ronde en tant que sa rondeur lui permet d’être appréhendable globalement comme forme mais — c’est là où l’inspect se distingue d’un aspect — tout ceci de l’intérieur même du ballon. Il faut pour cela s’imaginer habiter le ballon sans pouvoir l’embrasser en totalité d’un seul regard mais en arrivant cependant à saisir comme entité sa forme spécifique.

L’intension du ballon serait alors le dynamisme intérieur qui sous-tend son inspect rond ; c’est la pression de l’air, l’intensité interne qui rend possible et nécessaire cet inspect régulier tel que saisi de manière endogène.

V.2 Les Misérables

Prenons un second exemple, emprunté à ce roman-maître qu’est Les Misérables de Victor Hugo.

V.2.a. L’aspect

L’aspect, ici, est double : c’est l’aspect du monde décrit par le roman et l’aspect du roman lui-même.

L’aspect du monde, c’est la France de la Restauration et de la Révolution de 1830, ce sont ses classes sociales, ses bagnes et ses couvents, ses étudiants et ses commerçants, etc. C’est un monde profondément injuste, pour les ouvrières, pour les anciens révolutionnaires, pour les bagnards confrontés à la cupidité des opportunistes, mais c’est aussi un monde peuplé de gens droits et habité de grandeurs inaperçues.

L’aspect du roman, ce sont trois livres, de longues digressions et descriptions, un foisonnement de personnages lié par ce fil conducteur qu’est Jean Valjean, etc.

V.2.b. L’intension

L’intension du roman, c’est l’opérateur Jean Valjean comme subjectivation de la justice qui intensifie l’existence de Valjean comme ses rapports avec l’évêque de Digne, Javert, Cosette, Marius, les Thénardier, etc.

L’intension du roman — cela n’aurait pas de sens ici de parler d’une intension du monde —, c’est la justice comme thème subjectif œuvrant dans un monde injustement disposé. L’intension, c’est la tension portée par un juste traversant ce monde injuste ; c’est l’opération produite par la circulation de ce juste agissant ce monde de l’intérieur plutôt que le dénonçant de l’extérieur.

V.2.c. L’inspect

L’inspect de l’œuvre peut être alors pensé comme la mise au jour de cette réalité singulière qu’en ce monde injuste, il y a bien la justice (axiome beckettien, comme vous le savez sans doute…). Ce monde, quoiqu’injuste, s’avère configurable comme juste. Ce monde n’est pas donné comme juste ; il est même essentiellement donné comme injuste mais il apparaît, via l’existence immanente d’un juste, qu’il y a bien la justice en ce monde (et non pas en un autre monde, au-delà de celui-ci, ou en un monde venant après celui-ci, une fois qu’il serait bouleversé par une révolution de ses fondements).

D’un côté ce monde est injuste et d’un autre côté il y a la justice en ce monde (ce qui n’est pas exactement dire que ce monde est juste). La justice donc peut configurer ce monde, le modeler. Justice va ainsi nommer une caractéristique globale que Valjean dégage dans ce monde.

Global veut dire ici : il ne s’agit pas de produire des îlots de justice dans un océan d’injustice, des zones libérées de justice dans un monde globalement injuste mais bien de tenir qu’il y a la justice, de part en part dans ce monde-ci. Globalité ne voulant pas dire totalité, on ne dira pas que ce monde injuste est devenu juste grâce à Valjean. Ce monde est simplement devenu appréhendable globalement comme compatible avec l’existence de la justice en son cœur et non pas en ses marges. Ce monde s’avère justifiable (mais pas en totalité), justifié par Valjean, magnétisé par la justice de part en part. Ce monde est globalement justicié par un juste, mais pas totalement : certes les Thénardier doivent fuir, mais ce sera pour devenir marchands d’esclave…

Ce monde, tel que globalement vu par un juste, tel qu’appréhendé globalement par qui soutient qu’« il y a bien la justice en ce monde injuste », ceci est l’inspect du roman, d’un « roman au monde » (comme on parle de « sujet au monde »…).

 

Résumons :

— L’aspect est objectif. Il est ici double : l’aspect du monde (tel qu’on peut le voir de l’extérieur grâce au roman, tel qu’on peut le caractériser par comparaison avec d’autres mondes, etc.) et l’aspect du roman (cet aspect que l’on pourrait dire forme extérieure de son corps).

— L’intension est subjective : c’est l’énergie propre du roman, son vecteur, son désir, son courage, ses angoisses également, sa volonté propre, son dynamisme, ce qui fait que le fil d’Ariane qu’est Jean Valjean ne se rompt pas et rebondit d’une taverne à une usine, d’un couvent à un jardin, traversant hasardeusement ce monde en sa plus grande diagonale : les diagonales des couches sociales, des différentes subjectivités de la France de la Restauration (religieuses, napoléoniennes, révolutionnaires, bourgeoises, canailleuses, etc.), récollectant sous la figure d’un homme solitaire ce qui peut être inscrit comme justice immanente.

— L’inspect est également subjectif. Il est simple et non plus double car il a pour essence d’être l’empreinte du roman sur le monde en question. C’est l’inspect du roman tel que pétrissant, creusant, modelant, configurant le monde qu’il parcourt, marque et transforme. L’inspect, c’est cette justice immanente de ce monde où justice a conquis un sens subjectif et n’est plus réductible à l’objectivité d’une équité…

 

Récapitulons les propriétés différentielles de ces trois catégories :

 

Aspect

Inspect

Intension

Compréhension

Globalisation extrinsèque et « objective »

Écoute

Globalisation intrinsèque et « subjective »

Forme statique et « esthétique »

Force dynamique et « dramatique »

cohérence extérieure (de l’apparaître)

consistance intérieure

insistance (intérieure)

 

VI. Écoute…

Comment penser plus avant l’aspect et surtout l’inspect d’une œuvre musicale s’il est vrai que l’inspect indexe la Forme écoutée de l’œuvre ?

On pourrait dire dans un premier temps : l’aspect de l’œuvre, c’est l’aspect qu’en livre pour l’œil sa partition quand l’inspect, c’est sa saisie d’ensemble par une oreille qui n’en prend connaissance que localement, moment par moment, voisinage après voisinage [20].

Mais il faut bien sûr aller plus loin : l’oreille est également en état de dégager l’aspect d’une œuvre et la polarité aspect / inspect en musique ne recouvre pas le partage œil / oreille.

Pour caractériser un aspect de l’œuvre qui soit proprement auditif, il nous faut alors distinguer la compréhension d’une œuvre de son écoute, l’idée étant que la compréhension va produire l’aspect de l’œuvre là où l’écoute va conduire à son inspect.

VI.1.a. Mandelstam

Ossip Mandelstam, cet autre poète, écrivait ceci :

« La qualité de la poésie se définit par la rapidité et la vigueur avec lesquelles elle impose ses projets péremptoires à la nature inerte, purement quantitative du lexique. Il faut traverser à la course toute la largeur d’un fleuve encombré de jonques mobiles en tous sens : ainsi se constitue le sens du discours poétique. Ce n’est pas un itinéraire qu’on peut retracer en interrogeant les bateliers : ils ne vous diront ni comment ni pourquoi vous avez sauté de jonque en jonque. »

VI.1.b. Point d’écoute

L’écoute, on l’a vu, est une traversée de l’œuvre musicale, sur toute son étendue, « de part en part ». Cela suppose le déplacement incessant d’un point d’appui — celui-ci nous est fourni par le moment-faveur, à charge pour l’auditeur de rester ensuite à hauteur de l’attention dont l’occasion lui a été ainsi gracieusement prodiguée — qu’on peut figurer comme le traçage d’une ligne d’écoute intérieure à l’œuvre. Soit : à partir du moment-faveur se constitue un point d’écoute, moins point d’écoute sur l’œuvre que point d’écoute à l’œuvre.

VI.1.c. Ligne d’écoute

La succession des points d’écoute trace une ligne d’écoute à l’œuvre qui va être le fil d’Ariane pour l’inspect.

VI.1.c1. Global n’est pas total

Une propriété essentielle de ce fil d’écoute est d’être global — il traverse l’œuvre d’un bout à l’autre de son déploiement temporel — sans être pour autant une totalisation.

La totalité d’une œuvre, c’est la sommation, l’intégrale de tous ses éléments tant écrits que sonores, sans en oublier un seul.

La globalité d’une œuvre, c’est ce qui permet de la compter-pour-une sans pour autant compter chacun de ses éléments ; c’est une manière de l’embrasser de part en part sans pour autant s’attacher à compter chacun de ses points. L’écoute musicale édifie une telle globalisation qui n’a nul besoin d’en passer par une totalisation (c’est-à-dire par une audition). Ainsi si la troisième audition est bien la bonne, l’écoute par contre n’a nul besoin d’auditions préalables et, plus encore, les écoutes successives d’une même œuvre ne sont pas cumulatives comme le sont les auditions puisque le fait qu’il y ait vraiment écoute n’est garanti par rien et que chaque écoute véritable est toujours, peu ou prou, un hapax.

Revenons à notre inspect qui est la Forme immanente, la Forme en-soi et pour-soi de l’œuvre. Cet inspect découle de ce tracé d’une ligne d’écoute sans être à proprement parler cette ligne d’écoute. L’inspect va être édifié à partir de cette ligne d’écoute sans s’y identifier. De quelle manière ?

VI.1.c2. Intégrale curviligne

Pour éclairer ce point, je réutiliserai l’image mathématique de l’intégration mais en recourant cette fois au concept d’intégrale curviligne.

Une intégrale curviligne, c’est ce qui somme le travail d’une force le long d’une courbe, c’est ce qui intègre la dépense occasionnée par la circulation d’une énergie le long d’une trajectoire. Point remarquable : le résultat de l’intégrale est indifférent à la manière dont cette trajectoire est parcourue (techniquement dit : le paramétrage de la courbe en question n’importe pas) ce qui autorise les mathématiciens à l’inscrire ainsi :

(G désigne ici la courbe le long de laquelle la force F est intégrée)

Comme l’on voit, le temps t — comme tout autre paramétrage de la courbe — n’apparaît pas ici… Ceci veut dire que l’intégrale curviligne est une propriété en soi de la courbe, indépendante de la manière dont on la paramètre c’est-à-dire dont on la parcourt. Ce point est pour nous important : il indique que la production de l’inspect par filage de la ligne d’écoute ne dépend pas de la manière dont cette ligne va être parcourue par qui écoute : celui-ci peut faire une pause, hésiter, sauter rapidement d’un point d’écoute à l’autre, l’inspect de l’œuvre sera le même. Autant dire que la com-préhension intime de l’œuvre ne dépendra pas d’un paramétrage objectif, d’un tempo exogène à l’écoute qui lui imposerait son mode de constitution.

Je rappelle que dans notre cours précédent nous avons vu comment le moment-faveur délivre la dimension privilégiée constituante de la ligne d’écoute, dimension qui vient paramétrer l’ensemble des évolutions et par là constituer le « ds » de l’intégrale curviligne.

Cette différentielle va s’appliquer à l’intension le long de la ligne d’écoute pour configurer l’intégrale de l’inspect que l’ont peut noter ainsi :

dl note le différentiel tangentiel du point d’écoute (différentiel le long de la direction privilégiée par le moment-faveur).

C’est donc l’intension à l’œuvre qui va faire l’inspect. D’où les « mathèmes » suivants de l’aspect et de l’inspect musicaux :

 

Aspect comme compréhension d’une pièce de musique

 

Formalisation mathématique

(intégration d’une fonction dans une intervalle)

 

D’où le mathème musical de l’aspect :

 

Inspect  comme écoute à l’œuvre

 

Formalisation mathématique

(intégration d’une force le long d’une courbe)

 

D’où le mathème musical de l’inspect :

 

VII. Des différentes acceptions musicales de la Forme

Qu’en est-il, en matière de Forme, des trois autres modes de l’entendre, du percevoir, de l’ouïr et, bien sûr, de l’auditionner ?

Une exploration approfondie impliquerait une théorie de la synthèse s’il est vrai qu’une Forme musicale procède d’une synthèse de ce qui est analytiquement disposé par chacun des modes de l’entendre. Sans me lancer ici dans une telle entreprise — au demeurant, il s’agit ici de théoriser l’écoute musicale, non l’entendre —, je dirai ceci :

VII.1 Audition

Quant à l’audition, on peut soutenir qu’à proprement parler, elle n’engendre pas de Forme : l’audition est une sommation, une intégration de tous les éléments. Son mode propre de synthèse est donc celui précisément de la totalisation qui n’implique guère d’« image » synthétique.

VII.2 Perception

En ce qui concerne la perception, son engendrement propre est celui d’une Gestalt laquelle peut être thématisée comme synthèse enveloppante de l’objet perçu. Ceci dit, la perception a plus à faire avec des entités locales ou régionales qu’à proprement parler globales ou totalisantes.

VII.3 Ouïe

Reste l’ouïe qu’on propose ici de concevoir sous un mode singulier : comme remontée de variations paramétrées vers le type d’évolution du paramètre ; par l’ouïe, on remonte des effets paramétrés vers la cause paramétrante.

Pour en donner un exemple très simple, imaginez deux courbes décrites par un même paramètre r qui soient des sinusoïdes décalées l’une par rapport à l’autre : x=f(r) et y=g(r). On peut très simplement ramener cette évolution aux variations d’un point M de coordonnées (x,y) parcourant un cercle centré à l’origine dans un repère du plan où r désigne l’angle variable que fait la droite OM avec l’axe des x.

Dans ce cas, l’évolution des courbes initiales a pour schème un cercle régulièrement parcouru selon le seul paramètre r.

Le principe de l’ouïe est donc de ramener les évolutions temporelles des différentes dimensions au paramétrage d’un schéma hors-temps.

Cette conception de l’entendre est bien sûr musicalement très pauvre puisqu’elle tend à concevoir le temps comme un simple paramétrage d’évolutions purement géométriques — on sait le bonheur (ou le malheur, selon) qu’a pu en tirer un certain Iannis Xenakis…

 

Au total, je résumerai ainsi les rapports des 5 modes musicaux de l’entendre à la Forme :


 

Modes de l’entendre

Audition

perception

Ouïe

Compréhension

Écoute

Type de Forme

Pas de Forme !

Gestalt

Schèma

Aspect

Inspect

Mode de constitution de la Forme

 

Enveloppement extrinsèque et « objectif »

Totalisation extrinsèque et « objective »

Globalisation extrinsèque et « objective »

Globalisation intrinsèque et « subjective »

 

––––––



[1] p. 167

[2] p. 165

[3] Le projet initial de Boulez (voir Points de repère, p. 11) était de rassembler ses cours de Darmstadt (1955-1960) en un vaste Penser la musique aujourd’hui dont les différents chapitres auraient été les suivants :

I. Considérations générales [cf. premier chapitre du libre Penser la musique aujourd’hui tel que paru en 1964]

II. Technique musicale [id.]

III. Forme [voir quelques bribes dans le chapitre I de Points de repère]

IV. Notation [id.]

V. Esthétique [id.]

VI. Conclusion [id.]

[4] p. 85

[5] p. 86

[6] On convoquait pour ce faire le talent des interprètes et les instituait, souvent contre leur gré, garant de cette mobilité…

[7] Cf. Vincent d’Indy…

[8] Cf. Points de repère, p. 91

[9] Boulez parle ici de « forme pensée »…

[10] Livre XI

[11] « Cette mystérieuse intentio dont parle saint Augustin à la fin du livre XI des Confessions (§ xxix, 39), qui n’est ni la relation normale à l’avenir, ni une extase au sens plotinien, mais le mouvement décrit par saint Paul (Phil. 3, 13-14) et que certains théologiens, reprenant sous forme verbale le participe employé par l’apôtre, avaient appelé “épectase”. »Yvon Brès (L’avenir du judéo-christianisme, Puf, 2002 – note 3 page 58)

[12] L’avenir du judéo-christianisme, Puf, 2002 – note 3 page 58

[13] XXVII, 36

[14] XXVIII, 38

[15] XXVIII, 38

[16] XXVIII, 38

[17] XXIX, 39

[18] Remarque

Christian Accaoui (Le temps musical, Desclée de Brouwer, 2001) parle de temps-fresque (p. 112) au lieu de ce que je propose de nommer la trajectoire qu’il s’agit d’ouïr. En ce point, Accauoi articule son temps-fresque à l’intentio augustinienne « par laquelle la représentation contracte en imagination l’objet temporel » nous dit-il (note 1 p. 37). Faut-il le suivre dans cette interprétation de l’intentio ? Je ne le pense pas. Plus généralement Accaoui retient de St Augustin la polarité distentio / intentio. Mais le jeu des notions augustiniennes ne se réduit pas à distentio et intentio : il comporte également l’extentio et l’attentio… Peut-on projeter ce quatuor de notions augustiniennes dans nos cinq figures de l’entendre musical ? Et faut-il en particulier considérer que notre « compréhension » se tiendrait au lieu de l’intentio ? Je ne le pense pas.

[19] Bien avant Panovsky, Viollet-le-Duc avait soutenu le même type de différence entre architecture grecque et architecture romaine…

[20] Lautman parlerait ici d’espace de Riemann…