De la solidarité de groupe dans la théorie
galoisienne
(séminaire
mamuphi, Ircam, samedi 13 octobre 2018)
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-
François Nicolas -
Deux cents ans après Galois, Alain Connes déclare qu’il lui a fallu « beaucoup de temps » et « énormément de travail » en 2011 pour arriver à « comprendre la pénétration de la pensée de Galois » et prendre conscience de ce que « sa pensée garde son potentiel de mise en mouvement » et cette « fulgurance qui montre la voie à suivre ». [1]
Pour mieux rétablir l’idée galoisienne d’ambiguïté, Connes délaisse provisoirement les structures algébriques abstraites que la modernité bourbakiste a retenues (groupes de symétrie des k-automorphismes, anneaux des polynômes, corps de résolution, espaces vectoriels et k-algèbres des extensions…) pour réactiver l’étonnement premier : il existe des relations rationnelles entre racines non rationnelles d’une même équation polynomiale, et c’est l’étude systématique de ces relations qui fonde la théorisation galoisienne avant qu’elle ne devienne officiellement « la théorie de Galois ».
Ce retournement rétablit une continuité Lagrange-Galois (sous le signe des « résolvantes » auxiliaires) pour mieux mettre en évidence le pas gagné par Galois : la lettre x ne symbolise plus tant une inconnue individuée que le membre générique d’un collectif solidaire, l’enjeu de l’équation n’est plus tant sa résolution (en x) que la caractérisation de son groupe si bien que les structures algébriques (dégagées dans la seconde vague de la modernité algébrique par Steinitz, Artin…) se réassurent ainsi dans leur capacité à formaliser le modèle polynomial.
Ce réancrage de la théorie dans son modèle constituant invite à repenser ce que modernité (ici algébrique) veut dire : par-delà le risque de l’abstraction formaliste où la syntaxe cultive ses capacités autoréférentielles (le « modernisme »), le retour à la sémantique originelle revivifie le travail théorique en autorisant quelques nouvelles interprétations de la formalisation patiemment élaborée et, par-là, quelques nouvelles extensions théoriques (songeons à la notion contemporaine de perfectoïde [2] venant explorer les parentés formelles d’espace géométrique entre l’algèbre polynomiale et l’arithmétique p-adique).
Ce faisant, le travail théorique avoue le secret commun à ses différents modèles en le formalisant : ainsi la forme du secret polynomial va se donner en l’idée de groupe qui formalise la solidarité secrète des racines (« l’ambiguïté » syntaxique avoue la solidarité sémantique des racines « conjuguées », donc gémellaires).
Ce qui caractériserait alors le travail théorique moderne serait que les secrets des modèles ne relèveraient plus d’une dissimulation (voir la logique infantile de l’objet caché pour mieux préparer la surprise de sa réapparition) qu’une mise au jour suffirait alors à dissiper, mais d’une singularité (dont Hironaka délivre le chiffre : une configuration locale qui avoue, par quelque irrégularité phénoménale, que deux tendances globalement orthogonales – c’est le secret d’ensemble - y sont rendues indiscernables). Dans notre cas, la théorie algébrique ne vise plus, comme dans l’algèbre classique, la résorption « par radicaux » du secret polynomial (tout classicisme ne répand-il pas quelque parfum d’enfance ?) mais l’aveu de sa singularité sous forme d’un groupe de solidarité entre racines.
Au total, on aurait donc la périodisation suivante :
- La première vague de la modernité algébrique (XIX°) avoue l’existence singulière d’un groupe qui reste pratiquement incalculable – d’où l’incompréhension tenace des « réalistes ».
- La seconde vague (première moitié du XX°) autonomise la forme de cet aveu, la séparant de la singularité secrète du polynome, par l’étude des nouvelles structures algébriques ainsi dégagées (d’où le risque « moderniste » d’un certain péril formaliste).
- La troisième vague (à partir des années 60), celle-là même qu’il s’agit cinquante ans plus tard de ressaisir inventivement (voir les chantiers en cours autour de Grothendieck) contre les sirènes démobilisatrices du consentement postmoderne, réancre la forme générale de l’aveu dans les secrets algébriques spécifiques en assumant consciemment qu’un secret avoué reste un secret (Lacan) : ainsi Connes, retournant à la théorie galoisienne d’avant « la théorie de Galois », éprouve que l’aveu, loin de dissiper le secret, le réactive en amplifiant ses échos.
Ce retour contemporain à la théorie galoisienne s’avère gros de raisonances pour les modernités musicale (composer en « groupant » des voix ?), mamuphique (« grouper » mathématiques, musique et philosophie ?) et politique (« justice » comme nom du groupe – infini - Humanité ?).
I. La
situation polynomiale et ses problèmes
Algèbre-arithmétique-géométrie
Petite pause
sur cette distinction
Groupements
géométriques/algébriques
3 -
Expression rationnelle de rα
4 -
Expressions rationnelles des (n-1) autres racines
5 –
Équivalence permutationnelle
III. Prolongements
mathématiques
Passage
à l’infini : les séries formelles
Le
groupe de Galois différentiel
Sa mort, une
équation à 5 inconnues !
Néoclassicisme
/ transmodernité
De la fonctionnalité à la Fonctorialité
De la collection constituée au collectif
constituant…
« La longue marche à travers la théorie
de Galois » Alexandre Grothendieck
« La théorie de Galois est devenue
tellement classique en mathématiques que les textes qui la présentent sont pour
la plupart d’une facilité apparente qui est déconcertante et terriblement
trompeuse car, en trivialisant les énoncés, elle en
masque souvent la portée métamathématique. Il n’est donc sans doute pas
inutile, même pour le mathématicien professionnel, de relire ces textes avec la
fraicheur nécessaire, i.e. en essayant de réfléchir directement aux
énoncés sans utiliser l’artillerie lourde. » Alain Connes [3]
À l’initiative d’Alain Connes, il s’agit de
reprendre Galois et sa théorie des groupes par-delà la « Galois
Theory » [GT] formalisée par Emil Artin (années 30-40) et Bourbaki, avant
même son déplacement par Lie (⟹ groupes de Lie), donc en son temps 0.
Cf. trois moments-dimensions de la modernité
algébrique comme de toute modernité [4]:
Il s’agit d’exposer la théorie galoisienne (≠
de GT) en mettant à plat ses étonnements, ses questions et ses enjeux premiers,
tels qu’ils peuvent se constituer avant même que n’existent les groupes, les
anneaux, les corps, les espaces vectoriels et les k-algèbres, donc avant
Dedekind.
Cf. ontogenèse : méthode d’exposition qui
rapproche le Galois inventant la modernité algébrique et par là la modernité
mathématique (le deuxième sera Riemann : les groupes de Galois et les
surfaces de Riemann composent le premier temps de la modernité
mathématique [5]) d’un
mathématicien naïf, disons un lycéen issu de Terminale.
Didactique non bourbakiste
(cf. Stewart) : commencer par degré 5 puis généraliser à n (cf.
« soit maintenant 5=n ») plutôt que l’inverse (« soit maintenant
n=5 »).
Posons le problème en exposant les polynômes à partir
de leur forme P(x)=∏(x-rj)
Assemblons un collectif de manière extensionnelle
par construction élémentaire progressive d’expressions où x est un nombre
indéterminé :
Expression
polynomiale ∏ |
R={rj} |
(x-1) |
{1} |
(x-1)(x-2) |
{1, 2} |
(x-1)(x-2)(x-3) |
{1, 2, 3} |
(x-1)(x-2)(x-3)(x-4) |
{1, 2, 3, 4} |
(x-1)(x-2)(x-3)(x-4)(x-5) |
{1, 2, 3, 4, 5} |
|
|
(x-3)(x-√2)(x-π) |
{3, √2, π} |
Ces expressions polynomiales donnent lieu à des
fonctions P(x) où x est un nombre variable :
par ex.
P(x)=(x-1)(x-2)(x-3)(x-4)(x-5)
Un nombre peut appartenir à N, Z, Q, R ou C –
ici le nombre variable x appartient à un corps, et les corps commencent avec Q.
Qu’est-ce que « mesure » cette
fonction P(x) ? Elle mesure l’écart synthétique de x à la
« base » {1, 2, 3, 4, 5}. Cette « base » constitue les
« racines » de la fonction polynomiale : R={rj}
f(x)=x5-1
x5-1=(x-1)(x-e2iπ/5)(x-e4iπ/5)(x-e6iπ/5)(x-e8iπ/5)=(x-1)(x4+x3+x2+x+1)
La fonction f(x)=x5-1=∏(x-) mesure l’écart cumulé de x à chaque racine :
Ces racines - les x qui
assurent que Pn(x)
vaut 0 – constituent bien la base de la fonction.
Voir ici la différence
entre P(x)=x5-1 et P’(x)=(x-1)5 ou entre [x5-1=0]
et [(x-1)5=0].
La première équation a
cinq racines différentes : x= ={
} ; la seconde a une racine quintuple (cinq fois
la même racine 1).
x5=1 formule
qu’un rapport quintuple de x à soi-même vaut 1 quand (x-1)5=0
formule que cinq fois, le rapport de x à 1 s’annule. D’un côté, cinq nombres
ont le même rapport triple à soi ; de l’autre, un même nombre est
quintuplé.
Cette fonction engendre un ensemble infini
d’équations {P(x)=q} dans laquelle se distingue l’équation polynomiale
canonique P(x)=0.
Pourquoi ? Car cette équation canonique
détermine nos racines, donc ce que j’ai appelé « la base » de la
fonction polynomiale sous sa forme ∏ ; on va le voir quand on va
développer ∏ en ∑ :
x5-15x4+85x3-225x2+274x-120=0
⇔ (x-1)(x-2)(x-3)(x-4)(x-5)=0
[voir
plus loin p.15-16]
Au total, on a donc à faire à trois types
différents de formalisations algébriques :
|
la
forme polynomiale est une |
x est
un nombre |
∏(x-rj) |
expression |
indéterminé |
P(x)=∏(x-rj) |
fonction |
variable |
P(x)=q (de préférence
0) |
équation |
inconnu |
Comme l’on sait ∏⟹∑ :
∏(x-rj) |
R={rj} |
∑cixi |
(x-1) |
{1} |
x-1 |
(x-1)(x-2) |
{1, 2} |
x2-3x+2 |
(x-1)(x-2)(x-3) |
{1, 2, 3} |
x3-6x2+11x-6 |
(x-1)(x-2)(x-3)(x-4) |
{1, 2, 3, 4} |
x4-10x3+35x2-50x+24 |
(x-1)(x-2)(x-3)(x-4)(x-5) |
{1, 2, 3, 4, 5} |
x5-15x4+85x3-225x2+274x-120 |
|
|
|
(x-3)(x-√2)(x-π) |
{3, √2, π} |
x3-(3+√2+π)x2+(3√2+3π+π√2)x-3π√2 |
∏ |
la
forme polynomiale est une |
x est
un nombre |
∑ |
∏(x-rj) |
expression |
indéterminé |
∑cixi |
P(x)=∏(x-rj) |
fonction |
variable |
P(x)=∑cixi |
P(x)=q (0 de
préférence) |
équation |
inconnu |
P(x)=q (0 de
préférence) |
Notre polynôme P(x) a donc deux formes duales
∏/∑.
Noter que notre transformation
(x-1)(x-2)(x-3)(x-4)(x-5)=x5-15x4+85x3-225x2+274x-120
procède d’un calcul (algébrique) à la lettre et donc « aveugle » (cf.
René Guitart).
C’est la même lettre x des deux côtés, qui des
deux côtés intervient 5 fois mais de manières bien différentes. Il faut
s’arrêter un peu longuement sur cette différence, pour en restituer
l’étonnement premier [6]
car tout ceci est au principe même de notre problème : celui de la
résolution par radicaux des équations polynomiales présentées initialement sous
leur forme ∑cixi=0.
Examinons les 2 équations (polynomiales)
définies par ces 2 expressions (polynomiales) :
∏(x-rj)=0 ∑cixi=0
x doit
vérifier le 1° ou
le 2° ou… le n° terme |
x doit
vérifier à la
fois le 1° et le 2° et… le n° monômes |
-
∏(x)=0 formalise R={rj}
extensionnellement selon une logique de produit fibré
(pullback [7]) :
multiplication de n monômes de degré 1 ;
-
∑(x)=0 formalise R={rj}
intensionnellement selon une logique de somme
amalgamée (pushout [8]) :
addition de n monômes de degré variable.
∑ formalise intensionnellement
car il formalise les racines selon une propriété commune, vérifiée par
chacune : on a bien ∑(rj)=∑cirji=0
Comment comprendre cette propriété ?
Cf. logique sémantique de cette didactique :
la syntaxe (et en particulier le calcul qu’elle autorise [9])
est tendanciellement « aveugle » et il nous faut une sémantique pour
en comprendre la logique rationnelle.
Cf. danger du « formalisme » (propre
à M-II) quand l’autonomie relative de la syntaxe ou de la théorie tend à
s’absolutiser en se coupant de toute sémantique (en oubliant, en
« refoulant » ses modèles) :
« formalisme » = refoulement du modèle et de
l’interprétation sémantique
∑ formalise un rapport complexe (d’ordre n) et
amalgamé (par somme) de la variable x à elle-même.
∑ formalise le rapport à soi que partagent
toutes les racines.
∑ formalise la propriété réflexive qui
fait équivaloir toutes les racines entre elles.
Ainsi le nombre 1 vérifie aussi bien les 5
propriétés suivantes qu’une infinité d’autres du même type :
·
x-1=0
·
x2-3x+2=0
·
x3-6x2+11x-6=0
·
x4-10x3+35x2-50x+24=0
·
x5-15x4+85x3-225x2+274x-120=0
et s’il vérifie, par exemple la quatrième,
c’est en tant que cette propriété est bien la seule qu’il ait en partage avec
les trois autres nombres 2, 3 et 4.
Donc ∑ convertit la propriété 1∊{1, 2,
3, 4} en une propriété purement réflexive de 1 ne faisant pas intervenir
explicitement les nombres 2, 3 et 4.
Cette conversion va évidemment être au principe
de notre problème principal : comment dégager les racines d’un ∑
arbitrairement donné, comment passer d’une relation polynomiale réflexive ∑ à
une relation polynomiale extensive ∏ ?
La transformation ∏→∑ nous dote immédiatement
d’une relation entre racines rj explicites
de ∏ et coefficients ci explicites de ∑.
Prenons un exemple simple :
(x-a)(x-b)(x-c)=x3-(a+b+c)x2+(ab+bc+ca)x-abc=x3+c2x2+c1x+c0
On a :
1.
c3=1 [10]
2.
c2=a+b+c
3.
c1=ab+bc+ca
4.
c0=abc
Formalisons cela en général : ci=σi(rj) où σi désigne la somme systématique (et donc
symétrique) de (n-i) produits de racines.
Ces relations ci=σi(rj) sont les sommes coefficients-racines.
Notons que ces relations sont symétriques et
rationnelles (elles sont triplement internes au corps Q : par les
coefficients des sommes, par les puissances entières des produits intervenant
dans ces sommes et par leurs résultats rationnels que sont les ci)
et symétriques. On peut les voir – et cela aura une grande importance dans la
théorie galoisienne [11]
– comme des relations rationnelles symétriques entre toutes les racines :
on a ainsi par exemple ces deux relations rationnelles ∑rj=cn-1
et ∏rj=c0.
Notre espace de travail est donc ainsi
constitué :
Posons-nous maintenant la question
canonique : comment l’inverser ?
Pour cela, nous nous situerons désormais dans
l’espace des polynômes
-
unitaires (le coefficient cn
de xn vaut 1),
-
séparables (à racines simples : toutes les
racines sont différentes),
-
à coefficients entiers (ci∊ℤ).
On démontre facilement [12]
qu’on peut se ramener à ce cas-là par opérations arithmétiques élémentaires sur
les coefficients et par multiplication/division dans l’anneau des polynômes.
On part donc désormais d’une expression
polynomiale ∑cixi avec ci∊ℤ.
On sait (théorème de Lagrange) qu’il y a n
racines algébriques (donc sur 𝔸 c’est-à-dire sur 𝔸ℂ≠𝔸ℝ) mais
la forme ∑ de l’expression polynomiale ne la met pas au jour comme le faisait
la forme duale ∏. Disons que, pour la forme ∑, ces racines sont secrètes et que
la question posée est : comment travailler cette forme rationnelle (sur Q)
peut avouer son secret c’est-à-dire mettre au jour ses n racines algébriques
(sur A) ?
Rappel « sémantique » :
l’expression ∑ amalgame un rapport complexe de x à lui-même qui
formalise cet unique rapport à soi que toutes les racines partagent. En un sens
∑ ne nous dit rien d’autre que ce que ∏ nous dit aussi sous une autre
forme : ∑(x)=0 ⟷ x∊R={rj} mais il nous le dit « intensionnellement »
(par une propriété discriminante de x) quand ∏ nous le dit « extensionnellement » donc explicitement (par la liste
même des racines).
On peut voir ∑ comme filtrant l’ensembles des
nombres algébriques pour ne sélectionner que les n nombres ayant la propriété
réflexive ∑.
∑ nomme rationnellement (dans Q) la propriété
distinctive d’une racine quelconque, c’est-à-dire d’un élément quelconque du
collectif R délimité par l’expression polynômiale.
Ainsi quand on écrit une équation polynômiale
quelconque, on définit rationnellement une propriété réflexive d’un nombre
inconnu qui, sans qu’on n’y voit goutte, délimite un strict collectif de n
nombres algébriques tel que dire « x a la propriété en question »
équivaut absolument à dire « x appartient à ce petit collectif ».
Amusons-nous un instant : le polynôme
suivant [13]
formalise que sa plus grande solution 2025 appartient au collectif {1789, 1871,1917, 1968}, autant dire qu’en 2025, une révolution d’importance mondiale pourrait survenir !
Notre secret peut être diagrammatisé
ainsi :
Le point singulier est le suivant : en
amalgamant le collectif des racines pour formaliser la propriété réflexive
commune qui distingue chaque membre, ∑ le dissimule en le structurant, l’organise
en le refoulant !
En effet ∑ transforme une liste amorphe
d’éléments {A, B, C, D, E} en une famille délimitée (elle serait différent si
on y ajoutait F ou si l’on en retranchait E) d’éléments partageant un trait
distinctif commun qui les discrimine parmi l’infinité (dénombrable,
rappelons-le) des nombres algébriques.
En un sens, ∑ avoue le secret de ∏ (le trait individuel
qui solidarise cette famille à la différence de tout autre, le trait commun des
éléments) tout en refoulant – par amalgame - la composition effective de cette
famille.
À l’inverse, ∏ avoue le secret de ∑ (la
composition élémentaire détaillée du collectif, la liste de ses membres) tout
en refoulant - par simple listage - le trait commun à tous ses membres.
La résolution de ce double excès/manque va se
faire par mise au jour de la manière dont les racines sont groupées, ce qui va
rendre compte de leur solidarité collective, c’est-à-dire des relations
directes entre membres du collectif (et non plus du trait familial partagé).
On pressent qu’on va avoir à faire ici au nœud
borroméen de trois formalisations de la même solidarité : ∑/∏/G, autant
dire à un hexagone logique [15] :
On a affaire à trois formalisations différentes
et complémentaires du même collectif :
·
∑ formalise une famille caractérisée par
un trait distinctif commun (sans que cette famille soit forcément solidaire).
·
∏ formalise une collection de membres
juxtaposés, une série ou une file indienne (ni trait distinctif commun ni
solidarité propre).
·
G va formaliser un groupe rendu
solidaire par les relations directes entre les membres.
Que veut dire « groupe » ? Que
veut dire que plusieurs racines sont « groupées » ?
Plus
loin, on va distinguer systématiquement la manière dont les racines sont
directement groupées par des relations rationnelles entre elles du Groupe de
Galois [GG] proprement dit qui ne concerne qu’indirectement les racines :
par leurs permutations (le GG est donc le groupe des permutations, non des
racines). Mais pour le moment, gardons l’ambiguïté duale du Groupement.
Cela veut dire que dans Q,
« rationnellement » donc, elles sont indistinguables, elles n’y
sont pas nommables séparément ; dans Q, ces racines sont parfaitement
gémellaires.
Ces racines sont cependant délimitées (définies
sur 𝔸, voire
sur √) puisqu’il y a bien dans Q une nomination rationnelle de leur collectif
solidaire : par un polynôme indécomposable sur Q du type (x2-2)
ou (x2+1) ou (x5+x4-4x3-3x2+3x+1).
Donc les permutations entre ces racines
conjuguées sont indiscernables dans toute expression rationnelle - c’est-à-dire
expression rationnellement construite à valeur rationnelle : expressions
polynomiales définies sur Q à valeur dans Q (ainsi ±√2 n’interviendra que
dans des monômes d’exposant pair).
Point complémentaire (qui va avoir une
importance dans la résolution par Galois du groupement) : la solidarité de
groupe entre ces racines prend la forme d’une relation rationnelle directe
entre ces racines - par exemple les deux
racines conjuguées {A, B} de (x2-2)=0 sont directement liées par la
relation rationnelle directe : A2=B2 et les quatre
{A, B, C, D} de (x4-2)=0 sont directement reliées par la relation rationnelle
A4=B4=C4=D4.
Au total, un groupe (qui peut être un
sous-groupe) de racines se manifeste sous 4 traits :
- l’existence d’une nomination rationnelle de
leur collectif comme tel (selon le trait distinctif que chaque membre
partage) : voir le polynôme propre du groupe ;
- l’inexistence d’une nomination individuelle
pour chacune (le polynôme n’est pas séparable dans Q) ;
- une indistinction rationnelle
(« ambiguïté ») de leurs permutations (Q ne peut discerner une
interversion des membres) ;
- une relation rationnelle directe entre elles
(la solidarité qui constitue la gémellité entre racines se dit
rationnellement).
Remarquons une différence importante entre les
trois premiers traits et le quatrième : les trois premiers sont relatifs
au corps Q puisqu’ils concernent la capacité de discerner rationnellement des
nombres qui ne sont pas forcément rationnels. Par contre le quatrième trait
désigne une relation absolue entre racines algébriques : A2=B2
ou A4=B4=C4=D4 vaut absolument
quelle que soit la nature rationnelle ou non des racines quand (x2-2)=0
ne peut nommer ±√2 seulement sur Q.
Tout de
même, comme on le verra, pour l’équation x5+x4-4x3-3x2+3x+1=0
dont les 5 racines réelles {A, B, C, D, E}={-1,9…, -1,3…, -0,2…, 0,8…, 1,6…}ne
sont pas formulables par radicaux, on a E=A2-2, D=E2-2,
B=D2-2, C+B2-2 et A=C2-2.
Le quatrième trait va être la porte d’entrée
pour l’aveu galoisien du groupe secret.
Pour le dire d’un mot, c’est ce trait qui
concerne la dimension géométrique du groupement quand les trois autres concerne
sa dimension arithmétique (liée au corps de résolution : de Q à C).
Ce point a son importance : la théorie
galoisienne reconfigure les rapports entre les trois grands domaines
mathématiques : arithmétique, géométrie, algèbre.
La naissance de l’algèbre avait constitué un
pont entre les deux continents, dogmatiquement séparés par Aristote [16],
de l’arithmétique non axiomatisée et de la géométrie euclidiennement
axiomatisée en formalisant d’une unique manière par la lettre x des quantités
aussi bien arithmétiques (nombres) que géométriques (grandeurs).
La théorie galoisienne des groupes dispose
cette fois la géométrie des groupes [17]
en pont entre l’algèbre des polynômes et l’arithmétique des corps.
Voir ce schéma synthétique de la « Galois
Theory » :
On peut comprendre la théorie galoisienne
primitive, différente dont de la Galois Theory [GT], comme théorisation
de la manière dont on peut passer de ∑ à ∏.
L’idée va être de concevoir ce passage, dont on
sait qu’il va donner dans la GT comme un
espace fonctionnel : l’espace de fonctions polynomiales rationnelles car
l’opérateur du travail Fonctoriel
va être
un travail sur les fonctions polynomiales à n variables généralisant en quelque
sorte les ci=σi(rj).
En effet, le point de départ de la GT est
le groupe des substitutions (entre racines) indécelables dans Q par des
polynômes rationnels, groupe qui concerne donc le rapport G/Q.
Posons que le rapport entre G et Q, qui va
donner , est un
rapport Fonctoriel (entre deux catégories : celle des groupes et
celle des corps) et que la manière de rapporter ces deux catégories est fonctionnel
puisque ce sont des fonctions polynomiales ℙ qui discriminent permutations
décelables/indécelables : au point d’arrivée Id/Q[rk],
toutes les substitutions sont devenues décelables par ℙ sur le corps étendu.
On voit donc que le fonctionnel constitue le
Fonctoriel : ℙ noue Fonctoriellement G et K ; ou : G est relié à K
par ℙ.
On a
Remarquons, au passage, l’analogie avec notre
point de départ :
Les transformations internes à l’anneau P des
polynômes relient fonctoriellement la
catégorie des groupes et la catégorie des corps comme les sommes coefficients-racines
corrèlent fonctionnellement la présentation duale d’un polynôme en somme
de monômes ou en produit de polynômes simples.
Le fonctionnel associe un élément et un seul à un ou plusieurs éléments.
Le fonctoriel est une correspondance entre structures. Il faut le comparer à une marche sur deux jambes : toute la correspondance de Galois est basée sur ce principe (avancer d’un côté – du côté des corps par AE – pour avancer ensuite de l’autre – du côté des groupes).
Mais le fonctoriel compte en fait 3 et pas 2 car il y a 1 correspondance entre 2 structures : la pensée fonctorielle avance sur deux jambes et il y a donc 1 pensée qui coordonne 2 jambes.
Dans notre situation, ce qui coordonne fonctoriellement la catégorie des groupes et celle des corps est l’anneau des plolynômes :
Il faut maintenant bien distinguer deux modes
de groupements polynomiaux pour les racines :
-
un mode de groupement direct entre les racines,
qui ne fait pas intervenir leur corps de définition ; on parlera ici de
groupement géométrique ;
-
un groupe algébrique strict, le GG, dont les
éléments ne sont pas les racines mais les permutations entre différents
arrangements des n racines.
Détaillons.
En détaillant quelques équations du 5° degré,
on peut voir que les racines s’avèrent différemment regroupables,
par exemple de ces 7 manières :
(x-1)(x-2)(x-3)(x-4)(x-5)
≡ {1, 2, 3, 4, 5} 1+1+1+1+1 |
|
(x-1)(x-2)(x-3)(x2-2) ≡{1, 2, 3,
±√2} 1+1+1+2 |
(x-1)(x2-2)(x2+1)
≡ {1, ±√2, ±i} 1+2+2 |
(x-1)(x-2)(x3-2) 1+1+3 |
(x2-2)(x3-2) 2+3 |
(x-1)(x4-2)
≡{1, ± 1+4 |
|
x5-2=0 5 |
x5+x4-4x3-3x2+3x+1 5 |
∑ |
∏ |
R |
G |
x5-15x4+85x3-225x2+274x-120 |
(x-1)(x-2)(x-3)(x-4)(x-5) |
{1, 2,
3, 4, 5} |
1+1+1+1+1 =Id |
x5-6x4+9x3+6x2-22x+12 |
(x-1)(x-2)(x-3)(x2-2) |
{1, 2,
3, ±√2} |
1+1+1+2 |
|
(x-1)(x-2)(x3-2) |
|
1+1+3 |
x5-x4-x3+x2-2x+2 |
(x-1)(x2-2)(x2+1) |
{1,
±√2, ±i} |
1+2+2 |
x5-x4-2x+2 |
(x-1)(x4-2) |
{1, ± |
1+4 |
|
(x2-2)(x3-2) |
|
2+3 |
|
x5-2=0 |
|
5 |
x5+x4-4x3-3x2+3x+1 |
|
{A, B,
C, D, E} {-1,9…,
-1,3…, -0,2…, 0,8…, 1,6…} |
5 |
Ces relations directes entre racines ne sont
pas dépendantes du corps de définitions : certes (x2-2),
indécomposable sur Q, peut se décomposer sur √ℝ en (x+√2)(x-√2)
mais la relation directe entre les deux racines A2=B2
c’est-à-dire ici (√2)2=(-√2)2 ne dépend pas du corps.
C’est elle que je diagrammatise
par mes différents pentagones.
Le groupe algébrique de Galois est, lui,
relatif à une différence de corps puisqu’il concerne les substitutions de
racines qui sont indécelables sur un corps donné et cette indécelabilité
est relative à l’écart entre le corps de discernement des racines (√ℝ
pour ±√2 ou √C pour ±i) et le corps
de définition des polynômes (ici Q) :
sur Q, une permutation entre √2 et -√2 est
indécelable par le polynôme (x2-2) mais la même permutation ne l’est
plus sur √ℝ ou A ou
R ou C.
Résumons les différences :
groupement géométrique |
Groupe algébrique : GG |
racines |
permutations |
statique |
dynamique |
endogène ou direct |
exogène ou indirect |
« absolu » : A2=B2 B=A2-2 |
relatif (x2-2)
| (x+√2)(x-√2) x5+x4-4x3-3x2+3x+1
est indécomposable. |
En un certain sens, le point de vue
géométrique [18]
est un en-deçà de l’algèbre de Galois, une sorte de transcendantal pour
l’algèbre.
Cf. le point de vue moderne, lié à la
révolution de la conception d’espace : non seulement les espaces non
euclidiens et les surfaces de Riemann (prolifération des espaces par
invalidation de l’unicité d’un espace naturel) mais, plus encore, les espaces
fonctionnels/vectoriels/de Hilbert, etc. qui partagent alors avec l’espace
einsteinien le fait que l’espace en question ne préexiste pas à ses objets car ces
objets non pas peuplent l’espace en question mais le constituent : on
passe en quelque sorte de « un espace et ses objets » à « des
objets et leur espace propre ».
Cf. le rôle de la géométrie dans M-III :
la géométrisation des mathématiques configure ce « tournant
géométrique » que la mathématique oppose au « tournant logiciste et
linguistique » de la philosophie analytique…
Nous allons donc parcourir la théorie des
groupes selon deux parcours :
-
un parcours fonctionnel partant de {P}=ℙ pour
voir comment il met en branle la correspondance fonctorielle ;
-
un
parcours fonctoriel partant de pour
voir comment les différentes structures articulent fonctoriellement
leurs transformations.
Dans le premier cas, le travail sur ℙ se
distribue en une dualité qu’il
noue. Dans le second cas, le nouage de G et K (par les K-automorphismes du
corps étendu L) engendre en ℙ la
résolution du polynôme de départ.
Comme on va le voir, le point de vue
fonctionnel, remis en avant récemment par Alain Connes, majore la continuité Lagrange→Galois sous le signe des résolvantes ou fonctions
auxiliaires. On dira que ce point de vue est néoclassique.
Le point de vue fonctoriel, lui, majore, le
saut Galois/Lagrange sous le signe de la notion de groupe. On dira que ce point
de vue est modernisant [19].
La présentation de ce point de vue, qui suit de
près le texte originel de Galois, se trouve détaillée dans la brochure de
l’APMEP. Elle est présentée en 2011 par Connes (voir 2011 à l’Acédémie) et par Bruno Poizat
dans In the Steps of Galois (dir. Szczeciniarz…).
Résumons l’architecture en dix étapes :
1)
construction d’une fonction auxiliaire V
linéaire qui discrimine les n! arrangements ;
2)
construction d’un polynôme ℘ de degré (n-1)!
dont les racines sont toutes les valeurs de V pour tous les arrangements
correspondants à une racine fixe rα arbitrairement choisie ;
3)
expression rationnelle de cette racine rα ;
4)
expression rationnelle des (n-1) autres
racines ;
5)
équivalence permutationnelle :
choisir un autre point de départ donnerait engendrerait simplement une
permutation des résultats ;
6)
adjonction de racines entrainant
l’incorporation d’autres racines ;
7)
groupe de substitutions (GG) laissant
inchangées toutes les fonctions rationnelles des racines ;
8)
ce groupe est indépendant des choix arbitraires
de départ (V et rα) ;
9)
analyse du calcul effectif de ce GG via la
théorie des corps finis (de caractéristique non nulle) ;
10) algorithme
à travers les différents corps finis dont l’ordre est un nombre premier (voir
Frobenius et Cebotarev).
Détaillons seulement les premières.
Précisons d’abord : on appelle arrangement
de n termes une mise en ordre donnée (une liste ordonnée).
Par exemple, quand n=5, nommons les 5 racines
{A,B,C,D,E}.
Un arrangement est {A,B,C,D,E}. Un autre est
{B,A,C,D,E}. Un troisième est {B,C,D,E,A}…
On appelle permutation l’opération de
transformation d’un arrangement en un autre.
Par exemple, la substitution {B,A,C,D,E} ⟹
{B,C,D,E,A}.
Un arrangement est un état ordonné. Une
substitution est une transformation entre états.
Ceci dit, on choisit usuellement un ordre de
base, donc un arrangement canonique A0 (dans notre cas {A,B,C,D,E})
et on présentera tout autre arrangement comme substitution à partir de cet
arrangement A0. On a donc une correspondance biunivoque entre
arrangements et substitutions à partir de A0 qui autorise de parler
indifféremment des uns ou des autres.
Examinons l’espace fonctionnel des fonctions
polynomiales à n variables.
On connaît déjà les n sommes
coefficients-racines : σi(rj)=ci
En particulier, les deux extrêmes ∑rj=cn-1 et ∏rj=c0.
Ces fonctions sont symétriques en leur n
variables et ne prennent donc qu’une valeur quel que soit l’arrangement retenu.
Remarquons que cette propriété tient au fait
que l’addition et la multiplication des nombres est commutative – les corps Q,
R, C sont commutatifs.
Donc ici ABCDE=BACDE=BCDEA… et
A+B+C+D+E=B+A+C+D+E+=B+C+D+E+A…
Cette propriété de commutativité aura une
importance plus tard dans la réduction des groupes : il faudra qu’on
divise un groupe par un sous-groupe distingué (c’est-à-dire aux racines
solidaires) et que le groupe quotient soit commutatif (« abélien »).
L’idée de Galois est de choisir une fonction (linéaire)
des n racines – « fonction auxiliaire » notée V - qui va être
maximalement dissymétrique c’est-à-dire qui prend n! valeurs différentes pour
les n! arrangements des racines.
Intuitivement, on voit qu’une telle fonction
devrait pouvoir prendre la forme ∑niri
avec n entier.
Dans notre cas, par ex. 2A+4B+8C+16D+32E ou
10A+102B+103C+104D+105E…
On pourrait aussi imaginer une fonction du type
∑niri avec ni entier
(n∊ℕ).
Par exemple A+2B+3C+4D+5E ou 3A+5B+7C+11D+13E
(nombres premiers)…
On démontre qu’une telle fonction existe
toujours – un petit calcul combinatoire y suffit : il y a nn nombres qui rapportent les racines entre
elles (A/B, B/A, C/E, E/C…) soit un nombre fini. Il suffit donc de choisir pour
coefficients de l’équation les nombres qui restent !
Remarque importante : Galois ne construit
pas explicitement cette fonction V. Il démontre simplement qu’elle existe
toujours.
Au passage, il démontre cela non par un
raisonnement par l’absurde mais par le raisonnement constructif présenté
ci-dessus. Simplement ce raisonnement constructif ne construit pas pour autant
la fonction V : le principe de son existence est constructivement démontré
mais pas son existence concrète.
On commence d’entrer ici dans la difficulté de
la théorie : elle est principiellement
constructive mais bien vite effectivement incalculable.
Faisons-le sentir par l’exemple suivant.
Nos polynômes de degré 5 sont les premiers à
n’être pas, dans le cas général, résolubles par radicaux. Leur degré est fini
et tout petit.
Il y a 5! arrangements différents de 5 nombres
différents (soit 120) si bien que le nombre de substitutions qu’il y a entre
ces 5!=120 arrangements est de 5!!=120!
Et c’est là que les choses plongent d’ores et
déjà dans un gouffre car 120!≅10200, ce qui est un nombre
rigoureusement impraticable [20].
D’où la double nécessité de
-
démontrer des existences restant inaccessibles
au calcul ;
-
mettre en place des algorithmes qui vont
calculer certaines de ces existences et étendre leur champ de calculabilité au
gré des développements des puissances de calcul. Avec l’informatique, la
puissance algorithmique a fait des bonds considérables mais, tout compté, on
semble aujourd’hui en rester aux groupes d’ordre 10 [21].
Revenons à notre fonction auxiliaire V qui a
pour caractéristique d’avoir n! valeurs différentes pour les n! arrangements de
ses n variables.
Entre les deux extrêmes de nos fonctions sommes
(une seule valeur) et de nos fonctions auxiliaires (n! valeurs), on a beaucoup
de cas intermédiaires.
Par exemple :
-
la fonction ∆=∏(rk-rl)
pour k<l ne prend que deux valeurs ±∆. C’est cette fonction qui est au
principe du discriminant d’un polynôme : δ=∆2 (voir le fameux
« b2 -4ac »)
-
la fonction F=r1+0.rj ou
F=ar1k+0.rj (pour j =2, …, n) prendra n
valeurs (les n valeurs des n racines). C’est une fonction indicatrice d’une
racine
En résumé on a l’échelle suivante :
Nombre de valeurs différentes |
Fonctions |
|
Nombre de permutations stabilisatrices |
1 totalement symétrique |
σi(rj)=ci : ∑rj=cn-1
ou ∏rj=c0 |
sommes coefficients-racines |
n! |
2 |
∆=∏(rk-rl) ⟹ ±∆ ⟹ δ=∆2 |
discriminants |
n!/2 |
|
|
|
|
n-1 |
|
Résolvante de Lagrange [22] |
|
n |
r1+0.rj ou ar1k+0.rj
|
fonctions indicatrices des racines |
(n-1)! |
|
|
|
|
n! maximalement assymétrique |
∑njrj
ou ∑njrj … |
fonction auxiliaire de Galois, indicatrice des arrangements |
1 |
À partir de la fonction auxiliaire V à n!
variables (les n! arrangements des n racines), indicatrice des
arrangements, on construit le polynôme ℘ de degré (n-1)! ainsi :
soit les (n-1)! arrangements A(rα)k
commençant tous par la même racine fixe rα arbitrairement choisie et
soit les n(-1)! valeurs différentes de V[A(rα)k]=V(rα)k.
Composons le polynôme ℘=∏(rα)
d’ordre (n-1)! ayant ces (n-1)! valeurs différentes de V pour racines :
∏[Y-V(rα)k].
Il est alors clair que pour rβ=rα,
les ∏(rα) et ∏(rβ) n’auront pas de racines communes
(puisque, par construction, la fonction V discrimine tous les arrangements
possibles).
Donc rα est la seule racine rj à annuler le polynôme ℘=∏[R-V(rα)k].
Il faut ici penser l’équation polynomiale ℘
réécrite comme polynôme en Y c’est-à-dire sous la forme ∑c(rα)iYi où les coefficients c(rα)i
sont des combinaisons des V(rα)k.
rα est alors la seule racine du
système d’équations :
·
P(rj)=0
(car rα est racine du polynôme de départ)
·
℘=∑c(rα)iYi
=0 (car tous les V[A(rα)k]=V(rα)k
sont, par construction, racines de ℘).
De ce système d’équations, on peut alors
déduire rα en fonction de 𝒱=V(arrangement canonique de base), « par
élimination euclidienne »[23]
- ce point est délicat ; je passe…
On a donc rα = ƒ(𝒱).
On a de même une expression rationnelle des autres
racines en fonction de 𝒱 : rj=ƒj(𝒱)
On démontre ensuite que remplacer 𝒱 par une
autre racine de ℘ donnerait une permutation des racines rj.
Donc choisir un autre point de départ donnerait engendrerait simplement une
permutation des résultats.
À partir d’ici, je « saute à pieds
joints » sur les détails plutôt obscurs – on comprend au passage l’intérêt
d’enseigner aujourd’hui la Galois Theory plutôt que la théorie
galoisienne telle qu’elle s’élabore dans les manuscrits d’Évariste.
Les étapes suivantes sont :
·
l’adjonction de racines entrainant
l’incorporation d’autres racines ;
·
le groupe de substitutions (GG) laissant
inchangées toutes les fonctions rationnelles des racines ;
·
l’indépendance de ce groupe par rapport aux
choix arbitraires de départ (V et rα) ;
·
l’analyse du calcul effectif de ce GG via la
théorie des corps finis (de caractéristique non nulle) ;
·
la construction d’une procédure algorithmique à
travers les différents corps finis dont l’ordre est un nombre premier (voir
Frobenius et Cebotarev) permettant la calculabilité effective de GG (pour
n<10).
Laissons-là ce que j’ai appelé le point de vue
fonctionnel centré sur les opérateurs fonctionnels aptes à discerner les structures
algébriques à l’œuvre dans notre domaine de travail.
Le point de vue que j’appelle fonctoriel
procède autrement : il s’intéresse au jeu des structures algébriques et ne
prend en compte le travail fonctionnel que pour autant qu’il opère comme
« le doigt qui montre la lune » : non pas en soi mais pour
palper et tâter les caractéristiques de l’espace polynomial.
Rappelons qu’à l’époque de Galois, le problème était celui de la résolution par radicaux des équations polynomiales.
Cette question peut paraître aujourd’hui comme relativement « arbitraire » [24] mais elle semble pourtant plutôt « naturelle » : résoudre par radicaux, c’est très exactement dégager le nom algébrique de chaque racine. Et quoi en effet de plus « naturel » [25] quand une équation a délimité 5 nombres que de s’attacher à les nommer un par un avec les moyens algébriques du bord.
Deux petits exemples pour cela.
Prenons l’exemple de cette formule compliquée [26] :
Comment s’analyse-t-elle en adjonctions successives ?
Comment se synthèse-t-elle en relations rationnelles ?
Posons pour cela :
·
α=
· β=√3
·
⟹ γ=
·
δ=
·
⟹ ε=
Le nombre initial s’écrira donc : αγ+ε.
On y accède en 5 étapes : l’extension nécessaire de Q relève donc d’une tour de 5 adjonctions.
Notons que chaque étape peut s’écrire en relations polynomiales ordinaires :
· α3=11
· β2=3
· ⟹ γ3=(7+β)/2
· δ3=4
· ⟹ ε4=1+δ
f(x)=x5+x4-4x3-3x2+3x [=x(x2-3)(x2+x-1)]
·
x5+x4-4x3-3x2+3x=0
⟹
x(x2-3)(x2+x-1)=0 ⟹ {0, ±√3, ,
}
·
x5+x4-4x3-3x2+3x=-2
⟹
(x+1)(x-1)(x+2)(x2-x-1)=0 ⟹{-2, ±1, ,
}
· x5+x4-4x3-3x2+3x=10 ⟹ (x-2)(x4+3x3+2x2+2x+5)
mais x5+x4-4x3-3x2+3x=-1
⟹
{A≃-1,92 ;
B≃-1,31 ;
C≃-0,28 ;
D≃0,83 ;
E≃1,68}
P(x)=x5+x4-4x3-3x2+3x+1=0 [27]
Ce polynôme s’avère irrésoluble par radicaux et ses 5 racines sont réelles.
⟹ A≃-1,918986… ; B≃-1,309721… ; C≃-0,28463… ; D≃0,83083… ; E≃ 1,682507…
Il semble qu’on ait
E=4C2+2D2 (calculs empiriques) mais ce n’est pas possible
car le GG relie les 5 racines entre elles. Or si l’on avait bien E=4C2+2D2
, de deux choses l’une :
- soit cette relation ne
vaut que pour ces 3 racines et pas pour A et B ; dans ce cas le GG serait
séparable en 2+3 ;
- comme ce n’est pas le
cas, cela voudrait donc dire que cette relation vaudrait également pour les
autres, ce qui n’est pas possible car cette relation n’engendre que des nombres
positifs ; or on sait que A, B et C sont des réels négatifs.
En fait, on a ici
le « générateur » suivant : x↦x2-2 soit P(x)=0 ⟹ P(x2-2)=0
Donc r’=r2-2 :
A = C2-2 ≃ -1,92…
B = D2-2 ≃ -1,31…
C = B2-2 ≃ -0,28…
D = E2-2 ≃ 0,83…
E = A2-2 ≃ 1,68…
Le GG n’ordonne donc pas les racines selon leur ordre numérique mais ainsi : A, E, D, B, C, soit :
On déduit de cela l’existence d’un polynôme P’(x) dual de P(x) :
Q(x)=P(x2-2)=(x2-2)5+(x2-2)4-4(x2-2)3-3(x2-2)2+3(x2-2)+1=x10-9x8+28x6-35x4+15x2-1
On vérifie que
Q(x)=P(x2-2)=P(x)P’(x) : x10-9x8+28x6-35x4+15x2-1=(x5+x4-4x3-3x2+3x+1)(x5-x4-4x3+3x2+3x-1)
D’où le polynôme dual :
P’(x)=x5-x4-4x3+3x2+3x-1=0
dont les racines sont l’inverses de celles de P :
⟹ -E=-1,68 ; -D=-0,83 ; -C=0,28 ; -B=1,31 ; -A=1,92
Ainsi
P’(x)=(x+A)(x+B)(x+C)(x+D)(x+E)
Au total
Q(x)≅(x±A)(x±B)(x±C)(x±D)(x±E) [Attention : soit tous les +, soit tous les -]
P/P’ :
x5+x4-4x3-3x2+3x+1 x5-x4-4x3+3x2+3x-1
On peut procéder à un nouveau tour de piste car Q=P.P’ est en x2.
Q(x)=x10-9x8+28x6-35x4+15x2-1 Avec X=x2 : Q(X)=X5-9X4+28X3-35X2+15X-1
Q a pour racines les carrés des racines de P/P’ :
X5-9X4+28X3-35X2+15X-1=0 ⟹ 0,08… ; 0,69 ; 1,715… ; 2,83 ; 3,68 (carrés des racines de P)
Q’ est à Q ce que P’ est à P : racines inverses
Q’(X)=X5+9X4+28X3+35X2+15X+1 ⟹ -3,68 ; -2,83 ; -1,71 ; -0,69 ; -0,08
Le générateur est désormais : E2=(A2-2)2
On déduit de Q.Q’ un nouveau polynôme en X2=x4.
Q(X).Q’(X)=X10-25X8+184X6-403X4+155X2-1
D’où à nouveau, en posant y=XÊ deux polynômes duaux :
R(y)=y5-25y4+184y3-403y2+155y-1=0 ⟹ 0,006 ; 0,476 ; 2,49 ; 8,01 ; 13,56
R’(y)=y5+25y4+184y3+403y2+155y+1=0 ⟹ -13,56 ; -8,01 ; -2,49 ; -0,476 ; -0,006
Le générateur est ici E4=(A2-2)4
On engendre ainsi une famille de polynômes duaux :
|
x5+x4-4x3-3x2+3x+1 |
x5-x4-4x3+3x2+3x-1 |
x10-9x8+28x6-35x4+15x2-1 |
A=C2-2 |
A≃-1,92 ; B≃-1,31 ;
C≃-0,28 ;
D≃0,83 ;
E≃1,68 |
-E≃-1,68 ; -D≃-0,83 ;
-C≃0,28 ;
-B≃1,31 ;
-A≃1,92 |
|
|
|
|
|
|
x5-9x4+28x3-35x2+15x-1 |
x5+9x4+28x3+35x2+15x+1 |
x10-25x8+184x6-403x4+155x2-1 |
A2=(C2-2)2 |
0,08≃C2 ; 0,69≃D2 ; 1,715≃B2 ; 2,83≃E2 ; 3,68≃A2 |
|
|
|
|
|
|
|
x5-25x4+184x3-403x2+155x-1 |
x5+25x4+184x3+403x2+155x+1 |
|
A4=(C2-2)4 |
0,006≃C4 ; 0,47≃D4 ; 2,49≃B4 ; 8,01≃E4 ; 13,56≃A4 |
-13,56 ;
-8,01 ; -2,49 ; -0,47 ; -0,006 |
|
Passons au mode d’exposition fonctoriel de la
GT. C’est en fait celui adopté lors de l’atelier-Galois d’avril 2018.
Vous pouvez vous reporter aux dossiers alors
établis à partir du livre de Stewart et du cours Ens
de Debarre et Laszlo.
Je le présenterai aujourd’hui de manière très
ramassée, en suivant les quelques intéressantes remarques… d’Alexandre Astruc dans le livre Évariste Galois [28]
qui complète son film (25’) de 1965 [29].
Centrons l’examen non plus sur l’existence du
GG mais sur la théorie de sa résolution.
Galois cerne son groupe de la manière
suivante – je le cite en aménageant son texte à notre propos [30]:
« Soit une équation donnée. Il y aura
toujours des permutations entre les racines (toutes ou une partie) formant un
groupe (le groupe total ou un sous-groupe) jouissante de la double propriété
suivante :
1.
toute fonction à n variables des racines,
invariable par les substitutions de ce sous-groupe, est rationnellement connue
(c’est-à-dire que sa valeur numérique est fonction polynomiale des coefficients
de l’équation et de quantités adjointes) ;
2.
réciproquement, toute fonction des racines,
déterminée rationnellement (au sens qu’on vient de préciser), est invariable
par les substitutions de ce sous-groupe. »
Il y a donc, sur l’espace fonctionnel de toutes
les fonctions polynomiales des n racines, une relation d’équivalence entre
invariabilité (par permutations du GG) et résultats rationnels.
· Soit x3-3x2-2x+2=(x-1)(x2-2)=(x-1)(x+√2)(x-√2).
Quand une fonction polynomiale f(A, B, C)=f(1, √2, -√2) n’aura de résultats que rationnels ?
Si, chaque fois qu’elle mobilise B, elle mobilise également C par produit BC :
par exemple 25A+50BC+75A2(BC)5=25+50.2+75.25 sera rationnel.
À l’inverse une fonction du type 25A+50B+75C vaudra 25+50√2-75√2=25 - 25√2 qui n’est pas rationnel.
Les substitutions du GG sont donc celles qui font laissent A=1 inchangé et qui permutent les deux autres :
1 |
√2 |
-√2 |
1 |
-√2 |
√2 |
On voit bien que, si on adjoint √2, alors la seule substitution laissant invariable tous les polynômes des racines à valeur dans Q[√2] est l’identité.
· Soit x5+x4-4x3-3x2+3x+1 sans racines formulables par radicaux c’est-à-dire algébriquement.
Les seules fonctions polynomiales f(A, B, C, D, E) qui auront des résultats rationnels seront les fonctions strictement symétriques qui peuvent être vues comme fonctions composées des 5 sommes coefficients-racines.
On a en effet :
σ0=A+B+C+D+E=-1
σ1=AB+AC+AD+AE+BC+BD+BE+CD+CE+DE=3
σ2=ABC+ABD+ABE+ACD+ACE+ADC+BCD+BCE+BDE+CDE=3
σ3=ABCD+ABCE+ABDE+ACDE+BDCE=-4
σ4=ABCDE=-1
D’où toutes les fonctions polynomiales à 5 variables sur les σj
L’idée directrice de groupe algébrique est essentiellement celle d’un ensemble d’opérations tel que l’enchaînement de deux d’entre elles (leur « produit ») équivaut à une opération de l’ensemble. [31] La composition des opérations – ici des permutations - ne fait pas sortir de la famille des opérations.
Cette endogénéité ne va pas de soi : enchaîner plusieurs opérations de même type peut conduire à une opération résultante d’un tout autre type. Songez aux effets de seuil où l’opération réitérée en vient à muter de nature (voir le verre qui finit par déborder par ajouts répétés d’une goutte d’eau).
Il y a ensuite l’idée, assez naturelle, de sous-groupe (un groupe dans le groupe).
Il y a ensuite l’idée la plus décisive : celle de sous-groupe distingué, ou normal.
C’est un sous-groupe stable par conjugaison (dans l’action de groupe) : H est distingué dans G ssi ∀h∈H : gH=Hg.
Ian Stewart en donne une caractérisation amusante : c’est un groupe « syndical » en ce que si l’un des éléments a une propriété, alors tous l’ont aussi.
Autrement dit ; si vous attrapez un élément, vous ne pouvez qu’attraper tous les autres à la fois.
C’est à nouveau l’image de multiples monozygotes : si vous en caractérisez un, vous caractérisez tout autant chacun d’eux.
Un groupe distingué constitue donc un groupe entièrement solidaire : vous ne pouvez distinguer aucun élément plutôt qu’un autre (c’est sans doute pour cela qu’on l’appelle tel : on ne peut distinguer que l’ensemble du groupe, non certains de ses éléments).
Attention : c’est une notion relative ! Un sous-groupe est distingué relativement au groupe dont il est le sous-groupe, c’est-à-dire relativement au corps sur lequel le groupe opère. À nouveau l’indistinction est relative au type d’existence prise en compte dans la situation, ici dans le corps de définition du groupe.
Cette idée est particulièrement importante car le SG
distingué permet de définir un groupe-quotient : en effet, le fait que le
SG distingué soit stable par conjugaison permet de définir une relation
d’équivalence sur G. On pose alors pour x et y∈G : xRy ssi xy-1∈H.
On note G/H l’ensemble des classes
d'équivalence = le groupe-quotient.
On a ainsi constitué l’opération élémentaire de la correspondance de Galois [CG], le moteur qui la crante (je rappelle que la CG est une correspondance fonctorielle c’est-à-dire qu’elle marche sur deux jambes - les corps et les groupes – et que cette marche est coordonnée par l’anneau des polynômes).
Quotientage-distinction
du groupe ∇G
↕︎ par
division « idéale » des anneaux
Adjonction-extension
du corps ∆K
D’où la distinction entre groupes simples et
groupes composés : un groupe est simple si ses seuls sous-groupes
distingués sont {1} et G. Sinon, il est composé. Dans ce cas, on le décompose
en groupes simples. Puis on réduit l’ordre du groupe simple par adjonctions.
La résolution de Galois va consister à réduire
progressivement l’ordre du sous-groupe distingué par judicieuses adjonctions en
sorte d’arriver, si possible, au groupe identité Id où toutes les racines sont
devenues rationnellement distinguables et où la seule permutation rendant
invariable les polynômes sur ce corps étendu est la permutation identité.
Le GG sera résoluble s’il existe un processus
distingué noté ∇G, c’est-à-dire une
suite décroissante de sous-groupes allant jusqu’à Id telle que chaque
sous-groupe est distingué dans le précédent et que le groupe quotient du groupe
par le sous-groupe distingué est commutatif.
G=G0⊳G1⊳G2⊳…⊳Gn=Id
avec Gi distingué dans Gi-1
et Gi-1/Gi commutatif.
Peut-on passer de ∑ à ∏ quand la somme
polynomiale devient infinie ? On parle alors de « séries
formelles ». On sait qu’une telle série formelle peut alors
être :
- convergente
- divergente (±∞) : 1+2+3+4…
- indéfinie (1-1+1-1+1…)
Exemples de séries convergentes :
·
pour 0<x<1 : ∑xn =
·
∑ = 1+x/1! + x/2! + … = ex
· x-x3/3! + x5/5! – x7/7!… = sin(x)
· 1-x2/2! + x4/4! - x6/6!… = cos(x)
Lorsque la série est convergente, peut avoir ∑⟹∏ ?
A-t-on par exemple sin(x)=∏(x-rj) ?
Il semblerait qu’on puisse l’avoir, dans
certains cas, mais alors le ∏ en question, convergent vers un nombre non
rationnel et non algébrique, ne serait plus unique et pourrait même comporter
une infinité de possibilités. Un théorème de Hurwitz
traiterait de cette situation. [32]
Cf. équation algébrique ⟹ équation différentielle (linéaire) où l’inconnue est une fonction.
Principal résultat : il y a dans ce cas 3 (et 3 seulement) types d’ambiguïtés galoisiennes (c’est-à-dire d’éléments du groupe de Galois différentiel) [33] :
· la monodromie (on ne revient pas au point de départ après avoir tourné autour d’une singularité),
· le recalibrage des exponentielles (au voisinage d’une singularité)
· les ambiguïtés de Stokes (également au voisinage d’une singularité).
Cf. les nombres p-adiques : même structure
d’espace et de groupe avec les polynômes… [34]
25 octobre 1811 – 31 mars 1832
Année scolaire |
Âge |
Classe |
Établissement |
|
1823-1824 |
12 |
Quatrième |
Louis-le-Grand |
|
1824-1825 |
13 |
Troisième |
|
|
1825-1826 |
14 |
Seconde |
|
|
1826-1827 |
15 |
(redoublement !) |
|
|
1827-1828 |
16 |
Première |
|
|
1828-1829 |
17 |
Terminale |
|
|
1829-1830 |
18 |
|
Normale |
|
1830-1831 |
19 |
|
Normale | Prison |
|
1831-1832 |
20 |
|
Prison |
|
·
Raison du duel ?
·
Qui fut la coquette ?
·
Qui fut son adversaire ?
·
Qui furent ses deux témoins ? [deux
inconnus « conjugués » !]
1. MI : Systématisation (Dedekind…)
2. MII : Généralisation formelle (Emil Artin…)
3. MIII : Extension (Grothendieck…)
« Tout
processus de généralisation s’accompagne d’une subdivision en concepts
distincts qui se trouvaient confondus dans la situation particulière d’abord
envisagée. En mathématiques, la crainte que généralité et banalité aillent de
pair est absolument injustifiée ! […] La généralisation d’un concept
s’accompagne souvent d’une différenciation en deux ou plusieurs aspects
jusque-là non distingués et qui appellent à leur tour des concepts spécifiques. »
Hourya Sinaceur [35]
Comme l’indique Hourya
Sinaceur, une généralisation ne procède pas par fusion/confusion de notions mais
produit tout au contraire une division/séparation/distinction de notions
jusque-là mal discernées.
Cf. Connes d’un côté ⟹ continuité par point de vue fonctionnel…
Cf. Zalamea de l’autre ⟹ sauts mais alors quelles continuités ?
Extension de la
fonctionnalité classique (cf. la notion de fonction est au cœur de
l’analyse) : la correspondance s’étend des objets aux morphismes qui les
relient au terme de quoi la correspondance se fait entre structures et non plus
entre objets.
·
Le groupe classique
est une collection constituée d’individus :
{-2, -1,
, 1,
} ⟹ x5+x4-4x3-3x2+3x+2
·
Le groupe moderne
est un collectif constituant de ses membres :
x5+x4-4x3-3x2+3x+1
⟹
Manière de renommer
symétrie ou ambiguïté…
Le collectif
constituant commence à 5. [36]
En-dessous, le
collectif est constitué.
l’écoute entre l’amalgame de l’oreille (∑) et
l’algèbre de la partition (∏) ?
Et : ≡
?
moins le groupe des différents leitmotivs qu’un
seul leitmotiv comme groupe de ses différentes variantes…
Lien entre modernité galoisienne et modernité
marxiste !
Galois-Marx-Wagner : 3 militants
politiques révolutionnaires porteurs de nouvelles conceptions du collectif.
Cf. la question de l’organisation comme
question centrale de la politique. ⟹ Marx, galoisien ?
L’organisation communiste : un groupe
irréductible sans sous-groupes distinguables ? Cf. sa solidarité
constituante, qui se nomme « camaraderie » ; cf. le fait que les
individus s’y intègrent le plus souvent sous pseudonyme.
Groupes infinis ⟹ séries formelles…
Voir le projet Douze (Blok) pour
« grouper » musique, théâtre et cinéma et non pas les totaliser en
« œuvre d’art totale »…
Le montage du cinéma serait-il une manière de
« grouper » ses différentes composantes ?
***
[1] Sur Évariste Galois (revue Secousse, n°6, mars 2012) : http://www.revue-secousse.fr/Secousse-06/Carte-blanche/SkS06-Connes-Galois.pdf
[2] Voir Peter Scholze (Médaille Fields 2018) : https://www.pourlascience.fr/sd/mathematiques/medaille-fields-peter-scholze-loracle-de-larithmetique-14428.php.
Sur les perfectoïdes : http://smf4.emath.fr/Publications/Gazette/2017/154/smf_gazette_154_60-64.pdf et https://www.youtube.com/watch?v=UfjaResU3tI
[3] 2011 : « La pensée d’Évariste Galois et le formalisme moderne ». http://www.alainconnes.org/docs/galoistext.pdf
[4] Pour les révolutions R.E.D., voir Hétérophonies/68 : https://heterophonies68.wordpress.com/
[5] On y reviendra avec l’examen du travail de Zalamea…
[6] celui qui m’a saisi quand pour la première fois l’enfant que j’étais à été confronté au secret de la lettre x
[7]
« tiré en arrière »
[8] « poussé en avant »
[9] Je rappelle : le niveau syntaxique correspond ici au niveau de la théorie dans la théorie des modèles, et c’est lui qui autorise des déductions et des calculs que le caractère purement « expérimental » du modèle (niveau sémantique) n’autorise pas.
[10] On va y revenir : on travaille ici systématiquement sur des polynômes unitaires (cn=1), séparables (racines toutes différentes) à coefficients entiers. On démontre qu’on peut systématiquement ramener l’examen des polynômes rationnels (sur Q) à ce cas.
[11] qui va se construire sur l’examen systématique de l’espace fonctionnel constitué par toutes les fonctions rationnelles des racines…
[12] Voir par exemple Escoffier p. 222
[13] Pour information, j’utilise le petit logiciel en ligne, fort commode, https://www.mathway.com/fr/Algebra
[14] =(x-1789)(x-1871)(x-1917)(x-1968)(x-2025)
[15] René Guitart a démontré que tout hexagone logique formalise le nœud borroméen de ses trois sommets contraires. Je conjecture ici la réciproque : tout nœud borroméen structure un hexagone logique à partir de ces sommets contraires.
[16] Aristote prescrivait qu’on ne pouvait démontrer une proposition arithmétique en faisant intervenir des démonstrations géométriques (et vice versa).
[17] La formalisation « naturelle » d’un GG est géométrique.
[18] Cf. remarque de Pierre Cartier sur mon exposé mamuphi de janvier 2018.
[19] Nomination provisoire, faute de mieux…
[20] Pour information ce nombre de permutations entre arrangements d’un polynôme d’ordre 5 doit être rapproché du nombre d’atomes dans tout l’univers : 1080.
[21] Voir la remarque d’Alain Connes (note 2 de sa conférence à l’Académie).
[22] Cf. pour les équations quadratiques : f(AB+CD, AC+BD, AD+BC) pour n=4
[23] Connes, p. 4
[24] C’est par exemple le point de vue d’Olivier Debarredans le cours MOOC-FLOT de l’Ens (2014).
[25] au sens où les catégoriciens parlent de « transformations naturelles »…
[26] Stewart, p. 153
[27] Exemple de Connes
[28] Flammarion, 1994
[30] Voir le détail dans Connes (p. 5)
[31] Pour avoir le groupe, il faut bien sûr ajouter aux opérations l’opération neutre et, concomitamment, l’existence systématique d’opérations inverses.
[32] Merci à Yves André pour cette indication.
[33] Voir Yves André : Idées galoisiennes (leçon mamuphi).
[35] Corps et modèles (pp.383-384 ; 398)
[36] En langue russe, le pluriel commence à 5 et le singulier concerne les nombres{1, 2, 3, 4}.
Il y a de nombreuses langues avec un duel (le Grec, l’Arabe…). Il y a
quelques langues avec un triel et il y en aurait (le Sursurunga
de Papouasie-Nouvelle-Guinée) avec le jeu
complet : {singulier, duel, triel, quatriel, paucal (peu), pluriel (beaucoup)}.
Notons
aussi le cas où la langue distingue un nom collectif qui n’est pas le pluriel
(Arabe par exemple). D’où, parfois, le singulatif
qui est l’unité de ce nom collectif (quelque chose en français comme « un
membre du troupeau bovin ou ovin »). Singulatif
s’oppose alors à collectif comme singulier s’oppose à pluriel…