S’orienter dans la pensée, s’orienter dans l’existence
Séminaire public d’Alain Badiou
II.
2005-2006
(transcription
de François Duvert)
octobre 2005.................................................................................................................................................................................................... 1
19 octobre 2005............................................................................................................................................................................................... 2
Qu’est-ce que vivre ?................................................................................................................................................................................... 2
novembre 2005................................................................................................................................................................................................ 6
14 décembre 2005........................................................................................................................................................................................... 9
janvier 2006................................................................................................................................................................................................... 11
mars 2006....................................................................................................................................................................................................... 13
25 avril 2006................................................................................................................................................................................................. 16
mai 2006......................................................................................................................................................................................................... 18
Juin 2006........................................................................................................................................................................................................ 21
Bonjour à tous, je
commence par les questions de date, comme de coutume. Je vous donne les 2
prochaines : le 30 novembre et le 14 décembre. Je vous donnerai le
calendrier complet le 30 novembre. C’est le 1er point. Ensuite, quelques indications
d’échéance pour les curieux. Entre vendredi, samedi et dimanche je participe à
3 colloques en 3 jours ce qui est absolument absurde. Je l’interprète – il faut
s’interpréter soi-même de temps à autre - comme une absurdité compensatoire à
un certain nombre d’assauts que l’existence empirique a mené contre moi depuis
le moi de juin et à laquelle il faut céder de temps à autre, y compris par excès.
Je vous les indique.
- le vendredi 21 je
serai à une soirée à Beaubourg sur et consacrée à Pierre Guyotat. C’est une
soirée à Beaubourg sur Guyotat. Je vous donne d’abord les repérages. Ça
commence en fait à 18h par un film, de ? Pierre Guyotat, qui est de 1989,
qui s’appelle Pierre Guyotat, 52 minutes dans la langue, sur Pierre Guyotat. A 19h30 commence la soirée, j’inaugure la soirée sous
le titre « PG, prince de la prose ».
C’est la 1ère chose. Dans la petite salle, au niveau – 1. J’en
profite pour redire au passage ou pour ponctuer un peu la signification de
Guyotat.
J’en ai déjà parlé même,
à ce séminaire, il y a 3 ans, en mars 2002, assez longuement. Je voudrais
redire simplement quelques mots. Guyotat est surtout, je dois dire pour moi,
les œuvres des années 60, même si on peut considérer qu’après c’est plus
radical, mais plus difficile d’accès, son œuvre est exceptionnelle dans l’écriture
française, aux limites de l’insoutenable. Exceptionnelle car elle est l’œuvre
littéraire qui déplie dans une prose inventée et somptueuse en même temps qch
comme le fond absolu et en dernier ressort sourdement criminel de nos sociétés.
Ce n’est pas une écriture de dénonciation, c’est plus radical que ça, c’est une
espèce présentation quasi-cosmologique d’un fond violent et saisissant de nos
sociétés. Tout ça car la thématique fondamentale de Guyotat c’est le prostitutionnel,
la relation prostitutionnelle des corps comme échange et contrainte généralisés,
sans médiatio aucune autre que cette contrainte et échange généralisé. Les
noms, les putains, qui prennent chez lui une résonance toute particulière, ces
noms de la prostitution et derrière eux et avec eux les noms qu’on pourrait
presque dire de la collision sexuelle, les noms du heurt sexuel, sont drainés et
organisés dans une sorte de symphonie tragique en vérité qui dessine je crois
vraiment une vision comme excédentaire, une vision comme prise dans une lyrique
sauvage de qch qui en réalité est en effet dans le fond de notre monde, à
savoir que si les relations essentielles de l’univers sont toutes sans
exception marchandes et commerciales alors le paradigme des relations entre les
hommes est la prostitution, ça en est le paradigme radical, puisque toute chose
n’est accessible que selon son prix, dans une collision d’échange et de
violence symbolisé par la sexualité de ce type là, une sexualité absolument dépourvue
de toute aura, la sexualité comme corporéité sauvage. Je voulais simplement
vous faire réentendre 2 ou 3 passages de Guyotat pour ce soir. Je n’ai pas pris
les passages les plus affreux. Je vous ai ménagés ! Ceux qui disent le
plus atrocement la vérité de notre monde. Les 3 passages sont de Tombeau
pour 500 000 soldats, que je considère comme
son chef d’œuvre, qui entre autres choses est un livre sur l’essence de la
guerre coloniale. Ça délivre qch de l’essence absolue de la guerre coloniale. « cette
nuit, le faisceau éclaire le ciel. O étoiles, jugements des nations astre libertaire..
.entend le spas de leur faune étonnée, les pancartes de l’utopie ruissent au
vent stellaire. Des nations d’hommes blessés arrivés dans la nuit reposent,
ignorant le décor de fleurs et de sources ou le flamboiement de…dans chaque
terrain de couleur et de niveaux diféents, une charrue dressée attend ‘etre
prise et mes mains empougnenent le bois couvert de rosée. Regarde, un lit désert.
Les coqs ni les enfants ne crient. Les eaux retenues le long des rives dans les
joncs sont alourdies et obscurcies par le sange. Le dos percé par le soleil.
Retorne toi… et tandis que tes yeux vainement remués … massacre découvert par l’aurore,
laisse un doux poignard déchirer tes reins et combattre tes pleurs ».
Et le dernier §, qui
est en réalité celui de la naissance possible, celui d’un suel coule, d’un
nouvceau monde Kment et Yohar réveillés marchent, un homme courbé sur la ierre
saillit la déesse. Une crinière sort de sa nuque et de son dos. sur sa tête une
colombe et une couronnne d’épines… au long sur la mer la voile cingle… les poissons jaillissent la barque joue
dans la profondeur sur l’ombre de la coque. La barque est vide maisu in rayon
le 1er de l’aurore Kmet s’agenouille en face de Yohar et Yohar et
face de Kment. Poings à terre, ils se baisent au genou au sexe et au front ».
- samedi 22,
colloque sur Derrida, 2ème journée. Je parlerai à 15h.
- dimanche 23, c’est
la dernière journée du forum le monde sur la musique comme pensée. ça a lieu à
Le Mans, ce n’est pas la porte à côté, à la salle des congrès au Mans. J’y ai
participé sous la forme d’un entretien avec Charles Ramond, en finale. C’est
sur 3 jours, entièrement consacré à la question des rapports entre musique et
pensée. Moi je parlerai plus particulièrement d’un point qui m’intéresse
depuis longtemps : pourquoi est-il si difficile de parler de la musique,
quel est le rapport exact entre la musique comme procédure, comme pensée et qch
qui dirait cela ? Alors que l’intellectualité de la musique est très vive
et très présente, il y a une difficulté qui est que le propos sur la musique
est toujours tiraillé entre une tendance qui le ramène ou le fixe du côté de l’affect,
la musique comme suscitation affective, alternance de joie et de tristesse,
comme emprise sur les corps, et de l’autre la musiqeu comme discours technique,
construction, écriture, figure quasiment abstraite et presque mathématique de
la pensée. Ce point concerne la seule musique, conjonction presque improbable
tout de même entre le comble de la puissance affective potentielle ou virtuelle,
y compris sous la forme de l’emprise rythmique sur les corps, figure de l’affect,
et le comble aussi de la construction artistique abstraite, de l’écriture comme
écriture. La musique c’est ça. Quand on entre par l’un l’autre devient
invisible, quand on entre par l’autre l’un devient incompréhensible. Je voudrais
traiter cette question.
La conclusion de
tout ça : c’est : ne venez pas me voir à la fin du cours ! je
vous donne rendez-vous lundi entre midi et 16h à mon bureau, ici. Ma permanence
aura lieu le mardi entre 10h et 13h.
15h50
Entrons dans le
sujet.
L’essentiel, le
centre de notre propos ça a été de proposer un nouveau protocole d’identification
de l’adversaire. C’est ce qui s’oppose à la création, nouveauté, vérité ce n’est
pas nécessairement l’adversaire politique, guerrier, dans a forme de l’Etat.
Toute pensée est aux prises avec une adversité un adversaire intime, intérieure,
mais c’es notre hypothèse. Comment l’identifier ? quel est le protocole
contemporain ? c’est la raison pour laquelle on a eu recours à des poètes
de la résistance Char et Pasolini : la résistance est un paradigme de la
constitution non classique du rapport à l’adversité. Elle a été une
sollicitation subjective qui n’et pas précodée, cette entrée en résistance est
un réquisit de la situation, et les gens sont imprévisibles, pas par les
partis, le sorhnisations. Raisons de rapport nouveau à l’adversité. Ces poètes
nos ont guidé pour cette raison dans la voie d’une nouveau protocole de constitution
de l’adversité. Pourquoi …. ? nous sommes au-delà de sa classique
identifictaion dialectique. Nous ne pouvons plus être dans le champ de la def
de l’adv par la logique de la contradicion, l’adv étant celui qui me nie, qui
exerce sur moi une figure de la négation, oppression, exploitation, de sorte
que mon rapport à l’dv est négation de cette négation. Si le rapport à l’adv
est .. en ce sens, i lets en effet négation de la négation, rébellion, révolte,
protestation négative, contre une négation exercée sur moi-me^me, dans
figreoppresssion, exploitatION. La thèse cest qu’on ne oeut plus assumer entièrement,
dispositif saturé, de ce q’on appelle la fin du marxisme, de la révolution, la
fin de tout diff qu’a la pensée à se reprédnter l’adv dans la figrue de la négation
de la négation .figure classique de la dialectivité… adversité immanente. C’était
le 1er point. Cette construction doal de l’adv a fixé le régime de
la pensée comme rév ou d’avant-garde. Provilégie la négation, table rase et recmmencement.
Dans l’élément de la révolte ou de la rébeellion, ie négatoiun de l anégation. Réeaminer ce point, dédicif. Les diff manestes
de la pensée cintemporaine dans ses chemineemnt pol et art sont liés à cette
crise de la figure dial de l’adev. Nous ne saons pas u mal ce qu’est l’adv. De
là une pente secrète au nihilisme. Le nihilisme c’ets qch comme la rébleesion
dand la figure d’un obcurté de ‘ladv ? c’était le 2ème point. L’année
dernière j’avais proposé de dire que dans le champ de ruine de la dial ou de
cette dial là, dans la diff de la dial classique de la constitution, avaient
surgi 2 nouvelles ifgures, figure de l’acceptation camouflée, ou acceptation
masquée : la figure de la gauche et la figure du rebelle, par prvocatio.
La gauche et son extrême avant-garde, comme 2 figures qui se nourrisent de la déréliction
de la figre dial… comme figre de l’adversaire. Je ne vais pas y revenir. La
gauche c’est la figure oppositionnelle, la figure de la constitution de l’adv
comme ce à quoi on s’oppose, distinguée de la destructino. On n’a pas pour but
de le détruire. L’essence de l’opposition est en réalité la substitution. La
figrue substitutive, oe il importe de s tenri à la place de ce à quo ion s’pposr.
I lfaut le pouvoir, il faut cette place. C’est la substittuion au placement qui
est l’essece de cette figure. Dont l’eesence est d’accepter … substiutti en
dernier ressort. La figure du rebelle, revers nihiliste de cela, pas opposition ?
elle ne dit aps qu’il faut le pouvoir, aisi l y a le pouvoir sinn rien. c’et
une figrue qui est négation sans négation de la ngéation, qui se tient dans l’absentement
de ce à quo on s’oppose. L’adversaire est naccessible. Ce qui revient à dire qu’il
est un système. Le système, il devient une abstraction nominale. L’adv est pris ou subsumé
sous une figure systémique. Un système c’est ce à quoi vous ne pouvez opposer
que le rien. ‘vest la def du système. Ce à quoi je m’oppose c’est le système,
vous êtes dans un élément nihiliste, élément du rien subejctivable qui est hors
la systématicvité du système. C’était le 2èem point.
Il faut êtrea du de
la de la négation de la négation
Figrue de la gaucge
et du rebelle opposées mas constitutives du moment présent ne sont aps une véritable
solution. Il faut donc à la fois en penser la dimension et prpose au-delà. Une
manière d edire les choss c’es qe la gauche catégorie, pas simplement la gde
collection des candidats socialistes aux léexction, la gauche est définissable
comme étant al fgrue qui a une cicneption substitutive de ‘adv. Elle s’oriente
selon la loi. Si on parle d’orientation dans la pensée, l’existence,c’est une
figrue selon la loi. Se substituer au pvr pour changer la loi. S’orienter selon
le régime de l aloi, telle qu’une substittion rend poss ds… le rebelle poposr
de ds’orienter sleon le désir. le couplage essentiele st celui de la loi et du
désir. nous savons qu’il y a une profonde identité entre les 2, une réciprocit
dont Lacan a fait la théorie. Je proposais de dire que ces 2 figures sont des
figures de désorientation, car l’orientation leon la lio, selon le désir, ne
prposent pas la constitution nouvelle d’une figrue d el’adv qui opurraint réorienter.
De fait leur effet est désorientant. Je ne dis pas que la désorientation soit
mauvaise, c’est une autre question. Mais ces figues ne sont aps des porposition
d’orientation, mais en tant que figures masqués sont désorientation.
Dernoer point :
il faut so’rienter sleon le géénique, ie
selon les vérités, selon qch qui pourrait être nommé vérité, en un sens renouvelé,
qch qui ne se laisse réduire ni à la loi ni au désir ni à leur articulation.i
ln’y a de propo de réorientation que si on tient que le jeu génral n’est pas réductible
à l’orientation loi et désir. nous avons fait le tour, en réalité
historiquement depuis mais 69 et ses csq. Expérimentation historiuqe des
virtualités contenues dans le tandem loi désir quant aux figure poss de
constituion nouvelle d l’adv. Expérimentation hist prolongée. Elle est
maintenatn saturée, et ce dont il s’agit dans cette ère, loi désir, c’est donnée
au fond dans le tandem hostil et paradoxal des mao lacaniens et des anar
deleuzieen de l’autre, est en disposition de saturation. Donc possibilité de
qch qui ne se laisse réduire ni à la l oi ni au désir. nous allons prendre un
peu autrement en disant ce qui ne se laisse réduire ni au corps ni au discours.
Rductible ni au cors ni au langage. Cette année va être conssacrée à la
construction cnoceptuelle d’un appareillage d epensée rendant possible que ce
qui nous oriente soit irréductible à la combinaison des corps et des langages,
d’un autre ordre que cette combinaison tout en assumant son existence
fondatemntale. Donc l’énoncé de départ pourrait être très simple. Ce serai tl’énoncé :
il n’est pas vrai qu’il n’y a que des corps et des langages, si on lu idonne s
aforme négative. Je soutiendrais que il n’y a que des corps et des langage est
un énoncé commun à la figure du rebelle et de la gauche. L’énoncé commun cest
il n’y a que des corps et des langages. Donc ou bien on est dans la figure
substitutive du pouvoir et de l aloi, on bien on est dans le nihilisme du désir.
c’est lun o c’est lautre. Ce qui soutient cela es un énoncé partageable il n’y
a que des corps et des lanages. C’est un énoncé que je propose d’appeler l’axiome
du mat démo. Il nous est arrivé d’évoquer cela ici déjà. L’idéologie domianet
de notre temps, site, lieu, c’est l’énoncé il n’y a quq edes corps et des
langgaes. Je pense que si nous voulons trouvez réellement un principe d’orintantio
au-delà de la dialetcicit éusuell… donc si je veu dire autre chose que cela qui
est très bien mais saturé, alos il faut déplacer l’énoncé du mat démo. Désorientantes
car encore à l’inté de l’énoncé mrimordiam d mt démo. On va définir la liberté
des corps par rapport au langge… c’est ce qui permet à l’expressivité des corps
d’être maximalment créatrice etc… vous êtes dans la désorientation, ni dans le
dispositif dial de la négation, ni dans une conception de l’aff. Nous doter dun’
appareillahe minimal concernant ce qui petu être dit au regard de l’énoncé
considéré comme doinant, qu iest il n’y a que des corps et des lanages. Déf
librté, égalité, droits de l’homme : csq de l’énoncé selon lequel il n’y a
que des corps et des langages. Le mat démo est l’élément dans lequel nous
vivons aujourd’hui. Alors la construction générale des csq de cet énoncé et de
l’entame qu’on peut faire contre lui est en réalité l’enjeu de LdM. Et donc on
peut définir ce séminaire comme une intro de LdM qui araîtra plus tard. On peut
dire que l’enjeu c’est à la fois d’avoir une intelligibilité de ce que cest que
le mat démo et des conditinos sous lesquelles on peut lui oppose qch.
Construction d’une scène idéologique nouvelle, fonction majeure de la philo :
contribuer à l’édification d’une scène idéo nouvelle… incise, exception à cette
domination. Alors effectivement je tente une construction qu iopposerait au mat
démo qch que j’appelle une dial mat, et qui là aussi peut avoir un énoncé
constituant très simple. Il n’y a que des corps et des langaes, il n’y a que
des corps et des langages sinon qu’il y a des vérités. La forme ets importante :
c en’est pas il y a 3 choses et pas 2 (dialà, mais la forme est il s’agit de
faire apparaître le 3èm eterme non pas dans le me^me registre que els 2 autres
mais en figures d’exception. Il n’y a que des corps et des langges, part matérilaiste.
V’est bien vrai qu’il n’y a que des corps et des langages. Sinon qu’il y a
auitre chose : dans certaines conditon, pa stuojours, peut-être raement,
qch est qui n’est pas exctameent dans la figure du il y a des corps et des
langages, mais… sinon qu’il ya des
vérités. Vous voyez le point, cette construction va donc comporter
-premièrement une
logique du il y a : part matérilaiste, que veut dire il y a, dès lors qu’on
est d’accord p our dire i ly a des corps et des langages. En quel sens entendre
il ya.
- le second travail
est une logique de l’exception : sinon que, en exception, en sinon que du
i ly a. dans un autre mode de ce i y a, apparaît.
Alors violà, en tout
cas nous savons que lappareillage contient une logique du il y a et une logique
de l’exception et la corrélation entre les 2. Empiriquement, je vous ferai
remarquer que le mat démo, sa pente majeure, c’est de considérer qu’il n’y a
pas d’exception. Pas d’exception, ce qui se dit très souvent par le fait que il
n’y a qu’une suel echose, qu’une politique, qu’une économie qu’un march
mondiale. Il y a une présomption de l’un, cette théorie selon laquelle il n’y a
qu’un seul ordre, c’est une théorie dont le contenu propre est d’aguer contre toute
exception. Non sans raison, car l’excepion n’est jamais vraiment démocratique.
On soutiendra ici le contraire. L’exception cest ce qui n’est pas comme le
reste. Le mat déom est csqt en affirmant l’énoncé de la pluralité et en
accordant à cette plluralité un staut d’unicité : elle est sans excetion,
ele est le i y a. or vous savez que de toujours dire il y a, c’est comme ça. C’est
un argument majeur et constant. Le reste c’est des utopies, archaïque, il y a
un c’est comme ça majeure, il se ramifie en pluralité immaneent en corps et
langage, mais ‘cest aussi une intsance de l’un, car il est une théorie de la
non exception c’est une figure très complexe, la non exception est camouflée
par la multiplicité. La non exception… reconnaître qu’il n’y a que des coprs et
des langages, vous ouvrez à une multiplicité sans corps : diversité des
cultures, des individus… sauf ce qui prétend être en exception, sauf ce qui prétendrait
qu’il n’y a pas que cela. Donc la non exception se présente dans la figure de
la multiplicité pure et de son acceptation normative. Mat démo, mat au sens où
il affirme il n’y a que des corps et des langages ce qui paraît être une thèse
mat élémentaire, et elle est vraie, mais reconnaissant cete multuplicité il l’accompagne
d’une forclusion de toute exception, qu isignfie en réalité que la pluralité
est le mode propre d’existence de lk’un. C’est le oceur du mat démo que l’un,
la non exception, la figure unique du i ly a, est donnée dans la figure de la multiplicité
normative. Reconnaissance de l’autre si vous voulez. Tout autre je le reconnais,
c’est jamais qu’une combinaison de corps et de langage particulière. Mais ce
que je ne peux pas reconnaître c’est ce qui est en exception de ce qu’il y a,
ie ce qui, c’est l’autre axiome, il n’y a que des corps et
ds langges, sinon que, ouvrant le brèche formelle de l’exception possible dans
le il y a. et c’est cette brèche que j’appelle vérité.
C’était pour faire
le tour du 1er type de difficulté…. Sinon qu’on va dire sinon que,
et que cette brèche du sinon que, on le nommera vérité. C’est le 1er
registre. Il faut convaincre, se convaincre qu’on partage la logique du il y a
et qu’on y suture, on y greffe une logique de l’exception, de façon immanente.
ouvert à un il y a d’une autre espèce,
travail de logique. Peut-on prescrire un univers du logique qui se prête
simultanément à la logique du il y a et à l alogique de l’exception …
La 2ème
difficulté possibilité de l’exception mais de sa possibilité, la puissance du
mat démo cest que nous avons à reconnaître son il y a. qui va réellement
objecter à il y a des corps et des langages, et c’est avec ça que se
constituent monde, univers, cultures etc… c’est certain mais il faut asssumer
tout en reconnaissant cela la figure de l’exceoption, le sinon que des vérités.
La 2èm difficulté,
cest que le mat démo si réellement il es tue idéologie, est de l’ordre du
semblant, de l’ordre de la représentation imaginaire. Mais la figure singulière
du mt démo, c’est que c’est un semblant tel qu’il est argumenté du réel. Ce n’était
pas du tout comme ça du temps où l’idéologie dominante était la religion
chrétienne, transcendance, destinal… c’ets une idéologie particulière :
elle ne se présente pas comme autre chose que la pure et simple description de
l aréaité, et prétend que c’est tout ce qui n’est pas elle qui argumente du ‘ne
tarsnscendance auqleonque. Compliquée, par ce que on a affaireà une figrue apte
à prononcer que ce qu’elle dit, c’est simplemet ce qu’il y a. et en un certain
sens c’est vrai. Donc elle est toujours en état d’arguer que son propos esn
dernier ressort… idéologique est la matérialité mêm de de cqu’il lya. Situation
relativement inédité : l’idéo dominante s eprésente comme argumentée de
thèses sur le réel, la description de ce qu’il y a. et mettant au défi tout
adversaire pitentiel d’assumer le il y a. l’argumentaire consiste à dire :
si vous dites comme nous que le il
ya c’est ce sil ya, alors il faut en tirer els m^mees csq que nous,
entre autre qu’il n’y a aps d’exception. C’est comme ça, c’ets comme ça. Et
donc l’idéologie elle-même se présente comme le contraire de l’imaginaire la
pure et simple description du il y a comme tel. mais ceci n’est qu’une
apparence, si c’est une idéologie : en éliminat l’exception, le il y a du
mat démo bascule dans l’imaginaire. C’es tune opération assez comliquée. Le
moment où le mat démo s’avère une idéoloie, totalise lui-même, forclot toute
exception. Close de l’un, élément idologique oprorpe, mais cet élément est
constammet argumenté du réel, du il y a. c’est une opération singulière, qui
doit être démontée et formalisée comme telle, qui revient à penser le réel du
semblant. Le réel du semblant de réelo : qu’est-ce que le réel du semblant
de réel. Comment se fait-il qu’il est en état de se présenter comme la description
de ce qu’il y a alors que nous expérimentons qu’il organise imaginairement les
conscienecs, qu’il a comme but de disposer les sujets devant le marché, de les
constituer comme sujets de la marchandise. Ou estèce que nous nous faisons
avoir ? ce n’est pas clair.. ou exactement fonctionne l’imposture n’est
pas claire. Tenter d’aller dans l’élucidation de ce point : quel est le
point d’imposture alors mmee que ce qui semble être son être prorpe est de
décrire correcteemnt le il y a. on sera obligé de dire que l’imposture c’est de
forclore l’exception, imposture très sépciale, particulière. Le fait basculer
dans la figrue imaginaire de la totalisation. Pour en venir là, nous serons
obligés de penser ce que c’est que la figure propre du semblant. Quest-ce que
le sembkant en tant qu’il est argumenté du téel. Nous debons… du il a de l’apapraître, en un sens ceci peut
être un il y a du semblant bien que ça se présent comme une thèse que nous
allons partager. Nous allons mnotrer commen une thèse sur le il ya, sur ce qu’il
y a, qui paarit raisonnableemnt latérialiste, raisonnableent démocratique, savoir la thèse : écoutez i n’y a
que des corps et des langages, tirons-en les css sur la libert… comment se
fait-il que cette thèse soit susceptible de fonctionner comme une imposture
radicale alors que en un certain sens nous sommes contraints de la
partager ? possible s’agissant d’une thèse de ce genre. Quel est le il y a
propre de l’apparaître, du semblant, sans cependant basculer dans une pure
théorie du semblant (simulacre, image, virtuel). A la Baudrillard. On va à la
fois d’un côté assumer la mtérialité de la thèse, àa ne relève pas de l’image,
du virtuel, du fantôme, c’ets une thèse mat, mais d’un autre côté i ly a un
foncyionnement de cette thèse qui la fait basculer dans…
(notes P. Gossart)
Distribution
de 6 feuillets agrafés :
0. Nous voici à
même de proposer une réponse à ce qui, depuis toujours, est la question
« intimidante » ¾ comme le dit un personnage de Julien Gracq ¾ à laquelle, si
grand soit son détour, la philosophie est à la fin sommée de répondre :
Qu’est-ce que vivre ? « Vivre », évidemment, non pas au sens du
matérialisme démocratique (persévérer dans les libres virtualités du corps),
mais bien plutôt au sens de la formule énigmatique d’Aristote : vivre
« en Immortel ».
Nous pouvons tout
d’abord reformuler le système exigeant des conditions d’une réponse affirmative
du type : « Oui ! La vraie vie est présente. »
1. Ce n’est pas
un monde, donné dans la logique de son apparaître ¾ l’infini de ses
objets et de ses relations ¾ qui induit la possibilité de vivre. Si du moins la vie est autre chose que
l’existence. L’induction d’une telle possibilité repose sur ce qui, dans un
monde, fait trace de ce qui lui est advenu sous les espèces d’une disposition
foudroyante. Soit la trace d’un événement évanoui. Un telle trace est toujours,
dans l’apparaître mondain, une existence d’intensité maximale. Par
incorporation du passé du monde au présent qu’ouvre la trace on apprendra
qu’antérieurement à ce qui advint et n’est plus, le support d’être de cette
existence intense était un inexistant du monde. Fait trace dans le monde, et
signe pour la vie, la naissance d’un multiple à l’éclat de l’apparaître, auquel
il n’appartenait que sous une forme éteinte.
La première
directive philosophique à qui demande où est la vraie vie est donc la
suivante : « Prends soin de ce qui naît. Interroge les éclats, sonde
leur passé sans gloire. Tu ne peux espérer qu’en ce qui inapparaissait. »
2. Il ne suffit
pas d’identifier une trace. Il faut s’incorporer à ce qu’elle autorise comme
conséquences. Ce point est crucial. La vie est création d’un présent, mais
cette création est, comme l’est pour Descartes le monde au regard de Dieu, création
continuée. Autour de la trace, autour de l’éclat anonyme d’une naissance au
monde de l’être-là, se constitue la cohésion d’un corps antérieurement
impossible. Accepter ce corps, déclarer ce corps, n’est pas suffisant pour être
le contemporain du présent dont il est le support matériel. Il faut entrer dans
sa composition, il faut devenir un élément actif de ce corps. Le seul rapport
réel au présent est celui d’une incorporation. Incorporation à cette cohésion
immanente au monde que délivre, nouvelle naissance au-delà de tous les faits et
balises du temps, le devenir-existant de la trace événementielle.
3. Le déploiement
des conséquences liées à la trace événementielle, conséquences qui créent un
présent, se fait par le traitement de points du monde. Il se fait, non par le
trajet continu de l’efficace d’un corps, mais par séquences, point par point.
Tout présent est fibré. Les points du monde où l’infini comparaît devant le
Deux du choix sont en effet comme les fibres du présent, sa constitution intime
dans son devenir mondain. Il est donc requis, pour que s’ouvre un présent
vivant, que le monde ne soit pas atone, qu’il y ait des points où s’assure,
fibrant le temps créateur, l’efficace du corps.
4. La vie est une
catégorie subjective. Un corps est la matérialité qu’elle exige, mais de la
disposition de ce corps dans un formalisme subjectif dépend le devenir du
présent : qu’il soit produit (le formalisme est fidèle, le corps est
directement situé « sous » la trace événementielle), qu’il soit
raturé (le formalisme est réactif, le corps est tenu à une double distance de
la négation de la trace), ou qu’il soit occulté (le corps est nié). Ni la
rature réactive du présent, qui nie la valeur de l’événement, ni, a fortiori, son occultation mortifère, qui suppose un « corps »
transcendant au monde, n’autorisent l’affirmation de la vie, qui est incorporation,
point par point, au présent.
Vivre est donc
une incorporation au présent sous la forme fidèle d’un sujet. Si
l’incorporation est dominée par la forme réactive, on ne parlera pas de vie,
mais de simple conservation. Il s’agit en effet de se protéger des conséquences
d’une naissance, de ne pas relancer l’existence au-delà d’elle-même. Si
l’incorporation est dominée par le formalisme obscur, on parlera de mortification.
La vie est en
définitive le pari fait sur un corps advenu à l’apparaître qu’on lui confiera
fidèlement une temporalité neuve, tenant à distance la pulsion conservatrice
(l’instinct mal nommé « de vie ») comme la pulsion mortifiante
(l’instinct de mort). La vie est ce qui vient à bout des pulsions.
5. Parce qu’elle
vient à bout des pulsions, la vie s’ordonne à la création séquentielle d’un
présent, laquelle constitue et absorbe un passé de type nouveau.
Pour le
matérialisme démocratique, le présent n’est jamais créé. Il affirme en effet de
façon tout à fait explicite qu’il importe de tenir le présent dans la limite
d’une réalité atone. C’est que pour lui, toute autre vision plie les corps au
despotisme d’une idéologie, au lieu de les laisser libres de gambader dans la
diversité des langages. Le matérialisme démocratique propose de nommer
« pensée » la pure algèbre de l’apparaître. Il résulte de cette
conception atone du présent une fétichisation du passé comme
« culture » séparable. Le matérialisme démocratique a la passion de
l’histoire, il est, véritablement, le seul authentique matérialisme historique.
Contrairement à
ce qui se passe dans la version stalinienne du marxisme, version dont Althusser
a hérité, tout en la contrariant de l’intérieur, il est capital de disjoindre
la dialectique matérialiste, philosophie de l’émancipation par les vérités, du
matérialisme historique, philosophie de l’aliénation par les corps-langages.
Rompre avec le culte des généalogies et des récits revient à restituer le passé
comme amplitude du présent.
Je l’écrivais
déjà il y a plus de vingt ans, dans ma Théorie du sujet : l’Histoire n’existe pas. Il n’y a que des présents disparates dont
l’éclat se mesure à la puissance qu’ils détiennent de déplier un passé qui soit
à leur mesure.
Dans le
matérialisme démocratique, la vie des corps-langages est la succession
conservatrice des instants du monde atone. Il en résulte que le passé est
chargé de doter ces instants d’un horizon fictif ¾ d’une épaisseur
culturelle. C’est du reste pourquoi le fétichisme de l’histoire s’accompagne
d’un discours insistant sur la nouveauté, sur le changement perpétuel, sur la
modernisation impérative. Au passé des profondeurs culturelles s’accorde un
présent dispersif, une agitation précisément dépourvue, elle, de toute
profondeur. Il y a des monuments qu’on visite et des instants dévastés qu’on
habite. Tout change à tout instant, et c’est la raison pour laquelle on
contemple l’horizon historique majestueux de ce qui ne changeait pas.
Pour la
dialectique matérialiste, c’est presque l’inverse. L’immobilité stagnante du
présent, sa stérile agitation, l’atonie violemment imposée du monde, est ce qui
frappe d’abord. Peu, très peu de changements capitaux dans la nature des
problèmes de la pensée, depuis Platon (par exemple). Mais à partir des quelques
procédures de vérité que déplient, point par point, des corps subjectivables,
on reconstitue un passé différent, une histoire des achèvements, des
trouvailles, des percées, qui n’est nullement une monumentalité culturelle,
mais une succession lisible de fragments d’éternité. Car un sujet fidèle crée
le présent comme être-là de l’éternité. En sorte que s’incorporer à ce présent
revient à percevoir le passé de l’éternité elle-même.
Vivre, c’est donc
aussi, toujours expérimenter au passé l’amplitude éternelle d’un présent. Nous
accordons à Spinoza la célèbre formule de la proposition XXIII du Livre V de L’Éthique : « Nous sentons et nous expérimentons que nous sommes
éternels. »
6. Il importe
toutefois de nommer cette expérimentation. Elle n’est pas de l’ordre du vécu,
ni de celui de l’expression. Elle n’est pas l’accord enfin trouvé des capacités
d’un corps et des ressources d’un langage. Elle est incorporation à l’exception
d’une vérité. Si l’on convient d’appeler « Idée » ce qui à la fois se
manifeste dans le monde ¾ dispose l’être-là d’un corps ¾ et fait exception à sa logique transcendantale, on dira, dans le droit fil
du platonisme, qu’expérimenter au présent l’éternité qui autorise la création
de ce présent, c’est expérimenter une Idée. Il faut donc assumer ceci :
pour la dialectique matérialiste, « vivre » et « vivre pour une
Idée » sont une seule et même chose.
Le matérialisme
démocratique ne voit, dans ce qu’il nommerait plutôt une conception idéologique
de la Vie, que fanatisme et instinct de mort. Et il est vrai que s’il n’y a que
des corps et des langages, vivre pour une Idée est nécessairement
l’absolutisation arbitraire d’un langage, auquel les corps doivent être
ordonnés. La reconnaissance matérielle du « sinon que » des vérités
autorise seule qu’on déclare, non pas du tout que les corps sont soumis à
l’autorité d’un langage, mais qu’un nouveau corps est l’organisation au présent
d’une vie subjective sans précédent ; et je soutiens que l’expérimentation
réelle d’une telle vie, intelligence d’un théorème ou force d’une rencontre,
contemplation d’un dessin ou élan d’un meeting, est irrésistiblement
universelle. En sorte que l’avènement de l’Idée est, pour la forme
d’incorporation qui lui correspond, tout le contraire d’une soumission. Elle
est, selon le type de vérité dont il s’agit, joie, bonheur, plaisir ou
enthousiasme.
7. Le
matérialisme démocratique présente comme une donnée objective, un résultat de
l’expérience historique, ce qu’il appelle « la fin des idéologies »,
mais il s’agit en réalité d’une injonction subjective violente, dont le contenu
réel est : « Vis sans Idée. » Or, cette injonction est
inconsistante.
Qu’elle accule la
pensée au relativisme sceptique est une évidence désormais assurée. La
tolérance, le respect de l’Autre, nous dit-on, à ce prix. Mais on voit tous les
jours que cette tolérance n’est elle-même qu’un fanatisme, car elle ne tolère
que sa propre vacuité. Le scepticisme véritable, celui des Grecs, était en
réalité une théorie absolue de l’exception : il plaçait les vérités si
haut, qu’il les jugeait inaccessibles au faible intellect de l’espèce humaine.
Il s’accordait ainsi au courant principal de la philosophie antique, lequel
pose qu’accéder au Vrai est le propre de la part immortelle des hommes, de ce
qu’il y a en l’homme d’inhumain par excès. Le scepticisme contemporain, celui
des cultures, de l’histoire, de l’expression de soi, n’a pas cette hauteur. Il
est simple accommodement à la rhétorique des instants et à la politique des
opinions. Aussi dissout-il d’abord l’inhumain dans l’humain, puis l’humain dans
la vie ordinaire, puis la vie ordinaire (ou animale) dans l’atonie du monde. Et
c’est de cette dissolution que résulte la maxime négative « Vis sans Idée »,
inconsistante de ce qu’elle n’a plus aucune idée de ce que peut être une Idée.
C’est la raison
pour laquelle le matérialisme démocratique se propose en fait de détruire ce
qui lui est extérieur. Comme nous l’avons remarqué, c’est une idéologie
violente et guerrière. Cette violence résulte, comme tout symptôme mortifère,
d’une inconsistance essentielle. Le matérialisme démocratique se veut humaniste
(droits de l’homme, etc.). Mais il est impossible de disposer d’un concept de
ce qui est « humain » sans en venir à cette inhumanité (éternelle,
idéelle) qui autorise l’homme à s’incorporer au présent sous le signe de la
trace de ce qui change. Faute de reconnaître les effets de ces traces, où
l’inhumain ordonne que l’humanité soit en excès sur son être-là, il faudra, ces
traces et leurs conséquences infinies, pour maintenir une notion pragmatique
purement animale de l’espèce humaine, les anéantir.
Le matérialisme
démocratique est un ennemi redoutable et intolérant de toute vie humaine ¾
c’est-à-dire inhumaine ¾ digne de ce nom.
8. L’objection
banale est que si vivre dépend de l’événement, la vie n’est promise qu’à ceux
qui ont la chance de l’accueillir. Le démocrate voit dans cette
« chance » le stigmate d’un aristocratisme, ou d’un arbitraire
transcendant : celui que depuis toujours on lie aux doctrines de la Grâce.
Et il est vrai que j’ai plusieurs fois utilisé la métaphore de la grâce, pour
indiquer que vivre, ce qui s’appelle vivre, suppose toujours qu’on accepte
d’œuvrer aux conséquences, généralement inouïes, de ce qui advient.
Réparer
l’injustice apparente de ce don, de ce supplément incalculable d’où procède la
relève d’un inexistant, c’est à quoi s’emploient de longue date les tenants,
non point de Dieu, mais du divin. Le plus récent, le plus talentueux et le plus
ignoré d’entre eux, Quentin Meillassoux, élabore pour ce faire une théorie
entièrement neuve du « pas encore » de l’existence divine,
accompagnée d’une promesse rationnelle concernant la résurrection des corps.
Tant il est vrai que c’est bien des nouveaux corps et de leur naissance qu’il
est inévitablement question dans cette affaire.
9. Je crois aux
vérités éternelles et à leur création fragmentée dans le présent des mondes. Ma
position sur ce point est tout à fait isomorphe à celle de Descartes : les
vérités sont éternelles parce qu’elles ont été créées, nullement parce qu’elles
sont là depuis toujours. Pour Descartes, les « vérités éternelles »,
dont nous avons rappelé, dans la préface, qu’il les posait en exception des
corps et des idées, ne sauraient être transcendantes au vouloir divin. Même les
plus formelles, mathématiques ou logiques, comme le principe de
non-contradiction, dépendent d’un acte libre de Dieu :
Dieu ne peut avoir été déterminé à faire qu’il fût vrai que les
contradictions ne peuvent être ensemble et par conséquent il a pu faire le
contraire.
Bien entendu, le procès de création d’une vérité, tel que s’en constitue le
présent par les conséquences d’un corps subjectivé, est très différent de
l’acte créateur d’un Dieu. Mais en son fond, l’idée est la même. Qu’il soit de
l’essence d’une vérité d’être éternelle ne la dispense nullement d’apparaître
dans un monde et d’être inexistante antérieurement à cette apparition.
Descartes a sur ce point une formule très remarquable :
Encore que dieu ait voulu que quelques vérités fussent nécessaires, ce
n’est pas à dire qu’il les ait nécessairement voulues.
L’éternelle
nécessité concerne une vérité elle-même, l’infinité des nombres premiers, la
beauté picturale des chevaux de la grotte Chauvet, les principes de la guerre
populaire ou l’affirmation amoureuse d’Héloïse et Abélard. Mais non point son
processus de création, suspendu qu’il est à la contingence des mondes, à
l’aléatoire d’un site, à l’efficace des organes d’un corps, à la constance d’un
sujet.
Descartes
s’indigne qu’on puisse supposer les vérités séparées des autres créatures et
devenues en quelque sorte le destin de Dieu :
Les vérités mathématiques, lesquelles vous nommez éternelles, ont été
établies de Dieu et en dépendent entièrement, aussi bien que tout le reste des
créatures. C’est en effet parler de Dieu comme d’un Jupiter ou Saturne, et
l’assujettir au Styx et aux destinées, que de dire que ces vérités sont
indépendantes de lui.
J’affirme aussi que toutes les vérités sans exception sont
« établies » d’un sujet, forme d’un corps dont l’efficace crée point
par point. Mais comme Descartes je pose que leur création n’est que
l’apparaître de leur éternité.
10. Je m’indigne
donc, comme Descartes, de ce qu’on fasse déchoir le Vrai au rang du Styx et des
destinées. A vrai dire, pour ce qui me concerne, je m’indigne deux fois. Et la
vie tient aussi son prix de cette double querelle. D’abord contre ceux,
culturalistes, relativistes, gens des corps immédiats et des langues
disponibles, pour qui l’historicité de toute chose exclut qu’il y ait des
vérités éternelles. Ils ne voient pas qu’une création véritable, une
historicité d’exception, n’a d’autre critère que d’établir, entre les mondes
disparates, l’évidence d’une éternité. Et que ce qui apparaît n’est dans
l’éclat de son apparition qu’autant qu’il se soustrait aux lois locales de
l’apparaître. Une création est trans-logique, de ce que l’être y bouleverse
l’apparaître. Ensuite, contre ceux pour qui l’universalité du vrai prend la
forme d’une Loi transcendante, devant laquelle on doit plier le genou, à
laquelle il faut conformer nos corps et nos mots. Ils ne voient pas que toute
éternité, toute universalité, doit apparaître en un monde et y être,
« patiemment ou impatiemment », créée. Une création est logique, dès
lors qu’une vérité est une apparition d’être.
11. Cependant, ne
j’ai pas besoin de Dieu, ni du divin. Je crois que c’est ici et maintenant que
nous nous suscitons, que nous nous (re)suscitons comme Immortels.
L’homme est cet
animal dont le propre est de participer à de très nombreux mondes, d’apparaître
en d’innombrables lieux. Cette sorte d’ubiquité objectale, qui le fait
transiter presque constamment d’un monde à l’autre, sur le fond de l’infinité
de ces mondes et de leur organisation transcendantale, est par elle-même, sans
qu’il soit besoin d’aucun miracle, une grâce : la grâce purement logique
de l’innombrable apparaître. Tout animal humain peut se dire qu’il est exclu
que partout et toujours il ne rencontre qu’atonie, inefficience du corps ou
défaut d’organes aptes à en traiter des points. Incessamment, dans quelque
monde accessible, quelque chose advient. A tout animal humain est accordée,
plusieurs fois dans sa brève existence, la chance de s’incorporer au présent
subjectif d’une vérité. A tous, et pour plusieurs types de procédures, est
distribuée la grâce de vivre pour une Idée, donc, la grâce de vivre tout court.
L’infini des
mondes est ce qui sauve de toute dis-grâce finie. La finitude, le constant
ressassement de notre être mortel, pour tout dire, la peur de la mort comme
unique passion, tels sont les ingrédients amers du matérialisme démocratique.
On relève tout cela quand on s’approprie la variété discontinue des mondes et
l’entrelacs des objets sous les régimes constamment variables de leurs
apparitions.
12. Nous sommes
ouverts à l’infinité des mondes. Vivre est possible. Par conséquent,
(re)commencer à vivre est ce qui seul importe.
13. On me dit
quelquefois que ne je vois dans la philosophie qu’un moyen de rétablir, contre
l’apologie contemporaine de l’ordinaire et du futile, les droits de l’héroïsme.
Pourquoi pas ? Cependant, l’héroïsme ancien prétend justifier la vie par
le sacrifice. Mon vœu est de le faire exister par la joie affirmative que
procure universellement le suivi des conséquences. Disons qu’à l’héroïsme
épique de qui donne sa vie, succède l’héroïsme mathématique de qui la crée
point par point.
14. A propos d’un
de ses personnages Malraux note, dans La Condition humaine : « Le sens héroïque lui avait été donné comme une discipline, non
comme une justification de la vie. » Je place en effet l’héroïsme du côté
de la discipline, seule norme du Vrai et des peuples, contre la puissance et la
richesse, contre l’insignifiance et la dissipation de l’esprit. Encore faut-il,
cette discipline, l’inventer, cohérence d’un corps subjectivable. Alors, elle
ne se distingue plus de notre désir de vivre.
15. L’animal
désabusé dont la marchandise est l’unique repère, nous ne serons livrés à sa
forme que si nous y consentons. Mais de ce consentement nous protège l’Idée,
arcane du présent pur.
Eh
bien bonjour à tous. Je commence par les questions de dates comme de
coutume […] Nous allons fonctionner cette année comme d’habitude,
c’est-à-dire avec une séance par mois à peu près d’ici juin […] Voilà, ça
c’est le premier point.
Ensuite, quelques
indications d’échéances, pour les curieux. Vendredi, samedi et dimanche, je
participe à trois colloques en trois jours. Ce qui est tout à fait absurde. Je
l’interprète, puisqu’il faut s’interpréter soi-même de temps à autre, je
l’interprète comme une absurdité compensatoire à tout de même un certain nombre
d’assauts que l’existence empirique a mené contre moi depuis le mois de juin,
et à laquelle il faut résister de temps à autre, y compris par l’excès. Et donc
c’est pour ça qu’il y a cette surcharge, circonstancielle.
Alors je vous les
indique quand même […] [Alain Badiou annonce sa participation vendredi à
une soirée à Beaubourg consacrée à Pierre Guyotat] J’inaugure la soirée […]
sous le titre Pierre Guyotat prince de la prose […]
J’ ai déjà parlé de Guyotat ici-même, à ce séminaire, il y a trois ans, en mars
2002, assez longuement. Je voudrais redire simplement quelques mots.
Guyotat est
surtout pour moi, mais c’est un choix particulier, présent par ses œuvres des
années 1960 ; même si on peut considérer qu’ensuite c’est encore plus
radical, mais c’est aussi plus difficile d’accès. L’œuvre de Pierre Guyotat est
une œuvre tout à fait exceptionnelle me semble-t-il dans l’écriture française.
Aux limites de l’insoutenable, elle est tout à fait exceptionnelle parce
qu’elle est peut-être l’œuvre littéraire qui déplie dans une prose inventée
mais somptueuse en même temps, quelque chose comme le fond absolu et, en
dernier ressort, sourdement et exemplairement criminel de nos sociétés. Ce
n’est pas une écriture de dénonciation si vous voulez, c’est plus radical que
ça. C’est une espèce de présentation quasi cosmologique d’un fond
invraisemblablement violent et saisissant de nos sociétés. Et tout ça tout
simplement parce que la thématique fondamentale de Guyotat c’est le prostitutionnel,
c’est-à-dire la relation prostitutionnelle des corps comme échange et
contrainte généralisés, sans médiation aucune.
De
sorte que les noms d’ailleurs, les « putains », prennent chez lui une
résonance toute particulière ; ces noms de la prostitution et, derrière
eux et avec eux, les noms qui ne sont pas même les noms de la relation ou du
rapport sexuel, mais les noms qu’on pourrait presque dire de la collision sexuelle, les noms du heurt sexuel sont drainés et organisés dans une sorte
de symphonie tragique en réalité, qui dessine (je crois vraiment) une vision
comme excédentaire, une vision prise comme dans une lyrique sauvage comme ça,
de quelque chose qui est en effet dans le fond de notre monde, à savoir
que : si les relations essentielles de l’univers sont toutes, sans
exception, marchandes ou commerciales, alors le paradigme des relations entre
les hommes et les femmes (et entre les hommes en général, dans l’humanité) est
la prostitution. C’en est le paradigme radical, puisque toute chose n’est
accessible que selon son prix, dans une collision d’échanges et de violences
qui finalement est symbolisée par la sexualité de ce type-là. La sexualité absolument
dépourvue de toute aura ; la sexualité comme corporéité sauvage. J’y
reviendrai mais je voulais simplement vous faire réentendre deux ou trois
passages de Guyotat ce soir, pour que vous voyiez aussi la langue. Je n’ai pas
pris les passages les plus affreux n’est-ce pas, je vous ai ménagé [Alain
Badiou sourit]. Enfin les plus affreux… Ceux qui disent le plus atrocement
quelque chose de notre monde. Les trois passages sont de Tombeau pour 500
000 soldats que je considère comme son chef-d’œuvre […] qui,
entre autres choses, est un extraordinaire livre sur l’essence de la guerre coloniale.
Ça donne, ça délivre quelque chose de l’essence de la guerre coloniale :
Cette nuit, le
faisceau est vers le ciel. Oh étoile, jugement des nations, astre libertaire.
Oh ! mère, entend les pas de leur faune étonnée. Les pancartes de l’utopie
bruissent au vent stellaire. Les nations d’hommes blessés arrivés dans la nuit
reposent, ignorant le décor de fleurs et de sources, où le flamboiement de
l’aurore les réveille. La terre se couvre alors d’instruments neufs. Dans
chaque terrain de couleur et de niveau différent, une charrue dressée attend
d’être prise et mes mains empoignent le bois couvert de rosée.
Regarde, bali
désert. Les coqs ni les enfants ne crient. Les eaux retenues le long des rives,
dans les joncs, sont alourdies et obscurcies par le sang. Vautours et rebelles
s’enfuient le dos percé par le soleil. Retourne-toi, retourne-toi, et tandis
que tes yeux vainement remués tentent de reconstituer le massacre, découvert par
l’aurore, qui laisse un doux poignard déchiré des reins, et le poison combattre
les douleurs.
Et
la fin, le dernier paragraphe, qui est en réalité celui de la naissance
possible, autour d’un seul couple, d’un nouveau monde, comme Adam et Eve après
le désastre :
Kment et Guiauhare, réveillés, marchent, les genoux et les poings dans
les épines, écartent la haie ; un homme courbé sur la pierre, saille
la déesse ; une crinière sort de sa nuque et de son dos ; sur sa tête
une colombe et une couronne d’épines. ; ses jambes nues vives,
incandescentes ; au loin, sur la mer, la voile cingle vers l’île et les
poissons jaillissent, étincellent sur la forge, heurtent les flancs de la
barque, jouent dans la profondeur sous l’ombre de la coque ; la barque est
vide mais un rayon, le premier de l’aurore, regarde et veille, sur la voile.
Kment s’agenouille en face de Guiauhare et Guiauhare en face de Kment. Poings à
terre, ils se baisent aux genoux, au sexe, et au vent.
Voilà…
[…] [Suit
l’annonce de sa participation, samedi, à un colloque à l’ENS sur Jacques
Derrida, avec la liste des participants. Il annonce également, dimanche, sa
participation à un forum Le Monde sur ²La
musique comme pensée² à Le Mans :] je parlerai sur un point qui m’intéresse depuis
longtemps, qui est de savoir pourquoi en définitive il est si difficile de
parler de la musique. Non seulement d’en parler en philosophie, mais d’en
parler en général ; c’est-à-dire quel est le rapport exact entre la
musique comme procédure, comme pensée, et quelque chose qui dirait cela. Alors
que pourtant l’intellectualité de la musique est très vive, il n’en reste pas
moins qu’il y a une difficulté. Difficulté que je résume en deux secondes qui
est que le propos sur la musique est toujours tiraillé entre une tendance qui
le ramène ou le fixe du côté de l’affect (c’est-à-dire la musique comme
suscitation affective, la musique comme alternance de la joie et de la
tristesse, la musique comme emprise sur les corps) ou d’un discours technique
(c’est-à-dire la musique comme construction, écriture, figure quasiment
abstraite et presque mathématique de la pensée). C’est un point très
particulier n’est-ce pas, qui à mon avis concerne la seule musique. C’est comme
si la musique était la conjonction, presque improbable tout de même, entre le
comble de la puissance affective potentielle ou virtuelle (y compris sous la
forme de l’emprise rythmique sur les corps par exemple, mais beaucoup d’autres
figures de l’affect) et le comble aussi de la construction artistique
abstraite, de l’écriture. La musique c’est ça. Et donc, quand on entre par
l’un, l’autre devient invisible. Mais quand on entre par l’autre, le premier
semble incompréhensible. Voilà pourquoi… Enfin je voudrais traiter cette
question.
Bien,
maintenant entrons un peu dans le sujet de cette année. Alors qu’avons-nous
fait l’année dernière ? Je le rappelle, y compris pour ceux qui n’étaient
pas là… L’essentiel, le centre de notre propos l’année dernière, ça a été de
proposer un nouveau protocole d’identification de l’adversaire. Alors
l’adversaire, c’est ce qui s’oppose à la création, à la nouveauté, à la
liberté… Ça n’est pas nécessairement l’adversaire politique, dans la forme de
l’État, etc. C’est une catégorie beaucoup plus générale qui est qu’on suppose,
au fond, que toute pensée est aux prises avec une adversité. L’hypothèse c’est
que toute pensée est aux prises avec un adversaire qui généralement est un
adversaire intime, un adversaire intérieur.
Et
alors, comment identifier cet adversaire ? Quel est le protocole contemporain
de l’identification de l’adversaire ? Je signale que c’est la raison pour
laquelle nous avons eu recours, de façon assez suivie, à des poètes qu’on peut
appeler les poètes de la Résistance. Pourquoi les poètes de la
Résistance ? En l’occurrence René Char et Pasolini principalement. Parce
que la Résistance, et donc la mémoire, c’est précisément un paradigme de la
constitution non classique de l’adversité, du rapport à l’adversité ;
c’est-à-dire que la Résistance a toujours été une réquisition, une sollicitation
subjective qui n’est pas pré-codée par quelque chose puisqu’elle n’est imposée
que par la situation ; c’est-à-dire si vous entrez en résistance parce que
les nazis sont là, ou si vous entrez en résistance contre Mussolini, ou
n’importe quoi d’autre, cette entrée en résistance est un réquisit de la
situation et on a souvent expérimenté que les gens qui entrent ainsi en
résistance sont imprévisibles ; c’est-à-dire ce ne sont pas les gens
pré-codés par les partis, les organisations, etc. Au départ ce sont des singularités
absolues qui entrent en résistance, pour des raisons qui sont des raisons
précisément de rapport nouveau à l’adversité, de choix nouveau au regard de
l’adversité.
Donc
ces poètes de la Résistance nous ont guidés pour cette raison, dans la voie
d’un nouveau protocole de constitution de l’adversité. Alors pourquoi ?
Pourquoi faut-il proposer une pensée nouvelle sur la question de
l’adversaire ? Eh bien c’est parce que nous sommes au-delà de sa classique
identification dialectique. Nous ne pouvons plus être dans le champ qui a
longuement prévalu de la définition de l’adversaire par la logique de la
contradiction finalement : l’adversaire comme celui qui me nie, ou celui
qui exerce sur moi une figure de la négation (oppression, exploitation, etc.),
de sorte que mon rapport à l’adversité est dialectique au sens où il est
négation de cette négation… D’abord et avant tout. Bien. Si le rapport à
l’adversaire est dans l’élément de la contradiction, en ce sens il est en
effet, comme Hegel l’a toujours énoncé, il est négation de la négation
puisqu’il est rébellion, révolte, protestation, affirmation négative contre précisément une négation qui est exercée originairement sur moi-même dans
la figure des oppressions, des répressions ou des exploitations.
Alors,
la thèse, c’était que nous ne pouvons plus entièrement assumer aujourd’hui
cette vue des choses. C’est aujourd’hui un dispositif saturé, ou usé. Et
peut-être le plus fondamentalement usé à mon sens de ce qu’on appelle, comme
vous voulez, ²la fin du marxisme², ²la fin de la révolution², la fin de tout. Et cette fin de tout, essentiellement, me paraît être les
difficultés qu’a la pensée à se représenter l’adversité dans la figure de la
négation de la négation. C’est-à-dire dans la figure en quelque sorte classique
de la dialecticité du rapport de l’action et de la pensée à ce qui est
constitué comme son adversité immanente.
Voilà,
ça c’était le premier point. Disons que cette construction dialectique de
l’adversité a fixé le régime de la pensée, pendant une longue période, comme ²révolutionnaire²
et/ou ²d’avant-garde². La figure révolutionnaire et/ou d’avant-garde est une figure qui
privilégie en effet la négation (la table rase, le recommencement, etc.) mais
dans l’élément de la révolte ou de la rébellion, c’est-à-dire dans l’élément,
en fait, de la négation de la négation. Alors ça c’était le premier point,
l’hypothèse de départ.
Je
vais réexaminer ce point qui est décisif quand même. Je tiens que les
difficultés manifestes de la pensée contemporaine dans ses cheminements
politiques, artistiques, etc., sont absolument liées à cette crise de la figure
dialectique de l’adversaire. C’en est le noyau, véritablement. Nous ne savons
pas, ou nous savons mal, ce que c’est que l’adversaire. De là évidemment, une
pente secrète (j’y reviendrai) au nihilisme. Car en réalité, le nihilisme,
c’est quelque chose comme la rébellion dans la figure d’une obscurité de
l’adversaire.
Passons
maintenant au deuxième point. L’année dernière, précisément, j’avais proposé de
dire que dans le champ de ruines de cette dialectique-là, dans la difficulté de
la figure classique de la constitution de l’adversaire, avaient surgi deux
nouvelles figures, apparemment tout à fait contraires, mais qui à mon sens sont
des figures de l’acceptation camouflée, de l’acceptation comme acceptation
masquée, que j’avais appelées : la figure de la gauche et la figure du
rebelle ¾ ce couplage par provocation n’est-ce pas. Ou si vous voulez la gauche et
son extrême avant-garde, comme deux figures qui en réalité se nourrissent de la
déréliction de la figure dialectique mais terminent en figure de l’acceptation
ce qui est entamé comme figure de l’adversaire.
Alors
je ne vais pas y revenir : on a fait des analyses, des élucidations
détaillées de ces points, mais je rappelle que la gauche c’est la figure
oppositionnelle, c’est la figure de la constitution de l’adversaire comme ce à
quoi on s’oppose. L’opposition étant distinguée de la négation, ou de la
destruction ; on s’y oppose mais on n’a pas comme but de le détruire. Et
l’essence de l’opposition est en réalité la substitution ¾ c’est comme ça que
ça marche. C’est-à-dire que l’essence de ce qui se présente comme opposition
est en réalité la figure substitutive ; c’est-à-dire il importe de
remplacer, de se tenir à la place de ce à quoi on s’oppose. Et donc il faut le
pouvoir, il faut cette place. La substitution au placement est l’essence de
cette figure, de sorte qu’elle est une figure d’acceptation de la figure du
pouvoir ; elle est une figure dont l’essence est d’accepter que,
précisément, ce dont il s’agit est substitutif en dernier ressort.
Et
quant à la figure du rebelle, j’avais dit que c’était le revers nihiliste de
cela. Ce n’est pas du tout une figure d’opposition. C’est une figure qui ne dit
pas « il faut le pouvoir » mais qui dit « il y a le pouvoir
sinon rien ». C’est une figure qui est la négation, sans à proprement
parler la négation de la négation, c’est-à-dire la négation sans l’affirmation,
c’est-à-dire qui se tient dans l’absentement de ce à quoi on s’oppose, et qui
fait que l’adversaire en réalité est inaccessible en fait. Ce qui souvent
revient à dire d’ailleurs qu’il est un ²système². Le ²système², la ²domination². Il devient une abstraction dominante. Si on regardait les textes détaillés
concernant ce courant, on verrait que l’adversaire est pris ou subsumé sous une
figure qui est une figure systémique. Un système, c’est ce à quoi vous ne
pouvez opposer que le rien. C’est la définition du système. Donc dès qu’on vous
dit « ce à quoi je m’oppose c’est le système », en réalité vous avez
un élément sourdement nihiliste parce que vous êtes dans l’élément du rien
subjectivable qui est hors la systématicité du système. On avait développé ces
points-là, je ne les reprends pas. Donc ça c’était le deuxième point.
Je
récapitule le mouvement parce qu’on va s’insérer dedans quand même, d’une autre
manière. Premier point : il faut être au-delà de la figure de la négation
de la négation, du point de vue de la subjectivité constitutive de ce qu’est
l’adversaire. Deuxièmement les figures de la gauche et du rebelle, opposées
mais finalement constitutives du moment présent, ne sont pas sur ce point une
véritable solution. Il faut donc à la fois en penser abstraitement la
dimension, et voir ce qu’on propose au-delà. Alors, une manière de dire les
choses, c’est que la gauche (c’est une catégorie n’est-ce pas, c’est pas
simplement la grande collection des candidats socialistes aux élections
présidentielles ; c’est un peu plus ramifié et conceptuel que ça), la gauche
c’est effectivement définissable comme étant la figure qui a une conception
substitutive de l’opposition, substitutive à l’adversaire. Et la gauche on peut
dire qu’elle s’oriente selon la loi. J’avais proposé de dire ça. C’est-à-dire
si on parle d’orientation dans la pensée, d’orientation dans l’existence, on
dira : la figure d’orientation que la gauche propose toujours, c’est une
figure selon la loi ; il faut le pouvoir, il faut se substituer au pouvoir
pour en fin de compte changer la loi. Et donc s’orienter dans la pensée, c’est
toujours s’orienter selon le régime de la loi tel que, en effet, une
substitution rend possible sa modification. Et j’avais dit que naturellement,
le rebelle propose de s’orienter selon le désir.
Donc,
à un niveau d’abstraction plus élevé, on peut dire que le couplage essentiel
des deux figures, c’est en réalité le couplage de la loi et du désir. Et que
nous savons en réalité qu’il y a une profonde identité entre les deux. Il y a
une réciprocité articulée dont Lacan a fait la théorie ; d’autres aussi.
Et qui fait que je proposais de dire que ces deux figures sont des figures de
désorientation en réalité ; parce que l’orientation selon la loi ou
l’orientation selon le désir ne proposent pas véritablement la constitution
nouvelle d’une figure de l’adversaire qui pourrait nous réorienter. Et donc
elles sont des figures complémentaires de la désorientation. Et d’ailleurs, de
fait, leur effet réel est désorientant. Je ne dis pas que la désorientation
soit nécessairement mauvaise ¾ c’est une autre question, plus compliquée que ça. Mais en tout cas on ne
peut pas dire que ces figures sont des propositions d’orientation dans la
pensée ou dans l’existence. Ce sont plutôt des propositions qui, en tant que
figures masquées de l’acceptation, sont des propositions de désorientation.
Et
alors j’en viens à ce qui était le dernier point de l’année dernière :
s’il faut une proposition d’orientation, alors il faut s’orienter selon le
générique, c’est-à-dire disons s’orienter selon les vérités, selon quelque
chose qui pourrait être nommé ²vérité² dans un sens renouvelé ; c’est-à-dire quelque chose qui ne se laisse
réduire ni à la loi ni au désir, ni à leur articulation. Voilà, c’est ça le
défi. Il n’y a aujourd’hui de proposition possible de réorientation dans la
pensée et dans l’existence que si on tient que le jeu général de l’orientation
n’est pas réductible à l’articulation de la loi et du désir. De cela nous avons
fait le tour. Et, à mon sens, nous avons fait le tour, historiquement, depuis
Mai 68 et ses conséquences. Mai 68 et ses conséquences ont été précisément
l’expérimentation historique des virtualités contenues dans le tandem loi-désir
quant aux figures possibles de constitution nouvelle de l’adversaire. Alors
c’est une expérimentation historique prolongée, ce n’est pas un moment… Je
pense que cette expérimentation est maintenant saturée. Et ce dont il s’agit
dans cette paire loi-désir s’est donné au fond dans le tandem hostile et
paradoxal des maoïstes lacaniens d’un côté et des anarchistes deleuziens de
l’autre. Eh bien ce qui s’est donné dans ce tandem-là, est dans une disposition
de saturation.
Donc,
et là j’en viens à mon point de départ de toute l’année, la possibilité de
quelque chose qui ne se laisse réduire ni à la loi ni au désir, nous allons la
prendre un peu autrement en disant : ce qui ne se laisse réduire ni au
corps ni au discours. Ou si vous voulez quelque chose qui n’est réductible ni
au corps ni au langage.
Cette
année va être consacrée à la construction conceptuelle d’un appareillage de
pensée rendant possible que ce qui nous oriente soit irréductible à la
combinaison des corps et des langages, soit d’un autre ordre que cette
combinaison. Tout en assumant naturellement son existence essentielle, basique,
fondamentale, infrastructurelle si vous voulez.
Donc
l’énoncé de départ pourrait être : ²il n’est pas vrai qu’il n’y a que des corps et des langages² ¾ si
on lui donne sa forme négative. Et je soutiendrai que ²il n’y a que des
corps et des langages² est un énoncé commun à la figure de la gauche et à la figure du rebelle.
Il est l’énoncé qui permet de dire que ce qui nous oriente est soit de l’ordre
de la loi, soit de l’ordre du désir… Et donc, ou bien on est dans la figure
substitutive du pouvoir et de la loi, ou bien on est dans le nihilisme du
désir. C’est l’un ou c’est l’autre mais ce qui soutient cela est un énoncé
partageable finalement, qui est ²il n’y a que des corps et des langages, à la fin des fins².
Et
qu’est-ce que c’est que cet énoncé ²il n’y a que des corps et des langages² ? Eh bien
c’est un énoncé que je propose d’appeler l’axiome du matérialisme démocratique.
Il nous est arrivé d’évoquer cela ici déjà. Donc l’axiome de ce que je propose
d’appeler le matérialisme démocratique, et que je propose de désigner comme
l’idéologie dominante de notre temps, de notre site, de notre lieu, c’est
l’énoncé ²il n’y a que des corps et des langages². Et alors vous
voyez, je pense que si nous voulons réellement trouver un principe
d’orientation qui soit au-delà de la négation de la négation, c’est-à-dire
au-delà de la dialecticité usuelle, à savoir « je me lève contre
l’oppression », « je me lève contre l’exploitation », « je
me lève contre les méchants » qui pullulent ¾ c’est bien vrai
[sourires]… Donc si je veux dire autre chose que cela, qui est déjà très bien,
mais qui encore une fois est manifestement saturé, insuffisant, alors il faut
déplacer l’énoncé constitutif du matérialisme démocratique. On ne peut pas être
dedans.
Ce
que je soutiens, c’est que les figures actuelles de l’orientation potentielle
sont désorientantes parce qu’elles sont encore en réalité à l’intérieur de
l’énoncé primordial du matérialisme démocratique : ²il n’y a que des
corps et des langages².
Alors
vous voyez bien, si on dit ²il n’y a que des corps et des langages², on va définir la
liberté comme la liberté des corps par rapport aux langages, on va dire :
les bons langages sont des langages qui ne contraignent pas les corps de telle
ou telle manière. Ou bien on va dire, inversement, le bon langage est celui qui
permet à l’expressivité des corps d’être maximalement créatrice, etc. Tant que
vous restez là-dedans, eh bien vous êtes, à mon sens, essentiellement dans la
désorientation. Vous êtes dans la désorientation, c’est-à-dire vous n’êtes ni
dans le dispositif dialectique de la négation de la négation (lequel est saturé
et obsolète), ni non plus dans une conception novatrice de l’affirmation. Et
donc, le problème de cette année, c’est de nous doter d’un appareillage minimal
contre l’énoncé considéré comme dominant, comme structurant la situation, qui
est l’énoncé ²il n’y a que des corps et des langages². Et aussi contre
l’ensemble de ses conséquences concernant la définition de la liberté, la
définition de l’égalité, la définition de ce que sont les droits de l’homme,
etc., etc. ¾ parce que tout ça ce n’est que des conséquences en réalité de l’énoncé
selon lequel ²il n’y a que des corps et des langages². Énoncé donc que
j’appelle énoncé constitutif du matérialisme démocratique dans lequel nous
vivons aujourd’hui et qui se déploie en tant qu’élément dominant.
Alors
la construction générale des conséquences de cet énoncé, de sa signification
véritable, de l’entame qu’on peut faire contre lui, est en réalité (c’est pour
ça que ce séminaire en est l’accompagnement)… est en réalité l’enjeu du livre
que je viens de finir, qui s’appelle Logiques des mondes. Qui est un énorme livre. Et donc on peut définir ce séminaire comme un
accompagnement, une introduction, une présentation concentrée de Logiques
des mondes en tant que Logiques des mondes paraîtra quelque part dans le printemps. On ne va pas l’attendre.
Et
on peut dire que l’enjeu c’est à la fois d’avoir une complète intelligibilité
de ce que c’est que le matérialisme démocratique, et des conditions sous
lesquelles on peut lui opposer vraiment quelque chose. Donc l’enjeu c’est la
construction d’une scène idéologique nouvelle. C’est après tout toujours une
des fonctions majeures de la philosophie, de contribuer à l’édification d’une
scène idéologique nouvelle, dans laquelle on identifierait le matérialisme
démocratique comme la figure idéologique dominante dans laquelle on chercherait
les points, les lieux où faire une sorte d’incise, d’exception à cette
domination.
Alors,
effectivement, dans le propos qui est le mien, je tente une construction qui
opposerait au matérialisme démocratique quelque chose que j’appelle une
dialectique matérialiste et qui, là aussi, peut avoir un énoncé constituant
très très simple. L’énoncé constituant du matérialisme démocratique c’est ²il
n’y a que des corps et des langages², et je propose comme énoncé constituant de la dialectique matérialiste
l’énoncé suivant : ²il n’y a que des corps et des langages, sinon qu’il y a des vérités² ¾ la
forme est très importante car ce n’est pas « non c’est pas vrai qu’il n’y
a que des corps et des langages ». En réalité il y a trois choses et pas
deux. Vous savez, la dialectique, ça consiste toujours à dire qu’il y a trois
choses et pas deux, d’une manière ou d’une autre. Mais la forme est très importante,
c’est-à-dire qu’il s’agit de faire apparaître le troisième terme, non pas dans
le même registre du ²il y a² que les deux autres, mais en figure d’exception.
Donc
on va dire ²il n’y a que des corps et des langages², ça c’est la part
matérialiste de l’énoncé. On est d’accord au fond pour dire qu’il n’y a que des
corps et des langages, d’un certain point de vue. C’est-à-dire que dans un
certain registre du ²il y a², c’est bien vrai que ²il n’y a que des corps et des langages² ; ²sinon
qu’il y a autre chose², voilà ; ²sinon qu’il y a des vérités² ; ²sinon que² veut dire que dans certaines conditions, pas toujours, peut-être rarement,
etc., ²sinon que² quelque chose est, qui n’est pas dans le même registre du ²il
y a²,
qui n’est pas exactement dans la figure du ²il n’y a que des
corps et des langages², mais qui n’en est pas moins pouvoir être dit ²étant²,
c’est-à-dire ²il y a, sinon qu’il y a des vérités².
Alors,
vous voyez, cette construction va donc comporter (et c’est ça qui fait son
extrême difficulté plus un autre problème que je vais vous dire) :
premièrement une logique du ²il y a². C’est la part matérialiste. Que veut dire ²il y a²
dès lors qu’on est d’accord pour dire essentiellement ²il y a des corps et
des langages² ? Mais quand on dit ²il y a des corps et des langages², en quel sens prend-on ²il y a² ? Ça c’est un premier travail. Et puis le second travail, c’est une
logique de l’exception, c’est-à-dire ²sinon qu’il y a des vérités² ; ²il n’y a que des corps et des langages sinon que il y a des vérités² ¾ c’est en exception, en ²sinon que² du ²il y a² ; quelque chose qui est aussi de l’ordre du ²il y a²
apparaît, mais dans un autre mode de ce ²il y a².
Alors,
voilà… En tout cas nous savons que l’appareillage dont nous avons besoin
contient une logique du ²il y a² et une logique de l’exception. Et naturellement la corrélation entre les
deux. Empiriquement, je voudrais vous faire remarquer (parce que là on est très
abstrait ; on ne le sera pas toujours rassurez-vous, c’est introductif ça)
que la pente majeure du matérialisme démocratique c’est de considérer qu’il n’y
a pas d’exception. On pourrait presque le définir ainsi, c’est-à-dire ²il
y a des corps et des langages² ou “il n’y a pas d’exception”. “Il n’y a pas d’exception” se dit très
souvent dans l’espace idéologico-politique par le fait que ²il
n’y a qu’une seule chose² : il n’y a qu’une politique par exemple, il n’y a qu’une économie, il
n’y a qu’un marché mondial. Il y a une présomption de l’un. Et cette
présomption de l’un, cette théorie selon laquelle il n’y a en réalité qu’un
seul ordre, c’est une théorie dont le contenu propre est d’arguer, d’argumenter
contre toute exception. Non sans raison, parce qu’après tout on peut soutenir
que l’exception c’est jamais vraiment démocratique, effectivement. Ici on
soutiendra finalement le contraire mais c’est un problème qu’il faut examiner
dans sa tension propre. L’exception, c’est ce qui n’est pas comme le reste, et
le démocratique c’est ce qui fait que tout est comme le reste.
Donc
on pourrait en effet soutenir que le matérialisme démocratique est conséquent
en affirmant l’énoncé de la pluralité, ²il n’y a que des corps et des langages², et en accordant à
cette pluralité un statut d’unicité, c’est-à-dire : elle est sans
exception précisément, elle est le ²il y a². Or vous savez que c’est un argument fondamental de la pensée démocratique
contemporaine que de toujours dire ²il y a², c’est-à-dire ²c’est comme ça². C’est un argument majeur et constant, ²c’est comme ça².
Le reste, comme vous savez, c’est des utopies, c’est des rêveries, c’est
archaïque. Donc il y a un ²c’est comme ça² majeur. Et ce ²c’est comme ça² majeur se ramifie en pluralité immanente dans la figure ²il
n’y a que des corps et des langages². Et en réalité, il est aussi une instance de l’un. Et pourquoi il est une
instance de l’un ? Parce qu’il est une théorie de la non-exception. Alors
c’est une figure très complexe n’est-ce pas, parce que la non-exception est
camouflée par la multiplicité. C’est ça l’opération. Elle est très fine, très
subtile. D’ailleurs, on en est tous plus ou moins corrodé ou atteint. La
non-exception est camouflée par la multiplicité parce que vous commencez par
reconnaître que ²il y a des corps et des langages². Alors donc vous ouvrez à une multiplicité sans bords ; vous reconnaissez
tout, la diversité des cultures, la diversité des individus, la diversité des
postures sexuelles, etc., etc. ; vous reconnaissez tout, sauf justement ce
qui prétendrait être en exception de cette modalité du ²il y a²,
sauf ce qui prétendrait qu’il n’y a pas que cela.
Et
donc la non-exception se présente dans la figure de la multiplicité pure et de
son acceptation normative. Et c’est pour ça que c’est un matérialisme
démocratique, parce que c’est un matérialisme au sens où il affirme que ²il
n’y a que des corps et des langages², ce qui paraît être une thèse matérialiste élémentaire, qui d’ailleurs est
vraie. Mais, reconnaissant cette multiplicité comme figure du ²il
y a²,
il l’accompagne quasiment par en dessous d’une forclusion de toute exception. Et
la forclusion de toute exception signifie en réalité que la pluralité est le
mode propre d’existence de l’un. Et je soutiens que c’est le cœur du matérialisme
démocratique, que l’un (à savoir la non-exception, la figure unique du ²il
y a²)
est précisément donné dans la figure de la multiplicité apparemment normative.
C’est la reconnaissance de l’autre si vous voulez. Voilà, “il y a des corps et
des langages”, ça veut aussi dire “tout autre je le reconnais”, “ce n’est
jamais qu’une combinaison de corps et de langage particulière” ; “donc je
dois la reconnaître puisque c’est ce qu’il y a”. Mais ce que je ne peux pas
reconnaître, c’est ce qui est en exception de ce qu’il y a naturellement ;
c’est-à-dire ce qui, d’une certaine manière, dirait, et c’est l’autre axiome
que je propose de soutenir : ²il n’y a que des corps et des langages sinon que², c’est-à-dire
ouvrant simplement la brèche formelle de l’exception possible dans le ²il
y a².
Et c’est cette brèche de l’exception dans le ²il y a²
que j’appelle ²vérité². Bien.
Vous
voyez que ça c’était pour faire le tour du premier type de difficulté.
Reconnaître la logique générale du ²il y a², que nous avons en partage, puisque après tout nous dirons aussi qu’il n’y
a que des corps et des langages. Nous n’allons pas dire ²il y a des âmes ou
il y a des esprits, il y a des feu follets, il y a une spiritualité²…
Non, on ne va rien dire de ce genre. Donc on va bien dire ²il y a des corps et
des langages² à la fin des fins. Sinon qu’on va dire ²sinon que².
On va dire ²il y a des corps et des langages sinon que…² Et cette brèche du ²sinon
que²,
dont on prendra ensuite des exemples etc., on la nommera ²vérités².
Ça
c’est le premier registre. Il faut se convaincre que l’on partage la logique du
²il
y a² et
qu’on y suture, on y greffe une logique de l’exception, de façon immanente.
C’est-à-dire oui il n’y a que cela, sinon que c’est ouvert à un ²il
y a²
d’une autre espèce, immanent au premier, fondé sur le premier, mais qui
introduit une logique de l’exception. Donc c’est un travail qui est en partie
un travail de logique ¾ je reviendrai sur ce point. C’est un travail de logique. D’ailleurs,
peut-on prescrire un univers logique qui se prête simultanément à la logique du
²il
y a² et
à la logique de l’exception, en tant qu’exception immanente ? Bien.
Ça
c’est une première difficulté, ça ne va pas de soi, ça demande un appareillage
compliqué et j’indique que c’est parce que cet appareillage est à construire
pour une part, que nous avons tant de difficultés ¾ quand je dis ²nous²,
c’est un ²nous² hypothétique, virtuel… Nous avons tant de difficultés à être dans l’espace
de la possibilité de l’exception. Pas simplement de l’exception mais de sa
possibilité. Parce que d’une certaine manière, la puissance du matérialisme
démocratique, c’est que nous avons à reconnaître son ²il y a².
Qui va réellement objecter à ²il y a les corps et les langages, et c’est avec ça que se constituent les
mondes, les univers, les cultures, toutes les représentations etc.² ?
Personne, c’est certain. Nous avons aussi à partager ça. Mais il faut un
appareillage nouveau et compliqué pour assumer, tout en reconnaissant cela, la
figure potentielle ou virtuelle de l’exception, c’est-à-dire en réalité le ²sinon
que²
des vérités, ou tout ce que vous voulez, on peut lui donner un autre nom.
La
deuxième difficulté, c’est que le matérialisme démocratique, si réellement il
est une idéologie, ce que je crois, est de l’ordre du semblant, d’une manière
ou d’une autre ; de l’ordre de la représentation imaginaire. Mais la
figure singulière du matérialisme démocratique c’est que c’est un semblant tel
qu’il est argumenté du réel. Ce n’était pas du tout comme ça du temps où
l’idéologie dominante c’était la religion chrétienne par exemple : c’était
une grande figure du semblant argumentée de l’extériorité au monde, à la
transcendance, au destinal, à tout ce que vous voulez. Le matérialisme
démocratique c’est une idéologie dont la figure particulière se présente comme
la pure et simple description de la réalité. Et elle prétend précisément que
c’est tout ce qui n’est pas elle qui argumente d’une extériorité au réel, ou
d’une transcendance quelconque. Et donc, la construction de quelque chose qui
échapperait au matérialisme démocratique est très compliquée, parce qu’on a à
faire à une figure qui est toujours en réalité apte à prononcer que ce qu’elle
dit, c’est simplement ce qu’il y a. Et en un certain sens, c’est vrai,
puisqu’en effet il n’y a que des corps et des langages. Donc vous voyez en quel
sens elle est toujours en état d’arguer que son propos, en dernier ressort un
propos de caractère idéologique, est tout simplement la matérialité même de ce
qu’il y a, l’effectivité de ce qu’il y a. Ça c’est une situation, à mon sens,
relativement inédite : que l’idéologie dominante se présente elle-même
comme entièrement argumentée de thèses sur le réel, argumentant de la
description de ce qu’il y a. Et mettant au défi, par conséquent, tout
adversaire potentiel, d’assumer le ²il y a². Parce que l’argumentaire du matérialisme démocratique consiste à toujours
dire : « si vous convenez avec nous de ce ²il y a²,
eh bien vous devez en tirer les mêmes conséquences que nous ; et entre
autres, vous devez assumer qu’il n’y a pas d’exception ». Ceci nous est
dit tous les jours : « c’est comme ça ».
Et
donc, l’idéologie elle-même, se présente comme le contraire de l’imaginaire.
Elle se présente comme la pure et simple description du ²il y a²
comme tel. Cependant, en définitive, ceci n’est qu’une apparence si nous
soutenons la thèse que ce n’est qu’une idéologie. Ceci n’est qu’une apparence,
ce qui veut dire que, en éliminant l’exception, le ²il y a² du
matérialisme démocratique bascule dans l’imaginaire. Mais ça c’est une
opération assez compliquée, c’est-à-dire le moment où le matérialisme
démocratique s’avère une idéologie, c’est précisément lorsqu’il se totalise
lui-même, c’est-à-dire lorsqu’il forclôt toute exception. Et cette forclusion
de l’exception, c’est-à-dire la clause de l’un, chez lui, est son élément idéologique
propre. Mais cet élément idéologique lui-même est constamment argumenté du
réel, argumenté du ²il y a² vous voyez. Donc c’est une opération tout à fait singulière, et qui doit
être démontée et formalisée comme telle. Et qui revient à quoi ? Eh bien
qui revient à penser, dans le cas du matérialisme démocratique, le réel du
semblant ; c’est-à-dire le réel du semblant de réel. Qu’est-ce que c’est
que le réel du semblant de réel ? ¾ c’est ça la question que nous devons adresser au matérialisme
démocratique. Comment se fait-il qu’il est en état de se présenter comme la
description de ce qu’il y a ? Alors qu’à l’évidence nous expérimentons par
ailleurs qu’il organise imaginairement les consciences, que en fait il n’a
qu’un seul but, c’est de disposer des sujets devant le marché. De constituer
des sujets comme des sujets de la marchandise ; il n’a pas d’autre but.
Nous le savons ça, nous l’expérimentons.
La
question est vraiment de savoir : où est-ce que nous nous faisons vraiment
avoir ? Et ben c’est pas clair ça. Aujourd’hui ça n’est pas clair ! La
conscience qu’on se fait avoir est certaine. Mais sauf à régresser dans les
figures de la négation de la négation (et de la figure de la dialecticité),
notre réponse à la question de savoir où exactement fonctionne l’imposture
n’est pas claire. Et c’est un des grands propos du séminaire de cette année de
tenter d’aller un peu loin dans l’élucidation de ce point ; c’est-à-dire
quel est le point d’imposture du matérialisme démocratique, alors même que ce
qui semble être son être propre est de décrire correctement le ²il
y a²,
comme un assortiment, un jeu réciproque des corps et des langages. Et on sera
bien obligé de dire à un moment donné que l’imposture c’est de forclore
l’exception. Mais c’est une imposture très spéciale, très nouvelle, la forclusion
de l’exception. Et c’est ce moment-là cependant qui le fait basculer dans la
figure imaginaire de la totalisation, dans la figure imaginaire de l’un ou du
tout.
Voilà. Mais pour en venir là, pour traiter ce point de
façon déployée, nous serons obligés de penser ce que c’est que la figure propre
du semblant dans ce cas-là, c’est-à-dire : qu’est-ce que c’est que le
semblant en tant qu’il est argumenté du réel ? Et donc nous devrons aller
jusqu’au point où nous rendrons raison du ²il y a² de
l’apparaître lui-même, c’est-à-dire : en quel sens le ²il
n’y a que des corps et des langages² peut-il être un ²il y a² du semblant ¾ bien que ça se présente comme une thèse que nous allons partager.
C’est-à-dire nous allons montrer, ou tenter de montrer comment une thèse sur le
²il
y a²,
sur ce qu’il y a, qui paraît non seulement raisonnablement matérialiste, mais
qui paraît aussi raisonnablement démocratique, à savoir la thèse :
« écoutez : il n’y a que des corps et des langages, tirons-en les
conséquences en ce qui concerne les libertés, l’égalité, etc. » ¾ ça
paraît absolument recevable… Comment se fait-il que cette thèse soit
susceptible de fonctionner comme une imposture radicale ? Alors que, en un
certain sens, nous sommes contraints de la partager. Vous voyez : comment
se fait-il que nous soyons contraints de partager une thèse qui doit
fonctionner cependant dans l’élément d’une imposture radicale ? Et comment
cette imposture radicale est-elle possible s’agissant d’une thèse de ce genre ?
Et
donc nous allons avoir à examiner quel est le ²il y a²
propre de l’apparaître, le ²il y a² propre du semblant, sans cependant basculer dans une pure théorie du
semblant justement. Alors j’appelle théorie du semblant quelque chose qui
dirait : « oui ben tout ça finalement ça relève du virtuel,
etc. » ; enfin une thèse à la Baudrillard, ou quelque chose comme ça.
Alors on va cheminer sur une crête qui n’est pas celle-là. On va à la fois
assumer, d’un côté la matérialité de la thèse, c’est-à-dire ²il
n’y a que des corps et des langages² ; ça ne relève pas, ça, en soi-même, de l’image, du virtuel, du
fantôme, etc. ; c’est une thèse matérialiste raisonnable mais d’un autre
côté il y a un fonctionnement de cette thèse qui la fait basculer dans la
logique du semblant ou dans la logique de l’apparaître. Voilà. Ça c’est, à mon
avis, un problème tout à fait capital aujourd’hui.
Par
conséquent, il faut que nous ayons la possibilité d’une théorie du semblant, ou
de l’apparaître, qui soit une théorie du réel de l’apparaître et non pas une
théorie du pur apparaître de l’apparaître. Vous comprenez : nous devons
avoir une théorie du semblant qui n’est pas une théorie du semblant comme
substitut du réel. Mais une théorie qui assume qu’il y a un réel du semblant
lui-même. Et quel est ce réel ? Quelle est cette dimension qui seule nous
permet de comprendre qu’une thèse matérialiste évidente puisse fonctionner en
définitive comme une imposture idéologique ? Et alors ça c’est ce que
j’appellerai la nécessité d’une nouvelle grande logique. Il nous faut une
nouvelle grande logique, voilà. Enfin, ce n’est pas étonnant puisque le schéma
dialectique c’était la grande logique de Hegel. Donc il nous faut une nouvelle
grande logique qui succède, relaie, relève la logique dialectique comme telle.
Alors ça c’est un aspect de la chose.
Et
d’autre part, comme nous ne voulons pas tomber dans une figure idéaliste ou une
figure du semblant pur, il nous faut aussi que l’exception relève du régime du ²il
y a².
Parce que si nous disons ²il n’y a que des corps et des langages sinon qu’il y a des vérités²,
nous avons à rendre raison du ²il y a² des vérités, donc du ²il y a² de l’exception, et comme ²il n’y a que des corps et des langages², il faut qu’il y
ait un CORPS des vérités. Et que cependant les vérités ne soient pas
réductibles aux corps et aux langages. Donc ça c’est la 2e partie du
programme : ce sera de tenter de penser ce que peut bien être le corps de
l’exception. Le langage, cela va de soi. Mais le point difficile c’est :
qu’est-ce que c’est que le corps de l’exception ? C’est-à-dire en quel
sens les vérités ont un corps ? Et vous voyez que nous y sommes obligés.
C’est ce qu’on appelle une figure de torsion. Nous assumons qu’ ²il
n’y a que des corps et des langages² ; nous disons ²sinon qu’il y a des vérités² ; et vous avez un retour du fait que vous avez assumer qu’ ²il
n’y a que des corps et des langages² sur le fait qu’il y a des vérités. Donc vous avez la question légitime
de : en quel sens y a-t-il une corporéité, c’est-à-dire une matérialité
des vérités elles-mêmes ? C’est en ce sens qu’on parlera d’une exception
immanente. Puisque c’est en exception de ²il n’y a que des corps et des langages², mais c’est une
exception immanente, c’est-à-dire : vous devez quand même montrer que ça
n’est pas un autre monde ¾ vous comprenez ?… Que ça n’est pas une autre scène. Que ça n’est pas
excepté du ²il y a² lui-même. C’est en exception du ²il n’y a que des corps et des langages² mais cela est quand
même dans le régime général du ²il y a². C’est pour ça que je parlais de dialectique ; ²dialectique² ça
veut dire qu’il y a une exception, mais matérialiste. Donc ça veut dire que
cette exception elle-même doit pouvoir se présenter sous la forme du régime
général du ²il y a². Et ça va culminer dans la question suivante : qu’est-ce que c’est
que le corps d’une vérité ?
Si
bien que nous avons, pour cette année, et dans Logiques des mondes aussi d’ailleurs, deux grands problèmes ; on peut les résumer comme
ça :
¾ premièrement : quelles sont les lignes générales d’une nouvelle
grande logique ? C’est-à-dire d’une nouvelle théorie du lien entre l’être
et l’apparaître, quelque chose comme ça ; ou entre le réel et le semblant.
Donc une nouvelle grande logique et
¾ deuxièmement : une théorie du corps des vérités.
Voilà. Alors, à
titre de renseignement, je vous indique comment ces problèmes sont ordonnés
dans Logiques des mondes lui-même ¾ Logiques
des mondes que vous aurez dans quelques mois. Voilà comment ça
s’organise, et vous allez voir tout de suite le lien avec ce que je viens de
vous dire.
Vous avez une
préface, une longue préface qui présente la possibilité d’une nouvelle scène
idéologique. Alors en gros vous avez une préface qui dramatise un petit peu
l’opposition du matérialisme démocratique et de la dialectique matérialiste,
c’est-à-dire qu’elle n’est pas au fond philosophique mais pré-philosophique au
sens où elle indique les virtualités idéologiques de l’ensemble : on va
essayer de faire en sorte que le matérialisme démocratique dominant soit en
quelque manière contraposé ou ébréché par une autre orientation de pensée qu’on
appellera la dialectique matérialiste. La préface argumente dans cette
direction.
Ensuite il y a
cinq Livres. Le Livre I est directement une théorie du sujet ;
c’est-à-dire qu’on entre dans le vif de la possibilité d’une subjectivation de
l’exception. On peut dire que le Livre I présente la thèse selon laquelle toute
exception est subjective ; ou si vous voulez que toute exception est
corrélée à un effet de sujet. Le ²sinon que² dans ²il n’y a que des corps et des langages² relève d’une
logique subjective. Et donc on propose, dans ce Livre I, mais c’est de
l’anticipation en même temps, les linéaments d’une théorie du sujet apte à
porter l’exception. Je signale que cette théorie du sujet, les anciens fidèles
d’ici en ont eu des bribes parce que je l’ai traitée dans les séminaires de 96,
97 et 98, que j’avais appelée Théorie axiomatique du sujet. Et en effet, c’est un peu cette théorie axiomatique du sujet qui est
présentée là, dans le Livre I, pour entrer tout de suite dans les raisons pour
lesquelles l’exception, en tant qu’elle est dans la figure d’un sujet, vient en
effet en exception de l’objectivité, du principe général du ²il
y a².
Ensuite il y a la
grande logique. Alors ça, la grande logique, c’est du travail. Il y a trois
Livres. Les Livres II, III et IV constituent le corps de la grande logique. Le
Livre II s’appelle Le transcendantal ;
le Livre III s’appelle L’objet, et le Livre IV La
relation. Donc le transcendantal c’est les conditions générales
de ce que c’est que l’apparition d’un monde ; j’appelle ²monde²
toute scène de l’apparaître, toute scène du ²il y a²,
ou de l’être-là si vous voulez. Et le transcendantal c’est simplement l’examen
des conditions de possibilité d’un monde ; pour Kant le transcendantal
désignait les conditions de possibilité de l’expérience, mais là c’est les
conditions de possibilité d’un monde. Ça c’est le Livre II.
Le Livre III
c’est L’objet, c’est-à-dire : qu’est-ce que
c’est, dans le monde, qu’un objet ? Comment on peut singulariser un objet
dans un monde. Et puis le Livre IV, La relation : eh bien qu’est-ce que c’est qu’une relation entre objets ?
Tout ça est d’un
classicisme parfait : conditions générales de l’apparition d’un
monde ; objets du monde ; relations entre objets du monde.
Le Livre V
s’appelle Les 4 formes du changement.
C’est le livre qui va contenir la théorie de ce qui peut se passer dans un
monde qui ait statut d’exception aux lois du monde. Donc on va distinguer 4
formes du changement qui vont depuis le changement comme simple dépliement du
monde, le changement comme loi du monde, j’appellerai ça ²les modifications²,
en un sens un peu spinoziste (²les modes², ²les modifications² ; les modifications d’un monde, qui font partie de ce monde, qui sont
sous la loi de ce monde). Et puis à l’autre extrémité il y aura l’événement.
Alors l’événement nommera les conditions de possibilité de l’exception :
il faut qu’il arrive quelque chose d’une nature tout à fait particulière pour
que l’exception du ²il y a² puisse elle-même se présenter dans un monde, vous voyez.
Et puis, entre
les deux, il y a deux formes intermédiaires du changement, mais je ne vais pas
vous donner toute la machinerie, ce n’est pas… Mais vous voyez, l’objectif
fondamental c’est de distinguer, dans les changements, les changements qui sont
intra-mondains au sens strict (c’est-à-dire qui sont des changements conformes
aux lois du monde) de ceux qui affectent le transcendantal, c’est-à-dire qui
affectent la condition de possibilité du monde, et non pas simplement le monde
dans son développement. Ça c’est une distinction majeure et qui doit être
repensée à nouveaux frais, parce que, en fin de compte, c’était ce type de
distinction qui sous-tendait, dans la logique dialectique, le thème de la
révolution par exemple. Prenez par exemple l’opposition traditionnelle entre
réforme et révolution. Remarquez qu’aujourd’hui tout le monde parle de réforme
et plus personne de révolution ; le couple est un peu défait ;
réforme est devenu un mot de la droite pure ¾ et quand on voit
que c’est Sarkozy qui se fait le champion de la rupture, alors là ça devient
sensationnel… Mais en réalité le débat entre réforme et révolution était un
débat qui portait sur quoi ? Eh bien la réforme c’était une transformation
homogène au monde ; on transformait quelque chose, mais on le transformait
de l’intérieur de la loi du monde. Tandis que la révolution c’était une
transformation du monde, de sa condition de possibilité même, de sa nature
intime.
Donc l’opposition
politique entre réforme et révolution a toujours été l’opposition entre deux
types de changement. Alors on va la retrouver là, mais dans un argumentaire non
dialectique, un argumentaire finalement soustrait à la logique de la
contradiction. Et on va identifier d’un côté les modifications, de l’autre les
événements. Au sens où la modification est interne à la figure d’apparaître du
monde, tandis que l’événement affecte la condition de possibilité du monde
lui-même, c’est-à-dire son organisation transcendantale. Ça c’est sur les
quatre formes du changement. C’est le Livre V.
Le Livre VI ça va
être La théorie des points. C’est un livre à la fois
décisif et peut-être le plus difficile parce que c’est un livre sur le rapport
entre la multiplicité infinie et le 2. Voilà. Ce que j’appelle ²point²,
c’est le moment où l’ensemble des nuances de l’apparaître d’un monde se
concentre dans un choix pur entre deux possibilités. Et comprenez bien :
ce n’est pas d’un côté le choix entre 36 000 possibilités et de l’autre le
choix entre 2 possibilités ; c’est le moment où l’ensemble des nuances
possibles d’un monde se concentre lui-même, en tant que multiplicité infinie,
dans la figure du 2. C’est-à-dire que c’est un moment où dire « oui »
ou « non », dire ceci ou cela, est une prise de position, non pas sur
ceci ou cela, mais une prise de position sur l’ensemble de la multiplicité
infinie du monde lui-même. Donc ça c’est un point à mon avis tout à fait
décisif parce qu’on ne va pas dire que la loi du monde est la contradiction,
comme on le dit dans la dialectique, c’est-à-dire que la loi du monde c’est le
2 ; on ne va pas dire que structurellement le monde est divisé en deux, ce
qui était en fin de compte, grossièrement parlant, la conception du monde
historique comme lutte des classes ou comme conflit entre deux camps, entre
deux options ¾ on ne va pas du tout dire ça : on va dire que, dans certaines
circonstances, en un point particulier du monde, dans le monde, il arrive que l’ensemble des nuances phénoménales de
l’apparaître se concentre dans la figure du 2 ; et que ça, c’est ²un
point² du monde. Ce n’est pas le monde structuré par le 2, c’est une figure au
contraire du monde qui, très localement, présente le nuancier infini de son existence
dans la figure du 2. Et c’est une théorie absolument nécessaire parce qu’on
peut montrer ensuite qu’un corps de vérités procède toujours point par
point ; c’est-à-dire que le cheminement d’une vérité se fait point par
point. Donc elle se fait en allant d’une figure de ce genre à une autre figure
de ce genre et, en définitive, une vérité c’est le traitement d’un certain
nombre de points. Ça n’est pas du tout quelque chose qui appréhende le monde
dans sa globalité ou dans sa totalité. C’est une trajectoire point par point.
Et c’est pour ça évidemment qu’il faut une théorie de ce que c’est qu’un point.
Et
le Livre VII, après la théorie des points, s’appelle Qu’est-ce qu’un
corps ? Alors vous savez que Spinoza disait « nous ne
savons pas même ce que peut un corps ». Alors le Livre VII de Logiques
des mondes est consacré à répondre à distance à Spinoza car, en un
certain sens, nous savons ce que c’est un corps. Enfin nous avons une idée de
ce que peut un corps. Donc la question du Livre VII c’est à la fois ²qu’est-ce
que c’est qu’un corps ?² et ²que peut un corps ?² Alors par ²corps², ici, il faut entendre naturellement un ²corps de vérités² ;
ce n’est pas n’importe quel corps. ²Qu’est-ce qu’un corps en tant que corps subjectivable ?² Et
on peut dire ²corps subjectivable² ou ²corps de vérités², c’est la même chose. Voilà.
Et
une fois qu’on a découvert qu’est-ce que c’est qu’un corps, on a complété ce
qui était amorcé dès le Livre I en matière de théorie du sujet. Parce que dans
le Livre I on ne sait pas encore ce que c’est qu’un corps ; on dit qu’un
sujet c’est un corps mais on ne sait pas encore ce que c’est. Dans le Livre
VII, on sait ce que c’est un corps et donc, si je puis dire, on sait à peu près
tout [sourires]. En tout cas pas mal de choses.
Et
puis alors après, après le Livre VII, vient une conclusion. La conclusion c’est
ce que vous avez sous les yeux, le texte Qu’est-ce que vivre ? Le texte que vous avez c’est tout simplement l’état actuel de la
conclusion de Logiques des mondes. C’est bien pour ça
que c’est quelquefois un peu obscur, un peu dur à comprendre. Mais quelquefois
c’est très limpide aussi. Et par conséquent l’élucidation de cette conclusion
va être la manière dont je vais vous présenter, à vous qui me faites le plaisir
d’être là, Logiques des mondes. Vous le connaîtrez
ainsi à fond avant tout le monde parce que, en fin de compte, au lieu que dans
le livre ça commence par la préface et ça va à la conclusion, ici on va
commencer par la conclusion. Je vous dois bien une manière originale de lire.
Alors on va lire comme les crabes, à reculons.
Comme
vous le savez, cette conclusion a pour titre celui du séminaire interrompu de
2003-2004. Donc on reprend les choses, en un certain sens, en un point où on
les avait laissées.
Alors
je voudrais terminer pour aujourd’hui… Donc vous voyez le schéma général qui
est le nôtre, qui est très ambitieux. La méthode qui est la nôtre est le
commentaire d’un texte finalement, en en élargissant un tout petit peu les
perspectives, un peu en diagonale ou à reculons. Je voudrais, pour terminer,
situer le cheminement de notre explication de ce texte.
Je
pense que peut-être les deux énoncés les plus énigmatiques et les plus
importants sont : un énoncé que vous trouvez dans le point 4, qui
est : ²La vie est ce qui vient à bout des pulsions.² Ça, je voudrais
arriver à ce que nous le comprenions tous ici. Cette définition particulière de
la vie, paradoxale en apparence puisque souvent la vie est présentée comme ce
qui est de l’ordre de la pulsion, ou en tout cas une des pulsions
fondamentales. Là je voudrais soutenir que la vie est ce qui vient à bout des
pulsions ; ce qui revient à dire que l’existence, telle qu’elle peut être
digne d’être vécue, est vie affirmative parce que, précisément, elle n’est pas
hantée par un adversaire non identifié ; parce que c’est ça une vie malheureuse,
c’est une vie qui est hantée par un adversaire qu’elle ignore. C’est ça. Et
c’est bien pour ça que la philosophie dialectique et tout ce qui s’y rattache
directement ou indirectement a été longuement vécue comme une figure
d’émancipation. D’émancipation pourquoi ? Eh bien parce que la vie était
au moins une vie qui n’était plus hantée par un adversaire insaisissable, par
un adversaire obscur. C’était une vie qui identifiait, de façon immanente, ce
qui lui était adverse. Et maintenant nous sommes de nouveau dans l’ombre de ce
point de vue-là.
Donc
on va appeler ²vie² la vie qui n’est plus hantée par un adversaire obscur. Eh bien cette
vie-là, je dis que c’est une vie qui est venue à bout des pulsions. Et c’est ce
venir-à-bout-des-pulsions que nous pouvons identifier à ²il n’y a que des
corps et des langages sinon que². Et que c’est le ²sinon que² qui est la figure grammaticale de l’exception qui porte le
venir-à-bout-des-pulsions, c’est-à-dire on vient à bout des pulsions, et donc
on est dans une vie qui n’est plus traînée par son adversaire obscur si l’on
assume, si l’on est dans la grammaire de l’exception. C’est ce point-là que je
voudrais délier complètement, avec ce qui va autour, à savoir que venir à bout
des pulsions c’est toujours être dans la création d’un nouveau présent.
D’ailleurs c’est dit deux lignes avant : ²on lui confiera
fidèlement une temporalité neuve² au nouveau corps ; on peut lui confier une temporalité neuve. Alors
ça c’est le premier énoncé qui cristallise je crois la difficulté.
Et
le deuxième c’est l’énoncé final que je peux vous lire : ²L’animal
désabusé dont la marchandise est l’unique repère, nous ne serons livrés à sa
forme que si nous y consentons. Mais de ce consentement nous protège l’Idée,
arcane du présent pur.² Donc cette deuxième thèse, qui est absolument finale, c’est mon dernier
mot si l’on peut dire [Badiou se marre], c’est que nous sommes livrés à la
forme de cet animal désabusé par notre consentement. Alors vous voyez comme
ceci se conjoint avec ce que je vous ai déjà dit, c’est-à-dire : c’est
parce que nous consentons à donner à ²il y a des corps et des langages² le même sens que le matérialisme démocratique… Si nous consentons à cela,
c’est-à-dire si nous consentons au même matérialisme que l’adversaire, eh bien
nous serons livrés à l’animal désabusé dont je parle, c’est-à-dire à la
subjectivité passive qui comparaît devant la marchandise. Voilà.
Et
donc, l’espoir, c’est que précisément notre perte requiert notre consentement.
Et ça je crois que c’est une caractéristique tout à fait ancienne du
matérialisme démocratique : il fonctionne au consentement. De manière
majeure. Il ne fonctionne pas à la tromperie, à l’illusion. Il fonctionne au
consentement. Et un consentement qui nous est extorqué parce que c’est
argumenté du réel, parce que c’est une idéologie du ²il y a².
Et en un certain sens, en effet, nous acceptons cette norme du ²il
y a².
Et donc le problème est d’accepter sans consentir. Nous devons accepter qu’il
n’y ait que des corps et des langages, mais nous ne devons pas consentir à ce
que cela signifie la forclusion d’autre chose. J’appelle ²acceptation² le
fait qu’à la dimension raisonnable de cet axiome nous ne devons pas nous
soustraire. Nous ne devons pas dire « non ! il y a autre chose ;
c’est pas vrai ». Non, nous devons d’une certaine manière,
raisonnablement, accepter cet axiome. Mais j’appelle ²consentement²,
non pas d’accepter l’axiome du matérialisme, mais de lui donner le même sens
que celui que lui donne le matérialisme démocratique, c’est-à-dire en réalité
la forclusion de l’exception.
Et
l’exception, naturellement, c’est grammatical, puisque ne pas consentir à
l’absence de l’exception c’est au départ ne pas consentir à l’éradication du ²sinon
que²
qui peut-être ouvre quelque chose d’incertain. Donc c’est vraiment la clause
grammaticale du ²sinon que² qui ne doit pas être raturée. La rature de la possibilité ou de la
virtualité de l’exception, c’est le sens que le matérialisme démocratique donne
à l’énoncé ²il n’y a que des corps et des langages². Et accepter cet
énoncé ne doit pas être payé du prix du consentement. Et alors qu’est-ce qui
nous protège de ce consentement ? Ça on le verra. C’est ce que j’appelle ²l’Idée² ;
²l’Idée² ça
veut simplement dire qu’il y a des vérités. Ça veut dire le remplissement de
l’exception ; c’est-à-dire c’est l’idée que toute vie véritable est une
vie en vérité, ou une vie pour une Idée comme je le dis ailleurs dans le texte ¾ on
reviendra là-dessus.
Et
qu’est-ce que c’est qu’une Idée ? Une Idée c’est le fait qu’il y ait
réellement un présent ; “l’Idée” ce n’est pas du tout une transcendance
platonicienne, ça veut simplement dire qu’un nouveau présent est attestable,
qui est le présent d’une vérité justement. Et qui, en tant que présent d’une
vérité, est le seul véritable et pur présent. Nous montrerons pourquoi le
présent des corps et des langages est un faux présent toujours, est un présent
absorbé par une dimension de non-présence. Il n’y a de réellement présent que
les vérités ¾ ça c’est une thèse qui va de pair avec le fait qu’il n’y a de réellement
présent qu’un sujet. C’est-à-dire que le présent c’est une dimension du sujet.
Et si tout sujet est sujet d’une vérité, ou sujet pour un corps subjectivable,
alors il n’y a de présent que le présent d’une vérité.
Et
donc, en principe, nous pouvons toujours être protégés du consentement par
l’Idée. C’est-à-dire que finalement le fait qu’il y a des vérités peut nous
protéger du consentement. Mais j’insiste sur le fait, très important, que le
consentement c’est plus que l’acceptation. Et là vous comprendrez un des
ressorts essentiels de la propagande contemporaine. La propagande contemporaine
c’est de nous dire : « ce que vous êtes forcés d’accepter, vous devez
y consentir ». Et au fond on voit bien comment les complications philosophiques
consonnent avec les évidences immédiates. Parce que ce que nous entendons dans
cette propagande n’est pas dit dans ces termes mais est pourtant parfaitement
de cet ordre. D’ailleurs vous devez bien accepter qu’il n’y a que des corps et
des langages, vous devez bien accepter que le monde soit comme il est. Qui va
dire le contraire ? Eh bien oui, évidemment, j’accepte que le monde soit
comme il est. Mais est-ce que ça veut dire que j’y consens ? Ce n’est pas
du tout la même chose, vous comprenez. Nous acceptons tout à fait que le capitalisme
soit hégémonique, que ceci, que cela… Comment faire ? C’est comme
ça ! Mais y consentir c’est une autre affaire. Or, y consentir, on voit
toujours qu’à la fin des fins ça consiste à dire « il n’y a pas
d’exception », c’est-à-dire il n’y a pas de point d’exception. Ce qui veut
dire aussi : « il n’y a pas de sujet ».
Et
alors c’est pourquoi le mouvement général de notre explication de texte de
cette année va se faire selon ces lignes-là. Je peux vous dire comment nous
commencerons la prochaine fois.
Là
aujourd’hui nous avons un peu parcouru l’ensemble mais nous allons commencer
par des précisions sur le matérialisme démocratique lui-même. Et par conséquent
nous commencerons par expliquer, de manière centrale, les énoncés 5 et 6. Pas
d’ailleurs absolument en entier, mais c’est pour vous recommander de les lire.
Donc
le chemin va se faire de la manière suivante : nous allons commencer par
les énoncés 5 et 6 afin de réélucider, de reclarifier très précisément et très
conceptuellement cette fois ce que c’est que le matérialisme démocratique. On
peut dire que nous allons commencer par une théorie de l’idéologie dominante un
peu plus définitive ou ramifiée que celle que j’ai exposée aujourd’hui. Et puis
ensuite nous allons basculer tout à fait de l’autre côté par le traitement d’un
concept qui est absolument opposé à tous ceux du matérialisme démocratique, et
qui joue un rôle central, qui est le concept d’éternité.
Alors
ça, évidemment, c’est un peu une affaire difficile cette affaire d’éternité,
parce qu’il s’agit de définir de façon nouvelle l’éternité. L’éternité est un
concept philosophique qui a une longue histoire. Et je considère que,
philosophiquement, c’est une entreprise décisive de reconstituer une
signification contemporaine au mot “éternité”. Ça ne peut pas être une
signification héritée, religieuse. Je pense que nous ne nous en tirerons pas si
nous ne réédifions pas, si nous ne reconceptualisons pas complètement et à
nouveaux frais la notion d’éternité. Parce qu’il n’est pas possible, en
réalité, de tenir l’exception, c’est-à-dire de tenir le ²sinon que²
des vérités si l’on n’a pas de possibilité de débaptiser l’éternité ;
c’est-à-dire si vous êtes dans la temporalisation, sans exception au temps, si
vous êtes dans le temps en tant que temps, alors vous êtes nécessairement dans
le fonctionnement matérialiste démocratique de ²il n’y a que des
corps et des langages².
Et
là on est dans la question de savoir ce qu’on est en état de penser : je
ne suis pas en train de dire « il y a des choses éternelles »… C’est
un autre problème. Mais est-ce que nous sommes en état de penser véritablement
une figure d’éternité qui soit une figure contemporaine ? Ça c’est un
point décisif.
Et
alors finalement, une partie de l’entreprise peut se nommer ²intégrale
laïcisation du concept d’éternité², c’est-à-dire extirper l’éternité de l’ensemble de ses connotations et de
ses sémantèmes religieux. Et je vais vous dire : finalement, pourquoi
l’islamisme ? C’est parce qu’ils tiennent sur l’éternité. A la fin des
fins c’est pour ça. Dans des conditions dramatiquement désastreuses. Mais si
vous abandonnez l’éternité aux religions, vous êtes pris, ça c’est sûr ;
parce qu’aujourd’hui, la disposition générale des choses c’est qu’on est dans
les énoncés du matérialisme démocratique, lesquels imposent d’une certaine
façon l’abandon de l’éternité aux religions.
Donc
nous devons absolument, impérativement, c’est quasiment une question de survie
de la pensée, nous devons absolument éviter ce dualisme-là n’est-ce pas. Éviter
précisément les figures qui nous sont imposées de la guerre contre le
terrorisme : l’Occident sous le signe du matérialisme démocratique d’un
côté, et puis de l’autre l’éternité abandonnée aux religions criminelles. Ça c’est quand même une situation intolérable.
Or, philosophiquement, ça j’en suis absolument convaincu, cela signifie que
nous avons comme devoir, comme impératif, de créer, d’inventer, de redisposer
une notions intégralement laïcisée d’éternité. Et cette notion d’éternité
affectée aux vérités, affectée aux Lumières si vous voulez, devra être
entièrement disjointe de l’appareillage imaginaire des religions sous sa figure
oppressive ou terrorisante, tout en restant incompatible avec le matérialisme
démocratique, en exception d’avec lui.
Et
alors, tout le problème est de savoir si nous pouvons avoir de cette éternité
une dimension affirmative, si cette conception contemporaine de l’éternité peut
être intégralement affirmative et non pas simplement régulatrice, idéale ou
sceptique.
Je
terminerai par Guyotat parce qu’il y a une très belle formule au début de Tombeau
pour 500 000 soldats. C’est un personnage qui
s’appelle Iérissos qui va mourir à la fin du livre 1, qui dit ceci :
« J’entre dans l’incroyance avec un tremblement de joie. Mon front, je
le veux écrasé et serré par l’arceau d’une litière, et mes épaules souillées
par les vomissures. Ô doute, seule éternité. »
Vous voyez là une version de l’éternité, intégralement laïcisée, mais dans sa
figure négative : la seule chose éternelle est l’incroyance ou le doute.
Eh bien un des propos de ce séminaire est d’assumer en effet que l’éternité
doit être une notion intégralement laïcisée, qu’elle est compatible en effet
avec la joie de l’incroyance, mais qu’elle n’est pas réductible au doute.
Merci.
- les dates :
14 décembre, 11 janvier, 1er mars, 29 mars, 26 avril, 31 mai, 14
juin
- je participerai à
une séance sur Beckett ce samedi 3 décembre au Vieux Colombier avec François
Regnault.
L’année dernière
nous avions pris le parti de commencer par des notations ou des commentaires
sur les circonstances (récupérer les cours de octobre-décembre 2004 : le
Sophiste, mort de Derrida, victoire de Bush). J’aimerais vous donner quelques
commentaires brefs et descriptifs sur les émeutes des banlieues et sur le fait
que nous vivions dans un régime d’exception. C’est significatif : on
réactive une loi qui date de 55, destinée à réprimer les gens à l’occasion de
la guerre coloniale en Algérie. C’est une manière intéressante de fêter un demi
siècle. 50 ans après. Il y a 50 ans il y avait une guerre organisée. A 50 ans
d’intervalle, les gens qui sont en cause dans les 2 cas sont pris dans le
soupçon de n’être pas des vrais nationaux, d’être inintégrés. On pourrait tirer
ça intégration et désintégration de la figure nationale. Alors 6 notations,
très courtes.
1° on peut appeler à
une méditation sur le nom même de banlieue ou de cité. Cette appellation, elle
est par elle-même significative d’une tendance prononcée ici, dans ce pays, à une
sorte d’apartheid généralisé, concernant les classes populaires, et à
l’intérieur de celles-ci ceux qui sont de filiation étrangère. Banlieue est
perçu comme un régime d’extériorité par ceux qui prononcent les banlieues. Mais
les banlieues c’est la dimension populaire de la ville, ça devrait être
représenté comme une partie de la ville, et même une partie essentielle de la
ville. Or la représentation de ça est un lointain, d’emblée un lointain
spatial, appelant une mise en séparation, en lointain et par csqt une mise de
la chose en pb. C’est une différence avec les quartiers ouvriers au 19ème
siècle. Ils étaient aussi désignés comme lieux de sauvagerie, ce n’est pas
nouveau, les barbares etc... mais ces quartiers étaient des quartiers des
villes, ils étaient représentés comme intérieurs, il étaient dans l’espace
propre de la ville, et ils y étaiet à ce point qu’ils s’en sont rendus maîtres
lors de la Commune. Belleville et Ménilmontant, c’est pas la même chose que les
banlieues. Une grande partie de la production, des ateliers étaient pris dans
la ville, interne à la ville (cf Hazan livre magnifique sur Paris et son espace,
la ville est-elle habitée par son peuple). Banlieue est au fond un mot d’une
exterritorialité. C’est un phénomène nouveau qui a commencé dans les années 50
et s’est déployé en reléguant la population ouvrière loin du centre jusqu’au
moment où ce lointain est devenu extraterritorial. On a entendu : les CRS
sont entrés dans les banlieues et n’en sortiront plus. C’est un syntagme
d’occupation : l’Etat occupe une partie extraterritoriale des grandes
villes, alors qu’on devrait assumer ça comme une dimension géographique
interne, immanente à la ville.
2° on peut faire
l’hypothèse qu’on assiste à un processus de constitution original d’un
racialisme spécifiquement anti-africain noir. Ce n’était pas une donnée dans ce
pays. C’est une donnée répandue, mais pas dans ce pays. Ça le devient : on
assiste à la constitution des paramètres, des identifiants de ce racialisme. On
voit se constituer une frontière. J’accorde une importance aux incidents de
Belila (?), à la tentative d’organiser les forces répressives marocaines ou
libyennes comme une sorte de rempart ou de mur intermédiaire entre l’Afrique
noire et l’Europe, et tout cela, l’apparition du syntagme subsaharien sert à
distinguer les 2. C’est dans cet ordre d’idées qu’il faut inscrire la lutte
contre le regroupement familial, la polygamie et les choses de ce genre. D’ici
à ce qu’on nous dise qu’ils sont cannibales ! Pour les lecteurs assidus de
Finkielkraut, ce n’est pas impossible… je crois que c’est intéressant de saisir
les points de constitution d’une disposition réactive ou réactionnaire de ce
genre. Il y a des expériences massives de racisme, mais ici on a la
construction progressive, immédiate, sous no yeux d’un dispositif singulier qui
n’avaient la même consistance antérieurement et dont on voit les assignations
géographique, politique, familiale dans un contexte renouvelé. On commence à
entendre un terme classique de ce genre de dispo : ces gens là font trop
d’enfant. C’est une caractéristique de l’Africain depuis toujours, avec la
thématique d’une invasion imminente. Ça me frappe bcp, et ça éclaire l’Etat et
son contrôle policier ségrégationniste, ne se fondant que sur le critère de la
couleur.
3° ce qui s’est
passé principalement à mes yeux s’est passé du côté de l’Etat lui-même. Il y a
eu des voitures brûlées, mais le pays n’était pas à feu et à sang. Il y a eu
une constitution étatique et médiatique de la situation plus importante que les
faits eux-mêmes. Ce qui est grave, ce sont les dispo prises par l’Etat, plus
que les émeutes. C’est l’Etat qui a transformé un état de révolte circonscrite
en état d’exception, au sens strict. C’est lui. Donc si événement il y a, c’est
bcp moins de la figure des révoltes que la réaction de l’Etat et
malheureusement une partie de l’opinion organisée par l’Etat. C’est nouveau et
inquiétant : que l’Etat saisisse une situation pour la transformer aussi
facilement en état d’exception. On peut dire que étape après étape (les choses
n’acquièrent leur visibilité que de façon discontinue), le fameux Etat de droit
se délite, inexorablement après avoir été un emblème. Etat de droit, droits de
l’homme. Assez tôt j’ai écrit que droits de l’homme signifiait d’abord qu’il
fallait être un homme et que être un homme obéissait à des critères très précis.
Là on le voit : tout le monde n’est pas un homme au même titre C’est
là-dessus que se fonde le délitement de l’Etat de droit qui n’a de
signification que minimalement égalitaire, même si cette égalité est formelle.
Pourquoi ? Pourquoi l’Etat de droit se délite-t-il au point que devant des
émeutes de gamins, il faille décider l’état d’exception, l’état d’urgence,
quasiment une occupation territoriale… C’est une vraie question. Je crois qu’il
faut répondre que dans la société actuelle, la masse des pauvres, finalement,
reprenons ce mot descriptif, au cœur de laquelle se trouve un gd nb de gens de
provenance ou de filiation étrangère, comme des tas d’autres gens l’ont été et
le seront, cette masse de pauvres doit être persuadé que ce qui lui arrive est
de sa faute (pas de ce qui lui est fait, du système dans son ensemble) et que
puisque ce qui lui arrive est de sa faute, elle n’est pas organiquement du
pays, d’ici, mais y est seulement tolérée. Autrement dit elle doit considérer
que sa présence ici est une bénévolence des gens qui sont au-dessus d’elle et
qu’elle doit intérioriser sa présence dans la figure d’une tolérance conditionnée.
Toutes les histoires de l’intégration etc… veut dire que leur présence est sous
condition, sous condition de quoi ? de se tenir tranquille et d’être comme
tout le monde. Mais ils n’en on pas les moyens. Moi je pense que nous allons
tendanciellement dont la double caractéristique est qu’il sera censitaire et
racialiste. Censitaire car en réalité la citoyenneté proprement dite aura pour
condition qu’on ne soit pas trop pauvre, et les autres seront dans une
situation telle qu’on leur fera savoir qu’on ne peut que les tolérer.
Racialiste, car au cœur de cette dispo de ceux qui sont mis dans le lointain
social, il y a en effet un très gd nb de gens d’origine étrangère, et que en
outre on constitue la figure africaine comme une singularité typique à
l’intérieur de cette étrangeté.
4° on a parlé de la
figure oppositionnelle l’année dernière, elle a fait merveille : pour
trouver des gens qui disparaissent dans des trous de souris aussi
misérablement, il faut se lever de bonne heure. Là on voit bien que la figure
oppositionnelle, sa subjectivité en tant que figure masquée du ralliement, est
à l’épreuve quand la situation est tendue et qu’il faut prendre une opposition
quelconque. L’opposition est dans la figure de n’avoir pas à prendre position
en réalité. Pourquoi ? Parce qu’elle ne peut pas rompre le pacte essentiel
qui la lie en réalité à l’ordre dominant, et là elle serait sommée de le faire.
Elle ne peut pas le faire, ni rallier non plus une position gouvernementale et
par csqt elle n’a pas d’autre possibilité que de disparaître. Et c’est ce
qu’elle fait, laissant finalement les gens en place faire le boulot gouvernemental et policier. C’est un
enseignement important, c’est une démo significative qui s’inscrit hélas dans
la faiblesse des réactions à la situation frappante. Situation d’une extrême
gravité idéologique et même humanitaire je dirais puisqu’on nous a bassinés
avec l’humanitaire. Des propos ouvertement persécutoires à l’égard de minorités
désignées comme telles, et des ségrégations assumées dans le corps populaire
sont des phénomènes très graves, je dis grave car les csq en seront
considérables, et qu’il puisse se passer dans un contexte de réaction pur
l’instant aussi faible, pour l’instant ,est tout de même un symptôme qui
indique aussi que c’est sur ce plan là que fonctionne l’opposition, comme
figure explicite du ralliement tremblant à la fonction gouvernementale
autoritaire.
5° l’émeute comme
telle naturellement ne constitue aucunement la production spontanée ou
transitaire d’un véritable sujet politique. Personne ne soutient ça, personne
ne soutient même que ces phénomènes sont remarquables et formidables. C’est une
discussion absurde. Les jeunes ont fait ce qu’ils savaient et pouvaient faire
c’est tout, dans un cadre étroit et limité. N’ayons pas une discussion absurde
sur est-ce que c’est formidable ou pas. le point c’est que les émeutes, comme
toujours, ne sont pas des productions politiques organisées (sinon ce serait
des insurrections). L’émeute organise la visibilité d’un problème. En ce sens
on peut la dire symptômale au sens large. Elle indique la visibilité d’un pb.
Et ce pb, par contre, puisque sa visibilité a franchi une nouvelle étape, est
intégré à l’ensemble des pbtique politique qui s’ouvrent, se proposent ou sont
en travail. Quelle est le pb dont la visibilité a été organisée. Faisons de
hypothèses, on peut nommer le pb de façon différent. Moi il me semble que le pb
qui est ainsi mis en scène par l’émeute est l’existence d’un écart considérable,
radical, visible entre d’un côté le pays et les gens qui y vivent, et de
l’autre l’Etat, l’Etat, la puissance gouvernementale censée être représentative
ou dirigeante de cette situation. Il y a un pb de l’Etat et un pb du
gouvernement maintenant qui est que il est clair que pour lui une masse fondamentale
des gens de ce pays ne relève que des questions de police, quels que soit les
discours sirupeux dont on enrobe ça et les projets mirobolants dont on assortit
la réalité. En fait, ce qui est là révélé et déclaré, c’est que toute une
fraction des gens du pays est considéré comme relevant essentiellement de la
police. Sur ce point j’ai été frappé par l’oubli (du gvt, des médias) de la stricte origine de
l’affaire : la mort de 2 jeunes gens, c’est ça, c’est pas des abstractions
comme la polygamie, la misère ou la religion musulmane. Dans une émeute il faut
être très près de la factualité. Au départ de quoi s’agit-il ? Il s’agit
quand même au départ d’un gamin de 15 ans et d’un autre de 17 ans qui sont
morts parce qu’ils avaient la police aux fesse et nous a raconté immédiatement
qu’il l’avait légitimement alors que ce n’était pas du tout le cas. On nous a
menti, le gouvernement, comme un arracheur de dent. Je trouve extraordinaire
que premièrement le gouvernement ne se livre à aucune autocritique sur ce
point, et que deuxièmement il ne s’incline pas devant ces morts et leurs
familles. Il est extraordinaire que Chirac intervienne sur cette affaire sans
prononcer un mot là-dessus. Moi-même je serai dans leur situation, ces jeunes
et leur famille, je l’aurais extraordinairement mauvaise. Il faut savoir dans
quelle balance on met les 2 morts et les voitures brûlées. Or c’est l’origine
de l’affaire, et le mépris dans lequel cette origine est tenue en tant que
vérité littérale, en tant que signifiant primitif, la mort, est significatif de
ce pb d’écart entre l’Etat et le pays, et des gens considérés comme dans un
lointain relevant des procédures d’occupation. Voilà pourquoi le solde de tout
ça est l’occupation territoriale d’un certain nb de cités par la police avec
promesse qu’elle va y rester toujours. Mais si on veut convaincre vraiment les
gens qui sont là qu’ils sont de ce pays ce n’est pas une très bonne méthode de
les occuper, ie envoyer des contingents d’homme armés.
Ce qui a été dit,
même s’il n’a pas été dit gd chose, ce n’est pas un sujet politique constitué,
ni une insurrection, c’est : nous sommes de ce pays et tout se passe comme
si on en était pas. c’est leur conscience. On en est et on n’en est pas. Et en
particulier : on est du pays, mais l’Etat ne nous compte pas vraiment
comme étant du pays. L’Etat s’est engouffré là dedans pour valider cet énoncé,
en annonçant aussitôt une série de mesures discriminatoires. Par csqt je crois
que là il y a un noyau, la double assertion conflictuelle d’appartenance au
pays et la résiliation par l’Etat de cette appartenance. C’est un point
capital. De ce point de vue je dirais, même en tendant les choses : ce qui
a été mise en visibilité là est peut-être plus dans les catégories politiques
traditionnelles plus une question nationale qu’une question sociale. Bien sûr
il y a la pesanteur du social, le chômage, la misère etc… mais la subjectivité
manifestée, ce qui a été prononcée était plutôt de l’ordre : je me
considère comme d’ici, et on ne me considère pas comme d’ici. C’était plutôt
ça. Donc affaire nationale au sens large du terme, ie du point de vue de ma représentation de moi-même je ne vois pas ce que je
suis à part français, et pourtant il m’est constamment signifié que ne le suis
pas pleinement (par le contrôle de police, par les contrôle d’identité, par la
question des papiers etc…). Et donc là on a une discordance grave et de
conséquences périlleuse entre la logique d’appartenance au pays, telle qu’elle
est vécue ou pratiquée, et le verdict étatique ou officiel sur cette
appartenance.
Il ne faut pas
oublier que la remise en cause de l’appartenance de gens au pays est toujours
d’une gravité exceptionnelle et qui rappelle de sombres années, même si on fait
toujours cette analogie, comme des époques où on allait chercher la 3ème
génération avant. On voit apparaître pour la 1ère fois l’hypothèse
d’expulser des gens qui ont des papiers réguliers, ce qui veut quand même dire
là qu’on entre dans la zone typiquement années 30 où on farfouille dans la
généalogie des gens pour savoir s’ils sont d’ici ou pas. C’est un point qu’on
voit apparaître. Les comparaisons historiques valent ce qu’elles valent, mais
ce point est frappant.
Toujours dans cette
logique, on voit bien que la puissance étatique, publique, gouvernementale, a
profité des circonstances pour étendre la responsabilité supposée de l’émeute
bien au-delà de ses acteurs effectifs. On a vu apparaître tout d’un coup le pb
du regroupement familial, le pb de la vie familiale, de leur origine, des sans
papiers etc… on est passé de émeutes de gamins, c’était massivement des gamins,
15-17 ans c’est des gamins, à culpabilité des étrangers et cette transition a
été facile et frappante. On aurait pu dire : c’est la jeunesse, mais c’est
devenu la promesse de nouvelles lois contre les étrangers en général. Le bilan
tiré par l’Etat est frappant : contrôler le regroupement familial. C’est
extraordinaire, quand on dit aussi que sociologiquement c’est la faiblesse de
la structure familiale qui ceci cela… Et là on fait le contraire ! Vous
disloquez les familles définitivement. C’est une solution absurde d’une extension
du pb initialement posé ou mis en visibilité par l’émeute à une persécution des
minorité de provenance étrangère dans ce pays. La logique en cours est extraordinairement
dangereuse et menaçant et que la situation est très mauvaise.
6° ma dernière
remarque est directive. Il y a une responsabilité de chacun devant ça. C’est
pas partidaire, c’est une circonstance, une circonstance gouvernementale et
étatique : il faut dire que mettre un pays en état d’exception et
d’urgence contre des gamins déshérités c’est un symptôme répugnant, vraiment.
Que devant des émeutes de gamins, absolument irraisonnées, en effet, etc… c’est
pas le pb, on mette tout le pays et son opinion au régime de l’état
d’exception, qu’on vote des nouvelles lois, qu’on projette de nouvelles lois
contre les communautés étrangères et qu’on construire de surcroît un nouveau
racialisme antinoir dans ce pays, c’est répugnant, purement et simplement. Il
ne faut pas dire simplement que c’est pas bien, que c’est un vrai pb qu’on
devrait les intégrer mieux que ça. Il faut commencer par traiter ça de
saloperie. Deuxièmement je pense qu’on ne peut pas laisser seuls ces gamins
face à la police et l’Etat. Il y a eu des initiatives d’assistance pour les
procès, de surveillance de la police, c’est très bien, on en a besoin. Ce sont
des questions d’organisation populaire dont on a besoin. On a vu que ces
émeutes étaient des émeutes, inorganiques, faiblardes et en un sens négative,
mais on en a besoin car la réaction de l’Etat serait dévastatrice si elle ne rencontrait
rien devant elle. Il faut être dans une volonté de démantèlement des lois scélérates
qui vont être votées, qui sont positivement effroyables raciales, de persécution
considérable. Il faut affirmer enfin que le droit ouvrier et populaire, ie le droit des gens à être ici et à ce que ça soit pas suspendu à des
qualifications, des prédicats, des désignations, des sociologies, suspendues
elles-mêmes à l’autorité policière et étatique.
Je voulais vous dire
ça, vous savez je suis un optimiste né mais je dois dire que j’ai trouvé ça
assez impressionnant. Et franchement c pas les voitures volées qui m’ont
impressionné. Tout le monde a dit : ils détruisent leurs propres lieux.
Mais qu’est-ce qu’on voulait qu’ils fassent ? on aurait pu leur donner des
conseils insurrectionnels intelligents, finalement. Mes chers amis, marchez sur
l’Elysée ! c’est ça ! qu’est-ce qu’on voulait ? Il y a eu un
journal qui a dit : ils n’ont qu’à s’inscrire sur les listes électorales.
Formidable ! Ils ont fait avec ce qu’ils avaient sous la main. Je ne dis
pas que c’est malin, mais pour être malin il faut le pouvoir. Il faut le
pouvoir, et les gens qui dans leur fauteuil disaient : oui, ils brûlent
leur voiture, ils brûlent leur école etc... Et bien oui ils ont brûlé l’endroit
où ils étaient. Parce qu’une partie de leur dire c’était : « nous on
est ici, et puis on veut pas qu’on soit ici, alors on va brûler ici ». je
ne dis pas que c’est une pensée formidable, mais on peut avoir une intelligibilité
de cela. Et les petits malins qui disaient : il faut faire bcp mieux, on
ne les a pas vu faire grand-chose finalement, à propos de ces jeunes, des
cités, de la ségrégation ouvrière etc… il ne faut pas reprocher à une émeute de
ne pas être une insurrection. C’est une émeute, et les émeutiers ont toujours,
que ce soit à Los Angeles ou ailleurs, saccagé l’endroit où ils étaient, et
quand ils essaient de faire autre chose, on leur tire dessus. Tout simplement.
Il faut bien le savoir ça. Alors ils ont attiré l’attention sur la conscience,
diffuse inorganisée, qu’ils sont ici et qu’on déclare qu’ils n’y sont pas, et
que la 1ère chose qui montre qu’ils ne sont pas d’ici, c’est que
quand 2 d’entre eux meurent, on ne dit rien que des mensonges. C’est ça
l’origine factuelle de la chose. Voilà, suite à quoi i faut prendre nos
responsabilités dans la situation actuelle. On n’a pas fini d’en entendre
parler, le train des choses requiert le bon vieux mot d’engagement.
Ce vaste prologue
terminé, reprenons le cours, qui après tout reprend les pb dont je parlais à
l’instant.
La matière ou
l’enjeu du séminaire de cette année est une sorte de commentaire de texte,
texte que vous avez « qu’est-ce que vivre »,
qui est en fait la conclusion du livre à paraître en février ou mars, qui
s’appelle LdM.
Encore un
rappel : LdM est organisé à partir
d’une opposition idéologique entre ce que j’appelle le matérialisme démocratique
d’un côté et la dialectique matérialiste de l’autre. Donc le livre est campé
autour ou à partir d’une opposition idéologique massive entre 2 orientations de
pensée possibles, qui sont aussi 2 visions du monde. Un des enjeux du S est
d’éclaircir ce point , de faire
toute la clarté autant que faire se peut sur la raison pour laquelle l’opposition
idéologique dans laquelle se constitue la pensée et l’action est à mes yeux une
opposition entre dialectique matérialiste et matérialisme démocratique. On voit
le changement par rapport aux dispositions traditionnelles : ce n’est pas
opposition entre matérialisme et idéalisme, comme l’était l’opposition traditionnelle
de la pensée révolutionnaire depuis le 18ème. Cette pensée se
réclamait du matérialisme et dénonçait la religion, la pensée bourgeoise comme
de caractère idéaliste. Et je rappelle que qln comme Althusser considère que
cette opposition idéalisme / matérialisme était une opposition organique qui
constituait la philosophie elle-même : depuis ses origines la philo était
réglée, normée intérieurement par l’opposition entre matérialisme et idéalisme.
Il faut comprendre ce point : Althusser ne veut pas dire que la philosophie
opposait des idéalistes à des mat, mais que la philo elle-même était la scène
de cette opposition, et que donc à l’intérieur d’une philosophie on peut
retrouver des signes, traces, d’un conflit entre matérialisme et identité qui
constituait précisément le devenir de la philosophie. Donc pendant une longue
séquence historique, la pensée révolutionnaire s’est réclamée du matérialisme
et a dénoncé l’idéalisme comme au fond l’idéologie spontanée des dominants,
quels qu’ils soient sous ses formes religieuses, spiritualistes, mythologique
etc… Vous voyez que la 1ère proposition ici avancé, c’est que ce qui
aujourd’hui constate la scène du repérage idéo, et donc ce aussi dans quoi
s’inscrit la philosophie, c’est en réalité l’opposition entre 2 matérialismes,
de 2 déterminations mat et pas l’opposition mat id. C’est le 1er changement
sur lequel je voudrais faire la clarté. Autrement dit, ce qui est soutenu c’est
que l’idéalisme a été vaincu c’est une thèse assez massive, ce qui est une
variante à mon sens de la thèse Dieu est mort. Si on prend au sérieux la thèse
dieu est mort on peut l transcrire : l’idéalisme a été vaincu, il est mort.
La société contemporaine, dans sa forme la plus oppressive, notre société, dans
sa forme menaçant, n’est en rien marquée par l’idéalisme, pas du tout. C’est
une société d’un mat implacable. Elle ne connaît que les relations de force,
les relations de puissance, d’argent. Elle l’a, comme l’annonçait Marx, dissout
toutes les relations idéalistes dans les eaux glacées du calcul égoïstes. C’est
la formule du Manifeste : la société
bourgeoise dissout toutes les vieilles relations dans les eaux glacées du
calcul égoïstes. Ces vieilles relations, c’étaient les relations étaient les
relations idéalistes : d’honneur, féodale, religieuses, familiales. Ce que
Marx annonçait, c’est que tout ça, ce contexte relationnel idéaliste, allait
être anéanti par la généralisation du mode de production capitaliste. Ie tout
allait être dissous dans les eaux glacées du calcul égoïste. Sa puissance
d’anticipation était extraordinaire : c’est maintenant que nous y sommes.
Il l’avait vu avec un siècle d’avance. Ceux qui disent qu’il est passé ne se
rendent pas compte qu’il est réalisé. Il est réalisé : annoncer la défaite
de l’idéalisme dans le années 1840 était asse audacieux, aujourd’hui c’est une
évidence. Philosophiquement l faut tirer les leçons de cela que l’idéalisme a
été défait, qui a été dit sous la forme matérialiste directe par Marx et qui a
été redit par Nietzsche sous la forme Dieu est mort. DU coup se pose la question
de savoir quel est le dispositif idéologique de domination contemporaine, si ce
n’est pas une des formes héritées de l’idéalisme. Si l’idéalisme a été vaincu,
comment se fait-il que ce ne soit pas une victoire révolutionnaire, de
l’émancipation. C’est un pb de notre temps. Au 19ème il y a eu la
conviction que le mat allait l’emporter en tant que dynamique révolutionnaire.
L’idéalisme pouvait être défait, mais pouvait être défait au service de l’émancipation.
Le résultat tout à fait inattendu est que l’idéalisme a été vaincu, je ne crois
pas à sa résurrection, au retour des religions (c’est une discussion
intéressante), je pense que Dieu est mort et ne ressuscitera pas contrairement
à sa vocation naturelle, et je pense dnoc que il faut bien constater que ça ne
s’accompagne pas d’une victoire de l’émancipation, mais plutôt d’une
installation à une échelle sans précédent de ce que Marx annonçait, ie la dissolution de tout dans les eaux glacées du calcul égoïste, mais cette
dissolution de tout dans les eaux glacées, c’est un matéralisme. Donc le
matérialisme l’a emporté mais pas l’émancipation. Il faut donc inévitablement
si on se pose la question quele est le dispositif contemporain de domination,
il faut considérer que c’est un mat, une variante singulière du mat, et il faut
se demander comment il se fait que ce mat couplé non à l’émancipation mais
couplé à la généralisation de l’économie capitalise organise le sujets.
Qu’est-ce qui fait qu’en tant que disposition idéologique nouvelle, il est
organisateur des subjectivités dans la figure d’une domination renouvelée en pas
ne tant que porteur d’une figure d’émancipation ? c’est le 1er
pb.
2nd
pb : que devient l’orientation mat dans sa destination émancipatrice ou
révolutionnaire ? Faut-il dire qu’elle a échoué, qu’on n’est plus dans un
espace de scission idéologique, mais qu’on a un triomphe atone ou général du
matérialisme réactionnaire ? ça renvoie au pb général de savoir quelle est
la nouvelle configuration de la dispo idéologique générale dans laquelle nous
vivons aujourd’hui. Nous sommes confrontés à l’examen de la possibilité d’une
scission du matérialisme lui-même, et non d’une opposition externe entre mat et
idéalisme. Il parait difficile de soutenir qu’il y aurait eu inversion des
positions, ie que en réalité l’idéologique
émancipatrice est l’idéalisme : il y a eu commutation. Si pendant longtemps
le matérialisme a été l’idéologique de l’émancipation, en réalité le matérialisme
a été réorganisé comme matérialisme oppressif, de la jouissance du capital, et
du coup il n’y aurait de chance possible de l’émancipation que du côté de la
figure idéaliste. Je ne la crois pas tenable, car l’idéalisme a été vaincu, il
est sans forme. Non pas qu’on rejette l’hypothèse mais que l’idéalisme est une
configuration morte, elle ne se laissera pas ressusciter par la bonne volonté
émancipatrice elle-même même si cette tendance subsiste, tendance à ressusciter
un idéalisme de circonstance au service de l’émancipation. C’est une tentative
absolument vaine car la victoire du matérialisme est événementielle, c’est un
fait, elle est arrivée, c’est un événement, Dieu est mort et l’idéalisme est
vaincu. Tout ce qui prétend dénier cette arrivée est tout simplement… et ne
fait que… sur cet évent, pendant un temps. Donc la posture consistant à dire
que l’émancipation est du côté de l’idéalisme est une posture sans avenir, une
posture qui ne peut être qu’une tactique d’arriération provisoire. Il faut
entériner la mort de l’idéalisme de notre point de vue si je puis dire, donc
une seule issue, la scission du matérialisme lui-même. Il faut penser,
réfléchir, considérer, qu’il y 2 voies matérialistes et non une seule. C’est à
quoi est destinée effectivement l’opposition que je propose, que je construis
entre matérialisme démocratique et dialectique matérialiste, puisque vous voyez
que mat est des 2 cotés, substantif d’un coté adjectif de l’autre, et cette opposition
enregistre que la dynamique émancipatrice reste du coté du mat mais en
produisant ou en organisant sa scission. L’enjeu de clarifier ça est
important : pourquoi dialectique matérialiste, et matérialisme
démocratique ? il y a des raisons, j’indique une chose, c’est que si vous
voulez élucider la victoire contemporaine du mat réac, vous devez faire porter
l’accent sur sa capacité organisatrice des subjectivités. C’était une gde force
de l’idéalisme : du temps où il était la substance des idéo réactives,
était un puissant organisateur de subjectivité. c’est pour ça qu’on l’appelait
opium du peuple, et qu’il était actif sur les subjectivités : la
consolation religieuse, la morale publique etc… le spiritualisme dans son
ensemble était un organisateur des subjectivités. Quand vous rendez compte
d’une idéo, il ne faut pas simplement en décrire la puissance objective, il
faut en décrire la force subjective. Or l’élément qui caractérise la force
subjective du matérialisme réactionnaire contemporain c’est son élément démocratique.
C’est pour ça que je dis mat démo : la puissance organisatrice du mat
contemporain c’est sa dimension mat, c’est pour ça que, en un certain sens,
tout le monde est pour lui (ie c’est l’idéologie
dominante, ie l’idéologie de la domination, tout le
monde est pour elle à un certain niveau de sa construction subjective, le reste
est en exception). Quant à dialectique matérialiste, c’est dialectique car ça
ne peut pas en rester à la dualité, ça doit aller jusqu’au 3. c’est la
puissance du 3, de l’exception par rapport à la simple dualité.
L’ensemble de ces
schèmes ou catégories constitue un enjeu fondamental. Je les laisse en repos
pour l’instant. Dans le texte que vous avez, 2 énoncés sont importants,
radicaux : « la vie est ce qui vient à bout des pulsions », et « l’animal déjà… dont la marchanise est l’unique repère,
mais de ce consentement nous protège l’idée par… ».
ceci donne la piste que je vais suivre, pour le rebâtir autrement.
Au fond il s’agit de
construire une liaison nouvelle, liaison nouvelle qui tente de répondre à la
question qu’est-ce que vivre, en tant que vivre est autre chose que survivre,
comme on le sait depuis au moins les situationnistes. Vivre en tant que la vie
est autre chose qu’une perpétuation de sa survivance. Qu’est-ce que sa capacité
à se tenir dans la vie comme sujet. Sous ce signe et dans cette ambition là, il
s’agit de construire une liaison entre venir à bout des pulsions, ie être dans une vie qui n’est pas régentée pulsionnellement, donc venir à
bout des pulsions, la souveraineté de l’Idée (ce qui nous protège de tout cela,
y compris des pulsions, c’est l’idée) et la création d’un présent. C’est la
liaison principale qu’il s’agit de rendre claire : qu’est-ce que venir à
bout des pulsions, ie vivre dans un régime qui
est autre que celui de l’immédiat. Car le mat démo c’est la condamnation à
l’immédiat. Nous sommes condamné à l’immédiat. Donc venir à bout des pulsions
peut se dire aussi venir à bout de l’immédiat, c’est la partie négative. La souveraineté
de l’idée : accepter ou se tenir dans la souveraineté de l’idée, et être
dans la réalité du présent, dans la création du présent. Le lien entre les 3
choses n’est pas apparent. C’est ce lien dont il s’agit de rendre raison, de
clarifier, pour que la question qu’est-ce que vivre soit résolue ou orientée
dans sa résolution. pourquoi ce n’est pas immédiat ? ce qu’on ne voit pas
aisément c’est 1) la puissance de l’idée contre la pulsion, puisque tout le mat
semble enseigner le contraire, ie que la pulsion est
la maître de l’idée, 2) et la relation entre l’idée et le présente, puisque la
conviction mat a légué la conviction que l’idée est au-delà du présent. Donc on
tend les choses, i y a une tension constitutive de la dialectique matérialiste,
il y a une torsion qui est que l’idée, ce qui va être appelée idée (l’idée de
l’idée c’est compliqué !), va se trouver d’un côté réarticulé différemment
sur le vital, l’immédiat, la pulsion. Disons l’idée va se trouver dans un
rapport nouveau au corps (généralisons). Et de l’autre elle va avoir un rapport
nouveau au présent, au présent du monde.
Un des enjeux du
séminaire est d’établir une doctrine de l’idée, une pense du principe, telle
que cette idée, ce principe,soit dans une relation toute nouvelle au cors, qui
permettra de parler d’un corps de l’idée dans un sens nouveau, ce qui permet de
venir à bout des pulsions ou de l’immédiat. Et dans un rapport à un présent actif,
de l’action ou de la création. Donc l’idée ne sera ni transcendante au corps ni
indifférente au présent. La différence entre le matérialisme démocratique et la
dialectique matérialiste, c’est nous le verrons la reconnaissance de
l’existence de l’idée, nous verrons en quel sens (reconnaissance de l’idée
comme exception). L’enjeu est de penser l’idée de telle sorte que qu’elle ne
soit pas en position d’arrachement ou de T en corps, et qu’elle ne soit pas non
plus dans une indifférence retirée ou T au présent de la création ou au présent
de l’action. On peut le dire autrement, dans une formule plus risque :
l’enjeu est de constater une solidarité organique possible entre la constitution
du présent, ou la constitution d’un présent, et qch que nous appellerons
l’éternité, qui sera une caractéristique maintenu de l’idée. Evidemment, ce
serait trop facile de dire : nous enlevons les caractéristiques de l’idée,
elle n’est pas universelle, pas éternelle, elle n’et rien de tout ça. C’est
alors assez facile de résoudre le pb de son homogénéité au présent d’un coté et
au corps de l’autre. On va maintenir l’idée dans sa tension d’exception, donc
en puissance d’éternité. A vrai dire, si je remplace idée par vérité, ces
termes s’équivalent à peu près (l’idée est la production d’un procès de
vérité), on voit bien que ça n’a pas de sens si on ne maintient pas sur un
certain bord l’éternité. Dire vérité éternelle c’est à mon sens une redondance.
Une vérité qui n’est pas éternelle, autant l’appeler de suite opinion, c’est
plus simple. Mais vérité est un mot devenu entièrement obscur, obscur. Quand je
dis rétablir la solidarité organique entre la création d’un présent et
l’éternité, on voit bien que ça ne se fait qu’avec une redéfinition de
l’éternité. Nous sillons une fois de plus le sillage de Rimbaud : elle est
retrouvée / quoi / l’éternité. Mais la retrouver c’est toute une affaire !
sa définition c’était c’est la mer allée avec le soleil. Si vous basculer l’éternité
du côté non de l’idée mais du côté de la nature (la mer allée avec le soleil),
alors cette éternité là est l’éternité du poème. Ça c’est vrai, le poème peut
garder cette figure de l’éternité naturelle. Cela ne nous suffira pas dans le
temps présent, dans la menace du matérialisme démocratique. C’est une discussion :
peut-on n’opposer à la dispo présente du monde que le poème ? C’est ce que
dit Rimbaud : on est astreint à la figure du monde tel qu’il est une
figure de l’éternité. Ça j’en suis persuadé. Mais est-ce que ça ne peut être
que l’éternité du poème ? C’est une éternité parfaitement métaphorisée par
Rimbaud. c’est une figure d’éternité inscrite dans la splendeur du poème même,
mais est-ce que cette figure suffit ? Si elle suffisait ça voudrait dire
que nous n’aurions pas d’autre issue que le retrait, le retrait dans le poème.
Il n’y en aurait pas d’autre. Et si nous étions vraiment dans la désespérance,
nous pourrions dire i n’y a que le retrait. C’est un pas que je ne franchirai
pas, mais je comprends cette
conviction qui consisterait à dire le monde est livré à la dévastation,
thème heideggerien, et dans cette figure de dévastation nous n’avons plus que
la mer allée avec le soleil, ie la pure instance du
poème comme sauvetage de l’être, gardienne de l’être. Mais je pense qu’une
instance plus totale, plus radicale, est possible. Il s’agit de savoir si
l’éternité peut être autre chose que la mer allée avec le soleil. Le pb est de
savoir quelle figure conceptuelle de l’éternité nous proposerions qui ne serait
pas réductible à la singularité foudroyante du poème, telle qu’elle s’articule
à l’évidence de l’apparaître naturel, au gardiennage de l’essence de
l’apparaître naturel dans le poème. Nous espérons une figure de l’éternité dont
l’arrimage au présent ne soit pas seulement l’arrimage au présent naturel. Il
faut donc réassumer l’éternité comme dimension réelle de la pensée agissante,
comme dimension réelle possible, et non pas comme retrait poétique. Le poème
contemporain est un poème di seuil, la pensée se tient sur le seuil, sur le
seuil justement de la bénédiction de l’être. Le poème n’est pas le
franchissement mais le gardien du seuil lui-même. C’est pour ça qu’il a
toujours qch comme une entrée, une auroral, il est auroral car il est la mer allée
avec le soleil, il capte cela qu’il détient comme une entrée possible dans
l’être, et il est dans ce retrait et ce seuil. Au fond on pourrait dire que ce
qu’il s’agit de tenter est de savoir si on peut avoir une conception de
l’éternité qui est aussi un franchissement, et non pas simplement la pure
tension de ce qui se tient sur le seuil de la beauté, du salut ou de la nature.
c’est un débat fondamental : est-ce que nous avons une ressource autre que
celle du retrait ? Est-ce qu il y a une disponibilité qui est celle d’un
franchissement. Et la forme générale, spéculative, ie philo de ce pb, est : y a-t-il possibilité d’une idée telle que son
articulation au corps et au présent ne soit pas résignée au retrait, ie ne soit pas contenue ou maintenu dans l’instance du poème. C’est l’enjeu
central. On peut le dire dans les termes de Spinoza : il dit nous sentons
et nous expérimentons que nous sommes éternels. Enoncé admirable :
l’énoncé est tout autre chose qu’une vaste promesse pour qui saura mourir le
moment venu. Nous sentons et nous expérimentons que nous sommes éternels. Le pb
est de savoir quand et comment. Il ne dit pas que nous sentons et expérimentons
constamment : il faut gagner ça (d’abord par la lecture assidue de
l’ensemble des théorèmes de l’Ethique) mais il y a la conviction profonde que
cette expérimentation chez lui est une expérimentation de l’éternité que nous
sommes en tant que modes de la pensée et figure interne à la substance etc… et
cette expérimentation est une expérimentation qui est finalement la
constitution d’une subjectivité nouvelle, qui est par elle-même cette
expérimentation de l’éternité. Je suis prêt à reprendre ce programme tel
quel : aujourd’hui, où et comment expérimentons que nous sommes éternels ?
vous pouvez dire : « je m’en fiche, je ne veux pas
expérimenter que je suis éternel, je suis bien comme je suis ». Très bien mais il faut en payer le prix, et il faut dire :
« nous sentons et nous expérimentons que nous sommes commerçants ». Et c’est bien ce que nous expérimentons à tout instant. La
question de savoir si nous pouvons expérimenter autre chose se dit toujours
d’une manière ou d’une autre que nous expérimentons que nous sommes éternels,
ie que nous ne sommes pas confinés à ce qu’il est prescrit
que nous soyons. Car expérimenter qu’on est éternel, c’est expérimenter qu‘il y
a en nous une dimension irréductible à ce que nous sommes. Il y a en nous une
dimension irréductible à ce que nous sommes. Le destin qui nous confine dans ce
que nous sommes c’est précisément ça que vient rompre cette expérimentation que
nous sommes éternels. Quand nous expérimentons que nous sommes éternels, nous
sommes autre chose que ce que nous sommes. C’est la grande question. Vous voyez
qu’il y a une solidarité entre éternité et exception, ie rupture avec ce qu’il est par ailleurs nécessaire que nous soyons.
L’expérimentation dont il est question ici, qu’est-ce qu vivre ? Vivre,
c’est expérimenter qu’on est éternel, sinon c’est survivre, c’est attendre la
mort, c’est résider dans l’immédiat. Un jour de plus avec la voiture et c’est
bon, ou un jour de plus de plaisir.
J’ai vu récemment
une statistique qui m’a beaucoup intéressé, et qui plaidait pour le monde
contemporain. On lit tous les jours de grands plaidoyers pour le monde
contemporain, et ces plaidoyers en général prennent la forme d’un plaidoyer
pour la réforme. Il faut réformer, la France ne fait pas les réformes etc etc…
on n’est pas encore assez domestiqué ! On n’a pas encore compris qu’il
faut être encore bien plus soumis au mat démo que nous ne le sommes ! Et
alors qln disait : il e faut nous leurrer, le monde d’aujourd’hui est absolument
formidable, la statistique est là, nous faisons l’amour 4 fois plus que nos
ancêtres ! J’ai trouvé ça formidable. C’est probablement vrai d’ailleurs,
mais là il y avait qch d’assez nu dans la statistique, qch qui me plaisait.
C’est qln qui allait au cœur du pb. Je ne sais pas comment on a compté, mais il
y a eu une enquête menée. Lui il disait pas qu’on expérimentait qu’on était
éternel, mais qu’on expérimentait 4 fois plus la bonne vie. Qu’est-ce que
vivre ? Il avait sa réponse ! Réponse classique, il faut bien le
dire, il ne l’a pas inventé. Sa thèse, c’est aujourd’hui on vit 4 fois plus. En
route vers l’éternité, le chemin est long. 4 fois plus, 5 fois plus, 10 fois
plus. Quand on arrivera à 100 fois plus, on sera épuisés… Et alors, vous voyez
le pb aujourd’hui c’est de savoir où ça se tient. Si on n’adopte pas ce type de
réponse un peu exagérément empiriste. Où ça se tient ? La question
qu’est-ce que vivre je dirais que c’est une question topique, c’est pour ça que
la topologie, la question du lieu, de l’être là, deviennent primordiales. Nous
expérimentons que nous sommes éternels, mais où ? Quel est le lieu de
cette expérimentation ? Il serait idéaliste de dire c’est ma conscience,
c’est moi comme individu etc… Tout cela serait du retour à l’idéalisme
vulgaire. Nous avons à penser où qui est une figure abst originale. C’est pour
ça que la question du corps, en tant que localisé, qu isouteint la localisation,
qui nous dit où cette exp a lieu, et puis la construction du présent, qu iest
la dimension temporelle de l’activité d’expérimentation, est décisive. C’est
pourquoi nous retrouvons notre schéma qui nous dispose nécessairement l’idée dans son éternité effective dans
la double relation, nouvelle et à construire, entre une corporéité de type
nouveau, qui en assure la localisation, et la création d’un présent, qui
l’arrache à la temporalité courante. C’est ça assurer la solidarité organique
entre corps, présent et éternité, voilà l’enjeu. Ie définir une éternité telle
qu’elle assume en elle-même la levée conjointe du corps et du présent. C’est ça
le but. Une fois fixé ça, on commence par quelques remarques sur le mat démo
lui-même, sur son identification. Nous l’accompagnerons tout du long, c’est
notre adversaire, on sera près de lui et au plus loin en même temps (théorie de
l’adversité l’an dernier).
Le mat démocratique
est l’ensemble des csq de l’axiome : il n’y a que des corps et des
langages. Donc axiome simple, très transparent. Cet axiome est si simple que
nous voyez bien en quel sens nous le partageons tous nécessairement. S’il est
vrai en particulier que l’idéalisme a été vaincu, s’il est vrai par csqt que
Dieu est mort, il parait alors absolument raisonnable de dire il n’y a a que
des corps et des langages. Ça veut dire qu’il n’y a pas d’âme immortelle à
laquelle est promis ceci ou cela, il n’y a pas de Dieu transcendant qui crée et
gouverne les corps et distribue les langages etc… Il n’y a que des corps et des
langages, c’est la thèse fondamentale. Il est vrai qu’il n’y a que des corps et
des langages, tout le monde partage cette option. Quelques csq de cette axiome.
Je les donne à partir de 2 passages à partir du §5 page 2. C’est le passage qui
vient tout de suite après : « pour le matérialisme démocratique le
présent n’est jamais créé, il affirme qu’il importe de tenir le présent dans la
limite d’une réalité atone, et que pour lui toute autre vision plie les corps
au despotisme d’une idéologie… il propose de nommer pensée la pure algèbre de
l’apparaître… fétichisme du passé…». Je voudrais
expliquer ces csq. Le point central est que le matérialisme démocratique sous
l’énoncé il n’y a que des corps et des langages, pose nécessairement un principe
d’équivalence générale. Libre aux marxistes de dire que s’il pose un principe
d’équivalence générale, c’est que sa loi est finalement celle de l’équivalent
général, ie l’équivalent monétaire. On peut dire
ça mais ce n’est qu’une appropriation 2nde du matérialisme démocratique
qui est il n’y a que des corps et des langages. Et s’il n’y a que ça, vous avez
fondamentalement une permutabilité des corps et une équivalence des langages. C’est
pour ça que c’est un mat démo. Démocratique car s’il n’y a que des corps et des
langages, ça veut dire qu’il y a substituabilité des corps et équivalence des
langages. Car si vous vouliez installer de la différence ou de la hiérarchie il
faudrait qu’il y ait autre chose que des corps et des langages. Tout langage
prétendant assigner des prédicats particuliers au langage et au corps serait un
métalangage, ie un langage qui règle la hiérarchie des
corps et des langages ie un langage qui s’excepte
de la loi générale qu’il n’y a que des corps et des langages. Donc ce type de
mat est démocratique dans son essence, ce qui fait sa puissance. C’est un mat
qui a une présupposition en apparence relativiste (c’est une apparence). C’est
un matérialisme relativiste dans son essence puisqu’il exclut qu’il y ait une
clause d’absoluité. Le seul absolu c’est qu’il n’y a que des corps et des
langages, donc substituabilité des corps et équivalence de langages comme seul principe
d’organisation des énoncés. Ce qui veut dire que tout s’équivaut, les homme s
aux femmes, les cultures sont toutes excellents, les opinions sont toutes
bonnes, j’ai mon opinion et toi aussi. Et tout est bien, car à la fin des fins
il y a un régime de non hiérarchie qui est démo dans son essence. Le point est
important et demande un peu de technique (Livre VI) dont nous pouvons donner
une intuition : c’est le prédicat d’atonie de la réalité. La réalité est
atone au sens suivant : elle ne comporte pas de clause de décision
radicale. Il n’y a pas d’instance de décision radicale interne au mat démo
autre que son axiome. Il y a son axiome mais le monde qui est ouvert ou
constitué à la lumière de cet axiome ne comporte pas de clause de décision
radicale. Or j’aurai à revenir là-dessus, mais j’appelle point d’un monde un
moment où ce monde contracte en quelque manière en un point qui est tel qu’il
relève effectivement de la décision pure, du oui ou du non. C’est une figure
interne du monde qui soumet les processus en cours (ne parlons pas des consciences)
à l’astreinte du 2, du oui ou du non en un point. Le point est un point, ie pas la balance globale de la situation. Mais en tant que point il impose
la figure de la dualité décisionnelle et contracte la totalité de la situation
dans cette localisation décisionnelle. Nous reviendrons sur cette question du
point, décisive et complexe. J’appelle monde atone un monde dont on suppose
qu’i lest sans point. J’ai proposé une théorie complète du point, mais là je la
donne dans sa simplicité : contraction du monde dans un moment où il faut
dire oui ou non, et un monde atone est supposé sans point. Une des csq du matérialisme
démocratique est d’exiger l’atonie du monde, ie
d’exiger que les mondes soient atones et que précisément l’atonie soit la
valeur même du monde considéré. L’idéal du monde c’est son atonie. C’est qch
d’important. Parce que je soutiendrais aussi que qu’est-ce que vivre, c’est
traiter quelques points, en tout cas. La vie ne s’accommode pas du caractère
atone du monde. Donc là ce serait la 1ère csq du mat démo, la clause
d’atonie du monde.
Parenthèse : c’est tangible dans la réaction des autorités gouvernementales aux
émeutes. On monte sur ses gds chevaux, la presse étrangère déclare la presse à
feu et à sang etc… c’est l’horreur qu’il se passe qch, une horreur panique, car
il ne se passait vraiment pas gd chose. Si ça c’est le pays à feu et à sang,
qu’est-ce que c’est qd c’est la révolution française, ou l’occupation nazie. Se
demander s’il y a eu 1000 ou 1500 voitures brûlées, c’est un spectacle pauvre.
Mais à l’arrière plan de ça dans ce qu’on appelle le sécuritaire (les Français
veulent la sécurité, c’est leur attribut principal dit-on, peut-être veulent-ils
l’aventure). Mais la sécu c’est quoi ? C’est la garantie que le monde est
atone, c’est ça ! La garantie de l’atonie du monde, il n’y aura pas de
point. Bien plus importante est la clause d’atonie du monde que la sécu en son
sens empirique. Je n’aurai pas à décider quoi que ce soit. La France a une gde
tradition de désir de l’atonie. La figure la plus frappante c’et le
pétainisme : faire comme si les All n’étaient pas là, faire comme si on ne
savait pas très bien ce qui arrivait aux juifs. C’est ça l’atonie : c’est j’ai
rien à décider, je ne vois pas, je continue, je rase les murs. Le désir de sécu
et d’atonie a atteint son apogée sous le pétainisme qu’on cherche à nous
refiler sous une forme démocratisée. Un pétainisme soft. Donc 1ère
csq : on suppose que l’idéal du monde est son atonie. Comme toujours il y
a des prosateurs et des systématisateurs américains qui vont loin là-dessus
depuis 25 avant et même avant : l’idéal de la vie c’est une vie familiale
tranquille. Ce sont les lointains descendants de l’énoncé à mon avis
malencontreux de Voltaire il faut cultiver notre jardin. C’était pas forcé de
s’opposer à L avec une conception aussi peu stimulante. Il faut cultiver notre jardin
c’est une variante de l’axiome d’atonie du monde. C’est la 1ère csq.
La 2nde
csq, je vous la donne à la fin du §5 : « la vie des corps-langages
est la succession conservatrice des instants du monde atone ». Cette succession veut dire : il n’y a pas de présent à
proprement parler. Il y a succession des instants. Ie le point ne convoque de
façon créatrice aucun présent réel. Après csq sur le passé, ie les csq culturalistes : plus le présent est maigre, plus le passé
doit être représenté, en quelque sorte historisé, exhibé, montré comme une
culture séparée. C’est la profondeur fictive du passé : une passion de
l’histoire au sens médiocre, de l’histoire conservatrice.
Donc 2 csq :
atonie du monde ie absence de point et
inexistence du présent.
Alors l’absence de
point est généralement appelée en effet sécurité. Le matérialisme démocratique
est un mat sécuritaire car la sécu est le nom technique de la protection de
l’atonie du monde (vision technique de la sécu). C’est un monde sans présent et
là on dira que c’est car il abolit le présent sous l’immédiat. Succession veut
dire ça : abolition du présent au profit de l’immédiat.
Donc 2 disparitions :
- disparition des
points de décision comme points du monde, au profit de l’atonie (logique sécu
au sens large)
- disparition du
présent au profit de l’immédiat, ie
détemporalisation.
Donc le matérialisme
démocratique est une doctrine sécuritaire détemporalisée. Le pb c’est qu’il est
la protection violence de toute cela : il doit organiser la protection
violente de l’atonie sécuritaire et de la détemporalisation. Il considère comme
une menace l’apparition du tout point quel qu’il soit, ie de tout lieu ou décider qch, et aussi comme menace la création de tout
présent réel, ie au sens de présent actif, ie autre chose que la succession de l’immédiate.
Nous devons nous
contenter de ces 2 csq, disparition du P sous l’immédiat, détemporalisation, et
fixation sécuritaire de l’atonie.
Au regard de ça que
va dire la dialectique matérialiste ? Elle va introduire un axiome différent :
il n’y a que des corps et des langages, sinon qu’il y a des vérités. Ou sinon
qu’il y a de l’idée. Nous verrons ces nuances, sujet, vérité, idée, éternité.
On enregistre corps et langage et on ajoute une exception. La ligne général de
csq de cette thèse d‘exception : on entérine le matérialisme mais on ouvre
la possibilité d’une exception. Les csq vont être contraires : la dialectique
matérialiste ne s’accommode pas de l’atonie du monde. L’atonie du monde résilie
l’exception (c’est une de ses def possibles) et donc le sinon que des vérités
ouvre toujours à la possibilité que le monde ne soit pas atone. Si vous dites
qu’il n’y a que des corps et des langages, d’accord, mais avec vérité, on ouvre
la possibilité qu’il ne le soit pas. Il est possibilité que qch ouvre le monde
à la possibilité de sa non atonie. C’est le 1er point. 2nd
point : pour autant qu’il y a une exception elle crée un P. c’est une hypothèse
de temporalisation. Nous pouvons dire contre le sécuritaire atone, la dialectique
matérialiste pose la possibilité de l’existence de quelques points. Elle pose
la possibilité qu’il y ait quand même qch à décider finalement.
Parenthèse : la loi du monde c’est vous n’avez rien à décider, tout est déjà
décidé. Ça a déjà été décidé. On dit mais pourquoi c’est comme ça ? on
sait pas ! c’est la loi du monde atone précisément ; si le monde
atone on peut pas poser la question de savoir pourquoi, c’est déjà un point. Ce
qui pose la question de l’atonie du monde, c’est les grèves, émeutes, rassemblement,
ie des trucs archaïques et pathologiques. On ne peut
cristalliser l’atonie du monde en un point sans que ce soit plus atone. Donc
impossible décider quoi que ce soit et où personne a décidé cette atonie. Vous
êtes dedans. Ce que va dire la dialectique matérialiste c’est il y a quelques
points, ce point qu’i l y ait quelques points. Nous en avons vu quelques uns
nous pensons qu’il y en aura d’autres. Et quand il y a qch on ne laissera pas
dire que ce n’est pas un point si c’en est un. C’est une partie de la
répression actuelle c’est pour expliquer que ce n’est pas un point, ça, ce qui
se passe, qui ne requiert pas autre chose des citoyens et que le maintien
absolu de l’atonie et du principe sécuritaire renforcé. Donc c’est la 1ère
caractéristique, la possibilité qu’il y ait des points. 2nde
caractéristique ; ce sera que soit réouverte la question du présent. Mallarmé
disait « un présent fait défaut ».
Cette carence du présent, le fait que le présent comme présent actif puisse
être absent a été observé déjà de longue date, et M l’attribuait au fait que la
foule ne se déclarait pas. L’atonie du monde tenait à ce que la déclaration de
la foule, ie l’instance d’un pont collectif,
n’était pas donnée. La dialectique matérialiste énoncera : de même que
quelques points sont possibles, de même la réouverture du monde au présent
actif est aussi une possibilité. Et alors la prochaine fois nous reprendrons
cela plus en détail, et plus précisément à la manière dont ce présent est le
démêlé entre les 2, ie où est la scène du conflit,
où la possibilité de se confronter au mat démo trouve-t-elle son instance
d’acuité ? Question : y a-t-il aujourd’hui un point pour la pensée,
et où est-il ? Un point tel que décider d’une orientation idéo ait un
sens. Décider que certes peut-être il n’y a que des corps et des langages mais
peut-être aussi que en incise de ce il y a, il y a aussi quelque chose qu’il
n’y a pas. une idée c’est ça, et c’est aussi ça l’éternité. La mer allée avec
le soleil peut-être. Mais il y a aussi qch qu’il n’y a pas. Ce qui peut se dire
autrement : nous ne sommes pas condamnés à l’atonie du monde.
Je vous rappelle les
dates : 11/1, 1/3, 28/3, 21/4, 31/5, 14/6
Que sommes nous en
train de faire ? Nous sommes en train de proposer un cadre d’évaluation de
la situation idéologique, subjective, qui est la nôtre dans le monde
contemporain. C’est un cadre philosophique ou préphilosophique qui dessine une
sorte de schème formel pour y pouvoir y inscrire les caractérisations
fondamentales de la période. Ce cadre, quel en est le but ? il s’agit de
disposer la possibilité d’une orientation de la pensée, mais aussi
d’orientation de l’existence, de la vie pratique. Il s’agit q’elle soit en tout
cas dans une possibilité d’orientation. Ie en réalité il s’agit de venir à bout
de l’effet désorientant de la contemporanéité. Quand un tel cadre est obsolète,
ce qui se passe c’est que se multiplient les situations qui ont un pouvoir de
désorientation. Se multiplient les points de la situation dont l’effet massif
est de constituer une désorientation essentielle à la fois de la pensée et de
l’existence, et de leur lien. Et donc disposer d’un cadre dans lequel
redéployer l’ensemble de ces faits et de ces questions, c’est aussi travailler
à la création d’une orientation au sens où nous avons indiqué l’année dernière
que cette question était fondamentale. C’est véritablement une caractéristique
du monde que l’orientation de l’existence y est difficile, car elle est livrée
à l’immédiat. Et être livré à l’immédiat, c’est tout comme être jeté au lion,
c’est un martyre. Je ne dis pas que nous soyons les chrétiens du monde
contemporain.
Je voudrais pour
commencer coter un certain nombre
de faits parmi ceux que j’appelle les faits désorientants, ou les pb en
impasse, ou les interrogations sans issue, tant qu’on n’a pas un cadre ordonné
et nouveau. Je vais parcourir 12 faits ou interrogations dans un désordre
affreux :
- que signifie
exactement un sondage, paru aujourd’hui, dans
lequel il est dit que 63% de la population nationale pense qu’il y a trop
d’immigrés. Le sondage insiste sur le fait que ça monte ! Bientôt 95 %
peut-être… On peut le prendre comme un fait désorientant : qu’est-ce que
ça veut dire ? D’abord que veut dire « trop », le syntagme « trop ».
Les gens ne sauraient pas le dire : à partir de quand y en a-t-il
trop ? en voient-ils trop ? Il y a des coins d’Alsace où on dit qu’il
y en a trop, sans qu’il y en ait un seul là bas. C’est un énoncé subjectif à
l’origine d’une bonne partie de la politique. Il est opaque. Pour lui donner
une quelconque transparence ou signification, il faut savoir qu’est-ce qui
autorise à dire trop. Quel est en quelque manière le transcendantal numérique
de l’assertion ? Que veut dire trop ?
- et puis que veut
dire « immigré » dans ce système de
représentation ? ce n’est pas transparent non plus. Il y a trop de gens
venus de l’étranger ? ce n’est pas ça ! ce n’est pas le statut
objectif d’immigrés. Est-ce une figure racialiste, les noirs, les arabes ?
Cet énoncé est désorientant à lui seul, en tant qu’affecté d’un indice.
Vous voyez poindre
la question que la désorientation est souvent la question d’une opacité de la
norme. Trop, c’est un jugement. Quelle est la norme d’un jugement ? C’est
opaque et cette opacité fonctionne de telle sorte que le jugement est
désorientant y compris pour celui qui le prononce. Celui qui le prononce dit
qu’il est désorienté en réalité. C’est une manière pour lui de nommer de façon
semi-criminelle (dans les conséquences) sa propre désorientation. D’ailleurs
une forme de la question dans le sondage est : est-ce vrai qu’on ne se
sent plus vraiment chez soi ? Ils sont perdus chez eux ! C’est un
énoncé désorientant par quelque bout qu’on le prenne. C’est un syntagme
désorientant de la conjecture contemporaine.
- la Chine : comment se fait-il que la Chine, paradigme révolutionnaire
extrémiste il y a 25 ans, soit aujourd’hui le principal concurrent des
américains pour la puissance capitaliste ? Quelle pensée dial peut rendre
compte d’un tel retournement ? D’autant que la compétition semble être
dans un élément homogène : ce n’est pas du tout comme la compétition de
l’URSS et des Etats-Unis du temps de la guerre froide ! Ce n’est donc pas
la compétition de 2 systèmes hétérogènes pour un contrôle total sur l’espace
mondial. Comment se fait-il que la Chine soit venue à cette place, alors qu’il
y a 20 ans elle était assignée à définir l’hétérogène en personne, au regard du
système impérial dans ses différentes composantes ? Nous dirons :
quel est le principe dialectique, la loi immanente de ce type de
renversement ? C’est énigmatique. Tout le monde sait bien que le mot Chine
recouvre une puissance mais une incertitude. La Chine est devenue l’interrogation
majeure de la planète en termes de puissance.
- pourquoi et
comment s’est installée de manière assez récente la disjonction contemporaine entre philosophie et mathématique ? (je cavale dans des symptômes hétéroclites) Alors qu’elles ont été
mêlées de l’Antiquité jusqu’à Descartes, et étayées l’une l’autre jusqu’à
Husserl ? Petit à petit a œuvré, a travaillé un élément de disjonction
entre les 2, qui est un élément dont nous héritons aujourd’hui et qui est
devenu obscur. Ce qui existe est une spécialité, la philo des maths, mais elle
ne porte pas remède à la disjonction : c’est un objet, donc une condition
extérieure à l’être propre de la philosophie. On dira : qu’est-ce qui
aujourd’hui organise le partage disciplinaire ? Question
foucaldienne : comment sont organisés les partages disciplinaires, avec
l’exemple abrupt de l’achèvement de la compénétration de la mathématique et de
la philosophie. Ceci est important, car ceci change pour part le statut de la
pensée : ce qui est identifié comme pensée n’est pas identifié de la même
façon si vous soutenez la disjonction ou si vous soutenez la compénétration
nécessaire. Ça porte bien sur qu’est-ce qu’un partage disciplinaire, et comment
transite une identité de pensée dans un tel partage ?
- d’où provient,
d’où peut provenir que des intellectuels
qui se situent eux-mêmes à la gauche et sont situés par l’opinion à la gauche
du spectre de l’intelligentsia nationale en viennent à tenir des propos racialistes et
répressifs ? On s’en indigne, et on proteste, mais le point énigmatique
est : qu’est-ce que c’est que ce cheminement, ce déplacement ? Sous l’effet
de quel système de forces immanentes, de déterminations de pensée, un espace
considéré comme de gauche, progressiste au sens large, plein de générosité et
de soutien aux droits peut-on en venir à de tels propos racialistes et
ouvertement répressifs, dans la grande tradition des propos réactionnaires ?
L’intéressant n’est pas qu’il y ait de tels propos, mais les gens qui les tiennent,
et où ils sont situés. Ce point requiert une analyse, avec des concepts (comme
le concept de gauche, analysé ici même).
- encore un autre point, qui est une variante : comment un grand pays cosmopolite, à
tradition révolutionnaire, comment est la France, après tout, la France est un
pays cosmopolite ne serait-ce que parce qu'elle a eu un grand empire
intercontinental, c'est pas un trou perdu du fin fond de la steppe, la France,
c'est une grande puissance impériale du passé, peut-être déclinante, peut-être
tout ce qu'on voudra, mais c'est un pays originairement cosmopolite. On sait
très bien que pour dire ce qu'est un français, il faut des critères du type
état civil, raciaux etc… Donc comment un tel pays peut-il tenir les
collégiens des parties populaires des grandes villes pour ses ennemis
intérieurs principaux ? Là aussi, si vous voulez,
le fait qu'il ait fallu décréter l'état d'urgence pour quelque émeutes de
collégiens par ci par là, c'est un phénomène dont on ne s'étonne pas assez,
dont la dimension en fin de compte énigmatique ne nous frappe pas suffisamment.
Sa dimension réactionnaire, répressive etc… est parfaitement limpide. Mais
c'est étonnant qu'un grand pays à héritage historique immense et de très longue
date cosmopolite dans sa composition immanente en vienne à décréter l'état de
guerre intérieure contre qui ? Contre une fraction des collégiens des milieux
populaires, il faut bien le dire, c'est comme ça. Quel est le principe de
dérive dans cette affaire ? Qu'est-ce qui rend cela possible ? Que ce pays en
vienne à cela, à tenir cette figure pour un ennemi intérieur, la figure qui
demande une voie de répression féroce : des bandes de collégiens du pays,
voilà. L'effervescence étatique sur ce point, avec des intellectuels médiatique
à l'appui, la désignation de cela comme le pb numéro 1 du pays, est une affaire
absolument pathologique. Et cette pathologie doit nous interroger non seulement
sur la nécessité de prendre position sur ce point, mais qu'est-ce qui rend
possible cela dans l'ancrage du pays lui-même ? Si on ne fait rien dans ce sens
là, ce qui se passe est désorientant, essentiellement désorientant, et pas seulement
réactionnaire, indigne ou réactionnaire. Le fait que ce soit désorientant est
plus important.
- Autre chose : d'où provient – question délicate et complexe – la raréfaction
patente entre art de masse et densité artistique ?
D'où vient que ce qui a à l'évidence une densité artistique novatrice dans le
champ de l'art coïncide de plus en plus rarement avec la possibilité d'un essai
ou d'une réception de masse de la chose en question ? Ce n'est pas un jugement,
mais ça constitue un problème. Le fait est que au 19ème siècle par
exemple vous avez de manière patente dans la littérature des possibilités de
coïncidence à grande échelle entre densité artistique maximale et la réception
maximale : c'est le cas de Hugo, c'est le cas de Dickens, c'est le cas Tolstoï
et c'est le cas de plusieurs autres. Et dans toute une partie du 20èle siècle
vous avez cela à l'évidence au cinéma : c'est le cas de Chaplin, c'est le cas
de Hitchcock et de beaucoup d'autres. Donc il n'est pas vrai du tout que dans
l'histoire de l'art au 19ème et au 20ème siècle on ait
une discordance nécessaire entre densité artistique maximale et la raréfaction
du public. Je ne dis pas que c'est toujours le cas : il y a des choses de
grande densité artistiques au 19ème siècle et au 20ème
siècle qui n'ont trouvé qu'un public restreint, mais ce n'est pas une
nécessité, et il y a un nombre significatif de contre-exemples. Il semble
indubitable qu'il y a raréfaction de ces contre exemples depuis la fin du 19ème
siècle, et qui affecte aujourd'hui le cinéma lui-même, où il semble bien qu'il
n'ait plus capacité de figurer au rang de l'art de masse des productions
industrielles. Je ne sais pas combien d'entre nous irons voir King Kong, mais
on a l'impression d'être un peu seul si on n'y va pas. On a l'impression d'une
solitude écrasante, et que c'est celle-là même du grand singe d'ailleurs, ce
désastre de la solitude. Mais il faut prendre ce point comme une question et
non comme une lamentation, comprenez bien. Il ne s'agit pas de dire que l'art
de masse est supérieur à l'art élitaire ou l'inverse, ce n'est pas du tout ce
que je pense. Je pense qu'il y avait une distribution relativement aléatoire et
compliquée, qu'il y avait des figures dans lesquelles les choses se croisaient
et d'autres dans lesquelles elles ne se croisaient pas. Mais là il semble que
ce croisement est de plus en plus improbable, y compris dans ce qui a été au 20ème
siècle l'art de masse par excellence, à savoir le cinéma, de même que le roman
a été l'art de masse du 19ème siècle. C'est encore un phénomène
désorientant : c'est un phénomène qui rend l'évaluation effective des processus
artistiques aujourd'hui extrêmement compliquée en effet. Et surtout qui semble
contraindre à une espèce de résignation élitiste sans avant-garde, qui n'est pas
une bonne chose, qui n'a pas de dynamique propre, forte.
- Autre chose : encore un symptôme en forme de problème. Pourquoi ouvrier est-il un
mot politique dans la France de 1840 où les ouvriers représentent moins de 10%
et a presque disparu aujourd'hui du vocabulaire politique alors qu'ils
représentent beaucoup plus de nos jours, et où si on ajoute les employés qui
s'en distinguent à peine on arrive à presque 50% ? On
dira "c'est le déclin du marxisme etc etc…".
Mais ce n'est pas vrai car ouvrier était un mot politique pour Auguste Compte,
qui n'était pas un marxisme flamboyant, qui considérait que… Ouvrier était
intégré comme mot politique et l'est resté jusqu'aux années 70 à peu près,
ie il n'y a pas longtemps. Sa disparition. Même Arlette
Laguiller parle de Travailleurs, alors que son organisation s'appelle encore
Lutte Ouvrière. Donc la contrainte de sa disparition est très puissante. Mais
il n'y a aucune espèce de raison objective à cela : la thèse selon laquelle les
ouvriers disparaissent est inexacte, ils sont bien plus nombreux qu'au moment
où Marx en parlait, sans comparaison. Donc le destin d'un mot comme mot politique
n'est pas corrélé à des données statistiques objectives. Donc il est corrélé à
quoi ? Quelle est la signification de cette disparition ou de cette soustraction
? C'est un trait désorientant de l'époque, car ce mot avait une fonction
d'orientation, de bien des manières : il fut un mot en particulier de la
discipline populaire. Donc un mot à partir duquel s'organisait la subjectivité
populaire, comme subjectivité certes distincte, séparée, dissidente, mais qui
avait une puissance immanente de structuration et de discipline. Ça a été
remarqué tout du long : ouvrier a été ce autour de quoi la dissidence populaire
trouvait des systèmes de représentation qui lui donnaient consistance, et c'est
on le verra au-delà un problème clé. Non la dissidence populaire, mais la
discipline de type interne dont elle est capable. Donc la disparition de ce mot
comme mot politique a des effets désorientants sans qu'on comprenne le mécanisme
profond de cette disparition. Or il faut être très attentif à la disparition
des mots, c'est un point d'une extrême importance. C'est une transformation
immanente du champ de la politique comme pensée.
- Autre question : dans quelles conditions s'est opérée la prise de pouvoir sur les
masses, et principalement sur les masses de la jeunesse, par la musique ? Quelle est l'origine exacte, le fonctionnement du pouvoir de la musique. Je
pense que le pouvoir de la musique est beaucoup plus important que le pouvoir
des images. Le pouvoir des images est devenu un lieu commun. Mais le fait que
l'articulation subjective de la jeunesse se fasse autour de la musique, autour
des musiques, réclame une explication. Le fait que ce soit établie une sorte
d'indistinction musicale entre musique comme figure artistique novatrice, comme
simple figure divertissement, comme rythmique pure, sont mises sur le même
plan, étalées sur le même plan, et ce processus est lui-même une condition du
pouvoir de la musique en tant qu'elle pluraliste et indistincte, ie pluraliste et sans hiérarchie. Finalement, comment ça s'est fait ? Quelle
sont les csq ? Quelle est l'homogénéité de cela au monde contemporain ?
Qu'est-ce que ça signifie pour le monde contemporain ? Cette question est
difficile, d'autant que c'est consensuel. Remarquez qu'il y a une fête de la
musique, qui n'est rien d'autre que la fête annuelle de son pouvoir. Vous savez
qu'une fête célèbre toujours le pouvoir de quelque chose. Le pouvoir du désir,
de la sexualité, du non-pouvoir, des esclaves, une fête célèbre toujours un
pouvoir. La fête de la musique célèbre le pouvoir de la musique. Mais quelle
est la nature exacte de ce pouvoir, sa nature subjective ? C'est le pouvoir du
rythme : qu'est-ce qui a installé dans le monde contemporain le pouvoir du
rythme, et l'ensemble évidemment de ses supports technologiques (ce ne sont que
des supports, des instruments du pouvoir, et non le pouvoir lui-même). Ce
pouvoir est une composante essentielle du monde aujourd'hui et sa nature n'est
pas claire.
- Autre chose : comment a trouvé prise en France, la France académique, l'installation
de la conception empiriste et grammairienne de la philosophie, la conception
américaine ou anglo-saxonne (les nominations varient) ? Conception extraordinairement tendue envers les autres, qui se définit
elle-même comme la seule conception possible et praticable de la philosophie,
que je définis comme ajointement entre une conception empiriste et une
conception grammairienne (philosophie analytique, nom partiel). Il est clair
que l'espace philosophique en France, y compris l'espace universitaire, a été
originairement hostile à cette conception, depuis Descartes. C'était
l'opposition Locke-Descartes. Il y a une hostilité française à l'empirisme
d'abord, puis à l'empirico langagier d'aujourd'hui, et tout se passe comme si
cette hostilité était défaite petit à petit et qu'on arrivait à l'installation
possible de ce parti. C'est une description, pas un jugement. Or je tiens
qu'une des caractéristiques essentielles de la philosophie française était de
se construire comme philosophie du concept, donc comme philosophie qui ne
pouvait être ni empirique, ni langagière, précisément (c'est le paradigme
cartésien). Philosophie du concept qui va jusqu'à Deleuze, avec des variantes,
mais avec le point en définitive central que la philosophie est en dernier
ressort création de concepts, production de concepts, exhibition de concepts :
c'est le cœur de l'activité philosophique, de la pragmatique philosophique (non
pas comme étude figée, mais comme mouvement, interrogation dans la pensée). Or
le dispositif empirico-langagier est tout à fait autre, à quel moment les
digues ont-elles cédé ? Comment les figures de résistances se sont-elles
ébréchées, de sorte que ce qui paraissait inconcevable dans les années 60 ou 70
soit aujourd'hui largement installé ? Et s'il s'installe – comme une tumeur
j'allais dire – il s'installe avec ses propres normes, sa propre finalité ?
Comment s'est-il installé ? Je ne le sais pas moi-même. Hypothèses plates sur
l'importance des universités américaines et son influence etc…, mais tout cela
est empiriste. Quel défaut de la cuirasse, de l'intérieur, a rendu possible
cela ? La disjonction philosophie mathématique a probablement un rôle là
dedans, les questions s'enchevêtrent.
- Autre point : y a-t-il réellement fusion ou confusion de l'image et du réel à
travers les technologies numériques, les images virtuelles etc… ? Ce pont-aux-ânes de la virtualisation de tout et de l'inséparabilité
objective entre image et réel, est-ce que ça correspond à quoi que ce soit
d'effectif ? Ou bien est-ce que c'est simplement une discursivité idéologique ?
Assistons-nous véritablement à des zones d'indiscernabilité effective entre la
virtualisation numérique, les images artificielles etc… Sommes-nous entrés dans le monde du
virtuel et de la proposition indistincte de l'image ? C'est une question
prégnante et assez obscure. En définitive, de quelle théorie du réel elle se
soutient ? C'est ça la vraie question. Pour pouvoir dire que image et réel sont
en voie d'indistinction à travers la virtualisation numérique de représentation
elle-même, la déconstruction des indices réels distinguant finalement l'image
de la représentation, il faudra une théorie du réel particulière, en vérité une
théorie empiriste du réel, pour que ça se recoupe. Si vous n'avez pas cette
théorie du réel, ça veut dire quoi, ça ? Est-ce que c'est pas simplement ce
qu'on voudrait que nous pensions ? Est-ce que ce n'est pas une idéologie au
sens courant, ie qch qui participerait de l'ordre
général du monde tel qu'il est nécessaire pour sa perpétuation qu'il se
représente lui-même ? Si l'image et le réel sont substituables, alors vous êtes
entraînés dans une théorie du réel qui est hors d'état de vous proposer ce que
j'appelle un point, ie hors d'état de vous
proposer quelque chose à propos de quoi il faille impérativement décider. Moi
je soutiens que la thèse de l'indistinction de l'image et du réel est en
réalité une thèse sur la volonté, sur la décision.
Je ne développe pas, mais ceci donne une interprétation complexe du monde des
images, du virtuel etc… c'est un énoncé important qui signifie ou a pour
finalité de dire que toute décision est vaine, car toute décision est déjà
pré-ensevelie dans les images qui lui correspondent.
- Autre chose : pourquoi s'installe-t-il une hégémonie de la danse dans le spectacle
vivant ? Pourquoi y a-t-il en particulier une corrosion progressive du théâtre
par la danse ? Pourquoi d'une certaine façon la danse
(inventive, aujourd'hui, que je défends, je ne parle pas d'elle-même mais de
son hégémonie sur le spectacle vivant) ou ce qui la transite, à savoir
l'autorité du corps sur le texte, domine-t-elle ? Il ne s'agit pas de trancher
entre corps et texte, mais de constater un fait : l'hégémonie du corps sur le
texte ou, dans les catégories du matérialisme démocratique, l'autorité du corps
sur le langage, ou l'autorité du langage du corps sur les autres langages.
Voilà. C'est une question significative, car elle est très liée aux configurations
idéologiques contemporaines. Ce n'est pas de la responsabilité de la danse : la
danse est installée dans des configurations qui la dépassent, plus essentielles
au corps sociale que la danse elle-même (qui est dans une période d'intense
créativité).
- Enfin : pourquoi la quasi invisibilité de la poésie ? Il y en a, il y a des poètes, de grands poètes, mais il y a invisibilité,
surtout si on compare à d'autres époques ce qu'a pu être son audience large,
populaire, relayée par son audience scolaire. A ma génération, l'une des
disciplines scolaires était d'apprendre un nombre considérable de poèmes, les
avoir comme un trésor subjectif, disponible. On ne le fait plus, on le fait
maigrement, on le fait mal. Cette espèce d'archipel de la langue qu'est le
poème, cette sorte de ressource infinie et immanente de la langue qu'est le
poème est éloignée, est mise dans l'invisibilité craintive (qui se solde par le
fait que les éditions de poésies sont confinées dans des espaces de plus en
plus étroits). De même que je disais que la théorie des images, leur
souveraineté, était en réalité une proposition qu porte sur la décision, je
pense que la quasi invisibilité de la poésie porte sur la déclaration. Parce
qu'un poème, quelque soit son régime stylistique, est une déclaration, il
fonctionne comme cela : ce n'est pas une narration – sauf l'épopée – c'est une
déclaration. Le poète déclare quelque chose qui s'impose à l'examen de tous, au
nom seul de sa vacuité ou de son immanence. C'est une déclaration sur la
ressource infinie de la langue dans ce qu'elle charrie de prononciation sur e
qui est. De même que le monde contemporain par des ressources subtiles tente de
porter atteinte à la décision (il veut enseigner qu'en réalité on ne peut rien
décider, ou que tout est déjà décidé), et bien on n'a pas réellement le droit
de déclarer. Le poème est le lieu de la déclaration, de l'infini comme
déclaration.
L'ensemble de ces
points je vous les livre comme symptôme de désorientation, car ce sont des
points de concentration du monde contemporain dont la figure même est énigmatique,
à propos duquel le monde ne propose pas de cadre général. Il les entérine en son propre sein.
Je rebondis
immédiatement à partir du poème, à propos de 2 énoncés, dans paroles
d'archipel
Page 411 pléïade,
dans le recueil intitulé "Quitter"
(le titre me plaît, c'est sûr que nous avons à quitter qch). Ce sont des
déclarations, Char est déclaratoire, parfois à la limite du sentencieux, à la
fin des années 50, et l'archipel de 60. Je vous les fais entendre :
"Dans la
marche" : "nous ne pouvons vivre que dans
l'entre-ouvert, exactement sur la ligne hermétique de partage entre l'ombre et
de la lumière, mais nous sommes irrésistiblement jetés en avant tout ce que
notre personne prête aide et vertige à cette poussée".
Je voudrais revenir
sur l'expression : "la ligne hermétique de partage de l'ombre et de la
lumière" comme récapitulatif de tout ce que j'ai di avant.
Chaque point a quelque d'hermétique, d'énigmatique, et on sent bien que c'est
parce que n'est pas fait à son propos le partage entre l'ombre et la lumière.
Quand nous sommes confrontés à ces points, en effet, nous sommes exactement
confrontés à cette ligne hermétique de partage entre l'ombre et la lumière, et
évidemment nous allons êtres poussés dans le franchissement de cette ligne,
soit du côté de l'ombre, soit du côté de la lumière. C'est pour ça que cette
question est de savoir comment franchir la ligne hermétique entre la
disposition de l'ombre et la disposition de la lumière. Et un peu plus loin
Char parle du sentiment qu'on peut avoir aussi aujourd'hui qui est le sentiment
d'être plus proche de quelque chose qui semble à la fois finir et ne pas devoir
finir que d'un commencement, il dit ceci : "pour l'aurore, la victoire
c'est le jour qui va venir, pour le crépuscule, c'est la nuit qui engloutit. Il
se trouva jadis des gens d'aurore. A cette heure de tombée, peut-être, nous
voici". Alors là je retiendrai "à cette heure de
tombée, peut-être, nous voici". C'est la même
chose, peut-être, mais à cette heure de tombée, ie là
où la menace, la menace de la nuit, peut-être avons-nous à être des gens des
crépuscules. Des gens du crépuscule, non pas au sens où nous serions ce par
quoi transite la nuit, mais des gens du crépuscule qui tiennent en eux-mêmes,
justement, la survie du jour, des gens qui au moment de la tombée ne vont pas
consentir. Nous voici à l'heure de la tombée, mais non pas à celle du consentement
: il faut au contraire que le jour soit retenu. Absolument comme les gens
d'aurore étaient ceux qui était fait pour qu'un commencement demeure, qui ne
soit pas englouti, qui ne soit pas prématurément englouti par le jour. Nous,
nous serions des gens qui se retiendraient de consentir à la nuit.
Pour conclure cet
examen anarchique du monde, je voudrais vous recommander 3 livres sur des
points liés à la conjoncture.
1° Tout d'abord, sur
la question de la ville et de l'émeute, les
émeutes urbaines, les émeutes de banlieue. J'ai dit la dernière fois que le
simple mot banlieue fonctionnait aujourd'hui comme un mot d'exil, exil hors de
l'espace de la ville. C'est pourtant la ville, à moins que l'on n'appelle
ville, petit à petit, que là où les riches sont retranchés. La ville est
l'espace général de la socialité urbaine dans son ensemble. Ce qu'on appelle
banlieue, c'est la majorité de l'espace de la ville et de ses habitants. Et
alors, à propos de la ville et de sa relation à l'émeute, précisément, de son
caractère en définitive toujours fécond, difficile, obscur, de la relation
entre émeute, insurrection et ville, je vous recommande le livre superbe de
Eric Hazan, l'Invention de Paris.
C'est un livre au sujet de la ville, admirable par sa connaissance
extraordinaire de Paris, mais aussi surtout par l'intimité du rapport qu'il
établit entre la ville et le destin d'émancipation qu'elle porte pour les
masses de gens qui y habitent. Il y a des pages admirables sur les différentes
insurrections parisiennes, 1830, 1848, la Commune etc…, et vous y trouverez
aussi, ce qui est revigorant, une vision optimiste du devenir de Paris. Ie
enfin de compte, on n'arrivera pas à enclore Paris dans les murailles du
conservatisme. Il y a eu bien d'autres époques on a cru qu'on y arriverait, que
Haussmann l'a cru, des époques où ont sévi les urbanistes réactionnaires, mais
en réalité Hazan soutient la thèse selon laquelle la ville restera effervescente
à condition qu'on comprenne que son espace s’agrandisse, que son espace ne peut
être dessiné, clôturé, pas même par le périphérique. Périphérique dont il dit
des choses admirables, comme nouveau rempart d’une ville qu'on souhaiterait
close mais qui ne parviendra pas à se clore.
2° à propos de la question
coloniale, agité de toute part depuis qu’il y a eu une loi qui
enjoignait de considérer sa dimension positive. Je pense qu’il y a un point
important à saisir dans le colonialisme, qui n’est pas de savoir si on
objectivement on a construit des routes, des hôpitaux etc… mais quelle était la
subjectivité coloniale, de part et d’autre, et quelle était-elle en
profondeur ? quel était en particulier le degré de retranchement hostile
et taciturne des populations dominées par rapport aux colonisateurs ? on a
peu de renseignements là-dessus. devant la quotidienneté de l’occupation, La
masse des gens, c’était quoi. Bowles, la Maison de l’Araignée, livre admirable là-dessus, sur les années 20-30. Le témoin est américain.
Il touche la dissidence intime, prépolitique, de la population colonisée. La
manière dont elle ne consent qu’en apparence à la situation, mais qu’il y a une
réserve subjective profonde qui fait qu’en vérité elle n’y a jamais consenti,
sans que ça prenne la forme d’une rébellion explicite, ou d’une conceptualité
politique claire. Comment, dans la subjectivité du côtoiement du colonisateur,
il y a eu une résistance infranchissable, qui explique la durée brève de la
colonisation au Maroc (un demi siècle). Pourquoi ça ne s’est pas installé plus
durablement ? car en profondeur ça n’a jamais eu lieu. ça a été une
surface, une surface maintenue par la force articulée, une surface qui
transformait la profondeur. Mais en profondeur ça n’a jamais eu lieu car il n’y
a pas eu de consentement authentique de ceux qui en étaient l’objet. Il le dit
en tant que romancier. C’est dit dans la profondeur des personnages : il
l’a vu et l’a écrit.
3° sur l’esclavage
et sur Napoléon. Il y a une querelle sur faut-il
célébrer Austerlitz, est-ce qu’on l’aime ou pas, la grandeur de la France, la
République etc… Sur la relation entre la Révolution Française, l’esclavage, St
Domingue (Haïti) : The Black Jacobins
(Toussait Louverture et la Révolution à St Domingue), C.M.R James. Bonaparte a
tenté de reconquérir l’île, de remettre l’esclavage, et l’assassinat de
Toussaint sur ordre de Bonaparte.
Maintenant,
reprenons un fil plus directement conceptuel.
La dernière fois
nous avons commencé la construction d’un espace de repérage des données
subjectives contemporaines en proposant une opposition binaire entre le matérialisme
démocratique et la dialectique matérialiste. Je rappelle que l’axiome du matérialisme
démocratique est il n’y a que des corps et des langages, cependant que l’axiome
de la dialectique matérialiste est il n’y a que des corps et des langages sinon
qu’il y a des vérités. Vous voyez que en définitive je propose une organisation
du repérage subjective autour de ce qui va être une logique de l’exception
(sinon que). Nous avions déjà dit que un 1er déplacement effectué
par ce partage est qu’il instaure une division du matérialisme, et non une
opposition entre idéalisme et matérialisme. On est dans l’élément du matérialisme,
et il est scindé. C’est la 1ère remarque
qu’on avait faite.
Il y a une 2nde
remarque à faire : dialectique, en tant qu’adjectif, était autrefois
opposé à métaphysique. Dans le dispositif marxiste traditionnel, il y a le
couple matérialisme / idéalisme, et le couple dialectique / métaphysique. On a
2 couples, et on oppose le matérialiste dialectique à l’idéalisme métaphysique,
si on prend les polarités extrêmes. Le remaniement consiste à dire qu’il y a 2
figures possibles du mat lui-même, corrélé à l’idée que Dieu est mort, que
l’idéalisme est fini. Et 2nde opération, l’opposition entre dialectique
et métaphysique est terminée. Pas d’opposition entre dialectique et métaphysique
ici. Pourquoi les marxistes les opposaient-ils ? Car métaphysique est une
philosophie de l’un ou de l’immobile, et dialectique était philo du mouvement
et de la contradiction. On a mouvement et contradiction d’un côté, et identité
et immobilité de l’autre. Donc l’immuabilité et l’identité divine, métaphysique,
étaient opposées à une pensée du mouvement comme contradiction vivante.
Cependant que matérialisme (comme primat de la matière sur l’esprit) était
opposé à idéalisme. Je tiens à préciser que dans mon repérage il n’en va pas
ainsi : dialectique n’est pas opposé à métaphysique au sens où la
contradiction serait opposée à l’identité. Il faut bien comprendre ce point. En
réalité dialectique désigne un opérateur qui instaure la possibilité d’un excès
dans la figure d’une exception immanente. C’est un peu technique. Ça veut dire
quoi ? ça veut dire qu’il y a possibilité que quelque chose vienne en
excès de la stricte répartition des corps et des langages. C’est ce qu’affirme
la dialectique mat. Cet excès, en réalité, n’est ni une synthèse des 2 termes
précédents, ni non plus un terme supplémentaire, qui ferait qu’on compte le 3ème
terme comme ontologiquement distinct. Dialectique va tenter de désigner (c’est
la clé de tous les pb) la possibilité du 3 par rapport au 2, donc d’un excès sur
le 2, ie que nous ne soyons pas contraints ou chevillés à la
dualité, sans que ce 3 introduise un terme supplémentaire isolable et sans
qu’il soit une synthèse. Il va être en exception du 2, il va nommer l’écart du
2 (tout 2 contient un écart) : il va désigner cet écart dans la figure
d’une exception au 2 qui est en quelque manière exception immanente. Il y a un
entre 2, l’entre-ouvert de Char, il n’est pas réductible à l’ouvert, il n’est
pas non plus fermé. C’est l’entre corps et langage mais il n’y a que corps et
langage. L’entre-ouvert ne signifie pas qu’il y a autre chose que de l’ouvert
et du fermé. Il est précisément l’écart entre ouvert et fermé. Ici c’est
pareil : exception immanente entre les 2 termes se réalisant comme excès
sur le 2. Alors c’est pour ça que je dis que dialectique ne renvoie pas à la
contradiction ni à la synthèse. C’est un schéma non hegelien de dialectique.
C’est une exception immanente : quelque chose fait exception au 2 à
l’intérieur du 2 lui-même. Si on veut se le représenter on se le représentera
comme l’écart qui est immanent au 2. Alors c’est quoi cet écart ? C’est le
moment où la conjonction est indiscernable de la disjonction. On peut dire
l’écart sous la forme du i y a et corps et langage, mais on peut aussi dire qu’il
n’est ni corps ni langage. Si vous dites et corps et langage vous dites
l’écart, mais si vous dites ni corps ni langage vous le dites aussi. Il faut
conclure que la dialectique c’est la possibilité que ni ni veuille dire la même
chose que et et (c’est l’intuition deleuzienne). C’est indiscernable. Donc
c’est une disjonction conjonctive ou une conjonction disjonctive. Deleuze
parlait de synthèse disjonctive, mais je suis réticent à aller jusqu’à
synthèse : l’équivalent du et et et du ni ni comme point d’exception au 2
immanent au 2 lui-même. Ce qui permet de dire il n’y a que des corps et des langages
(matérialisme) sinon que il y a ce point possible où le et et et le ni ni sont
indiscernables, et qui est le point le conjonction disjonctive des 2 donc de ce
qui est en exception des 2. L’intuition centrale c’est que c’est cela qui
constitue un présent. Un présent n’est constitué que si se constitue ce qui est
en exception du 2. Dans le mat démo, pas de présent. Dans le 2, il n’y a pas de
présent, nous vivons sans présent. Je reviendrai sur cette figure de la
temporalité.
Parenthèse : c’est car il n’y a pas de présent qu’on a une obsession de la
mémoire. La dernière fois je disais histoire, et l’un de vous m’a fait remarqué
que j’aurais du dire mémoire. D’accord. La conservation du passé est la rançon
payée à l’absence de présent. Je vais vous dire une chose : quand le
présent est intense, le passé cède au présent. Le passé est ce à partir de quoi
le présent est reconstitué dans sa propre visibilité. Donc il n’y a pas de
présent car il n’y a pas de dialectique, de point où le et et et le ni ni
s’équivalent. Quand on est asservi dans la contrainte des corps et des
langages, alors ce qui surgit est au contraire le passé sous quelle
forme ? sous la forme très étrange d’un impératif : le devoir de
mémoire. C’est une expression très étrange : c’est comme si la
conservation du passé prenait la forme d’un impératif. Mais en réalité s’il y
avait un présent vivant, le passé ne pourrait pas être dans la forme de l’impératif.
Il circulerait du point du présent lui-même, il serait vivant par le présent
lui-même, il aurait la vie du présent, il serait incorporé à la vie du présent.
C’est la nécessité absolue de constituer le passé et de le justifier dans la
figure de impératif, qui finit par prendre la forme de la loi, il finit par
prendre la forme de la loi. C’est l’enfermement du passé dans la loi. L’étape
qui le mène à la loi c’est le devoir, il est conservé sous la forme d’un
impératif et est alors tout près d’être recueilli et figé définitivement dans
la forme de la loi. Ce n’est possible que car il n’y a pas de présent.
Par contre, dans la
dialectique matérialiste, on a la possibilité de la représentation du présent
en tant que disjonction conjonctive précisément. Ie le présent c’est ce qui
finalement rend possible une contemporanéité, ie le
fait que soit dans le dans présente vivant et cela et cela et encore autre
chose, ou que nous soyons au présent, vous, moi, d’autres. Donc et et. Mais
c’est aussi ce qui est irréductible et au passé et à l’avenir. Donc c’est un ni
ni. Le présent comme déploiement c’est précisément le moment où le et et (et
ceux-ci et ceux là sont contemporains dans la figure d’un présent affirmatif)
et c’est aussi ce qui n’est justement pas sous la loi du passé ou commandé par
l’avenir. Donc le présent c’est un régime d’autosuffisance de la
contemporanéité. A partir de là, elle peut s’élargir en passé, en avenir etc…,
mais elle ne peut le faire que sur la base d’une autosuffisance reconnue de la
contemporanéité comme telle. Cette insuffisance elle se fait au point de
l’intervalle lui-même, ie au point où on est dans un
ni ni (ni passé i futur) et dans et et (et ceci et cela). C’est la vitalité du
présent.
Le mouvement de la
dialectique matérialiste va être donc de reconnaître la constitution du présent
et de concevoir que la relation fondamentale dans laquelle la subjectivité peut
se constituer comme subjectivité affirmative n’est pas du tout comme le matérialisme
démocratique la relation entre le passé et l’immédiat. Ce qu’on peut dire c’est
que l’absence du présent est colmatée par la prégnance de l’immédiat. Cette distinction
est très importante : le présent n’est pas l’immédiat. Le présent est bien
plus fondamental que l’immédiat. On n’a pas de relation avec l’immédiat. Le
présent est une donnée logique, dialectique, c’est la donnée de l’intervalle
comme tel dans la figure de l’indiscernabilité entre le et et et le ni ni.
L’immédiat est la donnée empirique de ce qui transite. Il est non
subjectivable, il est un immédiat de l’objectivité. L’absence de présent se
réalisme dans le mat démo comme autorité de l’immédiat. Cette autorité de
l’immédiat explique dans une large mesure la souffrance des jeunes. La
souffrance des jeunes est patente, c’est l’asservissement à l’immédiat. C’est
une contrainte terrible qui se donne les apparences de la jouissance et se
réalise en réalité comme destruction. Le fait de l’autorité absolue de
l’immédiat est un prix payé à l’absence de présent. Il faut relever la
contradiction entre immédiateté et présent. La relation fondamentale qui
caractérise le matérialisme démocratique du point de vue de la question du
temps est la relation entre immédiat et passé. La contrainte de l’immédiat est
assortie d’un devoir quant au passé. La législation sur le passé est ce qui
donne une apparence de profondeur à la fugacité et caractère destructif de
l’immédiat. Il y a devoir de mémoire car il n’y a pas de présent mais seulement
de l’immédiat. On ne peut rien construire sur l’immédiat, donc on colmate la
fuite permanente de tout dans l’immédiateté par la législation monumentale sur
le passé. Et vous voyez comment c’est homogène : le fait qu’il y ait des
lois est homogène au fait qu’il y a seulement de l’immédiat, la loi est une
assurance contre la perversion de l’immédiat. Il y a quelque chose d’autre que
la circulation marchande indéfinie et l’asservissement de tout le monde à
l’immédiat. C’est quoi ? Le passé, sous forme négative, conservatrice, sacralisée
etc… Il y a un passé qui ne se réalise que comme morale, loi et religiosité délabrée,
culte misérable. Le devoir de mémoire c’est ce qui réalise dans la société
contemporaine la corrélation impossible entre la profondeur du passé et
l’absence du présent. C’est une relation sans relation, une relation qui ne
relie rien, car l’immédiat ne se relie à rien, il n’est ni relié ni reliable
(c’est ce qui le caractérise). Et donc il va avoir une garantie abstraite dans
l’extériorité législative du devoir quant au passé.
Quelle va être la
relation fondamentale dans la dialectique matérialiste ? C’est la relation
entre le présent et l’éternité. On peut en somme articuler l’opposition entre
mat démo et dialectique matérialiste : d’un côté la temporalité s’édifie
sur la relation sans relation entre l’immédiat et le passé (je dis sans
relation car l’immédiat ne se relie pas vraiment au passé, il va être sous sa
garantie législative, formelle et conservatrice). Il y a injonction législative
de conserver le passé pour que l’immédiat fuie un peu moins.
De l’autre côté,
relation du présent comme constitution dialectique dans sa relation à
l’éternité. Partout où un présent s’et constitué quelque chose d’éternel va
advenir, en un sens qui demande à être recomposé.
Les 2 dispositions
subjectives vont être enracinées dans des temporalisations absolument
différentes. L’enjeu c’est de réinventer l’éternité dans sa corrélation au
présent, et de le f aire au régime dialectique de l’exception immanente, et pas
au régime de la séparation ou de l’extériorité transcendante. Il s’agit que
l’éternité soit immanente au présent comme production vivante, comme création.
Un présent ne peut être que créé, sinon c’est de l’immédiat.
Le cheminement est
donc de réintroduire la dialectique matérialiste dans l’amplitude qui fait que
le présent a comme production immanente en régime d’exception quelque chose
comme l’éternité d’une vérité. Alors ça c’est un trajet, ça ne va pas de soi,
c’est une construction. Cette construction sera notre propos par la suite. Je
vous en donne l’échelonnement. Je vous propose 11 étapes :
- thèse 0 : on
appelle monde un lieu de l’être là des multiplicités (définition). Monde est un
espace d’apparaître.
Commentaire :
l’être comme tel n’est que multiple pur, et monde est un lieu de leur être là,
où elles apparaissent en soi. L’apparaître est une catégorie qui ne relève pas
du phénomène, de la représentation, de la subjectivité.
- thèse 1 : il
y a des mondes, il n’y a pas un monde ou un univers. Il y a multiplicité des
lieux d’apparaître pour les multiplicités. Les multiplicités apparaissent
multiplement. Donc réintroduction de la thèse de la multiplicité des mondes, à
nouveaux frais, thèse capitale car il y a des vérités toujours référés à des
mondes qui peuvent être distincts.
- thèse 2 : la
pensée de ce pluriel est possible. On a souvent présenté la thèse de la
pluralité des mondes comme un obstacle à leur pensée. Aujourd’hui, c’est le
relativisme culturel : il y a des mondes, des cultures, des langage,s et
que ces corps pris dans ces langages ne communiquent pas. La pensée de ce pluriel
n’est pas nécessairement possible pour le relativisme cult. Nous soutiendrons
nous que la pensée de ce pluriel est possible, ie
qu’il y a une logique des mondes. Les mondes sont discernables selon la logique
qui est la leur. Il y a des logiques des mondes. C’est le T. Penser la pluralité
des mondes c’est penser la pluralité de leur logique, ie la pluralité des logiques de l’apparaître.
- thèse 3 : il
y a des événements. Event étant défini comme un changement dans le monde non
pas du monde mais de sa logique. Un événement n’est pas une modification du
monde mais une modification de la logique du monde concerné. Donc l’événement
touche à la logique de l’apparaître. C’est une destruction ou une rupture dans
la constitution logique du monde lui-même, et pas une simple transformation
dans le monde. Le transcendantal peut être modifié. La logique des mondes peut
changer.
- thèse 4 : la
pensée de l’événement est possible. Il peut y avoir une théorie du changement
réel, ie du changement des conditions d’existence du monde (et
pas seulement d’un changement interne au monde). C’est une thèse du matérialisme
démocratique qu’il ne peut rien y avoir de tel : les conditions de possibilité
de notre monde nous dit on ne peuvent pas être changées. « la révolution
est une utopie », « les ruptures c’est
mauvais », « les lois économiques sont là » en sont les formules empiriques de la propagande quotidienne. Le
noyau philosophique : c’est pas de changement dans le transcendantal du
monde. On nous invite à nous adapter aux changements mais la loi du changement
n’est pas modifiable (vous avez intérêt à vous adapter !). cette nécessité
de la réforme (= l’adaptation au transcendantal du capitalisme du monde contemporain)
est l’envers de la thèse selon laquelle tout changement de transcendantal est
exclu. Là on va poser que il y a de l’événement et que sa pensée est possible.
Elle est strictement possible : on peut penser l’événement dans son être,
dans son apparaître, dans ses conséquences. 3 régimes de pensée appropriables à
l’existence effective d’événement. Dans son être : auto-appartenance. Dans
son apparaître : intensité maximale. Dans ses csq : comme relève d’un
inexistant. On le verra. Nous ne sommes rien soyons tout : c’est la relève
de l’inexistant. Ici c’est une internationale généralisée !
- thèse 5 :
tout événement laisse une trace. Cette trace sera identique à l’inexistant
relevé. Le terme inexistant en tant que relevé sera trace de l’événement
- thèse 6 :
autour de cette trace, peut apparaître un nouveau corps (exception
immanente : il n’y a que des corps et des langages, ce qui se constitue
autour de la trace est de l’ordre du corps). La condition de possibilité du
transit du présent à l’éternité est l’apparition d’un nouveau corps (pas
seulement agencement ou recomposition de corps préexistants). Comment un
nouveau corps peut coaguler ou cristallier autour de la trace. On va avoir une
compatibilité nouvelle des multiplicités qui va faire surgir la nouveauté d’un
corps.
- thèse 7 : ce
corps va porter la forme d’un sujet. Ce nouveau corps va être objectif mais stt
subjectivable. Il va s’installer dans le monde concerné comme support d’un
sujet.
- thèse 8 : ce
corps subjectivé va créer point par point une vérité. L’ordre propre de
production du corps subjectivé, c’est une vérité. Evénement, trace, possibilité
nouveau corps, forme subjective, production de vérité point par point.
- thèse 9 :
cette vérité est éternelle. Bien que produite dans un monde, elle est
reconnaissable comme telle dans tout monde. Donc elle est l’objet possible
d’une résurrection transmondaine. Elle est réactivable dans tout monde. Ça ne
veut pas dire qu’elle est constamment réactivée. Eternité = existence
transmondaine, ie communication entre les
présents. Il y a présent quand surgit un nouveau corps, on le montrera (ex de
la rencontre amoureuse). Le présent de l’autre monde reconnaît le présent du 1er
monde. Les présents communiquent par l’appropriation possible des vérités. Le
transit du présent à l’éternité passe par la production du corps sujet.
La dernière fois
nous étions restés à l’énumération d’une dizaine d’énoncés, où se récapitulait
le trajet qui conduit du monde, de la pensée du monde tel qu’il est là à
l’éternité d’une vérité, telle que quoique éternelle elle a procédé, elle a été
créée, dans un monde (et donc aussi dans un temps, nous y reviendrons) et se
trouve par csqt disponible dans notre monde ou dans un de nos mondes. C’est ce
trajet là qui était dessiné et la chaîne de concepts qu’il présuppose, qui va
de l’évidence de la présence d’un monde, ie de
l’apparaître, là, d’une configuration d’un multiple pur, à la configuration
singulière d’une vérité dont on admettra à la fois (c’est le pb) qu’elle a été
crée, qu’elle est singulière en ceci qu’elle procède d’une création en un monde
déterminé, et que cependant elle est éternelle au sens d’une disponibilité pour
tout monde, d’une disponibilité qui la détache de son… singulière au monde.
Détachement qui n’est pas réel, sans effacer ou raturer son pouvoir, mais elle
est rendue dispo dans plusieurs mondes sous des conditions dans lesquelles nous
reviendrons.
Je redonne la liste
des 10 énoncés :
0 un monde est
un lieu de l’apparaître (énoncé antérieur aux
énoncés qui structurent la trajectoire proprement dite)
1 il y a des
mondes et non pas un monde, ou un univers (qui serait le seul
monde, l’univers serait le monde sous condition qu’il n’y ait qu’un monde). On
opposera donc le pluriel des mondes à l’unicité de l’univers.
2 la pensée de
ce pluriel des mondes est possible,
et en réalité la pensée n’est rien d’autre que ce qu’on peut appeler la logique
3 il y a des
événements, étant entendu qu’un événement est une
modification ou une transformation de la logique elle-même. Un changement peut
affecter la loi des changements, ie un
chgt du transcendantal du monde. Distinguons entre un changement réel et un
changement qui affecte la logique du changement réel. On appellera événement
une transformation pour autant qu’elle affecte la logique de la transformation,
ie la logique du monde.
4 la pensée de
l’événement est possible. Cette thèse est
articulée : elle est possible dans son être (l’être de la multiplicité
événementielle est pensable, avec l’auto-appartenance comme critère), elle est
possible dans son apparaître (ie dans les
connotations logiques ou topologiques de l’événement, l’événement apparaît dans
un monde, et la pensée de l’apparaître de l’événement est praticable) et
l’événement est enfin pensable dans ses csq, dans le système de ces csq. Donc
la pensée de l’événement est triplement possible au regard de la logique des
mondes : ontologiquement, logiquement, réellement (si on appelle réelle la
pensée telle qu’elle s’effectue dans le registre des csq).
5 tout
événement laisse une trace. Je rappelle que la trace
est toujours dans la figure de la relève d’un inexistant. Il y a un point
inexistant dans le monde, et la csq 1ère d’un événement est toujours
la figure de la relève d’un inexistant, ie de
faire apparaître l’inexistant d’un lieu sous une intensité maximale, alors
qu’il était là avec une intensité minimale. C’est ce que j’appelle sa relève.
Allégoriquement, je cite toujours sur ce point l’Internationale : nous ne
sommes rien, soyons tout etc… mais en réalité c’est une figure générique. Tout
événement s’atteste de ce qui rend possible la relève d’un inexistant. C’est
pourquoi il faut être attentif, lorsqu’on est dans la question de vivre
vraiment, d’abord à ce qui inapparaît, à ce qui inexiste, et non pas à ce qui
se donne dans la brillance d’apparaître maximale. Car c’est toujours dans la
métamorphose de ce qui inexiste que se fait la signature de l’événement, que
l’événement est toujours venue à l’apparaître de ce qui n’apparaissait pas, de
ce qui était là, mais sans y apparaître. Cette relève de l’inexistant va
constituer la trace de l’événement.
6 autour de cette
trace peut apparaître un corps nouveau
(c’est probablement le moment matérialiste essentiel, le moment matérialiste de
la théorie des vérités éternelles). Ce n’est que selon l’apparition d’un corps
nouveau qu’une vérité peut procéder dans un monde et que donc qch peut
apparaître qui soit en exception de ce qui apparaît. Ie il y a des corps et des
langages, sinon qu’il y a des vérités, mais le il y a des vérités est lui-même
corporel, il n’échappe pas à la loi matérialiste des mondes. Il faut qu’il y
ait un nouveau corps pour qu’une vérité procède en un monde, et la théorie du
corps en tant que corps de vérité ou subjectivable est le cœur du pb.
Pourquoi ? Car c’est le moment où vous engagez une logique de l’exception,
ie qch s’excepte de l’uniformité ou de l’équanimité des
langages et des corps sans admettre pour autant que cette exception se fait du
point d’un autre monde, ou d’une transcendance ou d’une altérité radicale. Il
faut donc pouvoir penser le sinon que ou l’exception en immanence à la
matérialité. Il n’y a donc pas d’autre recours que de dire le sinon que des
vérités, le fait qu’il y ait une exception à la loi monotone de l’équivalence
démocratique des corps et des langages, cette exception n’en est pas moins
armaturée dans la matérialité elle-même. Elle fait corps. Naturellement ce
n’est pas un corps disponible, c’est un corps nouveau, un corps qui doit
procéder dans le monde et se constituer comme corps inaugural. Donc l’énoncé 6
est décisif et complexe. C’est le point de savoir comment il y a un avenir
matériel de la coupure événementielle : l’événement fait coupure dans la
logique du monde mais ce ne serait rien, ce ne serait qu’un éclair ou une
césure oubliée si ne procédait pas à partir de la trace de cette coupure la
constitution d’un corps nouveau. C’est là le centre matérialiste du pb :
la dialectique de l’exception n’est matérialiste que sous la condition qu’elle
rende rationnel l’hypothèse d’un corps de vérité. Et donc d’une éternité
d’abord portée par le corps, le contraire d’une éternité spirituelle, une
éternité qui n’est justement ni celle d’un dieu ni celle d’une âme. Une
éternité qui est portée par un corps dans un monde singulier et qui crée ce
faisant une disponibilité universelle.
7 ce corps peut
porter la forme d’un sujet (on l’appellera un corps
subjectivable, sujet désignant un formalisme tel que du point de ce corps
procède une vérité, et que les csq de l’existence de ce corps sont subjectivées
comme vérité).
8 le corps subjectivé
crée point par point une vérité (la production singulière
du nouveau corps tel qu’il porte la forme d’un sujet se nomme vérité mais ça se
fait point par point, ie ce n’est pas un processus
continu ou garanti). Ie la création d’une vérité dans un monde est un processus
discontinu (point par point). Le corps seul ne garantit pas la production de
vérité, c’est le corps dans la procédure du tramé point par point de ses effets
qui peut la garantir. Et les points, c’est une donnée de la situation, du monde.
Le corps procède de façon matérialiste à l’intérieur du monde en tant que le
monde lui propose des points. Le fait de dire que la vérité procède point par
point comme production du corps subjectivable s’oppose absolument à une toute
autre thèse qui est que dès lors qu’il y a le corps subjectivable, alors des
effets de vérité s’ensuivent. Ce qui a été par exemple au 20ème
siècle la théorie du parti : quand vous avez constitué le corps, le
contrôle ou la maîtrise des effets de vérité est sous la garantie de ce corps.
Seulement c’est oublier que le corps n’agit que point par point en définitive,
et que rien ne garantit qu’en tant que corps il dispose des ressources (qui
sont des ressources subjectives) du traitement des points en tant que point. Il
s’avérait incapable de traiter un point, et donc ses effets de vérité
s’annulaient, s’ensablaient, étaient inopérants. Donc l’énoncé point par point
est majeur, et il évite de considérer le corps comme constituant les effets de
vérité. Il en est l’opérateur inéluctable mais il n’en est pas le constituant.
Encore faut-il qu’il soit dans la saisie du point par point dans l’espace où il
opère. Donc une vérité éternelle en fin de compte est réellement tributaire du
monde où elle est créée. Dans son procès, elle est tributaire du monde où elle
est constituée puisque ce n’est que point par point en ce monde qu’elle a pu
procéder comme csq du corps subjectivable. Donc une vérité quoique éternelle
est marquée du monde où elle fut crée. C’est ce qui fait sa singularité, c’est
ce qui fait que son éternité n’est pas une éternité suspendue, transcendante ou
indifférente. Elle sera naturellement détachable du monde par des opérations
particulières puisqu’elle est appropriée d’un autre monde, mais du point de vue
de sa matière elle restera tributaire du fait qu’elle s’est constituée point
par point dans un monde. Au travers des épreuves de ce monde : elle aura
été éprouvée comme telle dans un monde.
9 cette vérité
est éternelle
Alors, je voudrais
d’abord donner la signification de ce trajet, trajet ponctué par les 10
énoncés. On voit bien conceptuellement ou ça arrive : il part des
multiplicités pures et conduit aux vérités éternelles en passant par
apparaître, corps, événement, sujet (la liste du chaînon conceptuel). Je
voudrais plutôt tenter d’en saisir la dramaturgie, de ce trajet. Ie quel est sa
tension propre, son paradoxe, son pb ? Au fond, c’est un trajet qui
conduit de l’indifférence ontologique à la disponibilité de l’éternité, qch comme ça. Au départ, vous n’avez rien d’autre que des multiplicités
indifférentes (je reviendrai sur ce point) et à l’autre extrémité vous avez une
disponibilité des vérités éternelles comme présent (une disposition au
présent). Ça c’est une vision stricte ou polarisée du trajet. Entre l’indifférence
ontologique inaugurale et l’éternité disponible active au présent, vous avez
quoi ? Vous avez la logique, la logique des corps, de la consistance de ce
qui apparaît, la consistance de l’apparaître, et en même temps ce qui peut
perturber cette logique (dans la figure de l’événement). Donc entre les vous
avez le transcendantal (appelons transcendantal la logique de l’apparaître) et
ce qui incise ou fait coupure dans la logique du transcendantal (et va rendre
possible qu’il y ait des nouveaux corps). Nous sommes dans l’énoncé de nouveaux
corps, et pas seulement des corps. C’est à commenter : si on revient à
notre dichotomie initiale, ie opposition entre matérialisme
démocratique et dialectique matérialiste, on dira que le mat démo c’est qu’il y
a des corps et des langages et ce qu’on souhaite c’est que les langages ne
briment pas la capacité des corps, et une fois garanti cela tous les corps et
tous les langages peuvent s’équivaloir dans l’espace qui est l’espace
précisément démocratique. La dialectique matérialiste dit : il n’y a que
des corps et des langages, sinon qu’il y a des vérités. Donc sinon qu’il y a quelque
chose qui est irréductible à la pluralité des corps et des langages, est
accessible à partir de cette pluralité, est accessible universellement. Mais le
vrai pb est qu’on ne peut pas dire cela sans soutenir qu’il y a corporéité, une
matérialité des vérités. Et donc à quelles conditions peut-il y avoir des
vérités… dans un monde qui assure l’être là des corps et des langages. Et c’est
pour ça que je dis entre l’indifférence anonyme des multiplicités d’un côté et
la dispo au présent des vérités éternelles de l’autre, il y a la logique de
l’apparaître (qu’est-ce que c’est qu’un monde, qu’est-ce que c’est que les
mondes, qu’est-ce que c’est que l’être là des multiplicités) et puis il y a
comme condition de possibilité d’un nouveau corps ce qui fait exception à cette
logique, ie ce qui est en incise ou interruption
de la présence là ou de l’apparaître des multiplicités dans un monde.
On peut les ramener
à 3 moments, dans une atmosphère dialectique traditionnelle :
- le moment de
l’indifférenciation ontologique
- le moment scindé
de la logique (scindé car c’est à la fois l’exposition de la consistance de
l’apparaître et l’exposition de sa fragilité, ie la
possibilité que quelque chose advienne qui n’est pas conforme aux lois)
- la disponibilité
des vérités éternelles, disponibilité au présent. Comme on l’a dit la dernière
fois, la question de l’éternité, c’est la question de l’éternité au présent,
ie de la présence de l’éternité. Si on commence par dire
que l’éternité est séparée, on retombe dans un dispositif traditionnel. Notre
pb n’est pas celui d’une éternité disjointe, mais d’une éternité disponible au
présent. Nous sommes proches de Rimbaud : Elle est retrouvée,
quoi ? l’éternité, c’est la mer allée avec le soleil. Elle est retrouvée, le pb de l’éternité c’est qu’elle soit là. Je crois
qu’une des dimensions du monde contemporain, c’est d’exclure l’éternité, comme
si il était de l’essence de l’éternité d’être séparée. En fin de compte il n’y
a que le présent, dans le monde contemporain, ie il
n’y a pas d’éternité car l’éternité ne pourrait être que séparée du présent. Il
n’y a que des corps et des langages, et des corps et des langages au présent. Tout
le pb est d’établir qu’il n’est pas de l’essence de l’éternité d’être séparée
du présent, ie elle peut être là et donc il peut y
avoir une dispo au présent des vérités éternelles quelles qu’elles soient.
C’est cette dispo des vérités éternelles au présent qui constitue le 3ème
temps du trajet.
Revenons sur chacun
des 3 moments
1° l’indifférence
ontologique
C’est le socle
général. Elle signifie que le il y a pur, comme indistinction possible du
possible et de l’effectif, ie le il y a en tant que il y
a, est l’exposition des multiplicités pures, formelles, et que la pensée de
cela, c’est cette figure de la pensée qui exclut le sens, ou se tient au plus
loin du sens, qu’on appelle les mathématiques. L’indifférence ontologique se
manifeste par ceci que les multiplicités comme telles sont dépourvues de sens
du point de vue anthropologique. Elles ne nous destinent à rien et ne sont destinées à rien. Elles sont
des possibilités formelles comme telles. Mais l’indifférence affecte aussi la
pensée, au sens où la pensée de cela est possible, et en certain la pensée
suprême si on veut (puisqu’elle est la pensée de ce qu’il y a absolument saisi
dans son il y a comme tel), mais en même temps c’est une pensée qui ne nous destine
pas non plus, et qui n’est pas destinée : les mathématiques. Cet ensemble
constitue l’indifférence onto primordiale : l’assortiment entre les
multiplicités pures, sans un, qui ne se récapitulent pas dans l’unité d’une
signification, et une langue formelle elle-même exclusive du sens. L’indifférence
ontologique 1ère est cette corrélation : le doublement de l’un
et du sens. Les multiplicités sans un, qui poussées au terme de leur décomposition
s’épuisent dans le vide, et langue et pensée de cette situation qui, dans la
figure du formalisme mathématique, qui se délivre de l’appui du sens, qui est
hors sens. On pourrait dire que la langue hors sens, absente, c’est la langue
de l’absence de sens de ce en quoi l’un est absent, et que l’absence de l’un
transite comme absente de sens dans la langue qui pense l’absence de l’un.
Cette indifférence ontologique, on pourrait dire qu’elle est la transcription
abstraite ou l’ontologie sous-jacente du mat démo lui-même, après tout. Le matérialisme
démocratique c’est il y a ce qu’il y a, et puisque rien ne fait sens, tout fait
sens. C’est à partir de l’indifférenciation onto une conversion du rien ne fait
sens à tout fait sens. Les 2 énoncés sont réciprocables, naturellement, car le
sens n’est sens que pour autant que sa règle de distinction d’avec le non sens
est expérimentable. Si tout fait égalitairement sens, alors en réalité on peut
donner sens à ce qui n’en a pas. Et je soutiendrais volontiers que l’indifférence
ontologique n’est que la forme abstraite ou sous-jacente du matérialisme démocratique,
de sorte que l’indifférence ontologique c’est la restriction de l’espace de
l’expérience à la dimension de l’indifférenciation onto. Et donc que nous
soyons matérialistes signifie que nous acceptons, partageons cette figure de
l’indifférence ontologique comme strate 1ère de l’élucidation de
toute chose, mais nous ne considérons pas qu’elle est exclusive de son opposé,
qui est l’absoluité des vérités éternelles. La dialectique matérialiste est quelque
chose qui a le même socle ontologique que le matérialisme démocratique, à
savoir à la fin des fins il n’y a que de l’immanence, de la multiplicité sans un,
formellement pensable et qui ne nous destine à rien. Il n’y a pas de
destination de l’être, thèse qui s’oppose à son historialité (thèse heidegerrienne
post heideideggerienne), ie il y a une histoire de
l’être qui le destine et nous destine en tant qu’il est destiné. Ni la dialectique
matérialiste ni le matérialisme démocratique ne soutiennent ça. Pour autant
qu’on s’en tient au socle ontologique, il est mathématiquement pensable comme
absence de l’absence de l’un. C’est ce dans quoi on peut s’établir en compatibilité
avec le matérialisme démocratique, tout en faisant ressortir le fond nihiliste
du matérialisme démocratique, ie du monde
contemporain. A savoir que cette indifférenciation doit faire loi, il y a
transformation de l’indifférence ontologique en impératif anthropologique. Tout
vaut tout, tout s’équivaut, ce qu’assure la circulation marchande dont la loi
est celle de l’équivalent général. Il y a un point où tout est commutable en
tout. La loi du matérialisme démocratique est une loi du nombre : c’est la
loi du compte marchand d’abord, ensuite car c’est politiquement la loi du
suffrage. Quand tout vaut tout, on compte, il n’y a rien d’autre à faire qu’à
compter, ses sous et ses voix (et les 2 en même temps très souvent, comme vous
savez). Cela est cohérent, cohérent avec une certaine représentation de l’indifférence
ontologique.
2° la
disponibilité de l’éternité comme présent
A l’autre extrémité
du spectre, interrogeons la disponibilité de l’éternité comme présent.
Qu’est-ce que ça veut dire ? Que veut dire la possibilité des vérités
éternelles ? Je rappelle, une vérité est créée dans un monde (enjeu de la
médiation) : la vérité de l’invention du théâtre est créée dans le monde
grec, celle de la politique internationaliste est créée dans le 19ème
en Europe etc… Des vérités disponibles sont créées dans des mondes singuliers,
mais il faut qu’elles soient telles qu’elle est reconnu du point de tout autre
corps subjectivable dans un autre monde. Une vérité n’est rien d’autre que
cela : qch qui a été créée dans la singularité d’un monde, qui y adhère
quant à sa matière, mais qui cependant est reconnaissable comme telle du point
d’un autre monde, ou plus précisément du point d’un autre corps subjectivable.
Que veut dire reconnaissance ? Que cette vérité est utilisable par le
nouveau corps subjectif d’un nouveau monde à ses fins propres, ie pour la production d’une autre vérité. Cette vérité est dispo non pas pour
un spectacle général, mais elle est dispo en tant qu’elle va quoi ? en
tant qu’elle va être incorporée au nouveau corps. La procédure de reconnaissance
est une procédure de réincorporation. Le nouveau corps va s’incorporer cette disponibilité,
bien qu’elle ait procédé dans un monde différent, logiquement différent. Donc
nous avons un terme fondamental : réincorporation. Je ne vais pas dire réincarnation ! je traîne déjà suffisamment de
casseroles religieuses comme ça. Je ne vais pas en rajouter. Réincoporation car
une vérité a été incorporée, puisque la condition de sa production est précisément
qu’un sujet soit la forme d’un corps nouveau. Il y a toujours eu un corps de
vérité. On dira réincorporé au sens de la disponibilité de cette vérité
produite une fois produite aux fins de la production par un nouveau corps d’une
vérité qui va être distincte, mais qui peut réincorporer l’autre. Ce qui va
rendre du compte du fait que les vérités circulent universellement et que leur
usage peut être extraordinairement hétérogène. Ie que elles ne sont pas
destinées à tel ou tel usage : c’est dans la contingence de la nouvelle
création d’un corps d’un monde nouveau que va procéder la réincorporation de la
vérité ancienne.
Permettez moi de
donner fugitivement 4 exemples (de la Préface de LdM) :
1° exemple
artistique : la réincorporation par Picasso de la stylistique
de la représentation des animaux dans l’art rupestre. Le comparatisme consiste
à trouver le chemin de la réincorporation. Si on compare les chevaux tels
qu’ils sont peints sur les parois de la grotte Chauvet ( ?) et une série
de chevaux de P, on peut cheminer de la ressemblance évident (P connaît l’art
rupestre) à un élément plus radical, la réincorporation, ie la manière dont la stylistique de la représentation du cheval dans la
grotte (30 000 ans, un autre monde, qu’on connaît peu : plus un monde
est vieux, plus il est épuré) est redisposée par Picasso à ses propres fins
(qu’en est-il de la peinture post-cubiste, ie
qui maintient la figuration mais la distord ou la respatialise différemment).
C’est ce qu’on appellera une réincorporation. C’est une disponibilité telle que
qch de ce qui a eu lieu est en effet dispo aux fins de la nouvelle subjectivation
d’un nouveau corps. De quoi s’agit-il ? De ceci que l’animal a une figure
d’apparaître telle qu’il est lié de façon singulière à l’idée. Le trait saisit
l’animal de façon particulière car il en exhibe une reconnaissance schématique
particulière. Ce n’est pas comme n’importe quoi, un caillou informe etc…
Qu’est-ce qu’un cheval ? la peinture ne fait pas que représenter un cheval,
elle dit ce que c’est, et le dit en peinture, pas autrement. Ce dire de ce
qu’est un cheval est incorporé à des objectifs particuliers qui ne sont pas les
mêmes entre Picasso et le peintre de la grotte.
Il y a un cynique
grec qui croyait avoir fait une plaisanterie définitive contre Platon : je
vois bien ce que c’est une cheval, mais je ne vois pas ce que c’est que la
caballéité. Il voyait le cheval mais pas son idée. Ce que je raconte dément ce
cynique : il s’agit de faire voir l’idée du cheval, dans un propos
pictural plus général, mais tel que ce n’est pas ce cheval qu’on va vous
montrer. On va vous montrer les différentes manières de peintre ce que c’est
qu’un cheval. Picasso ne peint pas comme le ou les auteurs de la grotte mais il
s’incorpore ce qu’ils ont déjà fait dans cette visée là à sa propre peinture.
Voilà une réincorporation.
2° exemple
scientifique : la réappropriation des textes math d’Archimède
alors qu’ils étaient devenus incompréhensibles. Archimède, Antiquité grecque
tardive, génie mathématique allant jusque aux abords du calcul infinitésimal,
de l’intégration des surfaces, dans une densité exceptionnelle. Pendant des
siècles, ces textes transitent sans effet : ce dont il était question
était devenu incompréhensible. C’était une vérité perdue. Son éternité
s’atteste à ce que ces textes deviennent des éducateurs fondamentaux à partir
des 15ème, 16ème, 17ème siècles. Ils s’avèrent
disponibles, non seulement comme textes, mais dans leur fonctionnement de
vérité, au prix d’une réincorporation dans un dispositif nouveau conduisant à
la création du calcul infinitésimal. D’un point de vue matérialiste, l’œuvre
d’Archimède est attestée comme vérité éternelle par sa résurrection. En
définitive, l’essence d’une vérité éternelle est d’être apte à une
résurrection. Il y a une chose qu’on pourrait dire, sur résurrection : au
fond, il n’y a que des corps et des langages. Dans le matérialisme démocratique,
il n’y a pas de résurrection. Aucun corps ne ressuscite (sauf dans certains
fables) et aucun langage non plus. Par contre une vérité le peut. Si vous
admettez qu’il n’y a que des corps et des langages, vous excluez la
résurrection. Si vous êtes dans la dialectique matérialiste, vous admettez la
résurrection (il est de l’essence des vérités éternelles de pouvoir être
réincorporées, et par conséquent d’être aptes à la résurrection). Il me
semblait que il y aurait 3 instances possibles du thème de la résurrection
(coquetterie lacanienne). Une instance imaginaire : il y a résurrection
des corps. C’est l’instance que j’appelle religieuse. Une instance
symbolique : il y a résurrection des langages. C’est l’enjeu de
l’historie. Vous savez que l’historicisme a été une des religions modernes.
Mais c’est symbolique. Quand Michelet déclare que l’histoire est la
résurrection intégrale du passé. Au-delà du romantisme, ça veut dire
quoi ? ça veut dire restitution du langage dans lequel le passé s’est
prononcé lui-même, ie résurrection symbolique de
ce qu’a été la circulation langagière du passé comme tel. Ce n’est pas simplement
un langage sur le passé, mais la résurrection du langage objet de ce passé. Ce
langage va exister comme tel dans la réitération de sa symbolique. La religion
est l’instance imaginaire de résurrection, l’histoire est l’instance symbolique,
et les procédures de vérités en sont les instances réelles. Donc sur la
résurrection : imaginaire, symbolique, réel, religion, histoire,
procédures de vérité. On peut donner une définition du sujet. Si un sujet est
la forme d’un corps subjectivable, d’un corps de vérité, si un sujet est ce qui
donne forme à la possibilité des conséquences d’un corps subjectivable. Et si
un tel corps se nourrit de réincorporation (c’est très souvent le cas), alors
on dira que un sujet est ce qui réincorpore une vérité pour une autre vérité.
Et c’est cette capacité de réincorporation subjective pour une vérité qui
porterait l’éternité. Il y a un lien entre l’éternité des vérités et le fait
que le sujet puisse être entre 2 vérités, l’entre 2 du vrai, ie ce qui donne forme à la réincorporation d’une vérité pour une autre
vérité.
3° exemple
politique : (avant le prochain cours vous le lirez !) il
confronte la thématique révolutionnaire moderne, et en particulier la question « qu’est-ce
qu’un Etat révolutionnaire ? » à
la question disputée dans un texte chinois du 1er siècle av JC.
Dispute sur le sel et le fer. Dans les 2 cas, on voit que la question
fondamentale est le rapport entre Etat et égalité. Pour Picasso, la question fondamentale
est le caractère essentialiste de l’apparaître de l’animal, le fait qu’il apparaisse
comme cheval, chien etc… Pour Archimède, ça tourne autour de l’appropriation
mathématique de l’infini. Ici, c’est l’égalité peut-elle se passer de l’Etat.
En politique, un des thèses fondamentale de caractère libéral est que la
liberté doit se passer de l’Etat autant que faire se peut (liberté
d’entreprendre, libertés individuelles, le moins d’Etat possible, pas de
service public, uniquement des services privés). L’Etat réduit à la gendarmerie,
mais pour le reste pas d’Etat c’est la liberté. La question posée là est une
autre question : quel rapport entre Etat et égalité. Au fond, ce qui
circule entre le texte chinois et les textes léninistes au sens flou, ouvert,
et dans des mondes différents, c’est la thèse selon laquelle l’égalité a comme
condition 1ère, peut-être transitoire, l’Etat répressif. Il y a une
concomitance inéluctable entre la volonté égalitaire et l’Etat répressif. C’est
une aporie aussi, une difficulté. Ça transite du thème chinois de l’école des
légistes en Chine du caractère implacable de la loi d’Etat, seule condition
pour abaisser les puissants, mortifier les riches et rendre possible l’égalité,
et puis le thème à l’autre extrémité de la dictature du prolétariat (c’est dans
la forme répressive et autoritaire de l’Etat que transitoirement au moins on
peut espérer briser l’hétérogénéité de la richesse et de la puissance). Ce
thème gravite autour d’une question, en donnant des éléments de réponse, de la
politique d’émancipation, sur la corrélation entre autorité collective et
égalité. Par voie de conséquence, la mise en scène de la pensée relative à la
tension considérable qui existe entre le motif de la liberté et celui de
l’égalité, leur caractère non homogène. Cette question doit être prise au
sérieux, on fait trop comme si liberté et égalité allaient ensemble. On voit beaucoup
de liberté mais pas d’égalité (elle est sacrifiée). Et la fraternité, c’est à
l’intérieur des mêmes strates. Quand il y a liberté, il y a égalité différenciée
et fraternité stratifiée. Et l’égalité alors il semble bien qu’elle ne puisse
faire l’économie d’une destruction des différenciations inégalitaires qui se
heurtent à une résistance énorme. Dès que vous touchez aux riches, vous risquez
votre peau. Ça c’est une loi de l’histoire. On n’y touche pas, à la fin des
fins. La maxime libérale consiste à dire : c’est comme ça, finalement, si
tout le monde travaille tout le monde sera riche. Le point n’est pas la santé
économique générale, mais que devient la maxime égalitaire. L’égalité est revendiquée
comme une norme intrinsèque. Il est frappant de voir que la vérité de cette
difficulté, de la proposer comme enjeu, que ceci soit répertorié dans la thème
de la dictature du prolétariat et dans un texte chinois de plus de 2000 ans. Il
faut une figure étatique répressive transitoire pour installer l’égalité. Elle
ne s’installe pas de façon transitive à la liberté. Ce qui s’installe de façon
transitive à la liberté, c’est une exacerbation de l’inégalité.
4° exemple
amoureux : on s’en tient aux histoires archivées, Tristan et
Yseut, Didon et Enée, Héloïse et Abélard, les archives augmentent aujourd’hui
avec la télé… Je prends la comparaison de Virgile, Didon et Enée, et Berlioz,
les Troyens. Berlioz est porteur d’une conception romantique de l’amour qui
n’est pas celle de Virgile, mais il va réincorporer des éléments fondamentaux
pensés par Virgile dans la conception dialogique de l’opéra. Cette figure de
Didon et d’Enée est dans la dispo d’une vérité éternelle, offerte à la
réincorporation.
Donc voilà pour les
2 extrémités :
- ontologie du
multiple pur, comme onto désanthropologisée (il n’y a pas de destination
anthropologique de l’ontologie).
- théorie des
vérités comme éternité locale (crées dans des mondes singuliers) conjointe à
une procédure de réincorporation (à distance).
Au passage, une
question : si l’ontologie est désanthropologique, qu’en est-il de la
théorie des vérités ? Comporte-t-elle une dimension anthropologique
quelconque ? Il faut dire que l’animal humain, cette bête à 2 pattes, peut
participer à la construction d’un corps de vérité. Il peut être incorporé à un
corps subjectivable. Il n’est pas ce corps en tant que lui-même : il n’est
pas le corps nouveau en tant qu’individu, mais des individus peuvent participer
à la construction de ce corps. Les procédures d’incorporation sont différentes
selon les cas (art, amour, politique). On admettra que l’individu peut
s’incorporer à un sujet. On entre dans une dialectique individu / sujet, et c’est
à travers cette dialectique qu’on peut calibrer la dimension anthropologique
des vérités s’il y en a une. Un animal humain, un individu, peut être
subjectivé. Je conclus que vivre d’une vie digne de ce nom, c’est être
subjectivé. On souhaite que cela arrive à l’animal humain. Ce n’est pas ce que
soutient le matérialisme démocratique : il soutient que il n’y a que des
individus. On peut nuancer : sa maxime c’est il n’y a que des individus et
des communautés. C’est son anthropologie. La maxime de la dialectique matérialiste,
c’est : il n’y a que des individus et des communautés, sinon qu’il peut y
avoir des sujets. Le pb est de savoir comment les individus sont incorporables
à des corps subjectivables, ie sont subjectivés.
La position du mat démo est que la subjectivation en ce sens est ruineuse,
c’est une illusion, du registre de l’imaginaire néfaste. Il ne faut pas être
subjectivé, car la captation par la subjectivation est en définitive la
définition spéculative du totalitarisme. Qu’est-ce qu’un individu
totalitaire ? C’est un individu qui s’imagine qu’il est sujet. C’est très
mauvais. La dialectique matérialiste pose qu’il y a des sujets, ie qu’il y a des vérités mais pris du côté de l’acteur. Par conséquent nous
aurons discord sur ce point qui finalement revient à ceci : le socle ontologique
commun énonce que l’être est non destiné (principe d’indifférenciation onto),
le matérialisme démocratique reste au plus près de ce socle commun et son
anthropologique en est une transcription immédiate (individu et communautés,
corps et langages). Pour la dialectique matérialiste, il y a un écart, qui
passe par l’énoncé « l’individu est subjectivable », il n’est pas réductible aux multiplicités atones ou indistinctes.
Il n’est pas pris dans l’égalité anonyme de e qu’il y a. Il peut aussi être
incorporé à un nouveau corps. On peut dire qu’il participe d’un sujet. On ne
dira pas que l’individu peut devenir sujet (formule équivoque que j’ai
employé par le passé) : il n’y a que des individus, et certains peuvent
être au-delà d’eux-mêmes. Je ne dirais pas que être subjectivé veut dire qu’un
individu se métamorphose en sujet. Ce serait une doctrine de la conversion, de
la mutation sur place. Je dirais que dans les conditions d’apparition d’un
nouveaux corps (excédant l’individu) il y a possibilité pour l’individu d’être
incorporé à ce nouveau corps, et donc de participer à la forme subjective
créatrice de vérités. L’opposition n’est pas entre individu et sujet, avec la
thèse du matérialisme démocratique (il n’y a que des individus) contre la thèse
de la dialectique mat (un individu peut devenir sujet). La possibilité de
subjectivation est une possibilité intrinsèque, elle ne passe pas par les
individus. Ce n’est pas la métamorphose de l’individu en sujet comme conversion
révélante (on a ça quand l’éternité est conçue de manière transcendante, la
religion appelle els individus à devenir sujet). Ce que je propose est plus
matérialiste : pas de métamorphose de l’individu en sujet, mais il peut
être incorporé à une figure subjective. Ça s’oppose au matérialisme démocratique.
L’individu n’est pas sans possibilité au regard du sujet : la
subjectivation est une des possibilités pour un individu, c’est une possibilité
du monde, et pas une ressource individuelle. La subjectivation est proposée par
le monde, sous condition d’événement, du corps subjectivable. La question est
de savoir si on l’accepte ou non, en tant qu’individu. Si on l’accepte, ça
entraîne un régime de csq dont on n’est pas le centre, c’est la logique de
l’incorporation. Voilà ce qu’on peut dire sur les 2 extrémités du propos :
l’indifférence ontologique d’un côté, les multiplicités pures et leur pensée
formelle et l’incorporation aux vérités éternelles et leur communication transmondaine
d’un autre côté. Ça culmine dans une dialectique de l’individu et du sujet.
3° la logique
Maintenant, le
niveau intermédiaire, l’entre deux : c’est le pb principal. Il rend possible
la coexistence des multiplicités indifférentes et des vérités éternelles.
Qu’est-ce qui rend possible le transit ou l’opération de l’un à l’autre ?
Qu’est-ce qui rend pensable l’incorporation individuelle à un
sujet (opération qui est distincte d’une grâce ou d’un miracle) ? Quelle
structure du réel rend possibilité l’apparition d’un sujet et sa production singulière
qui est une vérité éternelle ?
On a sur un bord les
multiplicités indifférentes, sur l’autre les vérités éternelles, et le système
de possibilité c’est la connexion de ce qu’il y a entre les 2. Je vais vous
dire comment procéder : on va construire une énorme tenaille, on va
prendre les 2 bords, et resserrer par couples successifs de concepts jusqu’à
arriver au point commun. Il faut faire un dessin (distribution la fois
prochaine).
On
aurait l’écart entre multiplicités et vérités. L’idée est de disposer des
concepts intercalaires par couples dans un resserrement progressif jusqu’à ce
qu’on ait le lieu d’articulation, commun, qui ne peut être que pensé sur les 2
versants à la fois. On va resserrer petit à petit la compréhension de l’écart
inaugural. Voici les paires de concepts :
1ère
paire :
- du côté des multiplicités :
l’être là / apparaître
- du côté des
vérités : présent créateur
2nde
paire :
- la consistance
logique (donne cohésion au nouveau corps)
- le nouveau corps (matérialité
dans un monde du présent créateur, ie
condition de production des vérités)
3ème
paire :
- le transcendantal
(le fondement de la consistance logique de l’apparaître)
- les conditions
d’existence (pour un nouveau corps)
4ème
paire :
- l’inexistant
- la trace (devenir
existant de l’inexistant)
5ème
paire :
- les points
- les organes (du
corps, appropriés à traiter un point)
L’événement est le
point commun des 2 séries. C’est un concept ambigu :
- du côté des multiplicités
indifférentes, vous avez la question des conséquences de l’événement, qui
relèvent de la logique, des lois de consistance du monde.
- du côté des
vérités, évanouissement, car il est de son essence de disparaître. Ce qui
l’assigne à autre chose qu’à la logique du monde (de consistance et de
perpétuation).
Je redis le schéma
triangulaire :
- multiplicités
indifférentes / vérités éternelles
- être là / présent créateur
- consistance
logique / nouveau corps
- transcendantal /
condition d’existence
- inexistant / trace
- point / organe
- événement.
C’est ce que nous
commenterons. Pour conclure aujourd’hui, un passage de Pasolini. C’est un poète
profond car il anticipe dans les années 50 ce qui nous arrive aujourd’hui.
C’est un passage du poème des Cendres de Gramsci, de 1954. Ce que vous allez entendre, c’est la description d’un monde
livré au mat démo, anticipation du poète, ie un
monde dans lequel le vrai s’est absenté. Poétiquement, Pasolini donnera 2 noms
à ce que pourrait être le vrai. Il dira religion véridique (= instance du vrai), et histoire (en
54, l’idée que l’histoire puisse être le lieu de procès d’une vérité est une
leçon du marxisme ambiant : c’est l’histoire comme intensité des vérités
disponibles, intensité au présent). Donc le monde décrit est un monde dans
lequel il n’y a ni religion véridique ni histoire. Il définit ce monde comme un
monde où l’idéalité est absente, et où cependant il y a une séduction de ce
monde, il y a une espèce de sensualité omniprésente du monde, mais qui est dans
l’abri, les ténèbres de toute réincorporation possible des vérités (par
l’histoire, la religion étant le nom du vrai). Le poème s’achève par une
interrogation de Pasolini sur la possibilité pour lui de vivre dans ce monde,
ie de vivre sans réincorporation).
Strophes 6,
terminale : « et on sent très bien que pour ces êtres vivants … le
don perfide et expansif de l’existence, cette vie n’est qu
On sent l’absence
de toute religion véridique. Non point vie mais survie.
Comme en un
peuple d’animaux dont le secret orgasme ignore
L’humble
conviction
Se fait vain en
cette trêve de l’histoire
Tout idéal plus
se révèle la merveilleuse et brulante sensualité presque alexandrine qui
illumine tout
Pénombre pour
retrouver les places vides de mornes ateliers
…
la perdent sans
nul regret pusiqu’elle emplit leur coer
on les voi qui
jouissent dans leur misère du soir
mais moi avec le
cœur conscient de celui qui ne peu t vivre que dans l’histoire
puisque je sais
que notre histoire est finie »
C’est le chant de Pasolini,
magnifique, qui dit un demi siècle avant que l’histoire est finie. Mais c’est
l’histoire telle qu’elle serait le lieu effectif pour lui de la réincorporation
dans le procès de vérité. Il fait sa part à ce qu’il dénonce : il comprend
bien que dans ce monde désaffecté de toute vérité, il y a une thématique de jouissance,
une espèce de sensualité marchande disponible qui fait qu’il y a cette survie à
laquelle nous sommes appelés à participer. Mais la vraie vie est absente. Comment
s’orienter dans la vie ? Sans l’histoire pour Pasolini. C’est notre
question : inventer une vie qui soit non pas sans histoire exactement,
mais qui n’est plus transitive à l’histoire, qui n’est plus commandée par
l’idée que l’histoire porte la vie, qu’elle porte comme telle l’incorporation.
Pasolini est dans l’attente d’une proposition de réincorporation faite par
l’histoire, c’est son point faible. Mais il n’a pas tort de dire que nous
sommes dans un monde où l’histoire ne nous fait aucune promesse, et donc nous
avons à vivre dans la promesse de l’histoire. C’est pourquoi il faut saluer le
poète qui nous le donne à penser.
Je voudrais
commencer par un point qui concerne le fait que ces derniers temps, j’ai été
amené à méditer sur une sentence autrefois fameuse de mao zedong, qui
disait : « être attaqué par l’ennemi est une bonne et non une mauvaise
chose ». C’est une phrase des écrits militaires. J’y
pensais simplement parce que, en effet, il y a eu un certain nombre de
critiques dirigées contre moi, en forme assez offensive, et donc je me disais
être attaqué par l’ennemi est une bonne et non une mauvaise chose. Si on
réfléchit sur ce point, il faut voir dans quel contexte Mao dit cela ? C’est
un propos de portée stratégique qui relève d’une longue tardition depuis Sun
Tzu de la stratégie chinoise. Ce n’est pas un point absoluement nouveau. Mais
si on l’élargit, il signifie ceci : quelle ets la dialectique appropriée
dans un conflit, quand on est dans un rapport du faible au fort ? du point
de vue de l’analyse objective de celui qui est le plus faible par rapport au
plus fort ? quel est l’espace dans lequel peut se développer un processus
où le faible, il y a ultimement un renversement de la situation, au sens où le
faible devient plus fort que le fort, bien qu’il ne cesse pas d’une certaine
manière d’être le plus faible. C’est un pb essentielle corréléà des pb discutés
ici, comme celui de la constitution de l’adversaire, adversaire hétérogène et
non pas himogène etc… dans cette question de la dial du faible au fort qui a
donné : un petit peuple peut vaincre une grande puissance, mot dr’ordre
qui a accompagné la guerre Viet Nam, donc un petit peuple a les moyens dans
certaines conditions en appliquant certains principes de remporter une guerre.
Les américains n’ont pas fni de vérifier cette loi ! La logique dans laquelle
ça s’inscirt, c’est dans le rapport de la stratégie et de la tactique. Le plus
faible, c‘est qui est engagé dans ue défensive stratégique. Stratégique, sa
ligne générale est défensive, ce qui inscrit le fait qu’il n’est pas le plus
fort, il ne peut pas prendre une offensive etc… donc il est en position de
défensive stratégique, et par csqt lorsqu’il prend l’offensive, cette offensive
est locale, puisqu’elle est défensive, elle localisée, et elle est donc
tactique, une offensive tactique, appelons-là comme ça, et il faut impérativement
qu’elle soit victorieuse, ce qui ne contredit pas l’infériorité globale, car
c’est une entreprise localisée. Ce que déclarent toujours les stratèges sur ce
point, c’est que il faut que premièrement, cette offensive tactique localisée
soit, elle, menée sous la règle d’une supériorité écrasante, sous la règle,
d’une supériorité locale écrasante, et qu’elle se fassse généralement par
surprise, donc qu’elle prenne naturellement l’adversaire dans un défaut de son
dispositif global. Et donc il y a donc une dialectique serrée, dans le détail
très complexe, entre une position de défensive stragéique et une position
locale d’offensive avec supériorité, supériorité qui est composée, amassée,
disposée dans le régime de son caractère tactique et local. Dans la durée, dans
la durée de la défensive stratégique se produit petit à petit un épuisement des
forces de l’adv, non pas abattu par une offensive globale, mais car la
topologie des choses dispose la poss de plus en plus cumulée d’offensive locale
à supériorité massive puisque chaque victoire renforce le potentiel, car chaque
victoire permet de saisir l’armement de l’adversaire, de démoraliser localement
les troupes etc… Cette dialectique nous intéresse, vous voyez bien
pourquoi, car la question de l’appropriation à la dialectique de l’espace
du rapport entre le local et le global est aussi une question en fin de compte à
l’arrière plan de la question des vérités : les vérités sont localisées en
tant que csingularités et ont cependant en fin de compte une portée stratgique
au long cours. On peut dire que ce principe dial qui combin offensivité
localisable ou tactique et un principe général de la défensive stratégique, qui
consiste à conserver ses forces, à ne pas les exposer, principe de conservation
qui suppose une hétéro qualitative, qu’on soit d’un autre rodre que
l’adversaire, combiner ça avec une supériorité écrasante locale ; voilà ce qui est le
principe général qui recouvre cette dial du faible au fort.
Et alors, on peut
considérer de ce point de vue là que le petit livre Circonstances 3, sous titré portée du mot juif,
qui a été à l’origine de cette méditation. On peut le situer dans cet espace.
Ça m’intéresse davantage de rendre raison de cet ensemble que de reprendre des
thèses que vous pouvez parfaitement connaître. En réalité, et surtout rétrospectivement,
on peut dire qu’il y avait là comme une attaque brusquée de ma part, une
attaque surprise, sur un point de la situation dominante qui était fort en apparence
et faible en réalité. C’est ce point que je voudrais élucider devant vous. Ce
qui est la règle de la stratégie dialectique : lorsque vous opérez par
surprise en et un point, vous frappez une partir du dispositif fort en
apparence mais qui s’avère à la lumière de votre frappe localement faible. Et
alors, si on le traduit dans la logique générale qu’on met en œuvre ici, il
faut revenir à l’énoncé du matérialisme démocratique, à savoir il n’y a que des
corps et des langages. Il n’y a que des corps det des langages. Entre parenthèses,
LdM est sorti, mais personnellement je n’en ai pas, mais je
sais qu’il est sorti, on me l’a dit, et j’y pense car il commence comme ça. Je
dis quelque part dans cette préface qu’une variante de cet énoncé peut se
dire : « il n’y a que des individus et des communautés ». si vous dites il n’y a que des corps et des langages, vous dites aussi,
variante interne, immanente, ce qu’il y a dans l’espace de l’existence humaine,
ce sont des individus et des communautés. Ce qui veut dire que vous désignez en
fait les particularités communautaires, quelles qu’elles soient d’ailleurs,
vous les désignez comme enveloppe langagière et limite des corps individuels.
C’est ce que ça veut dire. Il n’y a que des individus et des communautés, ça se
redit sous la forme que les communautés, les cultures, ie les langages, au sens large, ces langages, ces cultures, communautés, sont
des enveloppes des individus, l’enveloppe langagière des individus, mais aussi
enveloppe et aussi limite. Limite au sens où la théorie démocratique est ici
une théorie des prédicats. Il y a diversité prédicative, les individus supports
sont enveloppés et présentés dans des diversités prédicatives. ça c’est l’
discours de l’altérité culturelle, il y a des autres, des autres cultures, des
communautés, les individuds circulent ou sont enveloppés comme par des langages
par cette diversité culturelle. Et en même temps la liberté des individus,
ie dans le matérialisme démocratique l’expressivité des
corps, ce que les corps sont aptes à soutenir, à faire, à désirer, à réaliser,
est inscrite normée et aussi mesuré par cette diversité. Ce sont les 2 grands
mots d’ordre du matérialisme démocratique pris dans a figure actuelle. D’un
côté, une éthique de l’altérité, un discours de l’altérité culturelle,
thématique du respect de l’autre etc… et d’autre part le fait que les individus
en tant que existence expressive ultime, les corps en fin de compte, sont dans
un rapport à cette alérité qui est à la fois un rapport d’enveloppement (ils
sont portés et internes à la diversités des langages, cultres) et mesurés et
normés par cela, puisqiu’ils doivent recopeter la diversité comme telle. Ils
ont comme limite de leur expressivité individuelle la diversité communautaire
dans sa figure d’altérité. Ce qui donne en récapitulant que nous devons être
ensemble et différents. La démocratie, c’est une théorie des différences et du
consensus, et finalement c’est une théorie du consensus sur les différences. C’est
une théorie du même : il faut être différent mais pas au point naturellement
de ne pas être immanent au consensus de la différence. C’ets un résultat normal
de cette construction : s’il n’y a que des corps et des langages, la norme
doit être immanente au corps et aux langages, ie
elle doit être consensuelel quant au fait que finalement c’est toujours des
communautés qui enveloppent et norment le système de l’expressivité des
individus dans leur relation à l’altérité.
Ici ça fait une
occasion de vous signaler un petit livre, qui est le livre de Eric Hazan,
auteur d’un magnifique livre sur Paris (je l’avais déjà mentionné), qui s’appelle
LQR, qui est sous-titré la propagande du quotidien, c’est un petit livre très amusant et très vrai.
1ère
question : pourquoi il s’appelle LQR ?
C’est déjà assez sophistiqué : ça veut dire Lingua Quinte
Respublique. Pourquoi cette expression
tordue ? angue de la 5ème République. C’est en hommage au
journal du linguiste allemand juif Victor Klemperer, auquel l’une d’entre vous,
Isabelle Vodoz, a consacré une étude, et ce linguiste allemand a tenu un
journal pendant toute la guerre, absolument remarquable, il a pu échapper à la
persécution car il était marié à une aryenne, il est passé au travers, et son
journal, c’est au fond une description très profonde et très intense et
profonde de ce qu’est le nazisme, l’Allemagne nazie, à travers la mise en place
dans l’Allemagne nazie d’une nouvelle langue. Il n’y a que des corps et des
langages, disaient eux aussi les nazis. Il fallait montrer que la dimension
corps, c’était pour eux le racisme : corps racialisés, segemntés et races.
Les langage : il faut le langage du national socialisme, c’est une
création de forçage, déformation, un usage singulier interne à la langue
allemande, un nouvel allemand, l’allemand nazi, et dans son journal, il l’appelle
la LTI : Lingua Terce IMperii. Ce qui veut dire Langue du 3ème Reich, langue du 3ème
Empire. C’est en référence à ce magnifique de résistant intérieur, resté à
l’intérieur, par les moyens rigoureux de l’analyse langagière, qu’il en a
extrait des considérations sur l’essence véritable du nazisme dans l’espace de
son exercice quotidien, et pas simplement des grandes catégories. Sans du tout
tenter de rivaliser avec ça, mais en lui rendant hommage, Eric Hazan a appelé
son livre LQR, livre de la langue de la
5ème République. Pourquoi je parle de ça maintenant ? Eh bien
parce que il montre très bien, dans un chapitre très drôle, qu’une partie de
cette langue, une partie de la propagande quotidienne qui nous façonne, c’est
le type d’acollement des mots « ensemble »
et « différents ». Il montre que dans
la prose des politiciens démocrates d’aujourd’hui, tout repose sur un type
d’acollement des mots « ensemble »
et « différents ». La traduction
politicienne de « il n’y a que des corps et des langages » via sa traduction devient « on est ensemble, mais on est si
divers ». C’est constamment à l’œuvre dans n’importe quel
discours de Chirac ! c’est un exercice à la Klemperer. Ce n’est pas
simplement le discours de la droite, c’est pareil à gauche, et notre maire,
Bertrand Delanoe, est un grand spécialiste, il en est même le champion, d’après
lui. Par exemple, après le malheureux échec à la candidature olympique je
cite : « ceux qui ont le plaisir de construire ensemble en étant
différents ». Une sentence de Delanoe ! Et une
autre : « ceux qui ont envie d’être différents et ensemble ». On voit bien, et ça c’est le fond commun de l’idéologie démocratique
politicienne ordinaire. On est ensemble et différent et c’est formidable. A un
niveau plus spéculatif, ça veut dire en réalité, ce qu’il y a ce sont des
individus, qui en quelque manière sont mis ensemble souss leur système de
différencs, subejctivité est d’être disposé dans le il y a des individus et des
communautés de telle sorte que côté individu ils sont ensembles, côté
communautés ils sont différents, ils sont donc ensemble et différents, c’est ça
le collectif comme tel. ça veut dire que on exalte la diversité des langages, si
vous voulez, ou des communautés, des diversités, pour l’action consensuelle des
corps rassemblés. La dynamique, c’est on exalte la diversité des cutures pour
l’action consensuelle des corps rassemblés.
Et alors, il se
trouve - ce qui est un grand malheur - que le mot juif est devenu un paradigme
de ce fontionnement. C’est un malheur qui lui est arrivé, ce n’est pas du tout son
histoire naturelle. Il n’a rien à voir avec ça, mais il lui est arrivé, depuis
une vingtaine d’année ou un peu plus. En quel sens il est devenu paradigme de
son fonctionnement ? Parce que d’un côté, il est censé dénoter une
différence, une différence significative et irréductible, on peut d’ailleurs
dire que savoir laquelle est un vrai pb (mais c’est escamoté dans cette
affaire, c’est la différence axiomaisée, comem telle), et en même temps il est
absolument consensuel de nommer cette différence en tant que différence
exceptée de toute contradiction. Une différence qui ne peut devenir une
contradiction. C’est ça le point du point de vue de la dialectique du mot. Il
est le différenciant paradigmaique même temps qu’il
est au centre de l’opération selon laquelle le ensemble doit normer un accord
absolu sur la différence. Le mot juif fonctionnne aujourd’hui comme le
paradigme de cela. Il est à la fois la différence et le consensus. Ce n’est pas
son destin, sa nature, son historoicité et ce n’est aucunement sa vérité. C’est
son fonctionnement idéologique. L’argument classique de de la consensualité différenciante
qui affecte ce mot est un argument victimaire : l’exception victimaire
valide la corrélation de la singularité et du consensus. Je tiens, je soutiens depuis
longtemps, que l’argument victimaire en la circonstance est de façade. Il n’y a
pas du tout dans cette affaire de compassion ou de représentation véritable des
victimes, c’est une instrumentation des victimes, une odieuse instrumentation.
Le résultat qui compte est que le mot soi installe dans la position où je dis
qu’il est installé. Là il y en effet qch qui est représenté comme un point
fort. Point fort pourquoi ? Car les 3 termes victime, différence et consensus
y sont intégrées avec la intensité maximale, victime faisant médiation constituante
entre différence et consensus. Ça atteint une intensité maximale pour des
raisons factuelles incontestables : il est vrai que si on cherche où ce
triangle constitue son intensité maximale dans le siècle, c’est incontestablement
sous le mot juif que ça se passe avec l’exterminatoin des juifs d’Europe par
les nazis. Là en effet, en ce point là la triangulation victime, différence et
consensus est maximale et donc on peut installer le mot dans une opération qui
consiste à valider non pas le mot ni les gens qui lui correspnodent, qui sont
dans cette affaire hors jeu, mais le dispositf fdtal qui est le dispositif de
la corrélation entre différence et ensemble. C’est ça l’enjeu fondamental,
c’est ça dont ce mot est devenu le gardien, malheureusement pour lui, il est
devenu le gardien de ça.
Je soutiens
maintenant, et c’est un exemple, que ce point fort est en réalité un point
faible. C’est un point faible pourquoi ? pour au moins 2 raisons.
La 1ère
raison théorique, on aura l’occasion d’y revenir, c’est un point d’apparence
abstraite, c’est que en réalité ce point sacrifie l’universalité au nom de
l’unanimité. L’unanimité est gardienne de la corrélarion triangulaire victime,
différence et consensus et se substitue dans le champ de la pensée à
l’universalité véritable. Et de ce point de vue là, le mot juif lui-même qui a
une universalité authentique, mais pour de toute autre raison, il est porteur
d’une universalité véritable, il est sacrifié. Il est sacrifié dans son
universalité sous couvert de protection inconditoinnelle. Il est dans sa
réalité universelle sacrifié au profit du gardiennage d’une unanimité empirique,
qui en réalité ne fait que valider l’axiome du matérialisme démocratique dans
sa figure « il n’y a que des individus et des communautés ». C’est de cela qu’il est le gardien sacrifié en tant
qu’universalité véritable. C’est un point très important qui est la corrélation
entre universlité véritable, la vérité, et la question nom, de l’unanimité, de
l’organisation interne des opinions. Vous voyez bien : alors que le mot
juif était promis et demeure promis à une universalité véritable, compte tenu
de son intrication à de très nombreuses procédures de vérité dans l’histoire,
il est sacrifié au profit d’un gardiennage idéologique qui bascule tout entier
dans le champ des opinions.
La 2ème
raison est réelle, c’est que ce dispositif qui prétend, dans une triangulation
singulière, disposer un consensus pacifié, être le gardien d’un consensus pacifié,
car c’est un consensus qui intègre les différences, ce dispositif lui-même a
des ennemis. Parce que c’est la loi des choses. Et il est commis et forcer
d’appliquer à ses ennemis la dcotrine qui le constitue, à savoir il n’y a que
des corps et des langages. S’il n’y a que des corps et des langages, des individus
et des communautés, si les communautés sont enveloppantes et normatives comme
différences au regard des individus, si vous appliquez cette doctrine à un
adversaire ou une extériorité quel qu’il soit, vous devez prononcer qu’il y a
des communautés intrinsèquement mauvaises. Il n’y a pas d’autre issue. C’est un
point inéluctable. La doctrine en question va donc basculer localement en son
contraire, à savoir un racialisme affiché. Il va falloir déclarer qu’il y a de
mauvaises communautés. Si vous appliquez au fait qu’il y a des adversaires non
pas la doctrine que j’essaie d’élaborer, mais la doctrine selon laquelle il n’y
a que des individus et des communautrés, s’il s’avère que certains types ne
sont pas internes au dispo selon lequel il n’y a que des corps et des langages,
il va falloir les considérer comme adverses, et les considérer comme adverses
en leur appliquant le schème en question, ce qui revient à dire qu’ il y a des
communautés et des langages qui ne sont pas intégrables dans l’ensemble, il y a
des comm et des langages qui ne sont pas intégrables dans la norme qui régit à
vos yeux le rapport entre différence et ensemble. C’est islam qui nomme cela,
c’est islam qui nomme cela. C’est indépendant de ce qu’on pense des politiques
qui s’enveloppent dans l’islam. Islam, nomme cela, au niveau de
l’opinion : islam, islamiste, quelquefois sub-saharien même. Pendant un
temps ça a été totalitaire. Il y a bien ce bon Glucksmann qui est sorti de
terre pour dire que le nouveau totalitarisme c’est l’islam. C’est
cohérent : de Staline à Mahomet. Vous avez dans Hazan des pages sur ça sur
la portée, développement de ces mots là. Il étudie l’agencement de ces mots dans
le dispositif ici. Il montre bien que c’est une des formes du sacrifice
auxquelles est soumis le mot juif. Le mot juif ets capturé quelquefois via la
pol de l’Etat d’Iraël, quelquefois non, plus globalement dans la thématique
d’un conflit culturel (arabe et chrétien etc…). Je voulais simplement retracer
à ce propos le fondement logique. Si on est dans l’espace général selon lequel
la maxime de la situation est il n’y a que des individus et des communautés, vous
serez amenés à en venir là, et l’instrumentation du mot juif, extrêmement
périlleuse, extrêmement dangereuse, très agressive en réalité, amène finalement
à mettre ce mot au service d’un racialisme renouvelé, dans lequel il se trouve
compromis et engagé sans aucune raison. Sans aucune raison autre que
l’nistrumentaion dans la triangulation ensemble victime différent. Voilà. Ça a
commencé bien avant. C’est un avatar d’une longue histoire au milieu des années
70, sous la bannière des nouveaus philosophes (c’est un peu le même personnel
quand même !), elle s’est déployée, dépliée, accélérée dans cette
instrumentation singulière. Pourquoi je dis que c’est un point faible ? C’est
une cobinaison instable et contradictoire d’une unanimité démocratique de
façade, d’une réduction de l’universalisme à un unanimisme qui articulerait de
façon en quelque sorte naturelle la différence et l’ensemble, ceux qui veulent
tellement être ensemble en étant tellement différents. Le nouveau Paris
convivial ! dont les loyers montent… Une convivialité chiffrée. C’est ça
la donnée. Ça s’articule à une agressivité hétérophobe, ie phobique de l’autre, souvent à teinture racialiste, ou en tout cas hostile
à des communauté ou des cultures dtéeminée. Cette synthèse, qui fait notre opinion
journalistique, politicienne etc… nous sommes tous ensembles, et différents et
de l’autre côté il y a les affreux sur lequels il faut taper de toute urgence,
dont le schéma planétaire est le discours de Bush. C’est combinaison est une
combinaison faible. Ça se verra un jour, elle ne soutiendra pas indéfiniment
une réduction de l’universalisme à l’unanimisme d’un côté, et de l’autre une
effectuation dans un élément agressif et hétérophobe. Voilà, c’est ça le fond
du problème, c’est ça le fond du problème, c’est pour ça que sur ce type de
question ça prend une tournure quelquefois un peu nerveuse. Pourquoi ?
parce que c’est central dans le dispositif idologique aujourd’hui, c’est son
noyau, c’est son noyau de protection et de défense contre tout ce qui lui serait
hétérogène, c’est le discours de la domination, Hazan a raison, c’est la langue
commune de la 5ème république. Sur « ensemble » et « différent », qui a l’air
sympathique (le présisent présente ses voeux, soyons ensembles et différents,
assumons nos différence…) ça a bonne mine !, mais il faut voir ce que
c’est, il faut voir ce que c’est et ce que c’est, c’est le gardiennage d’une
représentation très particulière des conditions dans lesquelles les gens sont
enveloppés, situés dans l’espace général, à savoir dans un espace qui n’admet
que l’existence des corps et des langages, des individus et des communautés, et
qui doit garder ça par des moyens qui sont des moyens de distorions nominale
grave, dans lesquelles le mot juif a été pris, refaçonné, déformé, détourné de
son deston universalisté, et dans lequel l’effectuation est une effectuation
agressive et hétérophobe pour des raisons qui sont des raisons rigoureuses,
logiques, ce ne sont pas des bavures, des bavures d’un monde pacifié.
Ceci étant dit, nous
allons reprendre nos affaires, en aval, et en amont de cette opération
singulière qui a déclenché des troubles. Une autre sentence que j’aime bien
chez Mao : les troubles sont une excellente chose ! Aujourd’hui on
peut le rappeler, il y en a encore quelques uns. Il disait : 2 ou 3
troubles et on commence à y voir clair ! Le rapport entre le trouble et le
clair m’a toujours paru intéressant. Espérons qu’il y aura assez de troubles
pour qu’on puisse en effet y voir clair. 2 ou 3 troubles pour y voir clair.
Je voulais reprendre
en vous donnant ce schéma, et je vousdrais le commenter. Alors le schéma peut
se lire dans différents sens.
D’abord, la découpe
la plus générale, c’est la découpe en 3 régions :
- région de l’être
- région du sujet
- et il y a.
Quelle est la
signification de ça ? je la ponctue, je la reprends.
- il y a est la
signification la plus générale, elle désigne l’intérieur du triangle. Le il y a
est ce qui subsume les différents registres dans lequel qch d’absolument indistinct
se présente, et donc le il y a tente de prononcer une généralité supérieure à
celle de l’être comme tel. Il y a désigne non seulement le régime de l’être et
celui de l’apparaître - j’y reviendrai -, mais en quelque manière inclut
l’événement, et par csqt la bascule post événementielle des choses, et en
définitive les vérités comme telles. Le il y a nomme à la fois l’écart et la
communauté de présentation entre les multiplicités pures, les multiplicités
indifférentes, l’être en tant qu’être, et l’existence des vérités. On pourrait
dire si vous voulez : il y a de multiplicités indifférentes et il y a des
vérités. Ce qu’il y a, c’est ceci qu’il y a des vérités dans l’élément même où
il n’y a que des multiplicités indifférentes. Il n’y a que des multiplicités
indifférentes, sinon qu’il y a des vérités. C’est l’expression abstraite de il
n’y a que des corps et des langages, sinon que. Le il y a, c’est les 2 côtés du
sinon que. La région du il y a, c’est pour ça qu’elle est disposée entre multiplicités
indifférentes et vérités éternelles, c’est la région présentative génréale qui
au fond nomme le statut de l’être en même temps que son exception, en même
temps que ce qui y fait exception. Ce sont les 2 versants de la logique de
l’exception, on les désigne sous l’expression il y a. Donc il y a.
De l’autre côté, du
côté où on est dans l’identification du mouvement et pas seulement dans son
résultat ou dans son espace général, de l’autre côté ça se scinde. Vous voyez
bien que le sinon que est bien une synthèse disjonctive aurait dit Deleuze :
vous pouvez le prononcer soit comme il y a (côté sunthèse) soit comme existence
d’une différenciation de registre (côté disjonctif). Il dit les 2. Donc sinon
que c’est la corrélation entre il y a et les 2 régions. Les 2 régions c’est simplement
celle qui se tourne vers les vérités et celle qui est tournée vers les multiplicités
indifférentes. Le il y a est tourné des 2 côtés, c’est aussi découpe. Synthèse
et découpe.
- or là les
définitions sont nominales : j’appelle région de l’être ce qui s’espace
entre multiplicités indifférentes et événement. Région de l’être, c’est ce qui
rend intelligible tout ce qui en quelque manière se déploie ou se déplie entre
l’être pur, ie les multiplicités indifférentes,
sporadiques et infinies, dont le pur être est dissémination, ce que j’appellais
multiplicités inconsistances, multiplicités absolues et sans totalisation, sans
un, ce qui s’espace entre cela d’un côté et de l’autre l’événement. Région de
l’être c’est le régime général d’intelligibilité de ce qui s’espace là. C’est ce
qui vous permet de penser ce que veut dire qu’un événement advienne au multiple.
Car évidemment on admettra que tout événement est situé dans l’être : il
n’y a pas de relation d’extériorité pure entre l’événement et l’être, ou entre
événement et multiplicités indifférents. Tout événement affecte quoi ? les
multiplicités. Il a là son lieu d’exietence et d’efficace. Il n’est pas
ailleurs. Ce qui s’espace entre multiplicité indif et événement, c’est ce qui
s’space dans les multiplicité indif elles-mêmes en tat que exposé de façon
immanente à la poss événementielle. C’est ça la région de l’être c’est
l’intelligibiilté de ce que c’est qu’une multiplicité en tant que telle, mais l’intelligibité
de ce qui fait qu’une multiplicité en tant que telle peut se trouve exposée, et
à quelles conditions, événement. C’est la région de l’être.
- région du sujet,
c’est ce qui cette fois pense l’espacement entre événement et vérité. Pourquoi sujet ? car sujet nomme
cet espacement même : c’est le terme actif de cet espacement. On appelle
sujet ce qui, du point d’un événement, est apte à porter la configuration d’une
vérité. Sujet c’est ça, ce qui est apte à porter la configuration d’une vérité.
Donc région du sujet, est symétrique de région de l’être, si l’on veit, au sens
où de même que région de l’être nomme l’intelligibilité de l’espacement entre
entre multiplicité indifférente et événement, de même région du sujet nomme le
principe d’intelligibilité de l’espacement entre événement et vérité. L’orientation
du mouvement de la pensée se fait d’abord dans ce sens puis dans ce sens :
dans la région de l’être, le mouvement de l’intelligibilité se fait de multiplicité
indufférente vers événeemnt, et dans la région du sujet le mouvement de
l’intelligibilité se fait de l’événement vers les vérités éternelles. Au terme
de quoi on circule de multiplicité indifférente à vérité éternelle par l’ensemble
de l’angle. Donc région du sujet, c’est cimportant à comprendre, contrairement
à région de l’être, est sous une condition surnuméraire à multiplicité
indifférente. La région de l’être n’a pour condition de son parcours de
comprégension que multiplicité indifférente. Il n’y a pas d’autre point de
départ. On part de la théorie des multiplicités pures. Du point de vue du
mouvement intelligible, on part des mathématiques. Et puis, par un mvt
d’élucidation immanente, on en vient à penser comment il se fait que qch comme une
coupure, un tremblement, puisse affecter de manière interne des multiplicités.
C’est dans ce mouvement aurait dit Parménide que être et pensée sont la même
chose. Dans ce mouvement, la pensée est pensée de l’être en tant que susceptible
d’être affetcée par un événement. Dans la région du sujet on a une condition
événementielle. Ça ne part pas de multiplicité, ça y est. C’est installé dans
les multiplicités. La pensée des multiplicité est supposée acquise, et le
mouvement de la pensée se pose la question : comment il se fait que sous
condition d’un événement il puisse y avoir qch comme des vérités ? En ce
sens je dis qu’il va d’événement à vérité, intégrant la pensée des multiplicités,
car la pensée des multiplicités est supposée déjà acquise dans le mvt
d’intelligibilité de ce que c’est qu’un événement.
Voilà pour cette 1ère
triangulation : il y a, région de l’être, région du sujet.
Maintenant vous avez
lecture diagonale, qui est la lecture de
l’ordre de l’espacement. Le mouvement formel de la pensée dans chacun des 2
espacements. Ça c’est entre multiplicités indifférentes et événement, puis entre
événement et vérités éternelles, quelles sont les ponctuations ? c’est
quoi une ponctuation ? Une ponctuation, c’est un concept. Quels sont les
concepts qui se cumulent, de telle sorte qu’on accomplisse intelligiblement le
trajet concerné. Si vous allez de multiplicité indifférente à événement, comment
vous y allez, par l’entremise de quel enchaînement conceptuel vous pouvez transiter
pour que le mouvement soit compris ou refait dans son intelligibilité
effective. L’autre trajet c’est la même chose : quelles sont les
ponctuations, les jalons essentiels qui vous permettent de passer de événement
à vérité éternelles, de telle sorte que on comprenne comment il se fait que
sous condition d’un événement puisse s’effectuer dans une multiplicité la thèse
( ??) subjective telle qu’il instaure ou dispose avec le matériau de cette
multiplicité une vérité nouvelle, ie
une vérité appropriable depuis un autre monde. C’est la 2ème
lecture, je la reprendrai tout à l’heure.
Il y a aussi une
lecture verticale possible, qui fait apparaître des
corrélations entre les concepts de chacun des trajets. Vous avez des paires
conceptuelles, dont le 1er élément est situé sur le 1er
trajet, le 2nd sur le 2nd trajet, qui se
correspondent verticalement.
La thématique du
présent créateur correspond à la thématique générale de l’apparaître,
consistance logique correspond à nouveau corps,
transcendantal correspond à condition d’existence
inexistant correspond à trace
point correspond à organe.
csq
correspond à évanouissement.
C’est une lecture
verticale. Lecture verticale qui montre quoi ? Eh bien, elle montre que
tout concept du 2ème parcours, tout concept qui tente de rendre
intelligible le mouvement par lequel un sujet porte une vérité, toute
ponctuation de ce trajet reprend, intègre, un niveau d’analyse du 1er
trajet. Les 2 trajets ne sont pas, du point de vue de la pensée, entièrement indépendants
l’un de l’autre. Pas du tout. Au fond, chaque pas de l’un intègre un pas de
l’autre. Sauf que si on tient compte de l’orientation du mouvement, les places
sont contraires. Les places sont contraires. Prenons par exemple la corrélation
entre consistance logique et nouveau corps. La consistance logique va ête
élucidée en 2ème pas, si je puis dire, en 2ème pas dans
le 1er trajet (le 1er pas est l’être là, on laisse de
côté multiplicités indifférentes et vérités éternelles – qui sont les extrêmes).
Tandis que nouveau corps va être avant dernier, dans l’autre cas, le 4ème,
et ainsi de suite. Quand vous progressez dans l’intelligibilité du mouvement
subjectif, ie du mouvement qui vous conduit de la rupture
événementielle à la constitution d’une vérité, vous intégrez régressivement les
concepts fondateurs du 1er trajet, vous vous enfoncez dans le 1er
trajet. Ça ne se correspond pas. C’est une idée que je voudrais ponctuer au
passage. En réalité, la construction d’une vérité est aussi un enfoncement dans
l’être, du point de vue de l’intelligibilité. C’est pour ça qu’il faut aussi
penser la corrélation verticale. Si vous ne la pensez pas, vous avez l’impression
d’avancer tranquillement - tranquillement ? n’exagérons rien ! – mais
que vous partez de multiplicités indifférentes et vous vous tapez : être
là / apparaître, consistance, transcendantal, inexistant, point, événement,
organe, trace, condition d’existence, nouveau corps, présent créateur, vérité éternelles.
C’est un chemin jalonné. Mais en réalité c’est une apparence, ça, une apparence
formelle. C’est éventuellement un trajet d’écriture. Le trajet de pensée proprement
dit n’est pas de cet ordre : il est que quand vous avancez sur le 2nd
trajet, vous procédez à nouveau parcours du 1er, mais dans un sens
rétrograde. Vous vous enfoncez dans multiplicité indifférente. Plus vous avancez
de événement vers vérité, plus aussi, et en même temps, par une intégration en
spirale, plus vous vous enfoncez dans les déterminations ontologiques fondamentales.
Il y a un lien profond entre vérités éternelles et multiplicités indifférentes. Ce n’est pas une contardiction
simple. Quand vous parvenez à la constitution d’une vérité susceptible d’être
ressuscitée, d’être reconnue depuis un autre monde, en réalité, vous êtes près
de l’indifférence de la multiplicité comme telle. Ce que j’ai appelé le
caractère générique d’une vérité dans l’EE j’ai appelé le caractère génétique
des vérités. Une vérité exprime ce qu’il y a de plus profondément indifférent
dans ce dont elle est vérité. Une vérité, c’est ce qui est le plus éloigné de
l’expression de la particularité, et donc ce qui touche au fdt de la situation,
de l’être du monde, qui est qu’il est après tout une multiplicité indifférente.
Dans la singularité d’une véroté s’exprime aussi l’indiff de la multiplicité sous-jacente.
C’est pourquoi une vérité est au sens le plus fort du terme générique, ie synthèse de singularité et d’universalité. Synthèe au sens où 1° elle déborde
la multiplicité dans laquelle elle s’inscrit, ou le monde où elle s’inscrit, de
tsq elle est reconnaissable et appropriable depuis un autre monde, et 2° elle
exprime aussi le caractère indifférent de la multiplicité sous-jacente. C’est
une raison pour lesquelles elle est appropriable depuis un autre monde ; n’importe
quel autre monde est aussi constitué sur le fond d’une multiplicité
indifférente. C’est un point qui est spéculativement profond, qui fait que le
schéma doit être lu non pas seulement comme un trajet mais comme une géologie,
une géologie qui stratifie les concepts dans un ordre qui finalement fait que la progression de l’ordre, à partir
d’un certain moment, est aussi une rétrogradation. L’avancée dans l’ordre post-événementiel
est aussi un enfoncement, une rétrogradation, un recul dans l’ordre de l’intelligibilité
de l’être comme tel. Plus vous êtes si je puis dire dans l’éclat des vérités
éternelles, plus vous êtes aussi dans l’absolue dissémination obscure des
vérités indifférentes. C’est un point qui est probablement un point dialectique
au sens fort. C’est en ce sens que je maintiens l’expression d’une dialectique
matérialiste : je la maintiens car formellement, il s’agit d’une pensée
dans laquelle le 3 subsume le 2, c’est sa la dialectique, mais plus fdtalement
c’est parce qu’il y a intégration (métaphore platonicienne= dans le mouvement
ascentionnel vers les vérités éternelles, il y a intégration dans ce mouveemnt même
de l’appropriation de ce qu’il y a de plus indiférent dans la matérialité du
monde, de génrique, d’indistinct. Plus une vérité est distincte, aurait dit
Descartes, plus elle est aussi
intelligibilité de l’indistinct. C’est ce que le schéma essaie de dire, de prononcer.
Vous avez une lecture
en surface, topologique
Vous avez une
répartition de région, une lecture linéaire, en chemin
Vous avez une
lecture stratifiante ou généalogique en profondeur.
Il faut manier les 3
dimensions pour le lire vraiment.
Quelques mots de
commentaires sur l’aspect chemin, après le commentaire topologique des régions.
Sur l’aspect chemin, je donne simplement des définitions un tout petit peu plus
explicites de l’échelonnement des concepts :
- multiplicité
indifférente : on n’a pas à y revenir.
Le 1er
pas est de comprendre que la multiplicité indifférente, en
tant qu’elle est là, mais le là n’est pas spatial, c’est le là de son il y a, il
y a cette multiplicité là, elle doit apparaître. On appelle apparaître l’être là de la multiplicité. Et on nomme monde, c’est pour ça que c’est inclus dans être là ou apparaître, on nomme monde
le lieu, au sens abstrait, le là de cet apparaître. Vous avez un 1er
temps qui est de comprendre ce que veut dire la nécessité de l’apparaître pour
la multiplicités indifférentes. Comment il se fait que les mult indiff existent
dans un statut non réductible à leur statut onto pur. Comment il se fait qu’il
y a autre chose que les mathématiques ? Autre chose que des pures pensées
appropriables aux mathématiques. On pourrait imaginer un monde avec les seules
mathématiques. On aurait un court circuit entre multiplicité et vérité éternelle.
On aurait un monde parménidien, sauf que ce serait des multiplicités et non pas
l’un, les multiplicités et l’être pensée de ces multiplicités comme effectuation
immédiate. Comment il se fait qu’il n’y a pas que les math ? Vous savez à
quel point c’est vrai, qu’il n’y ait pas que les mathématiques. La philo se
pose plutôt la question : comment se fait-il qu’il y ait les maths ?
Je renverserais la question. La vraie question est : comment se fait-il
qu’il n’y ait pas que les mathématiques ? Il semble bien qu’il y ait bcp
d’autres choses que les maths ! c’est pour ça qu’il faut faire un 1er
pas. Il faut faire un 1er pas, les maths étant la pensée des multiplicité
indifférente, ça s’approprie au fait que qch dans le il y a de l’être ne se
laisse pas réduire à la multiplicité indifférente. C’est ça qu’on va appeler
l’apparaître. Il n’y a aucun sujet pour qui ça apparaît. Apparaître doit être
pris dans un sens non phénoménologique, il n’est pas question là de cse, ça
n’apparaît pas pour une cse. Ça apparaît tout court. L’apparaître est ce à
partir de quoi devient pensable qu’il y ait non pas seulement les mathématiques
mais des mondes.
Le 2nd
pas va consister à se demander comment il se fait qu’il y
ait une pensabilité générale des mondes. La question, c’est : comment il se fait que ce
qui n’est pas les mathématiques n’est pas non plus le chaos, n’est pas non plus
intégralement chaotique, inintelligible ? Comment se fait-il que qch
consiste dans ce qui n’est cependant pas la consistance mathématique des mult
pure ? Cette consistance est celle de l’apparaître. Pourquoi
l’apparaître consiste ? Ce qui est avéré par le
fait qu’il y a des vérités dont le référent n’est pas la multiplicité pure. Il
n’y a pas que des vérités mathématiques, c’est un constat : il y aussi des
vérités artistiques, par exemple, des vérités politiques, amoureuses. De même
qu’il n’y a pas que les mathématiques, plus encore il n’y a pas que les vérités
mathématiques. Ce qui veut dire il n’y a pas juxtaposition des maths et du
chaos. Ce qui serait une autre possibilité : il pourrit y avoir autre
chose que les maths mais absolument dépourvu de vérité et donc livré à l’indiff
empirique de la multiplicité. Mais ce n’est pas non plus la situation. Il faut
suivre une ligne qui reconnaît qu’il y a
autre chose que les mathématiques, mais non seulement au sens du il y a
mais cet autre chose n’est pas non plus chaotique ou initelligible et par csqt
est travaillé par des vérités. Et donc il y a une consistance proore de cela même
qui dans l’ordre de l’être n’est pas réductible à sa dimension mathématique, sa
dimension de multiplicité comme telle. Je propose d’appeler logique cette consistance, ayant appelé ontologique la mathématicité comme telle.
Dans l’EE, j’ai énoncé que l’ontologie c’était
les mathématiques. Mais j’appelle logique cette consistance plus vaste que
celle des maths, qui n’est pas réductible à la mathématicité comme telle.
J’appelle consistance la consistance étendue au il y a de l’apparaître, à
l’apparaître, au monde. Logiques des mondes, il y a des logiques des mondes,
c’est ça qui reste une question irréductible à celle de la pensée mathématique
de l’être comme tel. De même que j’ai énoncé que les mathématiques, c’était la
forme effective de l’ontologie, ie de l’intelligibilité des mult indiff, de
même cela qui expose les multiplicités indifférentes à la mondanité et s’avère irréductible quant à sa pensée aux
mathé, et qui cependant peut a ou peut supporter une vérté, je l’appelle logique.
Il est normal que cette logique ait un principe général de consistance soit
aussi effective en mathématiques. C’est le terme plus vaste désignant la consistance
des mondes, y compris naturellement de ce monde particulier de l’ontologie
qu’est la mathématique, un monde sans apparaître. Voilà.
Le pas
supplémentaire consiste à proposer un cadre général
de pensabilité de la logique, ie consiste à proposer
une logique générale dans laquelle se dispose toute logique de la consistance
comme telle, consiste à dégager des propriétés minimales par lesquelles passe
le fait que les mondes sont consistants. Comment se fait-il que les mondes
soient consistants ? Comment définit-on cette consistance logique ? Quels
sont les résuisits minimaux pour qu’il y ait intlleigibilité de ceci que les
mondes soient consistants, de ceci qu’il y ait logique ? c’est ce que
j’appelle transcendantal. Chez Kant c’est les principes
généraux de la consistance de l’expérience. Donc transcendantal renvoie à un
sujet, un sujet générique, un sujet qui n’est pas une individualité psychologique,
car le fil conducteur de Kant est le concept d’expérience, et la consistance
est la consistance pour l’expérience. Kant aussi admet que le monde sensible
consiste pour un sujet, la phénoémalité consiste dans la nature. Il y a une
logique, cette logique est transcendantale : c’est une logique de l’expérience
subjective telle que la phnoéménalité consiste et n’est pas un chaos informe.
La question est la même : comment il se fait que ce n’est pas chaotique,
comment il se fait que ce qui n’est pas mathématique n’est pas chaotique,
comment se fait-il qu’une physqiue est possible ? Et on appellera le
registre de la réponse transcendantal. Sauf que là, c’est du transcendantal
sans sujet. La consistance du monde est un phénomène en soi, elle n’est pas une
phénoénalité pour une détermination subjective ou une conscience quelconque. Le
sens de transcendantal est tordu, transformé, mais je l’ai gardé car il répond
qd même à : quelles sont les conditions de poss formelles de consistance
de mondes ? C’est la même question. C’est pour ça que j’appelle le système
de ces garanties de consistance un transcendantal. Mais évidemment ça n’a rien
à voir avec expérience subjective ou la représentation des phénomènes. C’est
une disposition immanente à l’apparaître lui-même. L’apparaître consiste parce
que tout monde est indexé sur un transcendantal. Une des variations par rapport
à Kant, c’est que 1° le transcendantal n’est pas subjectif, mais aussi 2° qu’il
n’y a pas unicité du transcendantal. Vous pouvez avoir plusieurs types
transcendantaux différents, et c’est aussi pour ça qu’il y a des mondes et non
pas un monde. Il y a des mondes parce que la garantie de consistance d’un monde,
à savoir son T, peut avoir des configurations très différentes d’un monde à
l’autre. Le fait qu’il y a des mondes, ce n’est pas simplement le fait qu’il y
a des multiplicités, ce n’est pas seulement une question de collection de multiplicités,
c’est aussi ça mais ce n’est pas le fond du pb. Le fond du pb, c’est que
l’agencement de consistance peut varier, et en général la plus profonde
identification d’un monde est une identification de son transcendantal.
Autrement dit, vous avez, si on nomme logique la consistance des mondes, vous
avez des logiques : logiques des mondes. Ce n’est pas simplement les
mondes qui sont pluriels, mais plus fondamentalement, plus organiquement, la
condition de possibilité de la consistance de ces mondes, appelée
transcendantal, qui est appelée également à varier.
Le pas suivant. On a fait : être là, consistance de l’être là, condition de possibilité
de cette consistance ou T. Nous allons avoir ensuite un peu comme chez Kant la question
du négatif. Qu’est-ce que c’est que le négatif dans la logique d’un
monde ? Et en particulier la très considérable question du néant.
Qu’est-ce que c’est que le néant ? Le néant n’est rien, réponse classique,
mais on est très embarrassé avec cette réponse depuis très longtemps. Déjà
Platon trouvait qu’il fallait faire mieux que ça. Là, vous voyez bien que la
difficulté de la question est qu’on se pose non pas la question de ce qui n’est
pas, mais la question du néant d’un monde. Donc de ce qui tout en étant d’un
monde en un certain sens n’y apparaît pas. Le point où se concentre
l’apparaître dans un monde et qui est la forme spécifique de l’inapparaissant
dans ce monde, étant entendu que ne pas apparaître dans un monde ce n’est pas
la même chose que ne pas être, c’est ne pas apparaître dans ce monde. Ça, vous
avez l’inexistant pour des raisons qui
tiennent à ce qui est dans un monde, je l’appelle ce qui existe, différent de
ce qui est, ce qui est c’est des multiplicités indifférentes. Ce qui existe, c’est
des multiplicités indifférentes pour autant que leur être là est assigné à un
monde, donc à un transcendantal. Donc on peut dire que exister (c’est un peu
plus compliqué), c’est être dans un monde, c’est être dans une certaine
indexation transcendantale. C’est être sous une logique, et pas seulement sous
une mathématique, même si cette mathématique est elle-même sous une logique. Et
alors si être dans un monde, c’est exister, il y a la question de savoir ce qui
inexiste. Mais vous voyez bien que ce qui inexiste est une tout autre question
que ce qui n’est pas : donc c’est la question de l’inapparaissant dans un
monde. C’est une étape indispensable pour des raisons que je dirai plus tard. C’est
un point qui admet une résolution, à savoir qu’on peut donner une définition de
ce que c’est que l’inexistant d’un monde. Je ne vous la donnerai pas, on n’en a
pas besoin pour l’instant !
Le pas suivant va nous rapprocher du registre subjectif mais de façon strictement
intérieure au transcendantal. ça ne va pas encore être subjectif, c’est
présubjectif de façon plus sensible. C’est la question des points. Un point, c’est une instance du 2 dans le transcendantal. Un point, c’est
ce qui convoque l’existence, disons-le comme ça, ce qui convoque l’existence au
choix, elle est convoquée à un choix, elle est convoquée à comparaître devant
le 2 en tant que, aurait dit Kierkegaars, alternative : ceci ou cela. On
peut prendre comme exemple n’importe quel choix radical, ceci ou cela, une
instance du 2. Un point, c’est ce qui dans le transcendantal permet de définir
ce que c’est qu’un choix radical : c’est un protocole de comparution de
l’existence devant le 2. On peut en donner une définition strucurale : on
peut dire étant donné tel transcendantal, voilà ce que c’est qu’un point pour
ce transcendantal, voilà quelles sont les différentes manières de définir un
point, un choix pur. C’est une fonction qui fait passer toute organisation du
transcendantal vers un 2, ceci ou
cela, 1 ou 0. C’est donc la ressource possible du transcendantal en choix pour
l’existence.
Ce qui est
important, c’est qu’il y a des transcendantaux riches en points, il y a des
transcendantal qui en ont très peu, d’autres hélas qui n’ont aucun point. Les
mondes qui ont des transcendantaux sans point sont des mondes inaptes aux
vérités. C’est une démonstration qu’on peut faire. J’ai proposé de les appeler
des mondes atones, des mondes plats. Les mondes atones sont structurellement
définissables : on ne peut pas faire comparaître l’existence devant le
choix pur. Il n’y a pas d’alternative au sens de Kierkegaard. Kierkegaard aurait
dit que ce sont des mondes dont Dieu s’est absenté. Bein que la plupart des
choix dont il parle ne soient pas marrants : Abraham. Quelquefois on rêve
d’un monde atone, le repos, pas de choix, pas de 2, rien, on flotte à la
surface, on fait la planche ! Mais malgré tout la définition que je
propose de ce que c’est que vivre requiert qu’il y ait des points. On est tenté
de s’installer dans le monde atone mais c’est pas un destin. C’est pas un
destin, on peut trouver des mondes avec points.
Les mondes avec bcp
de points sont des mondes tendus : par exemple, le monde constitué par les
séquences révolutionnaires intenses, quand tous les jours la situation change
et tous les jours il faut de nouveau choisir quelque chose. Pas de répit. Les
journées révolutionnaires se succèdent. On n’a pas le temps d’examiner la
situation qu’on est déjà catapulté vers d’autres choix. C’est un monde tendu.
Les mondes tendus c’est aussi assez terrible. C’est définissable
transcendantalement. C’est grosso modo un transcendantal qui a autant de points
qu’il a de degrés, de mesure possible de ce qu’est un existant.
Entre les mondes
atones et les mondes tendus, il y a des intermédiaires : quelques points,
ou pas mal de points. On a le temps de s’organiser pour traiter les points.
Quand vous disposez
du système généra apparaître, consitance logique, transcendantal, inexistant, point :
vous avez les matériaux nécessaire pour vous espacer entre multiplicité indifférente
et événement. Et en particulier les connexions intimes qui existent entre
événement et la nature du monde qu’il affecte. La logique du monde qu’il
affecte. Il y a une relation entre la ressource de l’événement et la nature
structurale du transcendantal qui soutient le monde et est affectée par
l’événement. L’événement va être spécifié comme point ultime de l’intelligibilité
de tout le parcours originé dans les mult indiff et a déployé la logique
de l’apparaître et ses différents degrés.
Evénement, c’est un
peu plus compliqué que dans l’EE
car il s’agit de comprendre comment un événement apparaît et pas simplement ce
que c’est que son être. Dans EE il
y avait une mathématique de l’événemnt et c’était une exception car sa
mathématicité passait en fraude un axiome, il y avait un axiome qui était
suspendu ou nié par l’événementialité. La théorie du multiple était déformée
par l’événement en un point. Il y avait un axiome violé : c’était un point de
non mathématicité interne à la mathématique. On donnait la mathématique et on
montrait que événement il n’y a que sous condition que un des axiomes soit
soustrait. C’est une conception soustractive de l’événement, de manière
essentielle : c’est la manière dont l’événement fait exception aux lois de
l’être qui m’intéressait. Là, c’est plus compliqué, car on veut connaître les
conditions logiques de l’événement et pas seulement sa nature ontologique.
Ontologiquement, il demeure une exception aux lois de l’être mais c’est pas
suffisant pour penser ce que c’est.
Car après tout un événement ça apparaît aussi dans un monde, ça a lieu
aussi dans un monde, il faut savoir quelle est sa caractérisation logique et
pas seulement sa caractérisation soustractive ontologiquement. On va avoir des
caractéristques de l’événement directement indexées à la logique du monde et
pas simplement à la mathématique des multiplicités. Donc ce qu’on va avoir
c’est des distinctions dans le ce qui arrive. Dans EE, on avait la situation et les événements. Là c’est plus compliqué : on
va distinguer 4 modes différents du ce qui arrive, on va rentrer dans les
nuances. La LdM c’est plus nuancé que s’il
n’y avait que les maths. C’est plus nuancé. Là on peut distinguer 4
types : la modification, le fait, la singularité faible et l’événement. On
aura l’occasion de passer par des exemples la prochaine fois mais on peut avoir
une intuition assez élémentaire de ça.
La modification c’est ce qui se passe dans le monde et qui est homogène à son
transcendantal. C’est ce qui se passe dans le monde sous sa loi de consistance
propre. Un monde change tout le temps, mais on appellera modification (écho de
Spinoza) les changements constants et infiniment nombreux qui se produisent
dans un monde mais qui ne sont que le dépli de ce monde sous la logique de son
apparaître : le ce qui se passe conformément aux lois de ce qui se passe
dans un monde.
On appellera fait quelque chose qui est une perturbation minimale, qui n’est pas exactement
rangeable uniquement au titre de ce qui présente le monde dans sa logique transcendantale mais
dont le degré d’apparition n’est pas d’intensité propre. C’est une perturbation
locale, mais une perturbation dont l’apparaître propre n’a pas d’intensité
particulière. Exister, c’est toujours exister avec une certaine intensité. Exister,
apparaître, être là se fait toujours selon une certaine intensité. Vous êtes
dans un monde avec une intensité particulière, c’est pour ça aussi que vous
pouvez inexister, apparaître avec une intensité minmum. On appellera fait une
perturbation locale, qch qui n’est pas réductible aux lois de présentation du
monde, mais qui est affecté d’une intensité moyenne.
On appellera singularité une perturbation locale dont le degré d’intensité est fort, en réalité
maximal. Modification : on est dans l’immanence légale. Fait : il y a
une petite perturbation d’intensité faible. Singularité : perturbation de
grande intensité, mais les csq de cette perturbation sont faibles, elles, les
csq sont faibles, et la mesure des effets d’une perturbation se fait à partir
de l’inexistant. C’est là qu’on va connnecter la question de l’événement et la
question du non apparaissant. L’effet d’une perturbation est réellement intense
lorsque cette perturbation est capable de doter l’inexistant d’une existence,
de faire exister l’inexistant, c’est la mesure d’une perturbation locale. La
singularité faible est très intense dans son apparaître mais n’arrive pas à
faire exister l’inexistant, elle le laisse inexister, elle le laisse à son
inexistence.
On appelle événement une perturbation dont l’intensité est maximale et qui fait exister
l’inexistant, qui arrive à relever l’inexistant (traduction de Hegel par
Derrida), il est relevé de l’inexistance à l’existence. Vous voyez : on a
un espacement des choses qui se fait depuis l’intériorité légale, la modification
(le point de conformité du monde, le dépli du monde), jusqu’à l’événement qui
est abordé logiquement à la fois par intensité de l’existence, et relève de
l’inexistant, ie intensité des csq. Il ne suffira pas
d’intensité d’existence pour parler d’événement il faudra mesurer l’intensité
des csq, l’effet sur l’inexistant : « nous ne sommes rien soyons
tout ». On passe par le fait, qualifié par une réelle
perturbation, un point illégal si vous voulez, mais de faible intensité. La
singularité faible qui est de forte intensité mais qui n’a pas d’effet sur
l’inexistant. C’est la caractérisation logique de l’événement.
C’est une question
qui m’a souvent été posée autrefois : l’événement n’est-il pas entièrement
une question rétroactive ? n’est-ce pas du point de vue de l’engendrement
des vérités qu’on est susceptible de dire après coup que c’était un
événement ? Dans le dispositif ancien, on pouvait dire oui. Ici la réponse
est modulée : il y a une condition intrinsèque, il faut que la
perturbation locale soit de forte intensité existentielle, maximalement.
Evénement sera pris en son sens traditionnel comme une secousse de forte
intensité, pour prendre une métaphore de type tremblement de terre. Il y a qch
de sismique, qui se donnera par le fait qu’une perturbation locale ait une
forte intensité intrinèque. Mais ça ne suffit pas : il y a une autre caractérisation
logique par les csq. On aura un protocole rationnel d’évaluation, mais en effet
non nécessairement immédiat. Non nécessairement immédiat, car il faudra voir,
expérimenter ce qu’il advient de l’inexistant :
est-ce que l’inexistant est relevé de telle sorte qu’il se met à exister dans
le monde, de tsq que ce qui n’apparaissait pas apparaît. Donc ce qui
n’apparaissait pas apparaît. Ce n’est que sous cette condition qu’on
distinguera la singularité faible de l’événement. On a un dispositif complet
qui donne une détermination intrinsèque et explique pourquoi c’est aussi une
question de csq. Et en outre, ça ouvre au 2ème trajet, il ne faut
pas croire qu’un événement ainsi qualifié, ie qui
relève l’inexistant suffise à lui seul pour constituer un sujet capable de produire
ou de composer une vérité éternelle. Nous sommes simplement dans le système des
conditions. Il faut un événement mais il doit petre capable dans ses csq de
relever l’inexistant. C’est une définition intrinsèque du ce qui se passe, mais
on n’est pas encore au terme du trajet. Simplement, ce qu’on a, c’est une trace.
Ça c’est je le
signale une grande différence par rapport à l’EE : on a une trace objective de l’événement. Quelle est-elle ? C’est
précisément le fait que l’inexistant est relevé : tout événement véritable,
puisque il n’y a événement que si dans l’ordre des csq il y a appararition de
l’inexistant, tout événement véritable suppose au moins une fois qu’il a
disparu (l’événement surgit et s’évanouit) laisse une trace qui est que
l’inexistant est relevé. Donc il existe, et en tant qu’il existe il fait la
démarcation entre si je puis dire l’ancien monde et le nouveau. Ce qui ne veut
pas dire encore qu’il y ait sujet ou vérité, mais il y a une différenciation
interne au monde dans la figure de la trace qui est en réalité que un
inexistant du vieux monde existe, qch qui n’apparaissait pas apparaît. Si vous
songez à ce que peut être votre propore expérience événementielle, vous verrez
que c’est une intuition évidente, comme toujours après coup. En fait, ce qui signale
qu’on a été dans une figure événementielle, c’est que qch qui n’apparaissait
pas apparaît, qch qui n’était pas là est là, et donc qch supplémente effectivement
le monde, ce n’est pas simplement que qch a changé au sens des lois du monde, ce
serait une modification, ce n’est pas seulement une perturbation. Il est arrivé
qch de grande intensit tel que il y a dans le monde qch qu’il n’y avait pas. C’est
pourquoi tout sujet est une création : il est sous condition impérative que
qch qui n’existait pas existe. Que qcg qui n’apparassait pas dans le monde
apparaît. Par csqt va s’enclencher un protocole de supplémentation dont le cœur,
le lieu central, sera l’apparition d’un nouveau corps, nouveau corps organisé
autour de cette trace, qui va coaguler autour de cette trace, un nouveau corps va
se constituer autour de ce qui n’existait pas. C’est ce point qui n’existait
pas qui va être le noyau, le cœur du nouveau corps. Voilà pour aujourd’hui,
merci.
Désolé pour le
séminaire annulé du mois dernier pour ceux qui n’ont pu être prévenus (donc pas
de K7 pour mars). 31 mai et 14 juin sont les 2 dates restantes.
2 échéances supplémentaires :
- ce samedi 29
avril, Yves Duroux et moi-même avec le CIEPFC invitons de Roudinesco sur son
dernier livre.
- 6 mai :
journée sur Parsifal, organisée par François Nicolas et moi-même. Il y aura
Slavoj Zizek.
François
Zourabitchvili, jeune philosophe, autour du meilleur petit livre sur Deleuze (Deleuze,
une philosophie de l’événement), est mort la
semaine dernière. Je crois être autorisé à dire qu’il a décidé de mourir,
puisque cela commence à se savoir. Il appartenait à cet ensemble flou de jeunes
philosophes entre 30 et 40 ans, qui est la relève véritable. C’est une perte,
c’est dommage que la vie ait ainsi vécu ce philosophe de la vie. C’est un
paradoxe amer que qch de la vie se présente comme mort. Je tenais à lui rendre
hommage devant nous.
Mon préliminaire,
c’est sur le mouvement contre le CPE. Je serai bref. Je voudrais construire ce
que je veux vous dire à partir d’un certain nombre de questions, ie tenter de formuler au point où nous en sommes (ie après la victoire tactique du mouvement sur le gouvernement) les questions
à partir desquelles se décidera l’avenir politique de ce qui s’est passé là.
Ceci est sous-tendu par la thèse qu’un mouvement en lui-même, par lui-même,
n’est pas exactement politique. Il est à la charnière dirait-on de l’historique
et du politique. Il a lieu dans une figure plus ou moins événementielle, et cet
avoir lieu ne décide pas à lui seul de son avenir politique, pas plus que moi
l’événement ne décide seul de la procédure de vérité dans mon jargon. On a
quelquefois inventé la formule selon laquelle les mouvements ne sont pas à
proprement parler politiques mais présentent des possibles politiques. Ie
ouvrent à la possibilité du possible, ou présentent une gamme ouverte de possibles
politique. Le mouvement, c’est ce qui fait à la fois sa force et sa limite,
présente un système complexe de possibles politiques (il n’en présente pas un
seul), il ouvre à une complexité multiple des possibles politiques. S’il
n’était pas là il ne les ouvrirait pas non plus. Il est le réel de la
multiplicité des possibles. On peut dire aussi qu’il est la politique dans son
suspens historique, dans le suspens de l’avoir lieu historique, collectif. Si
on admet ça, je crois qu’on peut constituer 3 questions à partir de ce qui
s’est passé :
1° quelle est la
séquence qu’on interroge ? on dit le mouvement contre le CPE. Mais tout le
pb est de savoir quelle est la séquence historique qu’on considère telle que
elle ouvre en effet à la multiplicité des possibilités politiques et telle que
la question de savoir comment va se décider son avenir politique est
constituée. Quelle est la séquence ? Décider sur la séquence, c’est déjà
décider sur l’articulation de l’historique et du politique.
On peut avoir 3
visions de cette séquence :
- la vision ultra
courte : la séquence, c’est le mouvement contre le CPE, depuis la décision
gouvernemental de mettre cette affaire en scène jusqu’à la décision
gouvernementale de plier bagage. Cet espace serait l’espace du mouvement dans
sa conception la plus courte et la plus homogène, en même temps. Puisque
l’objectif est assigné, la victoire définissable : on aurait une séquence
très courte et homogène.
- une séquence moins
courte, moins homogène : la séquence intégrerait la révolte des jeunes de
banlieue de l’automne-hiver dernier. On aurait une séquence distincte, mais
qu’on considérerait comme la séquence à propos de laquelle est ouvert le
système des possibles politiques, qui irait de novembre à aujourd’hui. Séquence
dont vous voyez qu’elle augmente en intensité ou contrariété immanente, mais
qu’elle perd en homogénéité. La question de l’articulation des 2 est encore
ouverte.
- une séquence bcp
plus longue : elle démarrerait avec le mouvement de décembre 95. Elle
intégrerait le mouvement de décembre 95 (contre le projet Jupe sur les
retraites, pour l’essentiel retiré, souvenons nous donc que la victoire
n’annonce pas toujours la victoire…), elle inclurait l’ensemble de la séquence
concernant le mouvement et l’organisation des ouvriers sans papiers à partir de
l’Eglise St Bernard (96), elle intégrerait le non au référendum sur l’Europe
(il y a donc une instance aussi parlementaire), la révolte des jeunes de banlieue
et le CPE. Et d’autres choses probablement. La séquence est complexe, chargée,
et porte sur des strates différentes de la société.
C’est la 1ère
question : quand on dit qu’il s’est passe qch et qu’il faut penser la
nouveauté de ce qch et voir sur quel type de possible nous allons décider et
trancher, dans un 1er temps il faut se demander de quelle séquence
on parle. On n’aboutit pas aux mêmes conclusions selon qu’on tranche en faveur
de telle ou telle description de la séquence.
2° à supposer qu’on
ait tranché la 1ère question (le cadre séquentiel, entre 1 mois et
10 ans), alors comment aborde-t-on la question de l’unité subjective de la
séquence ? De quoi est-il question non seulement au sujet les
revendications (diversité : papiers, retrait CPE, retraites…), mais d’un
point de vue subjectif ? il est possible de proposer une unité subjective,
étant entendu qu’il faut auparavant décider de l’espace temporel. La précision
technique de la question est assez simple : une unité subjective de
séquence finit toujours par se cristalliser en un mot d’ordre. Cette question
est ouverte : qu’est-ce qui constitue subjectivement le mot d’ordre de
rupture à travers lequel se constitue qch comme une subjectivité politique nouvelle ?
La question n’est pas tranchée, car les mots d’ordre mis en avant oscillent
entre la particularité tactique (comme retrait du CPE, excellent mot d’ordre
mais qui ne réalise pas l’unité de la séquence dans l’espace politique proprement
dit), et des mots d’ordre qui sont des généralités idéologiques (comme contre
le libéralisme). Il y a toujours des gens qui disent que contre le libéralisme
est l’essence générale du mot d’ordre tactique. Ça c’est un peu trop hegelien
peut-être ! A l’heure actuelle, le système de mots d’ordre capable de constituer
ou d’épingler une nouvelle subjectivité politique en la matière est un chantier
ouvert, car l’espace constitué juxtapose en fin de compte des mots d’ordre dont
la généralité idéologique est intéressante mais politiquement inactifs aussi,
et des mots d’ordre tout à fait actifs mais qui sont dans une perfection
tactique considérable. Là c’est une affaire de jonction entre la séquence et le
cadre mental dans lequel elle se constitue.
3° à supposer que
soit clarifiée la question de la formulation subjective de la séquence en
termes de mots d’ordre politique. La question est de savoir dans quel espace
politique cette unité s’inscrit. Dans quelle conception générale de la
politique elle fait résonner sa propre unité et son propre nom ou mot d’ordre,
ce qui l’épingle ou la révèle. C’est la question évidemment de savoir si c’est
représenté comme possiblement interne au parlementarisme ou pas. et ça ça
décidera quoi ? ça décidera de savoir si le bilan de cette affaire c’est
les élections de 2007 ou pas. et donc ça décidera de savoir si ce à quoi a
travaillé le mouvement est le mise en selle de la gauche et c’est tout. C’est
pas joué du tout. Le coup se prépare, une fois de plus, comme il a commencé à
le faire dès 1848. L’embuscade est absolument prête ! Si c’est ça qui
l’emporte, dites vous bien que dans un an, il n’y aura plus de trace de ce
mouvement. Il n’y aura pas de CPE mais on peut compter sur la gauche pour
proposer qch comme le CPA ! Le contrat pour l’avenir ! ça c’est une
question qui vient après les 2 autres : quelle est la détermination
historique de la séquence ? quelle est la zone d’articulation de
l’historique et du politique dans la figure de l’unité subjective telle qu’elle
se reflète pas des mots d’ordre ? dans quel espace imagine-t-on que ces
mots d’ordre puissent être pratiqués, déployés etc… (espace parlementaire,
de la gauche, ou une autre voie parallèle dans une figure d’autonomie) ? C’est
intéressant, comme une leçon de choses sur des points discutés abstraitement.
Une figure
événementielle quelconque doit décider du monde dans lequel elle opère, ie doit décider de savoir qu’est-ce qu’on embrasse sous le nom de ce qui se
passe : une césure brève, une surrection brutale et fugitive, est-ce que
c’est plus long, séquentiel ? quel degré d’homogénéité ou d’hétérogénéité
on accepte de prendre en compte dans ce type de situation. On a tendance à
considérer que plus c’est homogène mieux ça vaut, mais ce n’est pas un critère
pertinent. Le mouvement de décembre a mis en scène de difficiles et violentes
contradictions au sein du peuple, comme dit Mao. La 1ère
articulation de la séquence et la 2nde ne se sont pas agencées de
façon homogène. Donc entrer dans la politique c’est trouver l’espace
d’homogénéité de cet hétérogène. C’est toujours trouver comment un hétérogène
naturel ou légué par la situation est transformé en autre chose que lui-même, à
partir d’un espace nouveau. C’est forcément à partir d’un espace nouveau que
l’hétérogène peut se transformer en homogène. C’est le travail de la séquence,
et ouvre à la possibilité une unité subjective. Ce n’est ni dans la trop grande
généralité idéologique ni dans la trop grande particularité tactique. Ça décide
alors la question de savoir s’il est possible qu’une révolte articulée
s’inscrive dans un espace qui le voue pas à servir de marge de manœuvre à telle
ou telle des cliques parlementaires.
Voilà ce que je
voulais dire. Nous sommes au début des difficultés. On a mangé le pain blanc
des mouvements. Il a bcp d’ingrédients, c’est sa force et sa joie.
Dernier
préliminaire : mort de Aïgui, un des plus grands poètes contemporains,
mort le mois dernier à 71 ans. Quelques remarques le concernant, car il n’y en
a pas eu beaucoup. La mort d’un des plus grands poètes vivants n’est pas un
événement journalistique. C’est un enseignement aussi, tout de même : on
peut dire « le fait qu’un médiocre chanteur de rock soit mis sur le même
plan que la musique créatrice, bon, pourquoi pas »,
mais là c’est autre chose. On a affaire à une figure majeure du poème, et on
n’a rien. Donc nous, là, allons célébrer cela, cette voix essentielle, non
livrée à la compétition commerciale.
Quelques repères de
comparaison avec d’autres poètes du 20ème siècle :
- Pasolini : il a pratiqué une grande langue nationale et une langue locale. Il
a écrit des poèmes en italien et en dialecte frioulan, et sa poésie a tiré
parti du jeu entre les 2 langues. Aigui a écrit en russe et en tchouvache,
expérimentant un frottement langagier entre une langue instruite et une langue
plus localisée, très singulière, dans une communauté beaucoup plus restreinte.
Je le dis car je remarque que c’est un point de la poésie contemporaine qui est
de se demander, à la suite de Deleuze, comment des langues minoritaires peuvent
travailler de l’intérieur des grandes langues établies. Le résultat est de
l’ordre du poème : la déstabilisation de la langue nationale par le filon
secret de la langue locale, c’est cela qui pousse la grande langue nationale
dans ses retranchements.
- Celan : il y a là aussi des similitudes poétiques sur la coupe de la
langue. Il y a une manière d’interrompre toute rhétorique du poème en passant à
autre chose dès que l’expression de la 1ère chose est suffisamment
concentrée et suffisamment explicite. Le poème est une succession de coupes. Il
n’est pas du tout une exploitation de la langue en extension, comme les grandes
récits épiques par exemple. La langue est saisie comme une espèce d’ardoise
qu’on taille, et elle est sculptée sur une arête vive. Elle est interrompue
constamment par le fait que ce qu’on a dit, le dire s’est concentré
suffisamment pour qu’on passe à autre chose. Il n’y a donc pas non plus exactement
de principe de liaison (elles sont éludées), mais il y a un principe de
consécution et de coupe.
- Wallace
Stevens : il y a une concentration métaphysique sur
l’apparence, une fonction propre du matériau image, dans le poème, qui est une
interrogation sur la signification de l’apparence elle-même. Ce n’est pas
seulement une illustration de l’essence par l’apparence, c’est une
interrogation sur le monde sensible (auquel le poème se réfère) : quelle
est la signification du fait que le poème doit se référer au monde sensible ?
Le poème parle de ruisseaux, d’arbres, de mer etc… Quel est l’ordre de cette
nécessité ? Quelle est la prescription qui fait que le poème se déploie
dans l’image ?
- T.S Eliot : à la fin des fins c’est une poésie religieuse, en un sens
particulier : elle interroge l’apparence du point de vue de sa capacité à
faire signe. Le monde sensible est pris comme réseau de signes. La solution du
problème de l’apparence n’est pas celle de Stevens, qui cherche la vérité de
l’apparence, ou même l’apparence comme vérité. Ici c’est l’apparence comme
signe. On peut dire que le Dieu des poètes, c’est toujours le Dieu pour qui
l’apparence fait signe. De ce point de vue là on pourrait donc le comparer à
T.S. Eliot, ou à Patrice de la Tour Dupin (?).
En termes de
référence, j’avais commenté un poème d’Aigui, (Walenberg ?) à Budapest, inspiré par une grande
sculpture de Walenberg (?).
Dans le Court
Traité d’Ontologie Transitoire, l’introduction se
conclut par une référence à un
poème, Ici (1988). La poésie de Aigui
est une poésie de l’ici : comment ici fait signe ? Ce qui fait signe
n’est pas l’ailleurs, mais l’ici en tant qu’ici.
Un poème que je vous
signale, traduit par Léon Robel, « Aout, Nietzsche à Turin ». Sa poésie est traversée de personnages considérables : on
voit passer Nietzsche, Baudelaire, Malevich, Antoine Vitez. Il y a un élément
de dédicace dans les poèmes de Aigui. C’est un poème de 1867, qui part de quelque
chose de très connu concernant Nietzsche, qui est la permutabilité des
métaphores de la terre et des métaphores de l’air, la permutabilité du matériau
opaque et du matériau aérien, du fait que la pensée de Nietzsche est tendue par
la possibilité de la métamorphose de la montagne en espace aérien, de la pierre
solide en espace aérien (d’où la métaphore central de la danse, transformant le
poids en élan – métamorphose ancienne dit Bachelard) mais Aigui fait de cela un
poème. C’est la transfiguration poétique de la commutabilité ou de la
substituabilité de l’aérien au terrestre, la circulation immédiate de l’un à
l’autre, le moemnt pù la montagne et le ciel permutent.
Je terminerai par le
dernier recueil, toujours plus loin dans les neiges. Je vous lis le dernier poème, daté de 2004, le plus tardif. Il s’appelle
de plus en plus autrement sur la terre, sous-titré à propos du tableau d’un
ami. C’est à propos d’une peinture, il va dire pourquoi cette peinture est de
plus en plus autrement sur la terre. C’est encore la question de l’ici :
comment être autrement ici ? La peinture nous indique un lieu qui est le
lieu de l’autrement ici. Le poème est dédié à cet ami.
« Dans les
herbes de la terre petit à petit entre la luminescence des souvenirs de l’artiste.
La reconnaissance comme mouvement fluctuant chuchote par leur station ( ?)
la disposition d’un instant à l’autre, la respiration du monde comme souffle
érgulier. Espaces semblables à une plus haute tranquillité. Bigarrée des
rameaux et… sur ses toiles, de plus en plus hautement terrestres ».
Voilà, ayons donc
une pensée, et bien plus qu’une pensée, pour ce très grand poète.
Nous retournons à
notre schéma.
Je rappelle que ce
schéma est destiné à représenter, à styliser ou à inscrire le mouvement par
lequel se constitue le rapport impossible en apparence entre l’ontologie des
multiplicités indifférentes et la thématique des vérités éternelles. Je redis
ça de la façon la plus simple, architecturée : comment se fait-il que
admettant qu’il n’y ait rien d’autre que des multiplicités indifférentes, des
multiples de multiples, on puisse soutenir que cependant il y a des
vérités ? Qu’est-ce qui rend acceptable cette juxtaposition terminale,
sans dualité mondaine(ce ne sont pas 2 mondes séparées) ? Dans les mêmes
mondes il y a ontologiquement des multiplicités indifférentes et subjectivement
des vérités soustraites au temps : comment cette juxtaposition est-elle
possible, étant donné que nous ne sommes pas dans la solution métaphoriquement
platonicienne de la distinction des 2 mondes ? Nous ne disons pas que le
monde des vérités éternelles est lui juxtaposé de façon extérieure à
l’immanence du monde présenté ou des monde sensibles. Nous ne traversons aucune
distinction entre sensible et intelligible ou entre monde inférieur et monde
supérieur, entre monde des vérités et multiplicités indifférentes. C’est au point
du même qu’il y a le 2. C’est au point du même qu’il y a le 2. Les vérités
éternelles sont créées et disposées de l’intérieur d’un monde particulier et
sans intervention d’un autre monde. Nous cherchons un platonisme sans dualisme,
appelons le comme ça. Qu’est-ce qui est platonicien, alors, si ce n’est pas la
distinction sensible intelligible ? Et bien ce qui est platonicien c’est
de dire qu’il y a le 2, au point du même. A savoir que au point il y a les multiplicités
indifférentes il y a les vérités éternelles. C’est une question de genèse du 2
en ce sens là, au point du même. C’est le problème fondamental de Platon, le problème
de la participation ; étant donné un objet sensible quelconque, bien
entendu c’est un objet sensible, il est là, mais en un autre sens, il participe
de l’intelligible. Le point intéressant et complexe chez Platon n’est pas qu’il
y a 2 mondes (c’est un cadre de commodité, on coupe en 2 le schéma, ça ne dit
pas comment ça communique) mais leur articulation, ie la théorie de la participation, qui est loin d’être claire. Le problème
consiste à dire que la même chose (cette table) est là, elle est absolument de
part en part sensible, mais le fait qu’on soit en droit de dire que c’est une
table exige qu’elle participe de l’univers intelligible, ie elle communique de façon particulière avec l’idée de table. C’est bien
dire que au point du même (à savoir cette table par ex) il y a cette table, et
autre chose que cette table, qui cependant est immanent à la table, et qui est
le mode sur lequel elle participe de l’intelligible. Ce sont des rappels tout à
fait scolaires, mais pour dire qu’on peut appeler platonisme la conviction
qu’il est possible de rendre raison de l’un qui est là que pour autant qu’il
est aussi et en même temps traversé par le 2. L’un qui est là participe au
point du même de son autre. La table sensible et la table intelligible, c’est
bien joli de les séparer, mais le point important, c’est de savoir comment la
table sensible se laisse reconnaître du point de vue de l’intelligible. Donc je
reviens à la définition : platonisme sans dualisme. Mais il est déjà vrai
chez Platon lui-même que c’est au point du même que quelque chose se donne de
l’autre. Que donc tout 1 est 2. C’est ça le platonisme. Moi je le dis
ainsi : tout monde est susceptible d’être aussi le lieu de qch de
transmondain. En tout monde peut procéder un élément qui est transmondain,
ie un élément qui est reconnaissable comme tel du point
d’un autre monde. C’est identifiable comme vérité, y compris dans des positions
qui ne sont pas immanentes où cette vérité a été disposée, déployée ou crée.
Transmondaine en ce sens là : il faut dire qu’elle est mondaine puisque ce
n’est que dans un monde qu’un vérité peut advenir (au sens fort, ie avec les matériaux de ce monde, la matérialité d’une vérité est
intégralement celle d’un monde) et cependant il y a en elle qch d’autre que
cette identité mondaine, c’est le fait qu’elle est identifiable comme telle du
point d’un autre monde, au sens où elle peut y être ressuscitée (puisque la
rendre active en un autre monde suppose une procédure, ce n’est pas
contemplatif).
Si on regarde le
schéma, la dernière fois on avait spécifié pourquoi il y avait 3 régions :
- le il y a comme
élément générique : il y a au point du même des multiplicités
indifférentes et des vérités éternelles.
- la région de
l’être qui est la disposition structurale des multiplicités indifférentes,
ie le mode sur lequel sont pensées les multiplicités
indifférentes
- la région du sujet
qui est la région d’où procèdent les vérités
Le schéma nous donne
à la fois une corrélation et une torsion.
C’est une
corrélation car il y a un chemin qui se fait : multiplicités
indifférentes, événement, vérité éternelle. On n’est pas dans une disjonction
des 2 mondes.
Mais il y a une
torsion qui est représentée par l’excentrement de l’événement, qui est le point
de jonction, d’articulation et de coupure entre les 2 régions (être et sujet).
Donc il y a une séparation ou distinction mais qui n’est pas disjonctive entre
la région de l’être et la région du sujet. Et donc en fin de compte, penser ce
qu’il y a, c’est penser le mode sur lequel on peut articuler la région de
l’être et la région du sujet.
La torsion se donne
aussi par des correspondances point par point, ie la
lecture vecticale su schéma, que je rappelle, ie
les étapes : être là, consistance, T, inexistence, point correspondent aux
étapes du parcours qui va de l’événement aux vérités éternelles.
Autrement dit on a 2
chemins en sens contraires :
- un chemin de la
pensée qui se fait des multiplicités indifférentes à l’événement
-
____________________________de l’événement aux vérités éternelles
La dernière fois, on
avait commenté être là, apparaître,
consistance logique, transcendantal, inexistence, point, événement. Je le refais
en 5 minutes :
- une multiplicité
indifférente, c’est ce qui se laisse penser mathématiquement, donc comme multiplicité
de multiplicités sans point d’arrêt dans l’un et sans détermination qualitative
particulière
- ces multiplicités
doivent apparaître : un monde est le lieu où elles apparaissent
- cet apparaître est
consistant (ce n’est pas un chaos, il y a un ordre - qui peut changer). Il y a
une consistance logique de l’apparaître. On peut même dire que toute logique
est en réalité une logique de l’apparaître.
- la régulation de cette
logique, on l’appelle le transcendantal. Le transcendantal est simplement la
disposition qui nous permet de penser pourquoi l’apparaître est consistant,
pourquoi il y a une logique de l’apparaître.
- l’inexistance est
un point de corrélation obligé entre le transcendantal et les multiplicités :
dans tout monde il y a un multiple qui inapparaît.
- point est une
dispo singulière des mondes, qui est la possibilité ou l’impossibilité (selon
les cas) que le monde soit transcendantalement disposé de telle sorte qu’il est
exposé à un choix un binaire, ie à la possibilité
d’un oui ou d’un non.
Tout ça est
susceptible d’une description objective : les multiplicités indifférentes
(théorie math), théorie apparaître (logique), T (armature de ce qu’est une
logique de l’apparaîte) inexistant (point singulier dans tout monde) point
(mode propre sur lequel un monde peut ou ne peut pas passer par le défilé d’un
choix radical). Tout cela est susceptible d’une analytique détaillée (cf LdM) et qui est la pensée non seulement de la figure générique de l’être comme
tel (pensée ontologique) mais de la part logique de l’ontologie. Il faut bien
comprendre que dans l’onto il y a l’être comme tel, mais aussi logique, logos,
qui se dispose comme la loi d’apparaître. Ce segment propose une
intelligibilité de la logique comme principe de cohésion de l’apparaître. C’est
une idée ancienne, qu’on trouve chez les stoïciens et chez Kant aussi, qui est
reprise là sous une forme nouvelle : il y a des multiplicités
indifférentes, mais elles se disposent dans des coexistences qui sont des
coexistences logiques et non pas des coexistences désordonnées.
Evénement veut
simplement dire la survenue d’une dérégulation transcendantale. On a détaillé
la chose la dernière fois : l’événement est pris dans plusieurs formes
possibles du changement, c’est la forme la plus radicale, qui dérégule le
transcendantal lui-même. Un événement, ça porte atteinte à la logique du monde,
et pas seulement à ce qui importe ou n’importe pas dans un monde. Ce qui
distingue l’événement, c’est qu’il porte atteinte à la logique du monde du
double point de vue de l’inexistant et des csq. On peut appliquer ça au système
de question de tout à l’heure :
- la question de la
séquence consiste à savoir quelle est l’amplitude véritable d’où
l’événementialité de l’événement apparaît. Ie quelle est l’échelle ? C’est
une décision sur dans quel monde on va disposer l’événement en question. Ce
n’est pas la même chose de dire « il y a une lutte contre le CPE » et « la séquence commence en 95 ».
ce n’est pas la même chose de quel point de vue ? du point de vue du monde
à propos duquel on dit qu’il y ou qu’il n’y a pas l’événement. Vous fixer une
échelle, ie un environnement mondain. Vous aurez
des conclusions différentes quant à l’événementialité de l’événement car vous
n’aurez pas les mêmes considérations sur ses effets transcendantaux, ie sur ses effets sur la logique. La logique que vous mettez en scène quand
vous dites que cette affaire là doit être prise dans 2 mois ou dans 10 ans,
vous n’aurez pas les mêmes opérateurs logiques, vous n’aurez pas les mêmes
principes de cohésion et donc pas non plus les mêmes évaluations quant à
l’événementialité de l’événement. La question de l’événement, comme unique capacité
d’articulation des multiplicités indifférentes aux vérités éternelles, se pose
au regard de l’unité mondaine dans laquelle on travaille.
Il va y avoir 2
points fondamentaux :
- il y a événement
s’il y a relève de l’inexistant, ie il
y a événement que si un point attesté comme inexistant dans le monde se trouve
indexé à une apparition maximale (il faut repérer ce qui inexistait, de telle
sorte que l’événement l’a fait apparaître comme tel dans son intensité de
présence indubitable au monde)
- est-ce que l’événement
est situable dans le monde avec une intensité d’apparition donnée ?
L’interrogation sur
l’événement (comment in évalue ce qui s’est passé, quelle est la discipline des
csq), c’est est relatif au monde – ça suppose une périodisation, en termes historico-politique,
ça suppose un choix séquentiel. 1er point.
Et 2nd
point, l’interrogation sur le transcendantal : il faut identifier le point
d’inexistance dans la situation considérée.
Si vous réfléchissez
vous voyez que par exemple, si on interroge la révolte des jeunes des
banlieues, on l’avait un peut fait ici superficiellement, l’attestation quant à
l’inexistence est relativement claire. Le point, c’est que des gens qui sont
ici sont considérés en fait comme des corps étrangers. Donc une certaine loi du
monde les déclare inexistant, alors que naturellement, ils existent. Quels
qu’en soient les contours, la révolte signifie qch comme « et bien vous
êtes astreints à désigner notre existence ».
L’élément de relève de l’inexistant est immédiatement lisible. C’est de ça que
tout le monde parle : est-ce qu’il y a relève de l’inexistant ? est-ce
que c’est bien qu’il existe ? est-ce une calamité sociale ? est-ce
une pathologie sociale ? On leur dit : si vous ne nous aimez pas
partez ! on n’est pas obligé de…
Du point de vue de…
vous voyez de quoi il s’agit ; il s’agit dans l’événement d’autre chose
que ce qui arrive, même avec ue forte intensité. Ce qui arrive a puissance de
relever l’inxistance en un point. Maintenant supposons que nous ayons qch de cet
ordre. Comment explorer à partir de là la région du sujet ? comment rendre
lisible le cheminement de l’événement aux vérités éternelles. Regardez bien le
schéma les corrélations imposent de traiter dans un certain ordre : il
faut d’abord prendre la corrélation verticale inexistant trace (n°1) ensuite la
corrélation consistance logique nouveau corps (n°2) ensuite la corrélation être
là présent créateur. Puis T conditions d’existence (4, on revient en arrière)
puis point organe (5). On va expliquer les choses dans cet ordre.
…Encore une fois
pensons à la conjoncture récente. Supposons que ce qui s’est passé là on a
décidé sur la séquence, sur l’inexistant (ouvrier sans papier), que ce qui
s’est passé soit tel qu’il y ait relève donc installation au seuil de l’existence
politique. Ce que nous allons avoir, c’est qch qui s’enracine du coté objectif
de l’inexistant. Quelle va être la trace de l’événement ? c’est la relève
de l’inexistant. C’est nouveau : avant je disais il y a un nom pour
l’événement, donc subsistait la nomination. Nom de l’événement, donc il y a
déjà un sujet avant le sujet, un protosujet. Archisujet, 1er sujet,
apte à la nomination. Alors ici on n’a plus ça. Il faut dire que … lorsque
réellement il s’est passé qch qui affecte le transcendantal… qch qui était en
retrait d’apparaître, qui n’était pas et qui dans le monde était tel que le
staut d’apparaître, il était là dans la modalité de n’y pas être…
Dans cette métaphore
il y a toujours un point qui apparaît dans ce qui inapparaît. Il est
intéressant de reprendre la question amoureuse de ce point : là aussi une
figure de l’inexistant, proprement qch qui n’avait pas à apparaître, advient,
apparaît maximalement, d’une intensité ravageuse, car soutenue par
l’inapparaissant. C’est ce qui lui donne une allure dévastatrice, il n’y avait
pas lieu qu’elle apparaisse. C’est une rencontre. On peut voir ça aussi dans
l’apparition d’une ressource musicale enclose. Ça atteste le bouleversement de
la loique d’un monde : l’inexistant se met à apparaître. C’est la trace. Il y a trace…
inapparition et fait bascule dans le degré maximal d’apparition. Ça veut dire
aussi que la vigilance aux vérités, sa difficultés, c’est que c’est une
vigilance à ce qui n’apparaît pas, puisque c’est là que vous allez avoir la
possibilité d’une trace. Ce qui apparaît maximalement est intéressant que en
tant qu’il est le résultat d’un inapparaître antérieur. Et donc c’est une
directive : s’il y a une éthique générale, ce n’est pas sûr, une de ses
maximes c’est soit attentif à ce qui n’apparaît pas. c’est le contraire de
l’éthique commerciale : ne t’intéresse qu’à ce qui apparaît, et intéresse
toi maximalement à ce qui apparaît maximalement. D’où les publicité du
types : 1 500 000 personnes ont vu ce film. C’est intéressant de
considérer quelle est la nature exacte de cet argument. C’est un argument
anti-… au sens strict. Ie pour autant que ça apparaît conformément… à ce maximum.
Soyez le 1 500 001 ! vous voyez là il y a un point qui est que
le repérage de la trace est toujours un repérage sur l’horizon de
l’inapparaître et pas de l’apparaître. En même temps ça apparaît maximalement
sur le fond de la séquence postévénementielle. Ça apparaît maximalement sur le
fond de l’inapparaître. Et alors il y a là une capacité de diagnostic, ie qu’est-ce qui dans un monde est important quant au repérage de sa capacité
aux vérités. C’est bien du côté de ce qui apparaît, mais en tant que relié
souterrainement au fait de n’avoir
pas été dans l’apparaître,
l’épreuve du non apparaître. C’est ce que j’appellerais la dialectique
de la trace. Il faut trouver la trace, et c’est une dial singulière, ça se
passe dans l’éclat maximum mais en tant qu’i lest hanté par le non apparaître.
Donc 1ère opération : diagnostic sur la trace.
Ensuite va se
constituer qch autour de la trace. Au départ il n’y a que la trace. L’événement
est évanoui, il a lieu et disparaît. En tant que composition événementielle,
ie articulation objective, il n’apparaît que pour
disparaître. Ce qui compte c’est la trace, du point de vue du processus de
vérité.. Elle va tenir le non apparaître dans l’apparaître. Elle combine la possibilité
du non apparaître dans la modalité de l’apparaître. C’est ça la trace.
J’appelle corps de vérité, nouveau corps (ie la multiplicité) qui va se
regrouper autour de la trace. Il y a un critère formel assez simple que le
nouveau corps va être constitué de ce qui existe maximalement en relation à la
trace. Si qln assiste à qch qu’il interprète comme une révolution ou un
événement historique majeur, il va participer au nouveau corps qui va se
constituer autour de cet événement majeur pour autant que sa propre existence
individuelle est dans une relation maximale à cette trace, ie à l’inexistant tel qu’il a été relevé. Si par ex vous êtes comme Marx, et
que vous pensez que l’inexistant en politique c’est le prolétariat que la
révolution c’est ce qui fait apparaître ce prolétariat inexistant, vous allez
participer du corps politique, de la 1ère Internationale, pour
autant que votre propre existence va être liée à cette relève de l’inexistant,
de ce non apparaître qui apparaît, de façon également maximale. Autrement dit
le nouveau corps va se composer de tout ce qui s’agglomère à la trace dans la
figure d’une intensité maximale. Ie tout ce qui va exister autant qu’il est
possible d’exister dans l’identité à la trace. Exemple courants de ce que qd on
a identifié la trace alors le destin personnel est de s’incorporer maximalement
aux entours de cette trace, à ce qui se coagule. C’est entrer dans un corps de
vérité, c’est s’incorporer à une vérité, une vérité dont n’existe que la trace.
Pour autant que vous allez dans une norme de l’existence maximalement reliée à
cette trace, vous allez entrer dans ce corps de vérité qui induit un nouveau
corps. Dans le monde antérieur il n’avait pas lieu d’exister, sa trace n’était
pas considérée comme trace. C’est un corps événementiel en ce sens là : il
ne se constitue comme objet du monde que pour autant qu’il y a la trace de
l’événement, et dans des mesures existentielles d’intensité liées à cette trace
événementielle. Cors n’a aucune signification bio particulière ; c’est un
ensemble matériel tel que des individus peuvent s’y incorporer, de tsq que
cette nouvelle matérialité multiple vient à exister dans le monde avec comme
condition d’être dans un rapport maximal à la trace. Il y a une liaison entre
corps et consistance logique, car pour autant que c’ets un nouveau corps il
doit consister. Vous allez avoir la question : qu’est-ce que la
constitution logique d’un nouveau corps ? c’est le mode sur lequel va
travailler le dysfonctionnement de la logique antérieure. Avant l’événement on
a un dispositif de consistance, après l’événement ce dispositif est remanié
puisque l’inexistant vient à apparaître. Le corps qui va coaguler autour de
cette trace, selon quelles règles qui vont régir la consistance de ce
corps ? c’est un pb logique. Donc corrélation verticale entre nouveau
corps et consistance (de la procédure de vérité, en tant que corps qui apparaît
dans un monde).
- en politique c’est
la question de l’organisation en son sens le plus général. Ça a été la question
du parti pendant longtemps. C’est
un impératif : vous ne pouvez pas échapper à des énoncés singuliers
concernant la consistance des corps tels qu’ils s’articulent et se regroupent
autour de la trace événementielle.
- dans l’amour c’est
la question du couple, elle crée un nouveau régime de densité dans la relation.
Qu’est-ce une expérience cohérente, c’est la discipline du couple. Il y a
l’événement mais aussi les csq, pas forcément matrimoniale. C’est une question
immanente au devenir de l’amour, demandant de l’invention.
- ou nouveau corps
théorique dans la science : à partir du moment où une vérité procède par
regroupement corporel autour d’une trace elle doit résoudre la question de sa propre
cohésion. Ce point là est très exigeant. Si on veut garantir une consistance minimale
du corps de vérité, il y a une série de critères variés. C’est une raison pour
laquelle il ‘y a pas de correspondance terme à terme entre vérité et événement.
Il n’y a pas autant de vérité que d’événement, même en prenant événement au
sens le plus vigoureux. Car au-delà de l’événement il fat qu’un nouveau corps
se constitue selon des principes de consistance qui sont des principes
novateurs. On peut prendre comme grille d’analyse la question de savoir quel
corps politique au sens rénové surgit de cela est une question majeure. Elle ne
se réduit pas à la question de l’organisation qui va en hériter, mais quels
sont les principes de cohésion. Quelle proposition de consistance politique
nouvelle sort de là. S’il n’en sort pas, ce sera avalé par de vieilles,
d’ancienne consistance. La consistance est inéluctable. On ne peut pas opposer
l’illogique à la logique, ça ne marche jamais. Il y a des anarchismes vivants
mais le concept d’anarchisme victorieux est contradictoire. Alors ça veut dire
qu’on pratique, expérimente la question de la nouvelle consistance du corps. La
question la plus concrète et décisive des procédures de vérité, qu’il s’agisse
d’amour ou vérité ou d’autre chose encore, ce sont des question logiques, ie de discipline. Quelle est la part organisée, de compatibilité immanente,
qui régit un corps de vérité. Car l’événement est d’abord un dysfonctionnement
logique. C’est l’invention d’une nouvelle forme de compatibilité entre éléments
d’un corps, d’un nouveau régime de compatibilité. Ça peut être le corps d’un
œuvre picturale ou poétique. Celan et Aïgui : nouveau régime dans la
langue entre continuité et discontinuité proposition nouvelle sur les coupes et
les effets poétiques de ces coupes. C’est une proposition nouvelle sur ce que
c’est que la cohésion d’un corps poétique, d’un corps de langue comme corps
poétique. L’un des juifs allemands qui a traversé la violence du nazisme et un
russe ont prononcé ça, ce n’est pas indifférent. Dans des conditions
dramatiques quant à la langue ils ont eu à inventer un principe de cohésion
poétique de la langue comme telle. Ils ont eu en particulier à incorporer à la
langue l’expérience d’une interruption de la langue. C’est dans la langue
poétique que qch tient compte des régimes d’interruption. Qu’est-ce que parler
poétiquement allemand après la guerre ? qu’est-ce que c’est que parler
russe en poésie après la guerre aussi finalement ? C’est une sommation absolument
singulière, qui est un enregistrement dans les mécanismes les plus secrets du
corps langagier lui-même de ce que c’est qu’une compatibilité de type nouveau.
Ils proposent comme compatibles des choses qui avant étaient incompatibles, un
régime de coupure qui avant était considéré comme insignifiant, ne produisant
aucun sens. Ils forcent le sens dans la direction d’une coupure nouvelle qui
crée un nouveau régime de compatibilité dans lequel il y a une dialectique du
courant de la langue et de son interruption qui est absolument nouvelle. C’est
nouveau corps, consistance logique et nouveau corps.
Qu’est-ce qui
résulte de cela ? ce qui en en résulte, c’est un présent créateur. Etre
contemporain du nouveau corps, voilà le présent. Il ne préexiste pas à la
formation du corps lui-même. Etre contemporain de l’inexistant vient à
apparaître, et c’est s’incorporer au nouveau corps, condition du nouveau
présent. Donc une vérité surgit en tant que création d’un présent nouveau.
C’est une question difficile. Quand on a un grand mvt, la question n’est pas le
mvt qui apparaît et va disparaître, il va finir par s’arrêter. La question est
de savoir s’il va constituer ou non un nouveau corps. C’est une question
distincte. Le présent du mvt n’est pas la garantie qu’il constitue dans le monde
un nouveau présent politique. La présence du mvt ne garantit pas le présent
comme nouveau présent de tel que il fixe une nouvelle contemporanéité. Etre
contemporain de ça, c’est faire advenir une loi générale de la nouveauté de
vérité dans le monde concerné. C’est pour ça qu’il y a un présent créateur,
ie un présent qui n’est rien d’autre que le développement
créateur du corps lui-même et de son formalisme subjectif. C’est le mode propre
d’apparaître d’une vérité, d’où la corrélation à l’apparaître. Comment une
vérité apparaît-elle dans un monde ? Elle apparaît comme nouveau présent,
ie comme au sens strict une nouvelle temporalité, disjointe
de la temporalité dominante du monde concerné, ie
une nouvelle manière de vivre au présent. Dans un texte fameux Mallarmé disait
dans les années 1880, il assignait les restrictions de la possibilité poétique
elle-même au fait que un présent fait défaut. Un présent fait défaut :
c’était sa formule. Faute que se déclare la foule. Si on retourne la formule,
on a : si la foule se déclare, un présent peut advenir. Mais ça ne suffit
pas : si la foule se déclare, c’est très bien mais il faut plus que cela
pour qu’un présent se constitue. Pour qu’un présent se constitue il faut que se
constitue autour de la trace de cette irruption de la foule un nouveau corps,
un nouveau corps de vérité. Le nouveau présent c’est l’ensemble des mécanismes
d’incorporation au nouveau corps. Vous existez sous le nouveau présent pour
autant que vous êtes dans la figure de cette incorporation. C’est le mode propre
d’apparaître d’une vérité : elle apparaît comme nouveau présent dans la
figure d’une incorporation à un nouveau corps qui lui-même est pris dans une
consistance logique particulière et s’organise autour de la trace
événementielle. On va être renvoyé à la question des conditions d’existence de
ce nouveau présent. C’est la question du transcendantale. Est-ce que le
transcendantal du monde autorise réellement la possibilité maximale qui est
celle de l’existence d’un présent créateur. Par là nous entrons dans le
matérialisme proprement dit : il y a des conditions de possibilité, ce
n’est pas vrai qu’étant donné n’importe quel monde, n’importe quelle vérité
puisse procéder. C’est une vision relevant de c que Novalis appelait
l’idéalisme magique. Finalement dans n’importe quel monde n’importe quoi peut
surgir. Ce n’est pas vrai : l’événement doit être apte à procéder à la
relève de l’inexistant, autour de cette trace qu’est la relève doit se constituer
un nouveau corps, que ce nouveau corps doit se doter de sa propre consistance,
que tout ceci va donner un nouveau régime du présent, un nouveau régime de la
contemporanéité, mais il y a des conditions, qui sont des conditions d’existence
du présent dans le monde. Tout ça se passe dans un monde déterminé, modifié,
atteint dans ses lois mais qui perdure et continue à exister comme monde. Donc
on va avoir des conditions transcendantales d’existence du présent créateur
dans la figure du nouveau corps. Il y en a un certain nb, je n’entre pas ici
dans le détail, mais elles s’articulent toutes autour d’un point précis, qui est
que il faut que l’incorporation soit réellement possible, ie il faut que non seulement le nouveau corps se constitue autour de la
trace, mais on peut s’y
incorporer, il n’est pas un corps fermé. Ça correspond à bien des expériences
ordinaires, un corps si fermé qu’il n’est ouvert à aucune nouvelle expérience,
il n’est rien d’autre que l’inertie de sa propre fermeture. Ça ça veut dire
qu’il va transformer l’événement en répétition. Il na va être rien de plus que
le martèlement de la trace, ou son piétinement. C’est la figure éthique de
l’impuissance, l’impuissance comme maladie du corps de vérité, à partir du
moment où certes il s’est constitué mais aucune incorporation nouvelle à ce
corps n’est praticable. Ça se détaille techniquement, mais vous voyez très bien
ce que ça signifie. On peut aussi prendre l’exemple de l’amour, vous allez clore
tout ça. Un opérateur tout à fait remarquable de clôture c’est la jalousie. La
Prisonnière, Proust. Il faut s’enfermer dans une pièce, finalement, sans
sortir. Moment où l’expérience amoureuse devient défensive, ie elle n’existe que pour autant qu’elle ne s’expose plus au monde, ou elle
ne s’y expose plus que minimalement. Elle ne va donc rien incorporer comme
expérience supplémentaire dans sa propre dynamique. Elle va être un ensemble fermé
et elle va répéter son événement inaugural, elle va être simplement l’itération
de la trace et non pas l’incorporation du corps. Distinction majeure, entre qch
qui a constitué un corps, mais impuissant à s’ouvrir au monde lui-même, et un
corps d’incorporation, constamment ouvert à des expériences nouvelles. Et ça ça
va jouer beaucoup dans les systèmes des conditions d’existence, car le
transcendantal du monde intervient dans la possibilité d’avoir réellement un
corps d’incorporation et pas simplement une répétition de la trace. C’est là
qu’il n’est pas vrai que n’importe quel monde autorise n’importe quoi. C’est là
qu’il y a la finitude, si on appelle finitude la restriction transcendantale de
l’espace des vérités. Le fait que certains mondes sont agencés de telle sorte
que l’espace de vérités est étroit, que ne peuvent pas procéder aisément des
corps de vérité. Ça nous conduit à la dernière corrélation : un aspect
fondamental de cette réflexion c’est quand le monde contient peu de points. Ie
peu d’exposition du corps à des choix. L’incorporation, en définitive, elle se
fait toujours autour d’un point, ie
autour du moment où le corps pour traiter une situation particulière doit
choisir, ie passer par là ou par là. Si on a peu
de point, il propose peu de moment de cet ordre, il n’impose au corps que très
peu d’expériences décisionnelles, appelant ces expériences décisionnelles la
nécessité de choisir entre 2 possibilités. Le monde entier pour le corps se
contracte dans l’exigence d’un choix radical entre 2 options. Or la
régénérescence d’un corps de vérité menacé par la répétition, c’est toujours
d’être exposé à un choix de ce genre, à avoir à faire face à une alternative. Si
non il n’arrive même pas à distinguer en lui-même répétition et incorporation.
Il se répète sans le savoir. ce qui réveille un corps endormi, c’est la
nécessité absolue d’avoir à décider quelque chose, d’être convoqué par le monde
d’avoir à parier sur qch au sens où vont être décidées là les nouvelles
incorporations. Sinon on est dans la répétition. Donc il évident que laisser
ouverte la possibilité de l’incorporation c’est toujours être dans l’épreuve de
quelques points. Or il y a des transcendantaux qui limitent cette possibilité
voire qui l’annulent, il y a des mondes atones, sans point. Donc ça il faut
changer de monde, et c’est possible. Changer de monde c’est souvent changer
d’échelle. Comme je le disais au début, si vous considérez la lutte contre le
CPE sur différentes échelles, vous le disposez autrement, dans un autre monde,
un autre transcendantal, donc en un espace qui contient peut-être d’autre
point. Il n’y a pas de destin du monde atone car on peut changer de monde, mais
c’est une épreuve. Donc c’est vrai que dans les conditions T de persévérance et
de recréation d’un corps de vérité, la vision des points est fondamentale, si
le T du monde autorise cela. Or notre monde est un monde est un monde dans
lequel dans lequel la propagande sur les nécessités tient qu’il n’y a pas de
point. Vous pouvez choisir mais c’est ou la conservation catastrophique de
l’archaïsme du passé ou la modernisation. D’où la propagande ininterrompue sur
le fait que les français ont une nature particulière qui est un conservatisme
inébranlable, ils veulent garder leurs avantages et ne jamais les réformer.
C’est la nécessité des réformes nous explique-t-on ie s’accommoder à la mondialisation,
la nécessité économique, il ne faut pas s’imaginer qu’on aura nos retraites maintenant
c’est fini ça ! Aux USA où j’étais pendant les manifestations, la
présentation était remarquable : il y a qu’une seule chose plus bête que le gouvernement, c’est
les manifestants ! Le gvt est mauvais car il négocie trop, et les manifestants
sont mauvais encore plus, car ce sont des archaïques convaincus, qui ne revient
alors qu’ils sont tout jeunes que de n’être toute leur vie des fonctionnaires.
Alors c’est des petits vieux. Ils ne veulent pas prendre de risques ! ils
veulent qu’on leur garantisse tout. On a envie de leur dire : pourquoi
prendraient-ils des risques, sinon pour engraisser un certain nb de nab nab.
Oui, prenez des risques, n’ayez plus aucune sécurité de l’emploi, qu’on puisse
vous vider quand on veut, et puis travaillez dur, allez, au terme de quoi on
aura un peu plus de milliardaires français. La conviction profonde qu’on
cherche à installer, c’est qu’il n’y a pas de point, c’est que tout point apparent
est un faux point. Il y a une décision à prendre sous le nom de réforme à une
appropriation au monde tel qu’il est : ce que vous devez décider, sous le
nom de réforme, c’est simplement d’être comme le monde tel qu’il est exige que
vous soyez. Donc pas de point là ! Evidemment le traitement des points est
une réquisition fondamentale du développe des corps subjectifs. On appellera
organe ce qui dans le corps se constitue comme apte à traiter des points. Un
point aura à être traité dans l’organisation intérieure du nouveau corps par un
organe approprié à ce point. Si vous êtes confronté, face à un point, le corps
passe dans le point et sa division binaire, il faut un organe pour qu’il soit
apte à traiter le point. On pourrait donner une nouvelle définition de ce
qu’est un corps sans organe : c’est un corps livré à un monde sans point,
ie sous la supposition que son horizon est un atone. Par
contre si le corps est réellement confronté à des points alors il doit avoir
des organes pour le traitement de ces points.
Je reprends les
exemples simples du début : si vous vous demandez par exemple ce que veut
dire pour le mouvement, quelle qu’en ai tété la séquence, traiter le
point : récupération par la gauche parlementaire ou pas, vous voyez qu’il
doit y avoir une constitution subjective interne à ce qui se saisit de ce point
et le rend apte à le traiter. S’il n’y a rien de nouveau qui soit apte à le
traiter, il sera traité selon la logique antérieure, ce qui est le destin
inévitable de tels mouvements que de se solder par la victoire d’un gvt de
gauche (95). Sans organe = remodelage intérieur au corps telle que la nature
singulière du point auquel il est confronté puisse être traité de telle sorte
que ce traitement n’est pas la liquidation du corps mais son dvpt. On traite le
point au bénéfice du corps, et pas contre lui. Donc la notion d’organe est une notion
qui suppose dans l’objectivité du monde qu’il y ait des points et que le corps
soit apte à traiter le point de telle sorte que il le fait au bénéfice d’une
réincorporation, exactement comme dans l’amour il faut que le mode d’être
intérieur du couple, la façon dont il décide soit apte à traiter des points,
qui réouvrent l’expérience amoureuse du monde. C’est ça un organe, une création
immanente au corps, qui peut traiter un point, traiter le point au bénéfice de
sa propre incorporation. C’est une réouverture de l’incorporation.
Donc si vous avez
l’ensemble de la procédure qui fait que autour de la trace se constitue un nouveau
corps, qu’il est doté d’une constance logique propre, qu’elle permet de parler
d’un nouveau présent, si le transcendantal autorise que se développe une
autorisation, et si le corps développe en son sein des organe pour affronter
des points de telle sorte qu’il réouvre son incorporation, tout cela dessine
dans la figure d’un sujet, trame, institue la figure d’un sujet de vérité. La
vérité sera éternelle car elle aura eu lieu dans la création d’un nouveau
présent. C’est la présence qui institue l’éternité comme telle. Ce n’est pas
une csq de l’ordre… mais dans l’institution d’un nouveau présent que ce présent
est réactivable. Quand un présent est créé de façon séparée du monde
particulier dans lequel il sort, alors il a une existence comme présente, et
cette existence on peut la réactiver dans une autre procédure de vérité ou dans
un autre monde. L’éternité c’est la réactivation possible du présent.
Définition matérialiste, non religieuse, comme possibilité de résurrection du
présent dans un autre monde. On le reprendra la prochaine fois, et ceci suppose
bcp de conditions, et explique que les vérités soient relativement rares.
Je voudrais
commencer aujourd’hui en réouvrant hélas la rubrique des disparitions. J’indique
pourquoi je voudrais revenir sur le grand poète russe Aïgui, j’en dirai quelques
mots supplémentaires, et je voudrais vous parler de la mort de Jean Grosjean, poète
remarquable et partiellement méconnu, mort récemment.
1)
2 poètes disparus
a) Aïgui
Cette insistance sur
Aïgui a une signification plus générale. C’est l’importance exceptionnelle
comme condition générique de la philosophie du poème. Le poème comme forme radicale
de la langue, le poème comme ce qui dans la langue elle-même et par sa
métamorphose immanente, par sa métamorphose intérieure, coupe vers une
déclaration essentielle. Tout poème est dans la forme de la déclaration, il
n’est pas dans la forme de l’argumentation, de la démonstration, qu idoit être
jugée comme telle, qui ne s’autorise que d’elle-même, qui n’est pas prise dans
un réseau commun de règles. De là évidemment que le poème est cette autre
extrémité de la capacité de la lague par rapport au formalisme mathématique. Du
reste en dernier ressort le formalisme mathématique est anonyme, il est
transmissible intégralement, à raison précisément de son anonymat, alors que le
poème est radicalement propre, il est radicalement singulier. La raison
profonde c’est que la mathématique est ce qu’il y a d’extrême dans la langue du
point de vue de sa capacité à obéir à une règle, ie à
être dans le partage absolu de la transmission dès lors que la règle est compris….
Une démonstration est une démonstration pour tout le monde, celui qui la fait,
l’invente, la trouve, s’efface et disparaît devant la poss de la refaire, la
recomprendre dans sa transparence pure. Tandis que le poème est précis&ment
ce qui à l’autre extréùit, et pris dans des règles d’agencement n’en dmeure pas
moins une déclaration au risque pur du sujet, et qui sera évalué de ce point de
vue et non pas du tout du point de la conformité de son processus à une règle
partagée. On peut dire que le mathème est la dimension extrême de l’anonmyat de
la langue, le poème est la forme extrême de radicalité de sa singularité. J’ai
toujours soutenu que c’était 2 conditions essentielle de la philo, et qu’elles
l’étaient dans leur compatibilité paradixale, dans leur disjonction
essentielle. Nombreux sont les poèmes qui ont senti leur rivalité avec les
maths, leur discord homogène. Mallarmé, Pessoa, c’est le cas de bcp d’autres.
Je le dis d’autant plus que si mon usage des maths est souvent considéré comme
une des racines de mon obscurité essentielle, en réalité je soutiens que
l’usage du poème est aussi important pour moi quoique dans un autre ordre et
ouvre à des diff aussi considérables, sinon davantage. A raison de ce qu’il y a
en lui d’anonyme et de partagé, le mathème est en un certain sens plus ouvert
que le poème, qui odit être compris à la fois comme univoque, coupant court
vers l’essentiel et cependant comme absolument singulier. Je me disais s’il y a
une antiphilosophie contemporaine, au mauvais sens, pas au sens des grands
antu-philosophes qu’ont pu être Rousseau, Kierkegaard, Nietzsche, Wittgenstein
ou Lacan, s’il y a une passe antiphilosophique, on pourrait au fond la définir
comme l’indiffétrence conjointe au mathème et au poème, ie comme prétendant que le cheminement philo peut se faire dans l’indifférence
aux 2. Cette indifférence aux 2 fait de la philosophie une accompagnatrice du
journalisme. Ce côté d’essayisme journalistique qui est une représentation
grandissante de la philo. On peut la définir en profondeur comme tentative de
présenter sous le nom de philosophie quand ce n’est aps sa dégénéresance académique,
on peut la définir comme la tentative de définir sous le nom de philosophie qch
qui reste indifférent au mathème te au poème, qui ce ce point de vue est
dépourvu d’accès abrupt à la pensée, qui s’imagine qu’on peut accéder à la
pensée dans la convivialité des opinoins. Ce dont mathème et poème sont
l’école, c’est des conditions dans lesquelles il est poss de rompre avec les
opinions, dans la définition orioginairment platonicienne de la philo. Ce sont
2 écoles distinctes mais comparables à cet égard. Aujourd’hui, on le sait, la
poésie souffre aussi, entre autre chose, de ce déni où elle est de sa fonction
d’abrupt dans la langue et de ce qu’on lui substitue de pure circulation. Voilà
pourquoi pour les mêmes raisons pour lesquelles je mène combat pour la
transparence math comme ce qu’il y a au monde de plus facile, et non de plus
difficile, c’est le fait que c’est abslt partageable qui fait obstacle en
réalité, de même je mène combat pour que le poème soit pris en compte comme
radicalité singulière de ce dont la langue est capable, de ce dont la langue
est capable.
Je voulais revenir
un peu sur Aïugui, le poème de 1967 Aout : Nietzsche à Turin. Je voulais simplement dire que le volume excellent sur Aigui est le
volume de Poètes d’Aujourd’hui, par Léon Robel, de 1993. C’est une occasion de
souligner l’importance en matière de poème des médiateurs de la poésie, des
médiateurs des poètes un peu longtemps dans la traversée des langues étrangères
en particulier. C’est une des définitons possibles d’un grand poème qu’il survit
à sa traduction. Il y a l’autre hèse : il est si enfoncé spécifiquement dans
sa langue qu’il ne survit pas à la traduction. C’est une guerre dans
l’interprétation du poèle de savoir si un gd poème survit à la traductio ou
s’il ne peut pas y survivre. ma thèse ma pratique et mon expérience m’indiquent
c’est la 2nde idée qui est la bonne : il survit comme grand à
sa traversée dans la langue, étant entendu que la perte est considérable, mais
le considérable de la perte est aussi une mesure de la résistance du poème. La
manière dont vous recevez la frappe du poème après ou dans sa traduction est
une mesure de l’amplitude de pensée qui était immanente à sa singularité dans
la langue. Il y a des médiateur, traducteurs, présentateurs, qui ont été des
compagnons de l’introduction dans la langue française. C’est le cas d’Armand
Guibert pour Pessoa, Broda pour Celan, Robel pour Aigui.
Je voulais vous lire
ce poème, en hommage à la philosophie. Nous avons les hommages de la
philosophie au poème, mais nous sommes heureux d’avoir des hommages du poème à
la philosophie. Ce poème entoure Nietzsche par l’idée que il y a chez Nietzsche
une transmutation possible de la pesanteur et de l’aérien, en l’occurrence dans
les images du marbre et de l’air : il y a qch d’aérien dans le marbre, ou
de blanc comme le marbre dans l’air qui fait que la pensée de Nietzsche, la
vision de Nietzsche, la vue de Nietzsche orhganise cette commutabilité du
marbre et du ciel. Et la médiation c’est la blancheur. Il y a une perpcetion de
Nietzsche, à Turin, c’est le Nietzsche terminal, de l’après folie (Nietzsche
essentiel, où la détrmination archipolitique du destin est particulièrement
visible). Le poème met en scène, traduit le regard blanc de N comme organistaeur
d’un permanente substituabilité entre principe de pesanteur et principe de légereté,
entre le roc et l’air. Voici :
Or dans sa vue il
y avait comme qch de blanc, marmoréen sans pesanteur et sans matérialité. A
cause de cette parenté il sentait les précipices ouverts et dans le marbre au
jardin et dans la blancheur du papier. Il se frayait une voie à travers l’air
comme à tarvers de la soie. dans la min soudain il s’ouvrait tout grand
laissant vides quelque part des grottes et dans cette générale et vide aperture
si longtemps reculant comme une sorte de ciel, de rose autoépuisée, déchiqueté
et vif, cela pleurait dans une humide aérienne, dirait-on, calcarité.
Ce calcaire aérien,
cette pierre céleste qui est finalement la définition de ce qu’est pour Aïgui le
regard terminal de Nietzsche. Voilà ce que je voulais ajouter.
b) Grosjean
Je voulais vous
parler d’un autre poète et prosateur français, Jean Grojean. Il était né en
1912, il est mort à 94 ans. Nous nous réjouissons de la longue durée de sa vie,
c’est dans les 20 dernières années qu’il a fait ce qu’il y a de plus essentiel
dans son oeuvre. C’est un poète prosateur. Il a commencé dans l’élément de la
poésie. Sa poésie est une poésie en verset, assez ample, sans doute dans la
descendance de Claudel, il y a un élément chrétien ou religeiux dans cette
poésie, avec des références constantes à la Bible dont il a été un traducteur.
C’est le 1er versant de son œuvre, d’une poésie sans doute non assez
abrupte ou déchiquetée pour être pour nous, pour notre oreille complèement contemporaine,
mais qui est une poésie dont la subtilité doit être entendue à l’intérieur de
l’amplitude du verset et de la prosodie. Je vous lis une des Elégies, dans le recueil que je préfère, d’ailleurs un recueil de 67, comme le
poème de Aïgui. Les Elégies, c’est une série de
poèmes très beaux, qui sont des poèmes adressés, il y a d’un bout à l’autre une
adresse, un tu, toi, on s’adresse à un autre qui est un autre indécis, car
c’est un autre aimé, donc ce sont des poèmes d’amour en ce sens là, mais aussi
peut-être dans, ou au-delà, de ce tu aimé, qch qui s’infinitise, qch qui - si
on le traduit immédiatement en langage religieux - touche à la divinité, touche
à la divinité, mais une divinité qu’on tutoie, une divinité qui est
immédiatement présente dans la proximité amoureuse. Vous allez l’entendre Je
vous lis l’élégie 11 :
Si j’étais Dieu
je n’aurais eu de doigt que pour modeler dans l’âme ton visage dont ton corps
est le nimbre incorruptible et dont les univers ne sont que l’ombre. Puisse
novembre immerger de ces brouillard masures et chemins du bas pays pour te
laisser cueillir dans l’arbre mort le grand fruit rouge de l’arrière saison.
Encore un jour nous fûme ensmebles et presque un jour tant le temps se hâtait,
mais je dévorerai dans les ténèbres son soleil sur ta bouche. Tes yeux ont
refermé sur soi leur fleur pour illuminer l’ombre où me plongeront les heures
qui ne te verrint plus. Si tu t’endors dans les tombeaux du monde je haïrais….
Je regarderai d’une planète éteinte luire bruissante au loin la terre humaine
comme un cimetière de villes le dimanche, plein de vivants qui n’ont pas su ton
nom. Mais si mon âme se taisait dans mon âme à dieu, ni rien ni personne et
Dieu sans doute se serait rêvé lui-même. En vain auraient brillé les poussières
d’astres dans les flaques de ta route ou les larmes des branches dans tes
paupières si je ne les avais vues. L’espace n’était que juste la distance et
notre heure juste le loisir pour que tu vois ta face dans mes paroles et que
j’entende ma voix sur ton visage.
C’est tout de même un
très très beau poème. Je trouvais tout à fait extraordinaire sa fin parce que l’espace
n’était que juste la distance et notre heure juste le loisir pour que tu vois ta face dans mes paroles et que j’entende ma voix sur
ton visage me paraissait une définition poétique extraordinaire de
ce que c’est que l’événement d’une rencontre, dans la procédure amoureuse. Cette
construction d’un présent pur qui fait que instant et espace fusionnent dans
une commutabilité des mots et des visages. C’est ce qui est ici décrit ou nommé
dans le poème comme l’essence de la rencontre. C’est le versant poétique de
l’œuvre de Grosjean.
En 1972, Grojean a
donc déjà 60 ans, paraît qch d’apparemment assez différent, un récit (il
appelle ça un récit) dont le titre est Clausewitz. Clausewitz, le fameux théoricien de la guerre, qui devient donc chez
Grojean un personnage. C’est une évocation, en 80 pages, de ce fameux théoricien
de la guerre, saisi et pris dans une situation singulière, qui est précisément
la guerre, la guerre menée en France contre Napoléon. Et c’est structuré autour
de discussion d’une part entre Clausewitz et d’autres généraux prussiens, et
d’autre part entre ces généraux et une femme, qui est le point de vue singulier
d’une femme sur l’ensemble de ces considérations concernant à la fois la guerre
et la nation. C’est un petit chef d’œuvre. Il n’y a pas autre chose à dire. Je
ne peux que vous recommander de le lire, ce livre de 1972. Je vous lis juste le
début. Vous verrez comment il procède : il procède par une incorporation
immédiate et extrêmement soudaine d’un nom propre repéré, Clausewitz, dans le
concret d’une fable, et il va unir et insérer ce personnage, par ailleurs
identifiable et connu, dans un univers naturel dans lequel il va petit à petit
s’incorporer.
Clausewitz
montait le long des vignes (j’adore ce passage !
c’est merveilleux, ça nous guérit de tellement de commentaires sur
Clausewitz !). Quand il fut à découvert, il dut biaiser à cause du
vent. Il ne ralentit le pas qu’une fois à l’abri de la lisière. Des feuilles
jaunes et lentes tombèrent devant lui, la respiration se faisait plus facile,
le ciel et l’automne semblèrent plus proches. Il en avait assez du long effort
qui sclérose. La guerre de libération commencée en Russie d’hiver avec culminé
vers un solstice de juin comme une boucherie…. Et songeait-il après le tyran
une autre tyrannie. L’odeur du musc monta comme une enfance. L’enfance n’et pas
le passé, elle est le présage. Elle préfigure la vie et s’entête à briser les
figures dont la vie se maque. Clausewitz était le plus strict des hommes dans
son service. Mais sitôt la tâche assurée il devenait pensif comme une fille. Il
avait une proptitude de poudre mais son œil de cheval effrayé prenait toujours
comme une liturgie l’action des canons qui lui devait leur place. Clausewitz
longeait le bois comme un jeune homme en visiste chez ses oncles. Son regard
errait tour à tour, à gauche dans l’ombre où luisait le lierre et à sa droite
sur les éteules qu’éclairait une fin d’après midi. Combien les cieux essuient
d’orages avant d’obtenir cette douceur.
C’est Clausewitz en
1972. A partir des années 80, stt 82-83, quand Grosjean 70 ans, il montre que
cette réation singulière et unique, ce récit titré Clausewitz, est en réalité l’invention
d’un nouveau genre. L’invention d’un nouveau genre, ie une forme singulière du récit, très bref, qui est centré autour d’un
personnage, ou peut-on dire autour d’un nom propre, souvent tiré de l’Antiquité
ou de la Bible, mais pas toujours, qui fait que nous aurons ainsi Darius,
Pilate, Elie, Jonas, et quelques autres personnages tirés de l’histoire ou de
la légende, qui donnent la figure du nom propre au récit, et qui procèdent
d’une technique que vous avez un peu entendue dans le début de Clausewitz, une
technique qui consiste à aller très rapidement, de couper vers l’action ou vers
le dialogue, sans portrait, ie sans du tout faire
accompagner le nom propre d’un contexte descriptif ou historique véritable,
avec de très fortes images qui vont immédiatement incorporer le nom propee dans
un univers sensible et il y a un gd nombre de dialogue avec une théâtralité très
centrée sur des pb essentiels. L’ensemble, avec sa rapidité et cette
incorporation singulière du nom propre dans cet univers sensible nouveau, ça impose
une espèce de puissance réservée. Qu’est-ce que j’entends par puissance
réservée, qui est à mon avis la singularité de l’effet produit par ces récits
de Grosjean ? C’est une espèce de dire qui est abrupt, qui est confiant et
volontaire, ie la capacité de Grojean de susciter le
personnage dans l’univers sensible qui va lui être accomodé ne fait pas de
doute, mais qui reste étonné par la souveraineté du visible. Vous avez un élément
contrastant entre ce dire très abrupt, très rapide, très confiant dans sa
capacité, qui pourtant s’attache à un nom propre repéré et connu, et qui
cependant reste en dessous dans l’étonnement de la puissance du visible, dans
laquelle précisément on a incorporé ce nom propre. Je voudrais vous faire
entendre ça dans 2 des récits : Darius et
Pilate.
Je vous lis 2 très
brefs passages.
Darius, c’est
l’empereur de Perse, et il est avec son conseiller Daniel, et ils sont tous les
2 en promenade, et ils sont escortés par leurs gardes. Les gardes surveillent Darius et Daniel
à la fois comme des personnages simportants, mais aussi à raison de complots et
d’intrigues de palais qui les environnent :
Darius hôcha la
tête et se retira dans le bois. Daniel s’étendit parmi les herbes tremblantes et il s’endormit. Des fourmis
se promenèrent sur son front sans deviner ses rêves. Quand il se réveilla, le
souvenir de ses rêves ne pouvait se démêler des souvenirs de sa vie mais il
aperçut très haut dans le ciel un petit nuage lilial qui s’interrogeait sur le
sens du vent. Il entendit craquer des brindilles, on lui touchait l’épaule. Il
tourna la tête : Darius lui faisait signe de le suivre et rampait sous les
basses branches. Ils se dirigèrent vers un ronflement d’angoulevent. C’était les
2 gardes qui dormaient entre les ronciers. Darius riait sans bruit. Il regagna
la lisière et sussura : « je ne broute pas encore ». Puis une
fois debout : « Maintenant que les témoins de ma gloire dorment comme
les ivrognes de Mc Beth, je crois que je commence à te comprendre. La jeunesse
n’est pas ce que l’on a perdu, elle est de ne pas savoir ce que l’on a devant
soi. Me voici comme nos moissoneurs le matin prêt à m’arrêter n’importe quand
pour acclamer l’éternité qui passe » ».
Je suis touché par le
personnage qui se réveille pour acclamer l’éternité qui passe, ne serait-ce que
par la formule extraordinaire : l’éternité qui passe, et dont tout un
chacun peut être témoin dans un bois au petit matin. On peut être saisi dans un
bois au petit matin par le passage de l’éternité. Et cela, dit-il, c’est la
jeunesse. C’est pourquoi elle est perpétuelle. La jeunesse, c’est la chance de
pouvoir acclamer au coin d’un bois l’éternité qui passe. Et alors la vie va
devenir autre, la vie va devenir autre, car on ne peut pas impunément
acclamer l’éternité qui passe.
Dans un tout autre
sens, tourné lui plutôt vers la mort et la salvation, la figure du Salut, Pilate. Pilate, de l’Evangile, de la condamnation du Christ. Sa raconte sa vie.
Le passage que je vais vous lire, c’est Pilate a été destitué, il est vieux et
malade, il est en train de mourir, ça va être la scène de sa rédemption à lui,
Pilate, le mode propre sur lequel en définitive il est sauvé. Pour comprendre
la scène il faut savoir qu’il y a une scène très forte au début : on amène
Jésus à Pilate, il n’a pas de préjugés, il n’est pas vraiment dans l’affaire, et
ce qui va décider de sa décision c’est le trouble complet où le met le regard
du Christ. Le Christ le regarde, et Grosjean fait la remarque que le Christ
comprend qu’il a pour la 1ère fois affaire à l’autorité véritable,
il est devant celui qui décide. Alors il dit très peu de chose et se contente
de le regarder. L’histoire de Pilate est l’incompréhensibilité de ce regard
pour Pilate lui-même. On a regardé l’homme de l’autorité de telle façon que
cette autorité a été troublée et perturbée uniquelent par la façon dont l’autre
l’a regardé comme étant le détenteur de l’autorité. Pilate s’avère incapable
d’assumer sa fonction, il est déréglé, il est destitué, il tombe dans la
mouise, il meurt misérablement. Voici la fin :
Pilate ne pouvait
bouger, il ne pouvait tourner la
tête mais il avait entendu des pas sur le gravier et il en avait la gorge
sèche. Des anges lui apportèrent un gobelet d’eau de sourvce à boire et aussi
une cuvette d’eau pour se laver les mains comme il en avait eu l’habitude dans
une autre vie. Le grand ange s’agenouillait et lui lavait les pieds, et Pilate
se sentait à la fois gêné et dispo. Et quand le grand ange releva la tête,
Pilate fut stupéfait car les anges n’ont pas de regard, les anges nous voient
sans avoir de regard mais le grand Ange regardait Pilate et Pilate y
reconnaissait le regard du condamné de Jérusalem. Quand le nazaréen se fut
relevé, Pilate à son tour put se lever mais c’était avec l’intention de tomber
à genoux. Le nazaréen lui regarda les yeux comme il avait fait autrefois mais
cette fois-ci la clarté du regard n’était plus au fond d’une citerne. Pilate
découvrit que les moissons étaient faites jusqu’à l’horizon et que ne roulaient
plus dans le ciel que ses grands chars de vapeur qui ont la luminosité de la
neige et que salue l’arabesque imprévisible des envols des oiseaux de l’été.
C’est la fin de
Pilate. C’est ce que je voulais vous dire sur Jean Grojean de manière bien
entendu à ce que vous le lisiez.
c) remarque sur
la guerre en Afghanistan
Il y a un autre
point que je voulais vous dire, dans la rubrique de l’actualité. Je pense qu’il
faut s’intéresser grandement au devenir de la guerre en Afghanistan. Elle est
bcp plus symptômale. Encore que ne l’est l’évidence de la guerre en Irak. Je
rappelle qu’elle a été la 1ère réaction constituée suite au 11
septembre, approuvée par l’ONU, a donné lieu à peu de protestations de
l’opinion publique, on a dit les talibans on ne les aime pas bien fait pour
eux. 3 ans après la guerre est toujours là, l’occupation américaine est considérée
comme intolérable par la population. De considérables émeutes à Kaboul, sur le
mot d’ordre à bas le gouvenrement mis en place par les américains. Le sud du
pays est de moins en moins contrôlé par les forces alliées. La France est très
engagée dans cette guerre. C’est une guerre symptômale car elle a été considéré
très largement comme une guerre à peu près légitime et dont l’illégitimité va
s’avérer de plus en plus, au fur et à mesure qu’on va découvrir qe c’est une
guerre faite à un peuple qui ne demandait aucunement ce type d’intervention….
C’est un analyseur de la vérité de la politique française dans l’espace
international aujou’d’hui. La présence de l’armée française est réelle et quasi
clandestine pendant de longs mois en réalité, elle ne pet plus l’être. Il va
falloir justifier, légitimer, expliquer pourquoi nous sommes fourrés dans la
guerre en Afghanistan. Il y a là une entrée symptomale, et donc c’etst simeple
faire attention, se tenir au courant, enregistrer les nouvelles de l’armée
françasie dans ces territoires lointains. C’est un analyseur de la situation
planétaire qui est intéressant dans le triple devenir de toute cette affaire
qui se dit de 3 noms propres de pays : Afghanistan, Irak, Iran. Nous
sommes dans la question de savoir qu’est-ce que va devenir réellement ce processus
guerrier engagé séquentiellement en Afghanistan. Ça a été la 1ère
guerre de ce triangle, et la 1ère guerre est toujours en un certain
sens la mesure des autres.
2)
rappel de l’enjeu : des
multiplicités aux vérités, sens et vérité, la mort de Dieu
Je voudrais
maintenant revenir à l’analyse que nous proposions de la corrélation entre multiplicités
indifférentes et vérités éternelles.
Nous avions la dernière fois achevé le parcours conceptuel requis, parcours conceptuel destiné à
conjoindre l’incommensurable, qui propose une conjonction improbable de ce qui
est inccommensurable.
A savoir d’un côté,
du point de vue de l’ontologie pure, la reconnaissance qu’il n’y a rien d’autre
que des multiplicité indifférentes : l’être ne
nous destine ou ne nous promet rien. Il est bien vrai, comme le dit Parménide à
l’aube de la philosophie, que l’être est ce qu’il est. Non pas l’un mais la multiplicité
indéfinie. Mais qu’il soit la multiplicité indéfinie plutôt que l’un aggrave en réalité la dimension
d’indifférence qui est la sienne. Multiplicité indifférente, cela veut dire non
pas seulement multiplicité indifférente à l’homme, c’est plus vaste, cela veut
dire indifférentes au sens. Il est de l’essence de l’être comme tel de rester
indifférent au sens. On ne dira pas d’ailleurs non plus qu’il est dans
l’élément du non sens, ce qui serait lui conférer encore un sens. Les thèses absurdistes
sont encore internes à l’univers du sens. Si vous dites que l’être est absurde,
de trop, (sartre), l’en soi n’est pas de trop pour l’éternité : que
signifieriat qu’il ne soit pas de trop, qu’il soit exactement ce qu’il doit
être ? ce sont des formules brillanets et frappantes, mais de toute
évidence elles ne sont que l’enverts interne des formules théologiques concernant
le sens de l’être. L’être est indifférent au partage du sens et du non sens. Il
est antérieur ou en amont de ce partage. L’être est dans le registre de la mult
indiff, cela veut dire cela. Ce qui ne signifie nullement qu’il soit impensable.
Ce n’est pas car qch est extérieur au sens qu’il est soustrait à la pensée. S’il
n’y en a pas de sens, il peut néanmoins y en avoir vérité. C’est bien ce que
nous prouve jour après jour l’existence de la science mathématique, la science
mathématique comme science de la multiplicité indifférente comme telle, nous
prouve que l’indifférence au sens peut parfaitement être le lieu de la plus transparente
vérité. D’un côté cela, multiplicité indifférente en tant que indifférente au
régime du sens.
D’autre part on a
l’existence de vérités éternelles, transmissibles ou appréhendable
depuis la pluralité des mondes, qui précisément ne sont pas dans le régime de
la dissémination ontologique, de la muilt indéfinie où tout équivaut à une
autre multiplicité, multiplicités qui n’ont aucune raison d’être hiérarchisées,
qui sont dans l’égalité de leur être, et de l’autre côté les vérités éternelles
qui au contraire disposent certaines configurations de façon exceptionnelle
reconnaissent l’existence de processus en exception ou en incise de
l’indifférence.
Alors, finalemnt le
trajet conceptuel que nous reprenions et qui est détaillé, exemplifié, formalisé
dans LdM, c’est un procès philosophique de
connexion conceptuelle, d’organisation conceptuelle, entre les multiplicité
indifférentérentes, le régime soustrait au sens de l’être et l’exception, le
régime d’exception que constituent les vérités ternelles. On soutient là une
thèse philosophique un petit peu tendue, paradoxale, qui est que l’indifférence
absolue de l’être comme tel ne fait pas obstacle à la reconnaisance de l’existence
en exception des vérités éternelles. C’est la thèse. Autrement dit, l’existence
des vértés éternelles n’exige pas qu’il faille reconnaître que ce qu’il y a a
du sens. C’est une propositoin intrinsèquement, je crois, de
l’époque de la mort des dieux. Au fond, que nommait Dieu ? Je pense que Dieu
nommait la conviction que vérité et sens étaient conjoints, que la vérité était
aussi en quelque manière disposition du sens de ce qu’il y a. Il y avait en un
point une vérité qui garantissait le sens. C’était ça la conjonction organisée
entre sens et vérité. Une vérité éternelle, un point de vérité éternelle,
fonctionnait comme garantie du sens. Le nom de cela a été y compris dans la
métaphysique classique, le nom a été communément Dieu. La mort de Dieu, que je
considère comme un événement réel, ça s’est produit (Dieu vivait et puis
il est mort). Dieu vivait ça veut dire que vivait l’absolue conviction qu’il
existe un point de vérité qui nous dispense du sens, qui donne du sens à la
vie, la moralité, l’action, la mort, un point de vérité éternelle et garantie
de la donation du sens. La mort de Dieu c’est la fin de la vie de cette
conviction.
Je fais une petite
parentèse. Je pense réellement que Dieu est mort, je ne crois pas au retour des
religions ou à quoique ce soit de ce genre. C’est un point de discord avec
l’analyse idéologique courante. Si on salue le fat qu’il est mort, il ne va pas
revenir. C’est irréversible. Il faut interpréter ce qu’on nomme le retour des
dieux d’une toute autre façon, il faut l’analyser non pas dans l’espace de la
théologie mais purement dans l’espace de la politique. Il faut entrer cette
question du prétendu retour de la religion par les catégories politiques. Ce
sont des oripeaux jetés sur la mort de Dieu, ce sont les haillons du cadavre.
C’était une parenthèse.
Ce que signifie
la mort de Dieu c’est évidemment la séparation du sens et de la vérité. Cette séparation est en particulier la séparation radicale du sens ou de
la pluralité du sens et des vérités éternelles. L’interprétation commune par
csqt de la mort de Dieu, c’est la substutution de la question du sens à la question
des vérités. C’st comme ça que Nietzsche fonctionne. Nietzsche va dire ce qu’il
y a ce sont des interprétatoin, ce qu’il y a c’est des disopsitions du sens,
une logique du sens. Deleuze commence son livre sur Nietzsche en disant que
Nietzsche introduit la catégorie de sens en philosohie. Il paraît presque
évident que l’événement de la mort de Dieu en tant qu’il disjoint vérité éternelle
et donation du sens, finalement nous assigne à la pluralité du sens ou à la
logique du sens dans un orphelinat des vérités éternelles. L’homme moderne
serait orphelin des vérités éternelles et serait livré finalement à la pluralité
productrice du sens, et donc en définitive un espace plus ou moins relativiste,
ou culturaliste, où ce qui est intéressant c’est de se poser la questions de
production du sens, étant donné que ce sens n’est plus dispensé par le point
qui puisse être dit point des vérités éternelles. Deleuze m’a écrit un jour que
vérité qui était si important pour moi était un mot dont il n’avait pas besoin.
Il n’en a pas besoin pourquoi ? parce que en définitive dans l’élément de
la production machinique du sens, la question des vérités n’est pas nécessaire,
elle n’organise pas du tout la philosophie comme telle. C’est une leçon
différente de la mort de Dieu que de soutenir que d’une part sens est disjoint
de vérité, mais que d’autre part ça ne veut pas pour autant dire que vérité
éternelle ait cessée d’être organisateur de la philosophie. Bien plutôt, je
considère que ce qui a été sacrifié dans la mort de Dieu ce n’est pas la catégrie
de vérité mais celle du sens. Que les multiplicités sont en effet hors sens,
hors question du sens. Donc la tentative c’est de raccorder la possibilité des
vérités éternelles à une défection du sens. Où l’on retrouve soi dit en passant
le caractère paradigmatique conjoint des maths et de la poésie. Les mathss c’est
la leçon exemplaire quant à l’indiff des vérités au sens, et la poésie c’est
l’exploration du langage au lisières de la défection du esne. De quoi le
langage qui paraît voué au sens est-il capable quand on le conduit à la lisière
de l’abolition du sens ? C’est pour ça que mathématique et poésie sont
considérées des épreuves pour la pensée. Elles sont l’une comme l’autre dans
l’expérientation de qu’est-ce qui subsiste de vrai dans la capacité du langage
si on est aux lisières du non sens, voire même en deça de tout sens ? Le
propos à l’école des mathématiques et de la poésie est d’assumer une espèce de
court-circuit entre vérité et être, vérité éternelle et être multiple, court-circuit
au sens précis suivante que il n’y a pas la médiation du sens. Il n’y a pas la
médiation du sens. La vérité n’est pas portée par une couche de snes qui
enroberait la nudité d el’être et disposerait cette nudité pour la opssibilité
du vrai. C’est la présentation la plus tenace, qui est l’idée que entre la
nudité de l’être et la poss des vérités éternelles s’interpose la sédimentation
du sens. La tentative qui est dans l’élément de la mort de dieu, c’est que il
n’y a pas cette sédimenstion du sens, et que donc les vérités éternelles sont
des procédures en exception du il y a, certes, mais qui doivent pouvoir
économiser la médiation du sens. Ce raccordement, ce propos de raccordement, on
peut le décrire comme la surrection d’un sujet, la surrection ou l’apparition
d’un sujet à l’intérieur même de l’étabelment dépourvu de sens de l’être. Il
faut la surrection d’un sujet pour que soit portée hors sens une vérité éternelle.
Cette surrection se fait dans l’étalement dépourvi de sens de l’être et elle apparâit dans un monde. Voilà
c’était pour bien redécrire la signifcation générale du projet, et aussi le
situer dans un horizon et une perspective où la mort de Dieu est non seulement acceptée,
revendiquée mais prise absolument au sérieux, au pied de la lettre. Dieu est
mort, c’est pas une métaphore. Il vivait et il est mort. Ça lui est arrivé. Ce
qui prouve bien qu’il était vivant pusiqu’il lui est arrivé qch, à savoir de
mourir. Si on le prend comme cela, philosophiquement, cela crée un epace dans
lequel en réaliré l’équilibre qui est rompu c’est l’équilibre entre sens et
vérité (ça se dit comme ça par rapport aux fonctions qu’assumait le Dieu de la
métaphyique). Alors là on va avoir un espace de nudité de l’être et de logique
de l’apparaître dans lequel on fait l’économie de la question du sens et dans
lequel une vérité peut être portée par la surrection corporelle et matérielle
d’un sujet.
3)
rappel du schéma
Je rappelle les
conditions de tout cela, qui étaient dans le schéma :
- il faut un point
focal discontinu, un point de disocntiunité qui est en même temps un point
focal. Il est à la fois conjonction et dicjonction, point fical et
discontinuité. On le nomme évéement.
Et puis une série de
conditions connexe. Le fait qu’il y ait le point focal événementiel n’est pas
suffsiant, il faut des cnoditinos connexes, qui sont des conditions plus
structurales. Je les rappelle rapidement, récapitulation.
Elles sont du côté
de la structure T de l’apparaître, de la structure des mondes
Elle sont aussi du
côté de la forme post événementielle du corps subjectivable. Ce corps est
surrection du sujet, une matérialité. La structure du T est ce qui fait que les
multiplicités apparaissent dans un monde.
Du côté des
strucures transcendantales de l’apparaître, on y trouve :
- une forme d’ordre
- des opérations
internes à cet ordre, opérations qui permettent de penser l’existence comme distincte de l’être, l’existence comme apparaître de l’être, et de
penser l’existence y compris dans la modalité de l’inexistence.
- la structure
formelle du choix, ce que j’appelle les
points, ie des formes de condensation des nuances de la situation
mondaine dans un oui ou un non, dans un 1 ou un 2, dans une dualité
constituante, dans strutcure formelle du choix.
Forme d’ordre,
opérations synthétisées dans le concept d’existence, structure formelle du choix.
Voilà ce qu’on doit trouver du côté des formes T de l’apparaître.
De l’autre côté,
du côté de la surrection du sujet, on doit avoir :
- trace de l’événement, une trace intra mondaine de l’événement
- la possibilité d’une
incorporation à cette trace
- des organes de traitement des points
Traces d’événemnt,
incorporation au tracé, organe de traitement des points.
Je simplifie
terriblement, mais commentons ces 3 données parallèles.
a) du côté de la
structure transcendantale de l’apparaître :
- forme d’ordre : tout monde est consistant, dispose d’intensité d’apparition dans
une forme. C’est une thèse que je ne cesse d’opposer à l athèse du chaos. Les
mondes ne sont pas chaotiques, ils proposent des formes d’ordre.
- les opérations : ça veut dire que les organisations internes des intensités de ce
qui apparaît dans un monde permettent de qualifier chaque multiplicité comme
une existence dans ce monde. Et permet de mesurer l’intensité de cette existence,
y compris cette forme minimale d’intensité de l’existence qu’est l’inexistence.
C’est un point très important sur lequel il faudrait faire des variations plus
sophistiquées : existence et inexistence sont des catégories de l’apparaître,
pas des catégories de l’être (les catégories de l’être, c’est être ou ne pas
être). Exister c’est le mode propre sur llquel un être se présente dans un
monde. L’existence est relative au monde, elle n’est pas comme la multiplicité pure
l’objet d’un jugement d’être invariant. C’est la raison pour laquelle vous
pouvez parler d’inexistence ou de terme inexistant, alors que ontologiquement
c’est qch qui est. L’inexistant, c’est la preuve que l’existencne ce n’est pas
l’être : puisque une chose qui est, qui est mathématiquement pensable peut
parfaitement inexister dans un monde. L’inexistant est le témoin de la
mondanité du multiple, de ce que l’apparaître ne se dissout pas dans l’être,
n’est pas résorbable dans l’être. Existence et inexistence sont fdtaux ici pour
penser la distance entre la logique de l’apparaître dans un monde et la mathématique
pure du multiple.
- enfin les points : un point est une structure
transcendantale qui propose un choix radical. Ce n’est pas une subjectivité,
c’est une struture formelle du chois. Il y a comme un défilé dans lequel il faut
passer. C’est une proposition du monde lui-même, une proposition du monde
lui-même. C’est un point important à mes yeux car cela prouve que quand on est
dans l’instance du choix, ce n’est pas une délibération intérieure au sujet. Il
y a une objectivité de la puissance du choix. Le choix est un choix imposé, comme
dit Lacan tout choix est un choix forcé. Tout choix est un choix forcé en un
sens particulier qui est que vous êtes contraint au choix par la figure du
monde lui-même pour autant que vous participez d’un sujet. La meilleure manière
d’éluder le choix est de ne pas s’incorporer ç ue subjectivité générique
quelconque. Vous ne serez pas soumis à la contrainte du choix. Mais si vous
participez au dvlopt d’un sujet vous allez rencontrez de contarintes de choix,
c’est inéluctable et ce sont dans ces contraintes que le corps subjectif va
s’éprouver et se renforcer. Le processus de renforcement et de constitution
d’un corps subjectif c’est le traitement des points. C’est là que pour lui le
monde est concentré dans une dualité constituatnte, il va passer où il faut
passe. C’est ce qu’on peut appeler une victoire, il y a des victoires
subjectives qui sont bien avant la question des batailles. Qu’est-ce qu’une
victoire subjective ? c’est quand un corps subjectivable a réellement traité
un point. J’ai traité ailleurs les conditions formelles du traitement d’un
point. Quelquefois, on traite un point. Une victoire c’est quoi ? ça n’est
rien d’autre que le renforcement du sujet. C’est une leçon pour toutes les
procédures génériques, y compris la politique. La politique ça consiste à
traiter des points. Quelle est la récompense ? La récompense c’est qu’on est
mieux qu’avant, c’est quoi ? C’est êtrre plus apte à traiter d’autres
points ! Et alors à la fin des fins ? il n’y a pas de fin ! Il y
a la production immanente de qch qui restera comme une vérité éternelle de la
politique. Après on dit à un moment donné ça échoue ? ça veut rien
dire ! L’échec c’est que tout processus se sature, s’achève, renonce à
traiter des points etc… c’est la loi universelle des choses. Comme disait
Hegel, tout ce qui naît mérite de périr, de mourir, c’est pas grave. La
question est de savoir si on a été dans l’aptitude à traiter un certain nombre
de points, renforçant la possibilité d’en traiter d’autres. Ce que nous promet
la victoire, c’est la possibilité d’autres victoires éventuelles. C’est tout. La
mythologie qui soutient tout ça est nécessaire : c’est la mythologie d’ue
transforation globale du monde, l’idée que ça va changer le monde. C’est bien
de penser ça, c’est un accompagnement imaginaire de l’incoporation subjective.
D’abord car il n’y a pas de représentation globale du monde. Changer le monde
on ne sait pas ec que ça veut dire, je ne le connais pas comme un tout, la
question de son chgt global ou total n’a pas de sens. C’est aussi oublier qu’il
n’y a de victoire que point par point. Il n’y a pas de dernier point. Il n’y a
pas de dernier point. Voilà. Et vous voyez en quel sens la notion de point est
une contrainte objective du transcendantal relativement à la fidélité d’un
sujet. Donc le sujet fidèle c’est celui qui ne va jamais renoncer à traiter un
point, tout en sachant que le traitement du point est simplement le
renforcement du corps subjectif dans le renforcement du traitement possible d’autres
points. Tout ça c’est le procès même de constution de ce qui, ressaisi dans
d’autres mondes, apparaîtra comme vérité éternelle. Voilà ce que je voulais
dire sur les containtes de la structure trranscendantale de l’apparaître.
b) du côté de la surrection du sujet
si on prend
maintenant les choses du côté de la forme post-événementielle du corps
subjectivable, je voudrais aussi commenter les 3 termes :
- il faut qu’il y
ait une trace de l’événement. Cette trace a une
définition formelle : c’est la relève d’un inexistant. La trace est
immanente, elle consiste au passage d’une existence de degré minimal, donc
d’une inexistence dans le monde à une existence maximale. Il y a donc une
bascule d’un des termes du monde de l’inexistence à l’existence proprement
dite, ou à l’existence complète, c’est ce qui fait trace de l’événement. C’est
intéressant car ça veut dire que la trace, c’est un phénomène de l’apparaître.
La trace, c’est une modification transcendantale, c’est une modification de
l’évaluation transcendantale. Et donc c’est ce que je disais dans le texte que
je vous ai distribué au début de l’année, le texte qu’est-ce que vivre, ce qui importe est toujours lié à ce qui n’avait aucune importance. Ce
qui importe n’est jamais une connexion de ce qui importe, ce qui importe est
lié à ce qui inexistait dans la situation, mais ce inexistait n’importait pas
vraiment dans la situation. D’où l’impératif que je proposais à prêter
attention à ce qui n’existe pas, à ce qui est inapparaissant dans la situation.
C’est toujours là que qch fait trace de l’événement. Si vous n’êtes attentif
qu’à ce qui importe, vous manquerez la trace. Ainsi s’explique que les débuts
de la constitution d’un sujet nouveau soient toujours extraordinairement
localisés et minoritaires, soient des choses presque imperceptibles dans leur
commencmeent. Parce qu’elle se regroupent autour d’une trace qui elle-même est en
un point qui inexistait et qui comme tel n’attirait l’attention de personne.
C’est en un point éloigné de toute importance que ce qui importe apparaît en
tant que trace d’un événement qui affecte le transcendantal. L’héroïsme
fondateur, tout héroïsme fondateur, prenons ce mot, tout héroïsme fondateur,
ie toute acceptation d’une incorporation subjective première,
se fait au détriment de ce qui importe, au détriment de ce qui, dans la
régulation normale de l’apparaître, importe véritablement. C’est pour ça,
contraitement à ce qui est prétendu, en règle générale, les grands moyens de
communication sont absoulment inaptes à déceler les traces d’un événement. Ils
déclarent que c’est leur métier, quand même ! Mais ils y sont constitutivement
inaptes car ils ne peuvent ni reconnaître la trace elle-même (elle est au lieu
de ce qui n’importe pas) ni reconnaître els débuts de la constitution du corps
subjectivable (c’est en un lieu qui n’importe pas non plus). On est toujours
surpris de voir que des phénomènes qui apparaissent comme considérables ont été
entièrement ignorés sur des séquences très longues. J’ai été très frappé que
quand vous scrutez l’historiographie du 19ème avant de trouver le
nom de Marx il faut chercher longtemps. Ce n’est pas présent, c’est lointain,
disctint. Après coup, on juge autrement. C’est une loi générale qu’on peut
formaliser. Si la trace de l’événement est la relève d’un inexistant, tout ceci
est cohérent. Il y a une tendane générale à ne pas identifier l’émergence ou la
surrection d’un sujet à raison de ce qu’est la trace de l’événement.
- l’incorporation
à la trace est en réalité une question d’incorporation maximale ou maximalement
possible à ce que constitue la relève de l’inexistant, s’installer dans le
sillage de cette relève avec une intensité existentielle maximale. Cette opération
est une opération paradoxale, et ce paradoxe est bien connu de tous les
expérientateur de vérité, qu’il s’agisse des militants, des amants, des
artistes. Le paradoxe c’est que vous vous incorporez, vous accordez votre
propre intensité existentielle maximale à qch qui apparaît, dont vous êtes le
témoin qu’elle apparaît maximalement, alors que presque toute la situation dit
qu’elle n’apparaît pas du tout. Vous êtes le témoin d’une apparition maximale au
point même de ce qui était et demeure pendant tout un temps de l’inapparaissant.
Vous déclarez qu’apparaît qch qui pour énormément de témoins n’apparaît pas. Vous
êtes quand même comme un visionnaire ou comme un fou, il y a une folie de
l’incorporation au corps subjectivable, en termes d’opinion. D’ailleurs tout le
monde sait que stt au début ceux qui s’incorporent à une vérité sont considérés
comme des fous, d’une manière ou d’une autre. Il y a toute une tradition de
considérer la passion amoureuse comme une folie, les expériences artistique
comme des folies, les utopies polityiques comme des folies etc… non sans raison
puisque l’incorporation, il y a un moment où vous devez déclarer comme une
conviction maximale que qch d’essentiel apapraît au point de l’inapparaissant.
On vous dira : c’est des visions. C’est vrai que distinguer les vraies
visions des fausses n’est pas facile. Qln vient et dit : moi j’ai vu la
vierge dans un arbre, elle a vu qch qui n’existait pas comme exitant absolument.
L’univers est rempli de visions fallacieuses et d’apparitions douteuses. Ce
sont les csq qui font que ce n’est pas douteux. En définitive, tout va dépendre
de la capacité du corps à traiter quelques points. Tant que ce n’est pas le
cas, l’incorporation est une opération paradoxale que vous avez à soutenir dans
l’élément de son paradoxe. On a ce point que toute conviction originaire, toute
conviction subjective novatrice, est nécessairement dans une certaine forme de
l’insoutenable. Le plus terrible, c’est que vous avez à faire propagande pour
cet insoutenable : évidemment, l’incorporation en règle générale signifie déclarer
l’apparition de l’inapparaissant, déclarer que là est ce qui advient comme
vérité.
- et alors le 3ème
terme c’est il y a des organes pour les points. La
doctrine de l’organe est assez complexe mais on peut en donner une idée. Un
organe c’est ce qui de l’intérieur d’un corps subjectivable peut être apte à
traiter un point. C’est la dimension d’un corps subjectivable qui est spécialisée
dans le traitement d’un opint. Par exemple, dans le cas de la révolte des
esclaves dirigée par Spartacus : le corps subjectivable est représentable
comme armé des esclaves. Les esclaves n’avaient pas d’armée. Apparaît un corps
subjectivable dans l’espace politique absolument irréductiblement nouveau. Les
points ça peut être par exemple des batailles : si vous êtes confrontés à
l’armé romaine, ou bien vous êtes disloqués ou vainqueur. La seule manière de
ne pas traiter le point c’est de ne pas accepter la bataille, c’est pas
toujours la bonne idée. Si vous acceptez la bataille, il va se poser des questions
spécifiques concernant par exemple comment affronter la cavalerie romaine, si
vous vous n’avez pas de cavaleries, exactement comme dans les guerres de
partisans comment affronter les chars, ou l’aviation, sans char ni aviation. Il
faut spécialiser à l’intérieur du corps militaire des unités aptes à traiter la
question de la cavalerie en dehors des normes classiques. C’est un exemple
élémentaire. Le paradoxe de l’organe c’est qu’il tend à instituer une division
intérieure au corps subjectivable : puisque vous allez avoir des unités
spécialisés dans l’affrontyement avec la partie dure de l’armée adverse, vous
allez avoir à former un corps de spécialistes relativement indépendant du reste
du corps militaire, relativement désorganisé ou peu spécialisé (comme il est
normal pour une armée populaire ou une armée d’esclave). Evidemment l’organe
fonctionne non seulement comme spécilisation mais comme séparation. Or une
armée populaire n’a de force que dans son unité. Une armée classique non, elle
est sous les ordres de la hiérarchie, elle fonctionne sous une discipline
formelle. Mais l’armée populaire, qui s’est auto-constituée, a besoin
absolument d’une discipline subjective. Elle ne peut faire confiance qu’à sa
propre unité. Comment les organes spécialisés vont-ils s’avérer compatibles
avec cette uinté subjective qui paraît mieux réalisée quand vous avez une foule
inorganique qui se lancer sur les romains avec sa seule fougue subjective et va
se faire tailler en ièces par la cavalerie ? c’est un pb bien connu, exactement
comme quand vous avez une manif et q’il faut faire un service d’ordre, plus il
est spécialisé, il est aussi redoutable pour les manifestants que pour
l’adversaire. Il est spécialisé et aussi séparé, il va avoir des attributs
particuliers. On opurrait chercher des exemples du même ordre dans les
autres procédures : le moment où pour traiter un point, où pour que le sujet se
développe ou se renforce, vous devez avoir un organse de traitement, mais la
formation interne l’organe est aussi une séparation. Vous allez avoir à
reformuler le principe de votre unité. La question de l’unité ne va pas se
présenter comme avant. Elle va devoir intégrer la séparation singulière de
l’organe. C’est une question à mon avis de la plus haute importance concrète. C’est
une contradiuction fdtale et motrice en même temps que d’avoir à traiter les
points de telle sorte qu’il faut spécialiser certaines régions du corps subjectif
alors quecette spécialisatin est aussi une division alors que par essence le corps
subjectivable ne vit qu’au régime de son unité subjective, il n’est pas étatisé,
il n’est pas contrôlé par les lois transcendantales de l’apparaître, il est une
création continue. On peut dire aussi qu’un corps subjectivable est qch qui
doit reformuler les conditions de son unité à l’épreuve des points. Ce qui
éclaire qch qu’on connaît bien : rien n’est plus périlleux qu’une
victoire. On a traité le point, bravo, mais le pb c’est que c’est un peu un
commencement. Si on définit la victoire comme la capacité d’un corps subjectivable
à traiter un point (c’est sa définition légitime), on voit que comme le
traitement du point a requis un certain type de division interne au corps, le
pb du sujet dans l’élément de la victoire est la reformulation de son unité.
Comment résorber ou accepter sa division dans une figure nouvelle de l’unité
subjective. C’est une épreuve interne, immanente, qui expose le sujet
victorieux à une difficulté inédite qui est que cela même, le type de subjectivité
à l’horion de sa victoire n’est plus valide dans l’élément de cette victoire
elle-même, car qch dautre a surgi dans l’organsiation interne. Par exemple,
dans le cas de l’armée des esclaves de Spartacus, des contradictions très vives
ont surgi entre les corps spécialisés qui se consodéraient comme militairement
aptes et une foule d’esclaves ralliés, avec femmes, bagages, enfants, rendant
la situation militaire difficile. Cependant il fallait bien marcher avec ces
gens là aussi : c’était un pb dramatique : reformuler l’unité comme
unité d’un autre type que celle de la pure révolte (une foule considérable
agissante et détrminée) à l’épreve de l’affrontement avec l’appareil d’Etat romain.
C’est un point qui a été central dans les très violentes discussions et
affrontements politiques pdt la guerre d’Espagne. Relisez l’Espoir de Malraux, c’est au cœur du propos dans l’opposition l’illusion lyrique
(conception anarchiste, parousique, sacrificielle et unanime de l’affrontement) et conception communiste et stalinienne :
il faut faire d’abord une armée, donc des corps spécialisés etc… c’est au cœur
des affrontements politiques fratricides qui ont ensanglanté la guerre
d’Espagne. Je ne donne pas raison aux staliniens dans cette affaire, mais il
est certain qu’on ne peut aller à l’affrontement que sous certaines conditions
sur le traitement des points, donc l’acceptation d’une spécialisation
intérieure des organes. Ce point est d’une importance descriptive essentielle,
d’une importance descriptive essenielle, il est requis qu’une théorie du sujet
lui fasse toute sa place sinon elle est abstraite, innocente. La question de
l’organe liée à la question du traitement des points est la question décisive
de quoi ? du rapport entre unité et organisation, rapport etre unité
subjective et organisation, organisation pris au sens d’organe, au sens le plus
général du terme : ce qui organise le corps de tsq il dispose d’organe
capable de le traiter. Ce n’est pas réservé à la politique, par exemple la
question du rapport entre organisation et unité, c’est une question difficile dans
la procédure amoureuse. Si vous instituez l’amour comme une règle de vie, qui
est la vie du 2 comme tel, la scène du 2, vous devez constamment maintenir qch
de l’élan initial qui figure l’unité de cette scène du 2 dans le traitement des
points. Le traitement des points, c’est : quel appartement, des enfants ou
pas, ou on va en vacances ? c’est la même chose que pour Spartacus l’armée
romaine arrive et il faut la bataille ou pas. c’est une différece d’échelle, de
monde. I faut le s traiter. Il va falloir introduire dans l’élément de la subejctivité
inaugurale qui a décidé de l’amour comme tel une série de spécialisations
pratiques qui vont mettre évidemment l’unité initiale dans une épreuve
renouvelée point par point, qui et une épreuve par laquelle il faut passer.
C’est là que vous construisez. Mais cette contruction doit remettre à l’ordre
du jour le type d’unité dont il s’agit tout en gardant le principe originel de
l’incorporation qui est la trace de l’événement. Trace qui est ici que vous
devez rester dans la trace de l’événement : le 2 qui n’existait pas s’est
mis à exister dans le monde, la
rencontre, et la maintenance de ce 2 comme unité du 2 lui-même, rapport du 2 à
lui-même, est dans l’épreuve des points. C’est une expérience commune qu’on
peut reconstituer procédure générique par procédure énérique. C’est la question
fdtale posée par la nécessité des organes. Vous voyez dans cette récapitulation
apparaître non pas seulement quelles vont être les organisations concpetuelles
mais les point qui nous intéressent ici, qui est la question que nous
traiterons l’année prochaine, qui est de s’orienter dans la pensée, s’orienter
dans l’existence. Qu’est-ce que c’est que vivre d’une manière qui ne soit pas
animale, qu’est-ce que c’est que participer effetcivement à cette relation
incommensurable entre multiplicité indifférente et vérités éternelles ?
qu’est-ce que c’est qu’accepter l’incorporation ? c’est un pb qui est loin
d’être fantasmatique ou théorique. Quand on est dans l’épreuve véritable du
monde, donc dans l’épreuve des points, devient le pb de la maintenance de
l’unité dans des formes trasnformées d’organisation. La question de
l’organsiation, réservée souvent au domaine politique, elle pose pb, tout le
monde a expérimenté qu’elle pose pb. Il faut généraliser ce pb, et voir que en
défintive toute procédure subjective est à l’épreuve d’une question
d’organisation et plus précisément du rapport entre unité et organisation.
Unité c’est donné en principe par l’incorporation à la trace, ie la relève de l’inexistant, être le compagnon proche de la relève de
l’inexistant, c’est ça. Là il y a une unité de principe, mais la maintenance de
cette unité dans le traitement des points, voilà la question difficile. C’est
la question que j’appellerai la questoin de l’exisence des vérités, l’épreuve
existentielle des vérités. C’est la nécessité de réorganiser de telle sorte que
l’unité perdure alors même que des divisions y sont attendues, les divisions y
sont attendues par nécessité car vous ne pouvez pas éviter qu’il faille des
organes pour traiter les points. Ces divisions doivent être traitées de telle
sorte que l’organisation n’annule pas l’unité. C’est un pb complexe, et il n’y
a de solution que cas par cas. C’est pour ça que toute séquence d’une vérité
éternelle est aussi et toujours la solution d’un pb d’organisation. Toute proposition
universelle est une proposition sur l’organisation pour les raisons que je vous
dis. Tout amour exemplaire est un amour qui a proposé au 2 une forme
d’organisation inédite. Je vais vous dore que ce n’est pas le mariage qui
résout le pb, mais ce n’est pas lui non plus qui le contredit. Lorsque nous
sommes là, lorsque nous sommes en ce point où non seulement il y a des
victoires, puisque mon point de départ était le péril des victoires, mais où il
y a cette chose plus essentielle qu’est une victoire sur la victoire, victoire
sur la victoire, ie le traitement du péril de
la victoire elle-même, ie la solution du pb d’organisation
légué par la victoire. En réalité, la victoire est remportée non pas l’unité directement
mais par l’organe, c’est lui qui peut prétendre être victorieux, mais s’il
prend le pouvoir sur l’unité il va la détruire. Il n’est jamais qu’une
séparation, l’organe. La victoire sur la victoire, c’est toujours remettre
l’organse à sa place dans uun nouveau type de l’organisation. Que l’organe ne
soit que l’organe de l’organisatoin, l’expression d el’unité. Ce n’est pas
facile, c’est toujours l’histoire des troupes victorieuses qui prennent le
pouvoir politique : une troupe n’est jamais qu’un organe, il écrase
l’unité au nom de laquelle il a agi. Ou bien un couple qui organise tout si
bien pour les enfants qu’il n’y a plus rien pour eux. Donc ils deviennent une
machine familiale. La famille a pris le pouvoir sur l’amour, aventure bien
connue. Aventure bien connue, // au fait qu’une troupe victorieuse prend le
pouvoir. Nous savons que toutes ces matrices politiques sont immanente sà notre
vie aussi. J’essaie de faire théorie de ce qui est transversal et commu à l’expérience
subjective des vérités dans leur ensemble. Si nous avons les victoires et la
victoire sur la victoire, alors, bien que nous ne soyons jamais après tout que
des animaux quelconques, nous participons au devenir matérieil d’une vérité,
nous sommes dans l’élément du devenir matériel d’une vérité. C’est la possibilité
d’une victoire et la maîtrise des victoires dans l’élément de la fidélité à la
relève de l’iexistant. Ne jamais oublier l’inexistant, c’est ça le point, c’est
ça que la victoire fait oublier : que c’est de l’iexistant que vous
procédez. C’est ça l’orientation, l’orientation dans la pensée, l’orientation
dans l’existence en tant que lumière sur l’existence. C’est cette participation
au devenir matériel d’une vérité qui est dans l’élément de la victoire mais qui
est dans l’élément de la fidélité à l’inexisatnt. Tout échec dans la procédure
de vérité, c’est que l’inexistant originaire a été oublié. La victoire l’a
emporté sur l’inexistence. Vous ne vous souvenez plus d’où vous procédez. Le
monde vous a vaincu. Vous échappiez au monde parce que vous vous enracinez dans
l’inexistant. Mais s’il est omis ou rature, le principe du monde vous a vaincu.
C’est en ce point
que je voulais situer le poème de Wallace Stevens que je vous ai distribué. Son
explication est assez complexe, on la fera la prochaine fois. Je vais vous le
lire. Vous pouvez l’entendre dans la résonnance de ce que je viens de vous
dire. C’est un poème qui s’appelle Soliloque dernier de l’amant intérieur, un poème de 1954, dans le recueil Description sans Domicile, dans la très belle traduction de Bernard Noel. Je vous lis le poème, et puis
on en restera là pour aujourd’hui. Vous verrez que y compris la question de
cette pauvreté nécessaire qui est comme la métaphore de la fidélité à
l’inexistence, inscrite dans le poème, le fait qu’il n’y ait pas d’autre
victoire vraie que la nouvelle figrue dont le sujet affirme son unité, la
nouvelle donation de ce que c’est qu’être ensemble en est la conclusion. La
vérité comme lumière, comme lumière de l’existence.
Lumière, la 1ère
du soir, et c’est comme une pièce où l’on se repose et sans trop de raison
pense que le monde imaginé est à la fin des fins le bon. Voici donc le plus
intense rendez-vous et dans cette pensée, nous nous recueillons hors toutes les
indifférences en une chose, en une seule chose, un simple châle autour de nous étroitement
serré car nous sommes pauvres. Une chaleur, une lumière, un pouvoir, la
miraculeuse influence. Ici maintenant nous nous oublions l’un l’autre et nous même
nous sentons l’obscur d’un monde, une totalilté, un savoir, celui qui a ménagé
le rendez-vous. A l’intéreur de ces frontières vitales dans l’esprit, nous nous disons que dieu et l’imagination
ne font qu’un. Qu’elle est haute cette lumière, très haute, cette lumière qui éclaire
le noir. Hors de cette lumière là, hors de l’esprit central, nous élevons dans
l’air du soir une demeure où il nous suffit d’être ensemble.
Wallace
Stevens
Merci.
Ce que je voudrais
faire évidemment, c’est une sorte de récapitulation du trajet suivi dans ce
séminaire, en somme, et aussi anonncer ce que nous allons faire l’année
prochaine. Je voudrais rappeler d’abord que la construction générale s’étendait
sur 3 ans. « S’orienter dans la pensée, s’orienter dans l’existence », sur 3 ans. Nous achevons ici la 2nde, c’est pourquoi
l’année prochaine est une année terminale. Comment était agencées ces 3
années ? Pour le dire simplement la 1ère année proposait des
catégories d’analyse pour la situation présente, des catégories conceptuelles,
mais immédiatement appropriables à la situation présente. C’était une analyse
non pas tant de la conjoncture que des catégories avec lesquelles on peut réfléchir
la conjoncture. Quel est l’appareil philosophique permet de se saisir des
phénomènes subjectifs de rapports aux situations. Nous avions longuement pris
comme fil conducteur le caractère aujourd’hui difficile d’un usage simple des
catégories dialectique, c’était un peu ça le centre : est-ce que le
rapport subjectif à la stuation doit se placer sous le signe de la
contardiction, ou de la position négative ou révoltée au regarde de la situ…Est-ce
que l’entrée dans l’analyse de la situation peut sefaire selon le scat de la
négativité. C’est la question que nous avions mise à l’ordre du jour. La
quetsion la plus compiquée état de savoir : à partir du moment où on
renoncer à entrer dans les situations à partir de la négativité, quand on
considère que l’analyse et l’enggement ne se fait pas nécessairement à partir
des fgures de la négation, alors qu’en est-il de la notion même d’adversaire ou
de différence antagonique entre les positions ? Nous avions cheminé entre
la conception selon laquelle on entre dans les situations à partir du moment où
on a une position négative la concernant, l’entrée politique dans les
situations ou le sujet politique se constitue à partir de la révolte, de la protestation,
de l’indignation, du refus, etc… donc l’élaboration dialectique de tout cela
d’un côté, et de l’autre côté, l’idée consenseuelle que en effet finalement ce
n’est pas la cnotraduction la matrice de la pensée politique, car il existe une
possibilité d’harmonie de consensus, et alors l’adversaire est rejeté dans le
pathologique. Autrement dit, nous cherchions à déterminer la maintenance d’une
catégorie de l’adversaire hors négation pure. Ie sans que la contradiction soit
la matrice d’analyse de la situation, mais sans non plus naturellement qu’on
renonce à l’idée qu’il existe des points de vue antagoniques à l’intérieure de
la situation et au regard de la situation. Nous avions mis au centre de
l’analyse la catégorie d’adversaire, ça avait été une réélaboration de la catégorie
d’adveersaire, à travers quelles notions le reconstituer. On aurait pu avoir
comme sous-titre : pour une théorie non dial de l’adversaire, ou pour une
théorie non dialectique l’antagonisme. C’était l’enjeu principal de la 1ère
année, qui nous a entraînée derrière les poèmes de Pasolini et bien d’autres
matériaux, mais toujours avec en tête cette figure fdtale de la maintenance de
l’adversaire hors de la négativité pure.
La 2ème
année, elle était, celle qui s’achève, là, avait été annoncé comme consacrée
aux concepts philosophiques nécessaires à établir ce qu’est le principe d’une
orientation dans la pensée et une orientation dans l’existence. Au fond, ce qui
a été proposé dans cette ligne là, c’est une batterie de concepts
philosophiques qui porte en définitive sur la relation disjonctive entre ce qui
apparaît et ce qui est. Le fait qu’il existe un ordre propre de l’apparaître
dans lequel ce qui est est à l’épreve de la possibilité de sa mise en vérité.
Une thèse sous-jacente serait que une thèse du monde contemporain (essentielle
à vai dire) est que ce qui est est ce qui apparaît. C’est une thèse de la
substantialisation du semblant. C’est une chose que Marx a déjà vue : à
partir du moment où on vit dans un monde qui est sous le paradigme de la
marchandise, ce qui apparaît ne se laisse plus distinguer de ce qui circule, de
ce qui est. La marchandise c’est essentiellement ça. Si Marx parle comme vous
le savez de fétichisme de la marchandise, c’est bien parce que la marchandise,
comme le fétiche est un subsitut dont la logique propre est la logique du
semblant. Ce qui la soutient et la fait exister est sa valeur d’échange et non
pas valeur d’usage. Si on appelle réel d’un objet quelconque son importance,
son intérêt, sa signifciation véritable pour un usage créateur, ou des choses
comme ça, alors on voit bien que la valeur d’échange, la marchandise comme
telle, ne se présente pas sous le signe du réel, ou elle se présente sous le
signe d’une univers dans lequel le réel et le semblant sont indistinguables. Et
donc la relation dans le monde contemporain entre ce qui apparaît et puis ce
qui est est une opération qui indique la prévalence du semblant comme organisation
fondamentale de l’univers marchand. C’est une constatation empirique, mais elle
est intéressante, car elle soutient la nécessité d’en revenir à l’élabotion d’une
distinction philosophique entre être et apparaître. Ce serait une longue
histoire. Vous savez que une critique fdtale de Nietzsche contre la philosophie
en général, et Platon en particulier, c’était précisément la distinction entre
être et apparaître. au-delà de l’apparâitre il y avait un arrière monde, réellemente
existant, et donc la scission être appraître était le grief fdtal de N qui
entendait abolir cette distinction et montrer que ce qu’il y a ce sont des
interprétaions de ce qui apraît, mais la vitalité de ce qui apparaît n’a pas
besoin de se soiutenir d’une catégorie de l’être qui serait distincte de
l’apparaître. C’ets une critique intéressante et forte, mais périlleuse aujourd’hui,
car aujourd’hui il n’est que trop vrai que ce qui nous est imposé est
l’indistinction entre être et apparaître. Si très tôt, un peu par provocation j’ai
parlé de retour à Platon, de geste platonicien, des choses de cet ordre, si
j’ai levé haut le drapeau de Platon, drapeau tombé dans une grande misère au 20ème
siècle, c’est de manière essentielle parce que le mot d‘ordre général que ce
qui apparaît doit être pensé dans sa distinction d’avec ce qui est est un geste
essentiel de la critique spéculatve aujourd’hui. Il n‘est pasposs dans l’élément de
l’indistinction entre être et apapraître de maintenir la ditsance efficiente au
monde dont le réel est le semblant, dont la proposition est précisément que l’apparaître
vaut pour l’être. C’est vrai de la marchandise, mais c’est vrai en politique
aussi. Comme on sait, progressivement, les caractéristiques d’un candidat sont
son apparence. Ça va depuis ce qu’il dit mais dont l’irréalité est assumée
unanimement, jusqu’au fait qu’à la fin des fins qu’on finira par l’élire parce
qu’il a une moustache, parce que c’est une dame. Tout ça est un jeu
profond : on peut en rire, mais ce n’est risible qu’à un 1er
niveau. De manière essentielle, ce n’est que la projection dans l’espace des
subjectivités publiques d’un point fondamental qui est que il n’y a pas lieu de
distinguer entre ce qui apparaît et ce qui est. Ce qui donne des normes
particulières. Ce qui est normé est normé selon l’apparaître. Ce qui a apparaît
est aussi ce qui a valeur, le semblant est indistinguable de ce qui est. Ce qui
compte est aussi ce qui apparaît en tant que tel. C’est pour ça qu’un point
éthique fondamental est toujoursde prendre get de s’intéresser à
l’inapparaissant. Prend soin de l’inapparaissant, c’est la maxime. Ne te soucie
que moyennement de ce qui apparaît. On ne va pas ne pas s’en soucier du tout
quand même ! ce serait exagéré.Un peu d’apparaître tout de même ! La
mesure va jusqu’à l’indiscernabilité entre ce qui apparaît et ce qui est. Et
donc le fil général de cette année trouve en son centre la question de la logique
de l’apparaître, non pas par hasard, selon un mouvement essentiel qui est que
c’est bien là, dans la distinction entre être et apparaître, distinction
renouvelée, refondée, repensée que gît le ressort véritable d’une distanciation
critique par rapport au règne implacable du semblant. Le point à partir de là est
de comprendre comment la critique de l’apparaître ne va pas aboutir néanmoins à
ces résultats ordinaire qui est de considérer que seul vaut l’être comme tel,
et que ce qui apparâit est sans vérité. C’est la même chose que à propos de la
dialectique. Comment penser qu’on entre dans les situations autrement que par la
figure de la contradctin sans pour autant sacrifier l’antagonisme ? Là il
y a un pb analogue : commment distinguer être et apparaître de façon
rationnellement constituée sans avoir à sacrifier l’apparaître au nom de la
vérité ? C’est autour de cette difficulté qu’on a travaillé cette année,
et sur laquelle on travaillera encore. C’est un vaste programme philosophique.
C’est un getse platonicien mesuré. Si par platonisme on entend de façon
vulgaire finalement le sacrifice du monde sensible au nom de la pure vérité du
monde intelligible. Si on s’installe dans un platonisme vulgaire de la
transcendance de la transcendance on va distinguer être et apparaître, mais
tout simplement en raturant apparaître et en affirmant que la vérité est hors
du monde, au-delà du monde, qu’elle est dans un autre monde ; ce n’est pas
l’intuition de Platon par ailleurs, mais il y a un platonisme qui revient à ce
type de thèse. Il ne s’agit pas de ça. Il s’agit de maintenir l’écart ou la
distance entre l’être et l’apparaître, mais en montrant qu’une vérité procède
aussi selon l’apparaître. L’opposition de l’être de l’apparaître ne doit pas
coïncider avec l’opp de l avérité et du faux. L’app n’est pas de manière
essentielle le lieu du faux bien que il ait à être distngué du lieu d’être. C’est
ça le pb. Et ce pb consiste à montrer que le processus d’une vérité doit
pouvoir être pensable dans son apparaître même. Même si cet apparaître est
l’apparaître de l’être et non pas l’apparaître du faux, de la négation ou du
semblant. C’est bien l’être qui apparaît et cependant il n’y a pas lieu
d’identifier être et apparaître. Il ne faut pas tomber non plus dans
l’orientation critique : seul l’apparaître est connaissable et l’être
demeure inconnaissable. On va soutenir qu’il y a un connaître de l’être, une
ontologie, en réalité la mathématique, et il y a aussi une pensée possible de
la cohérence de l’apparaître, une logque de l’app, une LdM. Le rapport entre être
et apparaître ne doit être ni celui de la vérité et de l’erreur, ni non plus
celui de l’inccon et du conn, l’être étant retiré en quelque manière dans
l’obscurité de l’inconnaissable et le phénomène étant le lieu de l’organisation
de tout savoir. On suit une ligne de crête qui doit maintenir que en défintive
que le procès du’e véirt éconcerne l’être mais traverse l’apparaître. Ce qui
veut dire qu’une vérité surgit toujours dans un monde effcti, dans un être là,
il y a un être là de la vérité. Donc la vérité est de ce monde, elle n’est pas
ce qui dans ce monde fait signe pour un autre monde. Elle est un processus de
ce monde. Et par ailleurs ceci n’entraîne pas que la connaissabilité de
l’apparaître, l’apparaître d’une vérité elle-même, entraîne le retrait de
l’être dans l’inconnaissbale.
L’être est
connaissable, il y a une pensée de la cohérence logique de l’apparaûtre et
vérité est un mot qui désigne des processus traversant et situés dans l’être là
ou apparaître. Quand on a dit les concepts nécessaires pour s’orienter dans la
pensée et l’existence, ce sont les concepts attachés à la résolution de ce pb.
Le pb du salut de la vérité, catégorie en déshérence aujourd’hui, dans un monde
où être et apparaître sont assumés comme indiscernables, la catégorie de vérité
est inutile. Elle est dans le monde aujourd’hui assumée comme inutile. Ce qu’il
y a, c’est l’intensité du semblant. On va restituer la catégorie de vérité, mais
de tsq elle soit disposée dans un agencement de type nouveau entre être et apparaître.
Cela a pris le tour progressivement de l’exmamen de la tension propre de ce pb,
qui est la tension entre le fait que la pensée de l’être nous le livre comme multiplicité
indifférente. En effet ce n’est pas de l’être seul que procèdent les vérités.
C’est d’une certaine interruption du régime légitime de l’être qu’une vérité
procède. C’est le 1er point. Donc l’être est connaissable, mais ce que nous parvenons à en
connaître ne détient pas, ne rend pas raison, de l’existence des vérités. On
parlera de multiplicité indifférente. D’un autre côté, il y a des vérités, mais
ces vérités – éternelles - sont assignables à des mondes déterminés quant à
leur processus. Elles apparaissent, elles apparaissent. Elles sont
exemplairement ce qui se soutient de l’être et qui cependant apparaît. Elles
sont transmondaines, pour autant qu’elles se soutiennent de l’être, elles ne
sont pas réductibles à la singularité d’un monde, et cependant elles
apparaissent dans un monde. On a organisé une systématique conceptuelle autour
de cette double propriété des vérité, qui est d’être transmondaine et intra-mondaine
à la fois. Donc d’être assignable à un monde et d’être déchiffrable, lisible,
ou exposée à la résurrection du point d’un autre monde. Seule une telle situation
faisant preuve que vérité coappartient à être et apparaître, là au plus loin du
platonisme vulgaire mais très près d’une interprétation possible de la réminiscence
platonicienne et de la participation. Chez Platon la possibilité que le sensible
participe à l’intelligible suppose bien finalement que la vérité coappartienne
à l’être et à l’apparaître. Sinon on ne comprend pourquoi le sensible peut
participer à l’intelligible. Je vous l’ai déjà dit : ce qui est fdtal ce n’est
pas le schéma des 2 mondes, le cœur du platonisme c’est la participation, c’est
le mode propre sous lequel le nom d’Idée, ce qui est susceptible de vérité,
coappartient à l’être et l’app, coappartient à la trancendance et à l’être là.
Parentèse : c’est la raison pour laquelle Pascal dit « Platon pour
préparer au christianisme ». on voit bien ce
qu’il veut dire. Il veut dire que dans Platon on a l’idée remarquable que l’absolu
peut être dans le monde. Or évidemment, le christianisme donne de cela une
image très frappante qui est celle de l’incarnation : l’incarnation, c’est
l’absoluité de l’infinité divine présente là, c’est l’être là du vrai comme
tel, de l’absolu comme tel. Pascal a bien vu dans les intuitions foudroyantes
qui sont les siennes, que après tout, au cœur du platonisme on n’a pas l’écart
des 2 mondes mais le point de jonction des 2 mondes qui est le mode propre sous
lequel l’idée est présente là, et à vrai dire, dans la plus humble expérience
pour Platon. Si je sais que ceci est une table, c’est car ça participe à l’Idé
de la table. Ce n’est pas très facile à comprendre. Et si on le généralise, si
on essaie de clarifier l’intuition dont il s’agit, on voit que cette intuition,
c’est l’idéalité comme telle, la pensabilité des choses qui coappartient à
l’être et à l’apparaître. Si vous vous refusez à cette idée de coappa à l’être
et à l’appa de l’idéalité, vous allez repousser l’idée au-delà du monde et
allez donner du platonisme une version ésotériue, une version qui n’ a plus
d’autre issue que la néantisation mystique, il faudra sacrifier le monde pour
accéder à l’idée si l’idée est d’outremonde. En effet, il y a un platonisme de
ce genre qui est un platonisme mystique, qui est tout entier dans une ascèse
d’extériorisation à l’app pour pouvoir tenir l’essentiel dans un mouvement où
d’ailleurs la vie et la mort sont indiscernables. Quand vous devez outrepasser
le monde au risque de l’infini, vie et mort sont indiscernable, c’est le propre
de l’exp mystique radicale. C’est un platonisme très pariculier. Celui auquel
Pascla fait allusion est bcp plus réel. Chez Platon vous avez réellement une
tentative, la 1ère et la plus décisive, celle qui a donné la matrice
de tout, à penser que pour accéder au vrai comme tel il faut assumer qu’il
coappartient à l’être et à l’apparaître. Je me suis déployé dans cette
filiation platonicienne en disant : pn peut penser par un trajet
singulier, articulé et complexe, le fait que les multiplicité indifférentes et
les vérités éternelle existent dans le il y a, se partagent le il y a, et que
il y a les multiplicités indifférentes et il y a les vérités éternelles, pour
autaut qu’on comprend que la corrélation des 2 est un processus qui apparaît.
La coapaprition de l’être et l’être là est une nécessité pour une
intelligibilité complète de la coexitence des multiplicités indifférentes et
des vérités éternelles. C’est aussi pour ça que j’emploie délibérément vérités
éternelles qui fait très archaïque. Etre archaïque par les temps qui courent,
c’est une vertu, être moderne c’est très suspect. Stt être en train de se
moderniser ! Mieux vaut s’archaïser. On pourrait lancer ça comme mot
d’ordre : archaïsez-vous ! On nous bassine avec le fait qu’on n’est
pas moderne, eh bien oui, on ne l’est pas, du tout, on va s’archaïser à fond. Vérités
éternelles ! C’est un peu comme un geste platonicien, c’est la même eau,
c’est pour s’abriter en même temps qu’on donne un sens nouveau, dans une tradition
qu’on subvertit et qu’en un sens on réarticule. Vérité éternelle, ça désigne
ceci que l’universalité apparaît. L’universalité est maintenue, mais maintenue
dans sa surrection effective à partir de la singularité des mondes. Et que la
matière des vérités soit la multiplicité indifférente est assumée aussi :
i l’n’y a rien d’autre que des mult indifférentes ; sinon qu’avec des mult
indiff, il peut arriver qu’on ait la construction d’un processus d’avènement de
vérités éternelles. C’est à ça qu’on a consacré le 2ème temps. Pourquoi
il est un temps cetral dans le dispositif des 3 ans dont l’enjeu est :
comment s’orienter dans la pensée et l’exiztenc ? On peut le dire de façon
simple : parce que ce sont des catégories qui aboutissent à la conclusion
recevable aujourd’hui qui est que l’absolu existe.
Et qu’il n’y a pas besoin pour penser cela ni de l’artifice ou de récits
fabuleux des religions et des dieux. L’absolu existe. La chance de l’absolu
nous est réellement accordée. Ça aussi, c’est une thèse combattante. En
définitive, la thèse dominante c’est que l’absolu n’est pas notre chance
contemporaine, qu’il faut vivre sans. Moi j’ai toujours admiré sur ce point Hegel,
mon autre gourou. L’histoire de la philosophie, finalement, Platon, Descartes,
Hegel. La phrase hegelienne selon laquelle l’absolu est auprès de nous, l’absolu
est auprès de nous, ça je crois que c’est une phrase décisive, que lui profère
dans le contexte qui est le sien. Mais ce n’est pas du tout la même chose de
s’orienter dans la vie et l’existence si on pense que l’absou est auprès de
nous ou qu’il n’y est pas. c’est une démarcation décisive. On ne vit pas
littéralement de la même manière. L’absolu auprès de nous, c’est une image
naturellement, c’est un peu trop proche de l’ange gardien, l’absolu est auprès
de nous avec ses grandes ailes, comme ça, il nous conduit. Ce n’est pas ça. Ce
serait trop archaïque quand même !
J’aurais volontiers
fait une parenthèse : la théorie des anges est une théorie très
intéressante. Il faut s’intéresser à la théorie des anges. Dans ce massif très
étrange à bcp d’égards qu’est la philo médiévale, j’ai toujours considéré que la
théorie des anges est une des plus fascinantes. L’affrontement entre Thomas et
Duns Scot sur la nature des anges ets formidable. Pourquoi ? L’ange c’est
la médiation, c’est du platonisme réalisé. La participation, la coexistence du sensible
et de l’intelligible, de la matière et de l’âme, mais l’ange c’est l’ensemble
des degrés intermédiaires par lesquels justement il y a cette médiation active
entre matérialité et spiritulité. La théorie des anges est la théorie des différentes
compositions possibles entre matière et forme, qui dispose une hiérarchie dont
le sommet avoisine Dieu et la base avoisine l’homme. Voilà, on tire une espèce
de grande diagonale superbe. Ceci dit, l’absolu est auprès de nous, c’est
difficile de se le représenter comme une hiérarchie, les trônes de domination,
archanges etc… c’est dommage mais c’est comme ça.
Comment se la
représenter ? Je pense que cette phrase hegelienne, elle signifie pour
nous (je reprends une formule que j’utillise trop ou trop souvent), ça signifie
tenir à l’impossible. Tenir à l’impossible. Ça veut dire des choses très
précises, ça veut dire des choses comme les allemands ont écrasé la France
mais on va résister, dans les conditions de 1940 c’est pas possible, ça veut
dire, quoi ? prendre son fusil et aller dans la forêt ! vous n’allez
pas être un pétainiste ordinaire, vous allez dire : on a perdu la guerre,
il faut manger, de très bonnes raisons ! ma famille mes enfants, je ne
suis pas un héros. c’est de très bonnes raisons sauf que pour réellement les
faire fonctionner il ne faut pas penser ue l’absolu est auprès de nous. Aujourd’hui
ça veut dire dans des conditions très diverses et très variées (j’ai ouvert la
question des vérités à des types différenciés), sur un de ces types de vérité
ça veut dire tenir sur l’impossible, tenir effectivement sur un point qui en
tant que point réel est
unanimement déclaré comme point impossible. C’est pour ça que la propagande
aujourd’hui n’a pas d’autre contenu que de vous contraindre au possible. Elle
peut prendre des tours, mais elle se ramène à ça. Le possible c’est quoi,
aujourd’hui ? Le possible, c’est le possible prescrit par ce qu’on disait
tout à l’heure, le possible prescrit par les formes dominantes de l’apparaître.
Le possible est une catégorie de l’apparaître dans cette modalité là. Tenir sur
le possible ça veut dire tenir sur l’apparaîutre en tant qu’être, en tatn
qu’indiscernable de l’être. Inversement, l’absolu est auprès de nous, ça va
vouloir dire tenir sur l’écart entre l’être et l’apparaître non pas au sens où
l’être serait la vérité et l’app le faux, mais tenir sur l’écart comme tel.
L’écart, c‘est une perturbation du régiem du possible. Si l’apparaître n’est
pas indiscernable de l’être alors il se peut que l’être perturbe l’apparaître. C’est
une poss ouverte. L’être peut remonter à la surface de sa propre apparition
comme perturbation, perturbation qui comme vous savez j’appelle un événement.
Mais qui dans son essence est le mode propre sur lequel s’effectue l’écart de
l’être et de l’apparaître, par une perturbation des lois de l’apparaître par la
poussée de l’être qui apparaît justement,
en tant qu’il apparaît. Pour penser ça, il faut penser l’écart, mais pas la
disjonction totale, car si c’est ça, il n’y aura pas non plus cet effet de
perturbation qui a lieu là, une erturbation qui a lieu dans un monde déterminé.
Que l’absolu soit auprès de nous veut dire : il n’y a pas lieu en toute
saison et sur toute question de considérer que l’être et l’apparaître sont la
même chose. On peut toujours arguer à un mometn donné d’un point d’écart, et ce
point d’écart du point de vue de la logique de l’apparaître va se manifester
comme impossible. La log de l’app n’est pas identique à ses perturbations.
Tenir sur l’écart de l’être et l’app c’est tenir sur une assignation d’imposs
et donc résister à la prescription du poss comme possible immanent à la
réalité. Ça peut aussi se dire inventer ou créer d’autres possibles. Si vous
créez du possible, c’est qu’il était impossible. S’il était possible vous
n’auriez pas à le créer. Si vous faites apparaître un possible inconnu, c’est
que vous avez travaillé dans l’élément de l’impossible, donc vous avez tenu sur
cet impossible. C’est pour ça que l’ensemble des concepts qu gravitent autour
de l’écart entre l’être et l’apparaître sont aussi des conncets qui entrent
immédiation dans la question de l’orientation dans la pensée et l’orientation
dans l’existence. Ce sont des concepts d’apparence abstraite, la question de
l’écart entre l’être et l’apparaître paraît être une vieille question philo,
mais elle est extrêmemeent atcive et contemporaine pour la raison que je vuos
dis : c’est dans l’élaboration de cet écart qu’i ly a sens à dire que vous
tenez sur un point d’impossible. L’ensemble des réinterprétations complexes sur
sur l’écart entre être et apparaître forme l’arrière plan, les outil, l’horizon
cnoceptuel nécessaire pour pouvoir maintenir d’une certaine façon que l’absolu
est auprès de nous.
Et contre par csqt
l’essence désabsolutisante de la propagande générale concernant notre monde, et
contre aussi la scène falsifiée que désigne sur ce point précis le conflit, ou
la contradiction qui résumerait notre monde, qui serait la contraduction entre
la démocratie et le fanatisme islamique. Contradiction, quel est son intérêt de
propagande, pourquoi est-ce intéressante de présenter le monde sous cette
forme ? Il y a des faits empiriques derrière, bien sûr, mais pourquoi
est-ce si intéressant de maintenir cela comme cadre d’analyse de l’analyse
contemporaine ? pourquoi entrer dans la situation contemporaine par cette
entrée qui n’a guère de senspour l’écrasante majorité de l’humanité ? ça
n’a pas de sens pour les chinois. Pourquoi est-ce si fascinant pour les occiendentaux ?
c’est que la figrue du terroriste représente tout simplement ce qui arrive
lorsqu’on a affaire à des gens qui s’imaginent que l’absolu est auprès d’eux.
C’est ça qui intéressant. Et on dit : voilà, si vous pensez que l’absolu
est auprès de vous, voilà ce que ça donne. Eux, ils ont l’absolu ils ne
tiennent pas à leur vie, ils peuvent faire des attentats suicide, leur vie c’est
zéro car la vie est ailleurs, c’est l’image diabolisée et terrifiante de quiconque
consiste à soutrenir que s’orienter dans la vie et l’existence se fait à partir
de l’axiome l’absolu ets auprès de vous. C’est un absolu théologisé, archaïque,
délétère, en définitive en effet, on pourrait montrer que qch résonne avec une
absolutisation de la mort, mais l’intérêt propre mis dans la représentation du
monde comme conflit entre la démocratie ordinaire et ce type de disposition revient
en réalité à disqualifier définitivement dans des figrues grimaçantes, terrifiantes
et mortifères l’idée générale qu’on doit so’irnter dans l’existence partir d’un poit d’impos. C’est donc
partie prenante abvsolumente n faveur de la ^pression exercée en faveur de la
résignation démocratique. C’est distinct du jugement politique porté sur ces
gens là, que je considère très largement comme des figurs facisantes, parce que
massacrer des civils, faire des attentats sont des méthodes d’agitation
politique répugnantes. Ça n’éclaire pas la manière dont c’est traité ici. Il
faut disjoindre, comme sur bien des pb (la 1ère opération est une
séparation), d’un coté l’exercice du jgt politique sur ce type de pratiques politique,
qui peut être une condamnation ferme et rationnelle, il faut le séparer de la
manière dont c’est instrumenté, utilisé, déployé à des fins qu’il faut
connaître : on a là le modèle indépassable de ce que donne la conviction
quant à l’absolu quant à l’absolu lorsque elle est immergée dans la sphère de
l’action, de la politique, de la vie. C’est la propagande, toujours la
même : vive dans la modestie du possible. Ce qui revient à dire :
achetez nos produits ! de quelle vie il s’agit en vérité ? Achetez
nos produit, mariez-vous, ayez des enfants, veillez à ce qu’ils aillent à
l’école, tenez-vous tranquille, soyez cultivés. La culture, c’est aussi… Devenue
au relais de la religion, j’ai envie d’avancer la maxime : la culture,
c’est l’opium du peuple. C’est un principe de désorientation. Tout le monde est
désorienté. Il y a une vague persévérace institutionnelle. Mais s’orienter dans
la vie ou dans la pensée suppose un point d’absoluité quelconque. C’est inapproprié
au monde comme il est, où il ne doit pas y avoir d’écart entre semblant et
être, dans un monde où i lne doit pas y avoir de vérité, puisque la vérité procède
selon cet écart, elle n’est pas identique à cet écart. S’il n’y a pas cet
écart, vous devez vous résigner au possible marchand dont l’ennemu est
quiconque a réglé sur point d’absolu quel qu’il soit et dont on va nous
expliquer que le terroriste c’est l’image absolue de ça, il n’y en a pas d’autre.
Somme toute, ce n’est qu’un prolongement de ce qu’a été dans l’opération antitotalitaire,
initiée à la fin des années 70. C’est la continuation d’une longue séquence
dans laquelle là aussi 2 questions
ont été absolument fusionnées : quel bilan on faisait de l’expérience
soviétique, question interne à la politique révolutionnaire. ça faisait
longtemps qu’on débattait férocement des étapes, c’est une 1ère
question. On pouvait condamner la nature de l’Etat soviétique, les aboutissements
et la n ature du régime, ça doit être distingué de l’usage de propagande
anti-totalitaire, pour nous enseigner que on doit se résigner aux modules
politiques existant dans le monde occidental. L’organisation de ce point si
important du rapport entre l’analyse et ses csq était déréglé. Pourquoi est-ce
qu’une expérience séquentielle doit être jugée parvenue à son impasse et devant
être abandonnée dans ses principes fondateurs, pourquoi s’ensuit-il qu’il faut
se jeter dans le bras de l’autre hypothèse dominante ? Ce n’est pas
vraiment logique ! La logique c’est de dire : c’est qune séquence
particulière de la politique d’émancipation, il faut passer à une autre séquence,
mais ça n’implique pas de se jeter dans les bras de la démocratie dominante. De
même que considérer comme une impasse le terrorisme, ne pas aimer le terroriste
n’a pas pour principe de réalité d’adorer le gouvenremnet américain. C’est une
faute logique : il n’y a aucun lien de nécessité entre les 2 thèmes. Ça
peut être comme ça, ça peut être autrement. Et c’est autrement en effet. Alors
je vous disais ça pour mettre un peu, un peu pour animer le vaste dispositif
concpetuel entre être et apparaître du opint de sa destination. C’est la
réponse à la question qu’est-ce que vivre aujourd’hui, qu’est-ce que être réellement
dans l’intensité d’une orientation de la vie et de l’existence, qu’est-ce que
pouvoir maintenir des prescriptions universelles etc… Alors ça m’amène à
annoncer simplement, avant de clore dans la poésie, annoncer un peu ce qu’il en
sera l’année prochaine.
Nous avons prodigué
les catégories de la situation présente
Nous avons prodigué l’appareillage
conceptuel nécessaire quant au fondement même de la notion d’orientation
L’année prochaine il
va falloir prescrire un peu. Il va falloir… Alors là, j’avais envie de parler
comme Descartes (j’aurais parlé comme les 3 un peu comme Descartes, un peu
comme Platon, un peu comme Hegel).
Ce dont il s’agira
c’est de trouver et fonder une morale provisoire. Je voudrais expliquer un peu
ça. Pourquoi morale ? pourquoi provisoire ?
Pourquoi
morale ? Je le prends en un sens vraiment très dilué et général. Morale,
car s’agira quand même de savoir sous quelles règles minimales la vie véritable
est possible. Il ne s’agra pas seulement des conditions génériques de cette vie,
mais des quelques règles ou des quelques impératifs que nous piuvons partager
me semble-t-il (quels que soient par ailleurs les engagements disparates des
uns et des autres), en face de ce qu’est la pression dissolvante du monde
contemporain. Parce que le monde contemoporain, en effet, est un monde de la dissolution.
Dès que vous n’avez plus de point d’absoluité, tout s’éparpille : le point
d’absolu tient l’existence comme procédure minimalement unifiée ou
représentable sous le signe de son unité. Si vous n’avez pas ça, vous êtes
aussi disséminés, pas seulement être multiple (multiple on l’est toujours),
mais égaré. Etre dans un multiple égaré. Ça j’ai toujours trouvé extraordinaire
quand Marx dit dans le Manifeste :
finalement, le capitalisme c’est la destruction de tous les vieux liens, de
toutes les vieilles relations, de
tous les vieux pactes. On continue d’admirer comme des événemnts démo extra que
les hommes et femmes soient apriels, et le homo aussi et tout le monde et que
les enfants aient dres droits et les animaux aussi. Mais ça n’a aucun intérêt
pour le capital. Ce qu’il connaît c’est capital et force de travail. Tous les
vieux liens vont être anéantis il n’y aura plus que des atomes, vraiment. Marx
conclut en disant que tout ça est dissout dans les eaux glacées du calcul
égoïste. C’est une dissolution. On appellera morale, c’est pour ça que
j’emploie ce mot (qui est aussi un vieux mort, vous allez me dire que si on est
dans la morale des vérités éternelles, on est vraiment archaique !), mais
morale ça voudrait dire l’ensemble des règles telles que ça conserve un sens de
s’orienter dan l’existence et de s’orienter dans la pensée, ça résiste à la
dissolution. On appellera morale l’ensmeble de ec qui autorise la résistance à
la dissolution, le fait que ça ne se dissout pas complètement, que nous ne
sommes pas complètement dissous, en proie à la multiplicité égarée, ie à la multiplicité dans son indifférence dissolvante.
Et provisoire ?
pourquoi provisoire ? Je dirais provisoire parce que, en vérité, ce serait
simplement la récapitulation de ce que j’ai avancé souvent ici, à savoir que
nous sommes dans un temps intervallaire. Le vieux ondes de l’émancipation n’est
plus tenable dans son détail, les vieilles catégories de l’émancipation sont
saturées, mais le nouveau dispo n’est pas clairemet visible. On est entre les
2. on ne peut pas trouver de règles qui ne soit emportée sur un mpiement
géénrale sur lequel il y aurait accord. Ce qu iveut dire que nuos sommes
obligés de travailler dans une économie du sens de l’histoire. Economie du sens
de l’histoire, heureusmeent d’ailleurs car si on devait se prononcer dessus, on
se dirait qu’il est désastreux et que l’historie nous entraîne à la
dissolution. C’est ce qu’on voit avec quelques résistances en elles-mêmes
accélérant la dissolution, avec la figure du sacrifice terroriste. La figure du
sacrifice terroriste a en réalité considérablement accéléré la dissolution.
Nous devons travailler sans le sens de l’historie. On ne peut pas dire l‘historie
traaville pour nous. C’était bien d’avoir qln travaillant pour nous ! stt
quelqu’un d’aussi majestueux que l’Histoire. Quand même on travaille sous le
signe la proximité absolue ou de l’universel. Là aussi, c’est toujours le
chemin qu’on cherche à suivre entre l’ancienne conviction que des grandes
entités objectives travaillaient pour l’émanciation, Histoire, Classe etc… et
l’idée négative de la saturation, qu’il faut se résigner au poss et au capital
etc.. On ne va pas soutenir que l’histoire travaille pour nous mais on ne vas
soutenir du coup que toute prescription émancipatrice est impossible. Le
provisoire désignerait cet intervalle, qui est probbalement un intervalle
événementiel, un intervalle entre évéenments. L’entre événement. Dans l’entre
événement on a une mroale provisoire, ie
que on fait avec les vérités dont on dispose, ie
quelque fois des vérités tramées à partir des événements lintains, obscurcis,
saturés, mais on fait quand même, on fait quand même avec ça, et on ne dira pas
attendons qu’il se passe qch. Ça ce n’est pas une morale proivisoire :
attendons qu’il se passe qch et on s’y mettra. C’est une immoralité privisoire,
très répandue. Puisqu’il ne se passe pas gd chose… Mais si l’absolu est auprès
de nous, on peut penser à partir de ce qui a eu lieu qui est auprès de nous.
C’est la meilleure préparation à la venue d’une relance, absolument. Sinon,
elle sera exagérément passive dans sa réception, cette relance. Donc le
programme de l’année prochaine, c’est une morale provisoire pour notre temps.
Si j’emploie morale, c’est pour ne pas dire politique. Car ça ne se joue pas
seulement dans la sphère politique, même si elle en donne des ex pertinents. je
maintiens le spectre des figures de vérités, et en ce qui concerne les mutations
de l’amour, les formes d’art contemporain, les révolutions scientifiques à
venir et non exclusivelmet la politiques. Morale désigne aussi des règles
suffisamment limpides et universelles pour être appropriées au cadre de la
multiplicité des procédures de véité. En ce sens, ce n’est pas une politique,
c’est un ensemble de règles relatives à l’usage que nous pouvons faire de nous
mêmes, pauvres animaux, dans la convition que l’absolu est auprès de nous.
Cette conviction en
fin de compte, est un peu celle qui anime le poème de Stevens sur lequel je
voudrais conclure cette année, et que vous avez, sur laquelle je vourdais vous
donner un peu plus d’explication déteilles. Je le relis, soliloque
dernier de l’amant intérieur.
Lumière, la 1ère
du soir, et c’est comme une pièce où l’on se repose et sans trop de raison
pense que le monde imaginé est à la fin des fins le bon. Voici donc le plus
intense rendez-vous, et dans cette pensée, nous nous recueillons hors toutes
les indifférences en une chose, en une seule chose, un simple châle autour de
nous étroitement serré car nous sommes pauvres. Une chaleur, une lumière, un
pouvoir, la miraculeuse influence. Ici, maintenan,t nous nous oublions l’un,
l’autre et nous même. Nous sentons l’obscur d’un monde, une totalité, un
savoir, celui qui a ménagé le rendez-vous. A l’intéreur de ces frontières
vitales, dans l’esprit, nous nous
disons que dieu et l’imagination ne font qu’un. Et qu’elle est haute cette lumière,
très haute, cette lumière qui éclaire le noir. Hors de cette lumière là, hors
de l’esprit central, nous élevons dans l’air du soir une demeure où il nous
suffit d’être ensemble.
Wallace
Stevens
Lumière, l’ouverture du poème c’est évidemment d’un bout à l’autre de la venue
d’une vérité qu’il est question, de la venue de qch d’essentiel, qui va être
nommé lumière. Et c’est cela qu’il y a. Tout le
poème au fond se déploie au fond dans une sorte de ramification, de groupe de
métaphores et de csq de cette idée que il y a une lumière.
Et elle est la 1ère donc elle arrive, elle vient,
elle est là, la 1ère du soir.
Et on va en donner
des caractéristiques de cette lumière, comme étant ce qui advient, ce qui nous
offre une chance. Ces caractéristiques sont après tout tout à fait intelligibles.
C’est une pièce
où l’on se repose et sans trop de raison pense que le monde imaginé est à la
fin des fins le bon. C’est important. Nous y reviendrons
l’année prochaine. La venue d’une vérité, la venue de qch, de ce qui fait
disposition pour nous, elle est dans la dialectique représentée comme une
excitation, elle est représentée comme une suscitation quasi hystérisée. C’est
la représentation traditionnelle de l’effervescence négative, tout le monde
proteste etc… Cela est vrai mais plus fdtalement, ce à quoi on reconnaît
l’incorporation dans une vérité, c’est la création d’une nouvelle forme de calme.
Point emprique imomrtant : ce qui atteste, ce qui prouve qu’on est dans
une nouvelle séquence dela vie, c’est évidemment l’intensité mais c’est plus
plus fondamentalemnl l’avènement d’un nouveau calme, pas celui qui existaitavant.
Une nouvelle espèce qualitative de calme. Un repos nouveau qui est aussi le
repos de l’intensité elle-même.
Le monde imaginé
ets à la fin des fins le bon. Sans trop de raison. C’est sa manière à lui
de dire que lorsqu’on est dans cette situation on peut tout d’un coup penser
que c’est l’impossible qui est la bonne chose. Le monde imaginé, c’est comme on
dit des utopies. C’est ce qui est impossible au regard de la réalité. Mais justement
on peut dans ce nouveau calme penser que le monde imaginé est à la fin des fins
le bon, le vrai, et pas du tout le monde de la réalité commune. Vous
voyez : le signe qu’on est dans cette nouvelle séquence, le nouvel
appareillage de l’existence, au sens du navire, c’est simultanément la
conversion de l’impossible en possible, ou de l’imaginaire en réel, de ce qui
est représenté comme imaginaire en réel, et cela dans l’avènement, et cela dans
l’avènement d’une tranquillité neuve, qui est le calme d’une certitude. Celui
là, je l’aime. C’est très effrayant mais c’est d’un calme essentiel, c’est pour
toujours, c’est un calme terrible où le nouvau monde est le bon. C’est le plus
intense rendez-vous. Le calme n’est pas contraire à l’intensité c’est
l’intensité elle-même. Rendez-vous : ça se
présente comme une rencontre. Dans les formes singulières de l’apparaître du
vrai, la figure est celle d’une rencontre, d’un rdv dans cette pensée :
nous nous recueillons
hors toutes le sindifférences, c’est exactement ce qu’on
a expliqué toute l’année. L’indifférence de l’être est là mais hors de cette
différence on peut se recueillir. C’est une pensée. Dans la pensée qu’advient
le vrai, nous pouvons nous recueillir hors de l’indifférence de l’être, dans
l’indifférence de l’être. Pourquoi on peut se recueillir hors de
l’indifférence de l’être ? car on va se recueillir en une chose, une seule
chose. La rencontre d’une vérité, l’incorporation au vrai,
l’orentation de l’existence, c’est toujours le moment où nous échappons à la
dissolution et où nous nous recueillons en une seule chose. Cette chose n’est
presque rien dans sa naissance, sa fragilité. A elle seule, cette simplicité,
cette pauvreté de la chose va lutter contre la dissolution. Il va prendre des
métaphores : un simple châle autour de nous étroitement serré. C’est assez beau. Un châle sur les épaules et on est dans le vrai. Ce
n’est pas une magnificence, ce n’est pas le tintammare, ça vient doucement,
comme le calme, la certitude, le système de csq.
Nous sommes
pauvres, ce n’est pas une richesse mais une nudité.
Après une chaleur,
lumière, un pouvoir, une miraculeuse influenceI. Ce
n’est pas facile à dire ça n’appartient pas au langage antérieur. C’est le pb
de la conversion de l’imposs : il faut qu’il dispose des mots nouveaux,
qu’il fasse fonctionner la langue autrement. Dans la langue telle qu’elle est
livrée, le possible est distribuée. C’est la langue du journalisme. C’est la
langue de la distribution du possible, nous la parlons tous plus ou moins. Il
faut que ce soit autre chose. Si il y aune chose dont la langue des journalistes
est hors d’état de rendre compte c’est l’événement. C’est pour ça qu’ils en
batissent de faux appropriés à leur langue. Les vrais, leur langue ne peut pas
les nommer, car c’est une autre distribution langagière du possible. C’est
quoi ? Une lumière, c’est un pouvoir, la miraculeuse influence… c’est
quoi ce pouvoir ? c’est une nouvelle capacité. Ce que nous pouvons, nous
pouvons autrement, ce dont nous sommes capables. ça se passe quand ?
ici maintenant. C’est un nouveau présent, c’est l’apparition du présent, c’est pas avant,
c’est pas après, c’est pas une rêverie. Il se passe quioi ? Il se passe que
nous, nous animaux humains, pris dans l’infini de l’être, dans la multiplicité,
nous allons nous excéder, nous allons être plus que nous mêmes, nous allons
nous oublier, être dans une figure de nous même inédite, une figure qui par
csqt est l’oubli de la figure précédente, très largement. C’est une expérience
que vous connaissez, d’une manière ou d’une autre. Quand on est dans cet intense
rdv qch en nous s’incorpore à plus grand que soi, et cette incorporation à plus
grand que soi se paye d’un certain oubli de nous, des autres, du voisin. Nous
sentons l’obscur d’un ordre d’une totalité d’un savoir, celui qui a ménagé le
rdv : nous sentons la puissance
de l’événement, la puissance du vrai. La nouvelle vérité n’est jamais claire.
Celui qui a
ménage le rdv c’est ce que j’appelle la trace de l’événement qui est
presqu rien, la trace de ce qui a améngé le rdv. La trace est presque rien et a
ménagé le rendez-vous, l’événement lui-même. Il y en a une trace et cette trace
cependant elle ets trace de celui qui a ménagé mais elle est obscure, elle
fonctionne comme ordre, totalité, savoir, mais savoir de quoi ? on ne sait pas, un savoir nouveau, un
savoir obscur.
A l’intérieur de
ces frontière vitales. A l’intérieur des limites
vitales qui sont désomrais de nouvelles frontières, de nouvelles limites
vitales, de nouvelles orientations de notre existence, nous nous disons que Dieu
et l’imagintion ne font qu’un. C’est une métaphore qui
dit la même chose que le monde imaginé est à la fin des fins le bon. Dieu et l’imaginaton ne font qu’un. Cette imagination de l’impossible
adveune là comm possible c’est l’infini. Toucher au vrai, c’est toucher à
l’infini, au vrai comme tel. Notre imagination, cette pauvre figure traitée de
toute part comme imaginaire, elle est l’absolu auprè de nous, elle est devenue
l’infini qui nous excès mais auquel nous sommes incpocrrés. La vérité en devenir
c’est ça, la vérité comme processus dont nous sommes participants, c’est ce moment
où Dieu et l’imagination ne font qu’un car l’imposs et l’infin ne font qu’un.
Qu’elle est haute
cette lumière, très haute qui éclaire le noir
c’est la caractérisation de la vérité supposée achevée. Lumière va désigner au début du poème la venue du vrai, vers la fin du poème la
supposition de sa réalisation complète. C’est loin c’est haut. Nous ne sommes
pas complètement là, dans ue incorporatoin au vrai nous ne sommes jamais
exactement dan le deveir final, mais dans la pauvreté de son processus. Mais il
y a loin, haut, cette lumière qui éclaire le noir, la certitude qu’il s’agit bien
d’une vérité éclaire l’obscur dans lequel nous sommes, tout en étant elle-même
obscure. Nous qu’est-ce que nous faisons ? Nous ne sommes pas dans la parousie
du vrai, nous ne sommes pas dans l’achèvement du vrai, sommes des militants du
vrai, nou sommes dans la pauvreté de l’incoporation à la vérité qui devient,
nous pouvons espérer au moins porter un nouveau châle sur nos épaules, nous pouvons
être dans une nouvelle naissance, avec ce qu’elle comporte de fragilité et de
menace ? ce n’est pas l’arrivée triomphae du vrai dans l’appareil de
l’Etat. Nietzsche disait les vrais événements arrivet sur des pattes de
colombes. Nous sommes hors de cette lumière là, nous sommes hors de l’esprit centralI, ce qu’il appelle esprit
central est ce qui constituerait le centre de la nouvelle vérité, ce qui en
serait comme le disque solaire essentiel. Nous ne sommes pas dans le
face-à-face avec ça. C’est un point important parce que il ne faut pas
confondre le fait que nous maintenions la vérité comme processus et le fait
qu’il s’agisse du face-à-face avec la vérité totale dans la supposition de sa
réalisation. Nous ne sommes pas dans cette lumière centrale. Nous ne sommes pas
dans le moment où la vérité est représentée par un comité central. Nous sommes
hors de ce centralisme stalinien. Mais le centralisme stalinien était lui-même une métahore, la métaphore que
le vrai allait arriver dans la figure de la totalité. Si totalitarisme a un
sens c’est celui là. Non pas l’Etat totalitaire etc…, tout le monde sait que
c’était un désordre affreux, pas des totalités mais des agencements constamment
en train de se défaire et de se refaire. Par contre c’est vrai que ce qui animait
la subjectivité dont parle Steven c’est qu’on était en train de parvenir à un
face-à-face avec la vérité totalement réalisée. Il y a avait un esprit central,
il y avait des grandes figures centrales rendues possibles par la
conviction qu’il y avait un esprit central, donc le culte de la personnalité
était des symboles, une conviction. C’est pour ça que ça marchait. Mantenant ça
ne marche plus car on n’est plus dans l’élément de la même production quant au
vrai. Pour les gens qui pensent qu’il n’y a pas d’absolu, ces figures sont
totalement inintelligibles et on fait comme si elles ont été imposées de l’extérieur.
Elles n’ont pas été construites de l’extérieur. Elles ont été construites et
admirées de l’intérieur du mouveent. Les gens pensaient qu’ils étaient dans
l’esprit central, dans l’espérance et dans sa réalisation eschatologique de
l’espérance. Nous partageons la conviction de Stevens que nous smme hors de
l’esprut central, hors de cette lumière là, hors de la totalisation du vria,
nous sommes dans l’effectuation et pas dans la totalisation. Qu’est-ce que nous
faisons ?
En tout cas nous
élevons dans l’air du soi une demeure où il nous suffit d’être ensemble. Pas besoin d’être dans l’esprit central. Cet ensemble là est un ensemble
soustrait à l’indifférence. La demeure que nous arrivons àédifier sous le signe
du vrai, cette demeure, il nous suffit d’être ensemble car cet ensemble est
soustrait à l’indifférence donc il peut nos suffire. C’est quoi cet
ensemble ? C’est la communauté de ceux qui sont incorporés à une procédure
de vrité. Ça va depuis les 2 amants seuls au monde jusqu’à des peuples entiers,
c’est affaire de circonstances. Dans tous les cas ils édifient une demeure où
il nous suffit d’être ensemble. L’année prochaine, on essaira de trouver
quelques règles adéquates à la construction de sembables demeures.
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