BABEL : musique
contemporaine, langues et poésie
« Hétérophonie(s) ? » (Violaine
Anger, Rudolf Di Stefano, François Nicolas et Olivier Saccomano) |
Années
précédentes :
2015-2016
Hétérophonie(s) ?
Calendrier :
· Samedi 14 novembre 2015 – Hétérophonie(s) : bilan et perspectives
· Samedi 12 mars 2016 : Hétérophonies théâtrales ?
· Samedi 21 mai 2016 : Hétérophonies cinématographiques du montage ?
Pour
le détail, voir www.entretemps.asso.fr/2015-2016
2014-2015
Hétrophonie(s) ?
Calendrier :
Samedis matin (10h30-13h)
ENS, 45 rue dՕlm, Salle de Séminaire (sous-sol du pavillon Pasteur)
· Samedi 4 octobre 2014 – François Nicolas : L’hétérophonie musicale : vers une terza pratica ? Raisonances avec le poéme Douze (1918) d’A. Blok
·
Samedi 15 novembre
2014 – Violaine Anger : Polyphonie
et hétérophonie : esquisse d’un regard historique
(photo : Patrick Saint-Jean)
·
Samedi 13 décembre 2014 –
Jérôme Benarroch : Lecture(s) du mythe hébraïque de
Babel
· Samedi 24 janvier 2015 – Olivier Saccomano : Mise en scène et hétérophonie : pour une éthique contemporaine du travail théâtral
·
Samedi 14 fvrier 2015 – Ivan Segré : L'Hétérophonie
dans l'Ethique de Spinoza ?
Étude du scolie de
la proposition 2, Livre III: « Le corps ne peut déterminer l'esprit à
penser, ni l'esprit déterminer le corps au mouvement, ni au repos, ni à quelque
autre chose (si ça existe) »
·
Samedi 21 mars 2015 –
Marie-José Malis : De la récente mise en sècne de Hypérion (Hölderlin) au thé$atre La Commune d'Aubervilliers
· Samedi 11 avril 2015 – Rudolf Di Stefano : Un cinématographe hétérophonique ?
· Samedi 30 mai 2015 – Séance Godard : Adieu au langage (Attention : la séance se tiendra au cinéma du Théâtre de la Commune d’Aubervilliers ; elle commencera 10h30 par la projection du film et sera suivie à partir de 12h par une discussion).
Dans notre séance précédente, nous avons abordé la notion d’hétérophonie au cinéma. Il s’agira cette fois d’interroger cette notion en situation, face aux images et aux sons produits par Godard pour son dernier film Adieu au langage.
Ce film qui mène au plus loin la possibilité de dissonance entre ouïe et regard, exprimente la 3D comme un dispositif capable de superposer verticalement différentes voix : bruit, parole, musique, image, écrit. Une nouvelle question se posera alors nous : quel public, quel peuple de cinéma se constitue face un tel film que l’on pourrait appeler babélien ?
*****
Propositions
Violaine
Anger (musicologue) |
Rudolf
Di Stefano (cinéaste) |
François
Nicolas (compositeur) |
Olivier
Saccomano (auteur-metteur en scne) |
La théorie
musicale possède trois mots pour désigner les tensions internes à ce qui
est perçu comme une unité faite d’éléments différents voire hétérogènes. Le mot
« hétérophonie » est souvent utilisé pour les musiques dites
« traditionnelles » ou « du monde » : il désigne les
multiples décalages, parfois microscopiques, qui peuvent exister dans une
musique exécutée à plusieurs, c’est-à-dire dans un cadre théorique où le
temps mesuré n’est pas une donnée conceptuelle commune. La notion d’ « homophonie » ou d’ « homorythmie » est commune pour désigner l’identité
que partagent deux éléments mélodiques par ailleurs identifiés comme
différents : identité rythmique, identité dans l’articulation des
paroles, etc. On connaît aussi les homonymes en grammaire, mots dont la
différence de signification n’est pas discernable dans la prononciation.
L’élaboration théorique du phénomène en jeu est délicate : où se situe
exactement la différence, et la rencontre ? La
polyphonie désigne généralement une pratique écrite occidentale, même si le
lien à des pratiques improvisées est souvent fait. C’est la superposition de
lignes mélodiques ayant leur autonomie. La perception de l’hétérogénéité de
ces lignes est très variable, selon les œuvres et les époques : cantus
firmus très reconnaissable et opposé à des voix ornementales impossibles à
mesurer de la même façon ; superposition de lignes avec textes
différents, voire langues différentes (motet pluri-textuel), etc. Le mot de
« polyphonie » s’oppose dans le langage courant à l’ « harmonie ». On y insiste sur le côté horizontal d’un
déploiement musical, au détriment du côté vertical. Mais la polyphonie
suppose une pensée très précise de la verticalité et notamment de la
consonance, l’hétérophonie semblant échapper à cette réflexion technique sur
l’unité, au profit certainement d’une autre manière de produire de l’unité
qui reste à déterminer. A quel
imaginaire de la parole cela correspond-il ? On a souvent évoqué la
nature instrumentale du mot « organum », et Georgiades
Thrasybulos a fait référence à la pratique des « paroles
gelées », -gelées parce que sacrées-, issue peut-être de pratiques
instrumentales germaniques. Le mot « polyphonie » n’est pas
originel, mais celui, grec, de « diaphonie » l’est (Hucbald). Surtout, le
terme « polyphonie » est extrêmement vague, lorsque l’on
s’intéresse à la variété des musiques groupées sous ce mot. Autant
l’évolution historique des styles est bien connue, autant la réflexion sur ce
qui pourrait être perçu comme des limites théoriques du mot
« polyphonie », et sa relation à l’ « hétérophonie »
l’est peu. Ne serait-il
pas important de réinterroger ces termes ? Quelles sont les limites
exactes entre eux, et la manière dont ils jouent les uns par rapport aux
autres ? Jusqu’où l’unité peut-elle exister à l’intérieur d’un
éclatement que l’on ne cherche pas à résorber ? Comment peut-on penser
cet éclatement d’une manière non-dialectique ? Surtout quels sont les
buts visés par les différentes manières de fabriquer de l’ « hétérophonie » ?
Y a-t-il une « poétique » de
l’hétérophonie ? *** |
L’hétérophonie
cinématographique Au tout début le cinéma s’est pensé comme art
autonome, capable dans son champ propre d’accompagner les grandes inventions
politiques de son époque. Cinéma pur
était son nom et les quelques cinéastes qui l’ont pratiqué étaient :
Epstein, Dulac, Vertov, Vigo.... Très vite avec l’arrivée du parlant, le
cinéma s’est compris comme le grand continuateur des arts, avec cette
capacité unique de les convoquer tous, tout en les récapitulant.
L’architecture, la musique, le théâtre, la littérature, la peinture
devenaient des outils à sa portée qu’il pouvait convoquer à loisir. Cinéma
comme synthèse des arts qui n’est pas sans rappeler les grandes
collaborations du quattrocento italien
ou plus proche de lui, l’œuvre de Wagner et son ambition d’art total. Bazin
pointant les œuvres les plus exigeantes de cette nouvelle période du cinéma,
va être le théoricien de ce grand projet, et appellera cinéma impur l’avènement de cette nouvelle orientation. En plus
d’avoir la qualité de se mêler aux autres arts, le cinéma trouve rapidement
des moyens de diffusion à grande ampleur qu’aucun autre avant lui n’avait
atteint jusque-là. Très vite les grands distributeurs tirent parti de ces qualités
et font du cinéma un des plus puissants produits commerciaux. Malgré ce développement encore aujourd’hui en
vigueur, surgit une voie parallèle, qui tout en s’écartant de ce
développement hégémonique, se pense malgré tout dans la continuité de ce qu’avait
identifié Bazin. Les cinéastes les plus marquants de cette orientation sont
Bresson, Godard, Straub et Huillet.
Chacun d’eux à leur manière, au fil de leurs films, convoque les autres arts,
mais cherche à faire du cinéma, un lieu d’investigation singulier produisant
des découvertes qu’aucun autre domaine ne pouvait produire avant lui. Cette
nouvelle idée ne se nomme plus cinéma, mais se déploie sous la bannière du
mot cinématographe. Dans ce cinématographe, les images, les sons,
la voix humaine font l’objet d’une recherche aigue, et les films produits
deviennent le lieu d’une mise en valeur des écarts, des contrepoints, des
polyphonies. C’est ainsi que dans leurs films les autres disciplines
interviennent toujours de manière déliée, nettement délimitée, toujours dans
des compositions polymorphes. Les points importants deviennent alors la
découverte et la mise en valeur de principes spécifiques au cinématographe. Bresson conçoit les images
et les sons séparément, convaincu que chaque domaine détient une dimension
propre qui ne doit jamais se redoubler, pour que se produisent entre eux des
rencontres inédites. Godard par son travail sur le montage pointe la capacité
singulière qu’a le cinématographe
de proposer une nouvelle façon de voir, où des éléments aussi lointains que
possible sont rapprochés pour produire une comparaison d’un genre nouveau.
Enfin le travail de Straub et Huillet
avec leur principe du direct, où la
voix humaine, les bruits sont enregistrés au même moment que l’image,
produisant ainsi un bloc de matière
dont les éléments internes se dialectisent de façon hétéroclite. Trois
productions donc, à partir desquelles il est possible de penser de façon
renouvelée ce que sont les images, les sons, le montage spécifiquement
cinématographique et le type de regard et d’écoute qu’ils engendrent. Ces trois productions ouvrent une nouvelle
question : quel cinéma pour le XXIe siècle ? Quel (re)commencement qui
ne soit pas l’annulation pure et simple de ce qui a été découvert par les
œuvres de ces cinéastes ? Il n’est plus question d’un cinéma pur comme l’ont pensé les
avant-gardes, pas non plus d’un cinéma
impur qui aujourd’hui s’essouffle dans la voie néoclassique, mais d’un cinématographe qui accepte d’étendre
ses propres capacités sur la base de découvertes acquises. La notion d’hétérophonie pourrait être entendue
comme la possibilité pour le cinématographe
de faire une avancée décisive, en acceptant de mettre en son sein quelque
chose qui lui soit hétérogène, qui lui résiste de façon conséquente. On
pourrait dire que ce serait l’avènement d’un cinématographe qui serait — tout contre son autre. Il n’est donc
plus question de fusionner avec les autres disciplines, ou comme le disait
Bazin de « s’insinuer entre les arts » mais au contraire de monter,
montrer et faire entendre en permanence l’opération singulière de disjonction
entre les arts. À une époque où la notion
d’interdisciplinarité est partout revendiquée, le cinématographe au contraire ferait entendre qu’il
pense comme rien d’autre, mais que l’exigence de cette pensée crée des
fraternités profondes avec d’autres champs, d’autres pensées. Les films qu’il
fabrique seraient alors capables de prendre le risque de se rapprocher de ces
autres formes, non pour les absorber mais pour s'y confronter, en se mettant
en quelque sorte au bord du gouffre, à la limite de ce qu’un film est capable
de supporter. Ce cinématographe-là
deviendrait ainsi un lieu privilégié pour entendre et voir des mondes
séparés, et pour faire valoir la rencontre sincère d’éléments hétérogènes. *** |
Éloge de l’hétérophonie Appelons hétérophonie
une manière particulière de mettre en commun des voix ou des discours et
entreprenons de la caractériser. -
Il s’agit dans l’hétérophonie de mettre en
commun des entités relativement disparates plutôt qu’uniformes, des entités
qu’on ne pourra donc compter comme pluriel
d’un même type (comme on le fait en matière de polyphonie). Une hétérophonie n’est pas le produit d’une unité princeps ; elle incorpore une part
d’hétérogénéité intrinsèque, rétive à la figure du simple produit. Elle est
multiplicité de composantes bigarrées plutôt que pluralité d’unités
homogènes. -
La mise en commun de ces composantes
partiellement hétérogènes prend la forme d’une mise en rapport qui n’est pas à proprement parler une somme c’est-à-dire une
totalisation : ces composantes se rapportent les unes aux autres sans
pour autant constituer un ensemble récapitulatif, une totalité organique. -
Ni produit (plus grand commun diviseur), ni
somme (plus petit commun multiple), l’hétérophonie est une mise en rapport de
composantes relativement autonomes où le rapport est alors constitué à partir d’existences
séparées (et restant jusqu’au bout relativement séparables) plutôt qu’il
n’est constituant de ses propres
composantes. -
Hétérophonie nomme
ce qui arrive à ces différentes composantes, hétérogènes et autonomes,
lorsqu’elles sont mises en rapport par partage
d’un même temps chronologique. -
La mise en commun hétérophonique est
originellement extrinsèque : elle ne procède pas d’une nécessité
intrinsèque partagée par chaque composante. L’hétérophonie est une question
adressée de l’extérieur à chaque composante (alors qu’une polyphonie est
plutôt la réponse endogène suscitée par différentes voix éveillant leurs
pareilles). Ce faisant, l’hétérophonie part d’un montage qui rapproche des
composantes éloignées et procède donc tel un humour. -
Si le paradigme de la polyphonie pourrait être la fraternité, le paradigme de l’hétérophonie
pourrait être la justice : rendre justice de l’existence simultanée et
compossible d’une multiplicité relativement hétéroclite (tout comme la
Justice est la compossibilisation de vertus
relativement discordantes). -
La mise en rapport hétérophonique relève d’un
entrelacs ou d’une tresse entre ses composantes plutôt
que d’une construction contrapuntique : elle renvoie à une globalisation
topologique des parties plutôt qu’à une localisation algébrique des éléments.
La composition d’un tel entrelacs ou d’une telle tresse ne se limite pas au
montage premier : elle induit torsions, contournements, déplacements,
compressions endogènes des composantes sous l’effet exogène de leurs
partenaires ; elle dialectise ce faisant propriétés extrinsèques de
situation et propriétés intrinsèques de composition. Elle tend, ce faisant, à
transformer l’idée même de ce que « voix » veut dire. -
Selon un autre registre signifiant, on
pourrait inscrire une telle hétérophonie sous le nom de Babel ou sous celui de Pentecôte
(le premier désignant sa version plutôt centrifuge, le second sa version
plutôt centripète). En musique, si la seconda pratica (Monteverdi au début du XVII°) a étendu le vieux
contrepoint (modal) à la nouvelle polyphonie (tonale et hiérarchisée –
mélodie/fondamentales), l’extension de la polyphonie à une hétérophonie
pourrait être l’affaire de cette terza
pratica que le musicologue Célestin Deliège appelait de ses vœux à la fin
du XX° siècle. L’hétérophonie ainsi entendue serait
l’affaire d’une nouvelle modernité,
nullement d’une post-modernité ironisante :
l’hétérophonie n’est pas une pure juxtaposition ou un simple collage de
pièces préexistantes ; elle engage leur interaction endogène.
Musicalement, cette hétérophonie s’avancerait ainsi comme une extension de la modernité, non son
abandon, en procédant par adjonction de composantes d’un type nouveau aux
polyphonies préexistantes (cette terza
pratica serait ainsi une extension de la polyphonie, non sa soustraction,
tout de même que la seconda pratica
ouvrit à une extension du contrepoint – de Bach à Brahms-Wagner - plutôt qu’à
son effacement pur et simple). Le paradigme musical d’une telle hétérophonie
ainsi caractérisé, on se demandera : 1.
Cette ambition hétérophonique aurait-elle
valeur pour d’autres arts, tout particulièrement pour ceux
qui synchronisent tout autrement différents flux discursifs temporels :
exemplairement le cinéma et le théâtre ? 2.
Cette ambition hétérophonique aurait-elle également
valeur entre ces différents
arts : pour les mettre en rapport, les faire interagir, les entrelacer
et les tresser, à distance du modèle totalisateur de l’opéra ? 3.
Enfin, cette ambition hétérophonique
n’aurait-elle pas valeur métaphorique dans l’espace idéologico-politique
contemporain : pour organiser de nouveaux processus dialectisant Égalité
des composantes et libertés des collectifs ? *** |
Dans la pratique, je crois fermement aux
disciplines, au fait que chaque art doive instruire ses tentatives à partir
d’une histoire (diachronique, séquentielle) qui spécifie ses enjeux. Mais je
crois aussi que toute pratique a affaire à des exigences du temps
(synchroniques, événementielles) qui permettent de tisser, entre les arts,
des fraternités théoriques. De ce point de vue, l’hétérophonie, telle qu’elle est proposée à la discussion, est
sans doute avant tout une idée musicale
(comme la « distanciation » par exemple fut une idée théâtrale, ou
le « montage parallèle » une idée cinématographique), dans la mesure
où elle porte ses conséquences pratiques sur le plan de l’organisation, voire
de la conception même des « voix » en musique. Mais aussi dans la
mesure où la « voix » est déjà
une catégorie musicale constituée. Non que certaines œuvres, dans d’autres arts,
n’aient accordé à la « voix » une place de choix – tout le
monde vous dira qu’il y a un cinéma (Duras) ou un théâtre (Beckett) pour
lesquels la « voix » est centrale – mais elle n’y fonctionne
justement qu’à entrer en tension
avec des catégories constituées de ces arts respectifs (l’image, l’action). Je ne crois donc pas qu’il y ait intérêt, sur
un plan théorique, à transversaliser
l’idée d’hétérophonie. Par contre, elle ouvre sans
doute deux « sas » de discussion : d’abord, son entrelacement
avec l’idée de justice ou d’égalité (qui désignerait en musique un rapport
entre les voix qui ne se soutienne pas d’un réglage par un principe d’unité
supérieur) convoque sans doute chaque art à une approche politique de ses propres catégories. C’est, si l’on veut, la face
latérale de cette idée, par où elle côtoie
une autre idée, politique. Mais elle a aussi une face interne : elle
introduit, pour chaque art, un paradoxe dans la notion même de com-position. Appuyée au concept d’hétérogénéité, l’hétérophonie suggère en effet un art
où tiennent ensemble des éléments qui, par eux-mêmes, ne tendraient pas à un
tel rassemblement. Autrement dit : l’hétéros,
en art, ça ne va pas de soi… Cette idée invite alors chaque discipline à
revenir sur des modèles de composition hérités des expériences passées. Pour le théâtre, je voudrais me concentrer
sur une question a priori très
vaste, mais dont la saisie précise me semble une bonne entrée dans le nœud
des affaires théâtrales contemporaines : celle du théâtre « de
paroles ». Car, formulée comme telle – comme problème ou comme
revendication –, cette question est finalement assez récente : on la
voit apparaître dans les années 70 ou 80 du siècle dernier (par exemple chez
Pasolini, Novarina). À cette époque, connexe en
politique de l’après-68, elle peut s’analyser comme une tentative dramaturgique de reconfiguration du
modèle de la fable (et du type d’unité qu’il implique), mais aussi
comme une affirmation plus large sur l’expérience théâtrale elle-même, au
moment où celle-ci est intérieurement travaillée par les tendances
« performatrices » qui se développeront dans les décennies
suivantes (avec, souterrainement, l’idée d’un passage des « paroles »
aux « actes »). Or il se pourrait que la véritable impasse,
dans cette histoire, soit justement l’homogénéisation,
soit par une retombée dans le poème
et la profération de la parole
(minorant l’hétérogénéité des positions d’énonciation), soit par une fuite en
avant hors de la parole (où l’imaginaire règne en seul maître). C’est
pourquoi l’idée d’hétérophonie,
pour peu que le théâtre l’adopte et l’élève (comme un enfant trouvé),
pourrait bien servir à éclairer les enjeux (scéniques et politiques) d’un
« théâtre de paroles » contemporain. *** |
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