Hommage de Pierre Boulez à Adorno à l’occasion de sa mort
de la personnalité, il en va
comme de l’œuvre.
seule, a le pouvoir de
fasciner, celle
qui reste, et restera, inexpliquée
celle
qui résiste à la tentative d’investigation,
celle
qui, manifestement, possède l’évidence.
en vue de la cerner, on use
habituellement de mots neutralisants :
ambiguïté(s)
contradiction(s) ;
on
essaie diverses clefs – elles tournent à vide dans la serrure de l’inquisition.
reste à imaginer les
discrépances d’une individualité :
: qui
voit ses dons diverger,
ne
renonce pas à la divergence
— non
seulement, mais –
tâche,
en dépit d’incompatibilités flagrantes, de l’utiliser comme levier ;
: qui,
insécable, conserve et provoque –
ne
renonce pas à l’humus, sans ignorer le phénomène de pourrissement destiné à
l’entretenir,
aspire
à l’abri et à la demeure, cependant qu’elle propose le feu, l’incendie ;
: qui
accumule la connaissance, et s’efforce de ne pas envier l’innocence.
spécifiquement due à la circonstance,
(mais le pogrome est-il sans précédent ?)
la pérégrination,
partage médian de cette existence,
coupure de définition,
confirme
le lien et la nostalgie, exalte
le déchirement et la détermination.
à pleines brassées, les contradictions – non résolues,
les
ambiguïtés – non dissipées,
dont
la plus subtile, la plus rusée, des dialectiques ne viendra pas à bout ;
dont
le plus rusé, le plus subtil, des dialecticiens fera son gerbier !
(ce
gerbier que ne manqueront pas de visiter, et de piller, les mulots et autres
rats des champs…).
l’intelligence, la
perspicacité, vont, dès lors, se transmettre par l’élocution, aiguë :
qui
instaure le privilège et l’avantage de la communication avec un repère
primordial ;
non
point fixe,
mobile — il vous entraîne au-delà du périmètre de
(sauve)garde,
vers la contrée de la dimension
plurielle : où abîme et sommet ont chance de s’identifier.